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vision a été faite fans précision, & les parties ne tiennent aucune proportion jufte entre elles.

Plufieurs Académiciens, en différens temps, ont pris la mesure exacte de cet étalon pour comparer l'aune à la toife. M. l'Abbé Picard (Anc. Mém. de l'Acad. tom. VI, p. 536) évalue l'aune des Merciers à 3 pieds 7 pouces 10 lignes, ajoutant que celle des Drapiers eft de 3 pieds 7 pouces 9 lignes. Peut-être fait-il cette diftinction d'aune merciere & d'aune drapiere, d'après des mefurages comparatifs faits fur les copies que ces Marchands poffédoient refpectivement pour l'ufage de leur commerce. M. de la Hire nous apprend (Mém. de l'Acad. ann. 1714, p. 398) qu'il avoit mefuré cet étalon très-exactement, & l'avoit trouvé de 3 pieds 7 pouces lignes. En 1736, M. du Fay, de l'Académie des Sciences, confronta auffi à la toife l'étalon de la rue Quimquempoix, en fe fervant de la toife de l'Académie, & le trouva de 3 pieds 7 pouces 10 lignes & . Enfin MM. Hellot & Camus, (Voyez le Mém. indiqué plus haut) Commiffaires nommés l'Académie des Sciences, fuivant les ordres de M. de Maurepas, s'étant tranfportés le Jeudi 23 Septembre 1745, audit Bureau déterminerent également à 3 pieds 7 pouces 10 lignes & la matrice ou étalon de l'aune qui leur fut préfentée par les Gardes des Marchands Merciers affemblés pour cet effet.

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par

Ces deux Académiciens s'étoient fait affifter du fieur Lordel Ouvrier en inftrumens de Mathématiques, lequel s'étoit muni d'un compas à verge à pointes très-fines, d'une équerre à talon & d'une bande de fer d'une ligne & un quart d'épaiffeur fur fix lignes de large, difpofée à être mise exactement de la longueur de l'étalon du Bureau & d'un pied de Roi, divifé par feu le fieur Butterfields célébre Ouvrier d'inftrumens de Mathématiques, en pouces, lignes & douziemes de lignes par des tranfverfales, en préfence de MM. Picard & Auzout, fur le nouvel étalon de la toife du Châtelet, rétabli en 1668. Les Commiffaires avant que de procéder au mefurage de l'étalon, commencerent par l'examiner pour voir fi les talons ou faillies de fer qui y font attachés perpendiculairement, n'avoient point été altérés & dans un espace de près de deux cens ans ufés par le frottement des aunes ufuelles qu'on y avoit apportées pour en fixer la longueur; & ils reconnurent qu'il n'y avoit d'altération, encore même prefque infenfible, qu'à l'extrêmité fupérieure de ces ta

lons, mais que le bas en étoit très-entier. Ayant donc fait ajuster par le fieur Lordel la regle qu'il avoit apportée, de maniere qu'elle entrât entre les extrêmités fupérieures des talons, ils trouverent la longueur de cette regle de 3 pieds 7 pouces 11 lignes &. Après avoir fait diminuer la longueur de la regle pour la faire entrer entre les milieux des faces des talons, ils trouverent fa longueur de 3 pieds 7 pouces 11 lignes jufte.

Enfin la même regle ayant encore été raccourcie pour entrer exactement jusqu'au bas des faces des talons qu'ils jugerent trèsentiers en cet endroit, ils trouverent fa longueur de 3 pieds 7 pouces 10 lignes & de ligne. Comme cette derniere longueur de l'aune a été prife entre les endroits les moins fufceptibles d'altération, ils ne négligerent rien pour l'avoir exactement; ils eurent même l'attention de prendre cette longueur à l'abri des rayons du foleil, & de ne donner aucun degré de chaleur, même avec la main, à l'étalon & à la bande de fer, de crainte qu'il n'en réfultât quelque allongement momentané; ils vérifierent aussi plufieurs fois la longueur de la bande qu'ils étalonnoient, en la pofant à diverfes reprises, de plat & de chan, entre les bas des faces des étalons.

Quoique les Commiffaires ne puffent foupçonner que le pied apporté par le fieur Lordel, & qui portoit le nom de Butterfields, fût faux, ils comparerent dans la fuite la bande de fer qu'ils avoient étalonnée avec la toise, non celle de M. de Mairan, comme ils le crurent alors, mais avec celle de M. de la Condamine, suivant que cet Académicien en fait la remarque dans fon Mémoire fur la toife (Mém. de l'Acad. ann. 1772, II Part.), & ils trouverent la longueur de cette bande de 3 pieds 7 pouces 10 lignes, comme ils l'avoient jugée en fe fervant du pied de Butterfields; enforte qu'ils crurent pouvoir compter fur les mesures prifes avec ce pied auffi fûrement que s'ils fe fuffent fervi des toifes de l'Académie.

Cette longueur de l'aune de Paris eft également celle de l'aune des Marchans Merciers de Lyon; car une regle de fer que M. Hellot a fait étalonner en fa préfence le 27 Janvier 1745, fur la matrice de l'aune qui eft dans l'Hôtel-de-Ville de Lyon, entre juste dans l'étalon de l'aune de Paris, fans qu'on y ait pu remarquer la plus petite différence.

L'étalon du Bureau des Marchands Merciers de Paris, quoi

que ancien de plus de deux cents ans, n'eft fans doute qu'une copie d'un étalon beaucoup plus ancien; & l'Ordonnance de Henri II, qui n'eft poftérieure que de trois ans à la date gravée fur cet étalon, prouve qu'il étoit la vraie mesure de l'aune quoique vraisemblablement renouvellé; c'eft pourquoi il mérite d'être confervé avec autant de foin que le poids original que l'on garde à la Cour des Monnoies. On auroit pu même le regarder comme le véritable prototype de nos mefures longitudinaires; car, puisque d'après la mesure prife fans doute fur cet étalon, l'Ordonnance de Henri II, qui n'a été rendue que trois ans après la date qui y eft gravée, a fixé la longueur de l'aune à 3 pieds 7 pouces 8 lignes, ce qui revient à 524 lignes; & que la toise devoit contenir 864 lignes; il s'enfuit que l'aune étoit à la toise comme 524 à 864, ou comme 131 à 216; c'est-à-dire, que l'excédent de l'ancienne toife fur l'aune étoit de 340 lignes. Il auroit donc été facile de rétablir l'étalon de la toife du Châtelet d'après ce principe; mais nous pouvons auffi inférer une autre conféquence de la comparaison qu'on a faite de l'étalon de l'aune avec celui de la toise actuelle ; c'eft que le pied de Roi d'aujourd'hui est à celui qui étoit en ufage fous le regne de Henri II, & avant l'année 1668 comme 3144 à 3161; d'où il fuit que cet ancien pied de Roi contenoit 144 lignes du pied actuel, & prefque & de ligne de plus, & encore que l'ancienne toife ne contenoit pas tout-à-fait cinq lignes de plus que celle d'aujourd'hui, comme l'enfeigne M. Picard, mais feulement 4 lignes, & moins de 7 de ligne. Mefures itinéraires. Il n'y a point en France de mefures itinéraires légales, chaque Province ayant les fiennes propres & particulieres; feulement on a planté depuis peu aux environs de Paris des colonnes milliaires fur les grandes routes, qui les divifent de mille en mille toifes. Cette divifion n'eft guere naturelle ni pour la Géographie, ni pour la commodité des voyageurs. Il auroit été moins difpendieux & infiniment plus utile de divifer les routes par lieues de vingt au degré, dont chacune eft la tache horaire d'un voyageur de pied; mais nous aurons occafion de parler de cela ailleurs : il nous fuffira de remarquer ici que la lieue la plus ordinaire dont on fait ufage en France, eft celle de vingtcinq au degré, qu'on appelle lieue commune.

Mefure de France pour l'arpentage. Par Edit du Roi du mois d'Août 1669, fur le fait des Eaux & Forêts; de la police & con

fervation des Forêts, Eaux & Rivieres, Art. XIV. Nulle mefure n'aura lieu, & ne fera employée dans nos Bois & Forêts & en ceux tenus par indivis, grurie, grairie, fégrairie, tiers & dangers, appanage, engagement, ufufruit, & même des Eccléfiaftiques, Communautés, & particuliers nos Sujets, fans aucun excepter, que la mefure de douze lignes pour pouce, douze pouces pour pied, vingt-deux pieds pour perche, & cent perches pour arpent, à peine de mille livres d'amende, nonobftant & fans avoir égard à tous ufages & poffeffions contraires, auxquelles avons dérogé, dérogeons, & voulons qu'au Greffe il foit mis un étalon de la mesure ci-dessus pref

crite.

Mefure pour le bois à brûler. Par l'article XV de l'Edit allégué plus haut, il eft dit : Dans toutes nos Forêts & Bois, & ceux des Eccléfiaftiques, Particuliers, & autres dénommés en l'article ci-dessus, il ne fera fait aucune livraifon de bois à brûler, foit en cas de vente ou délivrance de chauffages, à aucune mesure qu'à la corde qui aura huit pieds de long, quatre de haut, les bûches de trois pieds & demi de longueur, compris la taille; le bois des cotrets de deux pieds de longueur, & le cotret de dix-fept à dix-huit pouces de groffeur; abrogeant les rotées, mefures, moules, fommes, charges, voies, & toutes autres mesures contraires. On appelle à Paris voie de bois, la demicorde; ainsi la voie de bois de chauffage devroit avoir quatre pieds de large & quatre de haut, les bûches de même longueur que ci-deffus, c'est-à-dire, trois pieds & demi; mais il y a des ufages particuliers dans le commerce & la vente des bois de chauffage de qualité différente, qu'il feroit trop long de détailler ici.

Les ouvrages de maçonnerie fe mefurent au pied & à la toise cubiques; le pied cubique contient 1728 pouces cubiques, & la toife cubique 216 pieds cubiques; mais pour la commodité du calcul, on la divife en 6 pieds de toife cubique, 72 pouces de toife cubique, & 864 lignes de toife cubique.

Les bois de charpente fe mefurent par folives ou pieces, & par cents de bois de charpente, c'est-à-dire, par centaines de folives. La folive ou piece, en fait de bois quarré ou équarri pour la charpente, peut être confidérée comme un prifme de deux toifes de longueur fur une bafe de 6 x 6 = 36 pouces quarrés; ou bien comme un parallélipipede d'une toife de longueur fur une base de 6 × 12 = 72 pouces quarrés; ou bien d'une toife de lonx gueur fur une base de 9 × 872 pouces quarrés, &c. En gé

néral la folive est un produit de 72 pouces linéaires par 72 pouces quarrés, qui font 5184 pouces cubiques. Elle fe divise en 6 pieds de folive, 72 pouces de folive, 864 lignes de folive ou de piece.

A l'égard du bois cylindrique ou en grume, pour l'évaluer en folives, on réduit la bafe circulaire en pouces quarrés qu'on mul

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tiplie par les pouces de la longueur de la piece; puis on divife le produit par 5184 pouces cubiques, & le quotient exprime des folives. Par exemple, un cylindre d'une toife de hauteur fur 9 pouces de diametre à fes deux bases, eft de la valeur d'une folive. Quand on a du bois de charpente à toifer, il paroît affez commode de l'évaluer d'abord en pieds cubiques; on divise ensuite le nombre des pieds cubiques par le nombre 3 & le quotient exprime des folives, dont chacune contient trois pieds cubiques. L'étalon ou prototype des mesures pour les liqueurs à Paris, eft dans l'Hôtel-de-Ville, confié à la garde des Prévôt des Marchands & Echevins, & il est défendu de fe fervir dans le commerce d'autres mesures de cette efpece, que de celles qui auront été par eux étalonnées & marquées. Les étalons pour les petites mesures à liqueurs, comme la pinte, la chopine, &c. font des vafes de capacité convenue & déterminée dans une certaine proportion entre eux, & auxquels les mesures ufuelles de même dénomination doivent, dans la confrontation, être égalées. Il réfulte d'un Arrêt du 6 Juin 1598, confirmatif d'une Sentence rendue au Châtelet, concernant les pots à vin, qui avoient été faifis par le Juge de Longjumeau, fur un Cabaretier du lieu, qui s'en étoit porté pour appellant au Châtelet & depuis au Parlement, que les mefures à vin doivent avoir, outre la jufte mesure, un pouce de furhausse quant aux pintes & mesures plus grandes, & un demi-pouce quant aux chopines & autres mesures moindres, & que l'endroit où finira la jufte mefure & commencera la furhauffe, fera marqué d'un filet circulaire au-dedans du vase & de la même matiere.

A l'égard des groffes mefures, comme les muids, pipes & tonneaux, cette méthode n'étant pas praticable pour les conftater de jufte continence, l'on a recours à une verge d'acier, qui eft une efpece de compas de proportion, fur laquelle font marquées plufieurs lignes qui fervent à faire la réduction fur-le-champ, de la continence de tous les vaiffeaux qui font d'une forme semblable à une mefure commune & connue. Cet inftrument de Géométrie fe nomme Jauge. Du Cange dérive ce mot de Galo ou Jalo,

mefure

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