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qui en poffédent une grande étendue, la mesurent par fchenes, qui eft une mefure particuliere aux Egyptiens, & de 60 ftades. Ainfi, dit-il, l'étendue de l'Egypte le long de la mer eft de 3600 ftades. Mais Hérodote s'eft trompé, il y avoit en Egypte trois fortes de fchenes, comme nous le verrons dans la fuite. Le schene du Delta valoit 40 ftades nautiques, ou 30 grands ftades Afiatiques ou 4 milles Afiatiques; le fchene de la Thébaïde valoit 60 flades nautiques, 45 grands ftades ou 6 milles, & le schene de l'Heptanome valoit 120 ftades nautiques, 90 grands ftades ou 12 milles. Or il paroît qu'Hérodote a ignoré cette diversité de fchenes, & qu'il n'a connu que celui de la Thébaïde; mais les fchenes du Delta n'étoient que de 40 ftades nautiques, enforte que les 60 fchenes de la largeur de l'Egypte le long de la côte maritime ne valent que 2400 ftades nautiques, 1800 grands ftades, 240 milles Afiatiques ou 90 lieues de France. C'est probablement d'après Hérodote que Strabon a auffi donné 3600 ftades à la côte maritime de l'Egypte. Eratofthenes dans le même Strabon, donne 3300 ftades à cette même côte fans affigner de limites; il faut apparemment les placer au golfe Plinthine & dans les environs de Raphia.

Selon M. de Chazelles la Ville d'Alexandrie eft par la latitude de 31° 11' 20"; & felon Pline (Lib. II, Cap. LXVII) & Strabon (Lib. II & XVII) la Ville de Syene, aujourd'hui Souene, eft précisément fous le Tropique du Cancer, & par conféquent par la latitude de 23° 28′ 16". Si l'on n'a point d'égard à l'écart des Méridiens de ces deux Villes qui différent au plus de deux degrés, on trouvera la distance d'Alexandrie à Syene 192 lieues de France: or felon Pline au même endroit, & Strabon (Lib. II), ces deux Villes font diftantes de 5000 ftades, & cette mesure est donnée par Eratofthene. Divifant donc le nombre des ftades par celui des lieues, on trouve 26 ftades pour une lieue, par où il est évident que ce font ici des ftades nautiques dont la lieue doit en contenir 26.

Il

par les

y a auffi loin de la mer à Héliopolis (Hérod. II.) en allant montagnes, que d'Athenes & de l'autel des douze dieux à Pife & au temple de Jupiter Olympien : & fi quelqu'un veut mefurer ces deux diftances, il trouvera qu'elles font égales, ou bien qu'il n'y a pas plus de quinze ftades de différence: car il ne s'en faut que quinze ftades que le chemin qui mene d'Athe

nes à Pife ne contienne 1500 ftades; mais le chemin qui conduit de la mer à Héliopolis fournit jufte ce nombre de ftades.

Syene eft éloigné du fommet du Delta de 4800 ftades, felon Artemidore dans Pline (Lib. V, IX.); or la hauteur du Delta doit être à peu-près égale à la diftance de la mer à Héliopolis; car cette Ville étoit fituée vers la pointe du Delta : d'où il fuit que la diftance de Syene à la mer, qui fait toute la longueur de l'Egypte, feroit de 6300 ftades. Mais s'il eft vrai qu'Eléphantine foit fituée vis-à-vis de Syene, comme l'affure Strabon qui y avoit voyagé, cette diftance de la mer à Syene ou Eléphantine, fera feulement de 6000 stades, comme le dit Aristocréon dans Pline. Juba fait la diftance de Syene au fommet du Delta de 3200 grands ftades, valant 4266 ftades nautiques; enforte que cette diftance étant ajoutée à celle d'Héliopolis à la mer, la distance de Syene à la mer ne feroit que de 5766 ftades nautiques.

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Il y a par eau d'Héliopolis à Thébes (Hérod. Lib. II, no. IX.) neuf journées de chemin qui font une diftance de 4860 ftades, c'est-à-dire, de 81 fchenes; mais par terre, depuis la mer jufqu'à Thebes, il y a 6120 ftades & 820 de Thébes jufqu'à la Ville d'Eléphantine. D'où il fuit que felon Hérodote la distance de la mer à Eléphantine, qui eft l'extrêmité méridionale de l'Egypte, eft de 6940 ftades, faifant 260 lieues. Cette même diftance ne feroit que de 6000 ftades, felon Ariftocréon dans Pline (Lib. V, IX.) où on lit qu'Eléphantine eft plus méridionale que Syene de 128 ftades.

La différence en latitude entre Syene & Alexandrie eft de 7° 43′ 4′′; à quoi ajoutez 24' prifes fur la Carte de M. Danville, pour la diftance du parallele d'Alexandrie au fond du Delta, toute l'étendue de l'Egypte en latitude, fera de 8° 7'′ 4′′ ; ce qui fait 5412 ftades nautiques, ou 4059 grands ftades qui valent 203 lieues environ pour la longueur directe de l'Egypte. Mais comme on ne peut voyager dans ce pays qui eft rempli de fables arides qu'en fuivant le cours du Nil; & que ce fleuve fait beaucoup de grandes finuofités, principalement dans la haute Egypte; je penfe que l'évaluation de la longueur de l'Egypte, en fuivant le fleuve, donnée par Hérodote, n'eft pas trop grande, ou ne l'eft pas de beaucoup.

Telles font les mefures de l'étendue de l'Egypte, données

le

par Hérodote, & il eft aifé de voir qu'il n'y a employé que ftade nautique. Par tout ce que nous avons dit on peut juger combien fon ufage étoit étendu dans toute l'Asie & dans l'Afrique même. Mais il étoit d'ailleurs spécialement affecté à la navigation. Il fervoit dans tout l'ancien continent à mesurer les traverfées fur la mer, les distances des Villes maritimes, des Ports, des rades, des promontoires, &c. On le trouve employé jusque fur les côtes de la grande Bretagne & de la Gaule, & dans d'autres parties de l'Europe.

Strabon (Lib. IV.) dit que quelques Ecrivains déterminent la diftance de l'embouchure du Var au Port de Vénus, qui eft aujourd'hui Port-Vendre dans le Rouffillon à 2600 ftades, & d'autres à 2800. Cette diftance eft celle qu'y trouvoient les Navigateurs qui faifoient le cabotage & ne quittoient point la côte durant leur navigation. Si l'on veut fe donner la peine de mesurer cette côte avec fes finuofités occafionnées par des golfes & des promontoires, on la trouvera fur la Carte de la Gaule par M. Danville, de 105 lieues, qui font jufte 2800 ftades nautiques.

C'eft ce ftade qu'il faut entendre ordinairement dans la réduction des journées de navigation des Anciens, appellées en grec dromos, nychthemerios plous, & en arabe mogra. Par exemple, Hérodote (Lib. IV, no. LXXXVI.) évalue la navigation d'un jour & d'une nuit, ou de 24 heures, à 1300 ftades, en ces termes: Lorfque les jours font grands, un Vaiffeau fait par jour environ 70000 orgyies de chemin, & 60000 durant la nuit; ainfi le Pont-Euxin, dans fa plus grande longueur, eft de neuf jours & huit nuits de navigation, qui font 1 1 10000 orgyies, c'està-dire, 11100 ftades. Il fuit donc que felon Hérodote, la journée de navigation eft de 48 lieues de vingt-cinq au degré. Ptolémée (Géog. I, IX.) eftime la navigation de vingt-quatre heures ou du jour & de la nuit à mille ftades, mais ce font ici des grands ftades Afiatiques; Ptolémée n'en emploie pas d'autres, cette journée de navigation eft de 50 lieues de France. El Edrifi & Abulphéda eftiment la journée de navigation de 100 milles qui font 37 lieues. Ces obfervations peuvent fervir à réduire en mefures itinéraires plufieurs diftances exprimées en journées de navigation dans les anciens Ecrivains. Par exemple, Diodore de Sicile (Lib. V.) dit que l'Ifle Pityeufe eft diftante des colonnes d'Hercule de

trois fois vingt-quatre heures de navigation; à raison de cinquante lieues pour une journée, cela fait 150 lieues. Il ajoute que la même Isle, qui eft aujourd'hui celle d'Iviça, eft distante des côtes d'Afrique, de 24 heures de navigation, cela feroit 50 lieues;

mais peu après il dit que l'Ifle Mallorque eft éloignée de l'Efpagne de 24 heures de navigation; cela ne paroît gueres

exact.

ne

Pline (Lib. XIX, proœm.) dit que Galerius mit sept jours à fe rendre du détroit de Sicile à Alexandrie, cela feroit 350 lieues; mais Babillius fit la même traversée en fix jours, cela ne feroit plus que 300 lieues. Valérius Marianus fe rendit de Pouzzol à Alexandrie en neuf jours, par un vent doux & très-foible, leniffimo flatu; cela feroit 450 lieues. Le trajet de Cadix au Port d'Oftie eft de fept jours, ce feroit 350 lieues de difftance. Mais on voit bien que ce ne font-là que des gros àpeu-près, parce que la journée de navigation dépend de la force & de la direction du vent & de plufieurs autres caufes.

Il n'en eft pas de la navigation à rames comme de la navigation à voiles. Une journée de navigation à rames eft bien moindre. En voici des exemples: la largeur de la mer Cafpienne est de huit journées de navigation d'un Vaiffeau tiré à rames (Hérod. II.) Cette largeur fur les Cartes de M. Danville eft de 3 degrés de grand cercle, qui font 75 lieues; c'eft donc 9 lieues par jour. Il y a de la Méditerranée au lac Méris fept jours de chemin en remontant le Nil; cette distance eft de 60 lieues, c'est par jour 8 lieues. Eléphantine est éloignée de Sais de vingt jours de navigation (Hérod. II.); cette distance doit être de 5600 ftades nautiques, & la journée de navigation de 280 ftades qui valent 10 lieues.

J'obferve que le ftade nautique étoit regardé par les Anciens comme l'intervalle ou la diftance du jet d'une fleche, d'où vient qu'ils l'appelloient quelquefois toxeuma.

Stade olympique, ftade Grec & de la Sicile: il contient de ftades nautiques, de ftades pythiques, de pléthres 617, de chebels 11, de décapodes 69, d'orgyies 115, de pas doubles 138 de xylons 54, de pas fimples 277, de coudées facrées 347, de coudées lithiques 4622, de coudées médiocres 520, ygons 55, de pieds Grecs ou olympiques 600, de y 517, de pieds Romains 625,

de pieds géométriques 694, de pieds pythiques 781%, de fpithames 925, & de toifes du Châtelet 99.08. J'avois évalué ce ftade à 96,30 toifes, en le déduifant de la pygme que j'avois foupçonnée être le pied Grec. Je l'avois évalué à 97,83, en le déduifant du côté de la base de la pyramide que Diodore de Sicile eftime de fept cents pieds. M. Vernon ayant pris la mesure du ftade d'Héroclès Atticus à Athenes, & l'ayant trouvée de 630 pieds Anglois, je l'en avois conclu de 98,56 toises. M. le Roi a auffi mefuré ce ftade, & l'a trouvé de 591 pieds de Roi ou de 98.5 toises. Je l'avois évalué à 98.92 toises en tirant la racine cubique du métrétès Attique qui valoit amphore Romaine, & que je regardois comme la cubature du pied Grec; mais toute l'antiquité attefte que le ftade Grec étoit de fix cents pieds Grecs qui en valoient 625 des Romains. (Voyez Strabon, Lib. VII, p. 223 de l'Edit. de Cafaubon; Polybe, Lib. III; Vitruve, Lib. I, C. 6; Columelle, Lib. V, C. 1; Pline, Lib. II, C. 23 & 108, Lib. III, C. 5 & 8, Lib. VII, C. 26, & Lib. XII, C. 14; Frontin, Cenforin, Suidas, Héron même, allégué par d'autres Ecrivains, dit que le mille contient huit ftades, μí sádian): par conféquent il faut arrêter la valeur μίλιον τάδια de ce ftade à 99.075 toifes.

Le ftade olympique étoit la mesure de la carriere à Pife dans le Péloponnefe où s'exerçoient les ftadiodromes dans ces jeux fameux appellés Olympiques. C'étoit également la mesure qui fervoit à déterminer les diftances dans le Péloponnefe & l'Attique. Ce ftade a dû être celui de la Sicile; cette Ifle après avoir été habitée d'abord par les Sicaniens & enfuite par les Siciliens, le fut en dernier lieu par des Grecs fortis de Corinthe & des autres Villes de la Grece; ces Colonies confidérables se bâtirent plufieurs Villes fur le rivage de la mer. Le nombre infini de Grecs, qui, felon Diodore de Sicile, abordoient chaque jour dans l'Ifle, & le Commerce qu'ils entretenoient avec les Naturels du pays, engagerent bientôt les Sicaniens à étudier la langue Grecque & à vivre comme les Grecs; ce que nous difons de la Sicile on peut le dire de la grande Grece en Italie où ce ftade dut être en ufage, & c'eft peut-être la raifon pourquoi ce ftade eft en quelque forte le feul dont les Romains aient connu rapport avec leur mille qui en contenoit huit ou environ. › par exemple, n'en a pas connu d'autres dans fa Géo

le

Pline

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