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>> On tiroit de la neuvieme Satrapie, qui confiftoit en la Ville de >> Babylone & en tout le refte de la Syrie, 1000 talens d'argent, » & de plus cinq cents garçons pour faire des eunuques. La dixieme » Satrapie, qui comprenoit Ecbatane, le refte de la Médie, les » Parycaniens & les Orthocorybantes, fournissoit 450 talens d'ar» gent. Les Cafpiens, les Panfiques, les Panthimates & les Dari»tes compofoient tous ensemble la onzieme Satrapie, & payoient » 20 talens d'argent. La douzieme Satrapie s'étendoit depuis les » BaЄtriens jusqu'aux Egles, & rendoit 360 talens d'argent. La >>>treizieme étoit chargée de 400 talens d'argent, & s'étendoit depuis Pactyice, les Arméniens & les Provinces voisines, jufqu'au >> Pont-Euxin. On comprenoit dans la quatorzieme Satrapie les >> Sagartiens, les Sarangéens, les Thamanéens, les Utiens, les » Mèces, & ceux qui habitent les Ifles de la mer Rouge, où l'on » envoyoit les exilés; & tous ces peuples ensemble payoient un >> tribut de 600 talens d'argent. Les Saces & les Cafpiens 250 » talens d'argent, & compofoient la quinzieme Satrapie. La fei» zieme embrassoit les Parthes, les Chorafmiens, les Sogdes & les »Ariens, & étoit taxée à 300 talens d'argent. Les Paricaniens & >> les Ethiopiens de l'Afie fourniffoient 400 talens d'argent, & fai» foient la dix-feptieme Satrapie. La dix-huitieme, qui contenoit >> les Mantinéens, les Safpires & les Alarodiens, payoit 200 talens » d argent. Les Mofques, les Tibarenes, les Macrofes, les Mo»fy nèces & les Mardes faifoient la dix-neuvieme Satrapie, & ren» doient 300 talens d'argent. Enfin comme les Indiens furpassent » par le nombre des peuples & l'étendue de leur pays, toutes les » Nations de la terre, ils formoient feuls la vingtieme Satrapie, & "payoient auffi plus que tous les autres : car ils étoient obligés de » rendre tous les ans le poids de 360 talens d'or. Si tout cet ar"gent, qui fe payoit au poids du talent Babylonique, eft réduit poids Euboïque, il fera 9540 talens ; & fi l'or vaut treize fois » autant que l'argent, on trouvera qu'à le réduire au talent Euboï»que, il fera 4680 talens : de forte que fi on ajoute tout cela en» femble, on trouvera que Darius retiroit de tribut tous les ans 1560 talens Euboïques, fans compter les autres petits tributs, >> dont je ne crois pas devoir faire mention en cet endroit. Je n'ai » point mis la Perfe entre les Provinces tributaires, parce qu'en » effet elle ne payoit aucuns impôts ».

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Voilà ce que dit Hérodote, & fur quoi on peut

fe permettre

quelques réflexions. 1°. L'Hiftorien dit que Darius voulut que l'or qu'il exigeoit de fes sujets fut pesé au poids du talent Euboïque; mais fi Hérodote entend par talent Euboïque le talent des Grecs, le talent de l'Attique, comme il est vraisemblable, puifqu'il écrit fon hiftoire pour les Grecs auxquels il convient qu'il fe faffe entendre, j'ofe dire qu'il avance une chofe qu'il nous eft impoffible de croire: car depuis la ruine de Troye, les Afiatiques ou les fujets des Rois de Perfe, & les Grecs, furent toujours mortels ennemis, & ne s'occuperent dans tous les temps qu'à chercher les occafions de fe mortifier les uns les autres. Les Grecs, par un préjugé qui avoit fon principe dans la haine & le mépris, ne voulurent jamais rien emprunter des ufages des Perfes ; & par des fentimens tout-à-fait semblables, les Perfes ne voulurent rien tenir des Grecs. Ce feroit donc une chofe étrange & inouie que Darius eût adopté les poids de la Grece, pour les prefcrire dans fes Etats, où ils devoient être ignorés, tandis que la Ville de Babylone avoit fes poids particuliers, dont l'ufage devoit être familier aux Perfes. Il y a donc dans le récit d'Hérodote quelque vice caché qu'il faut tâcher de découvrir. Voici comme je conçois ce qui a conduit l'Auteur à s'exprimer de la forte. Hérodote voyant que l'argent de l'impôt devoit être pefé à une espece de talent, & l'or à un autre qui étoit plus petit, s'informa quel étoit le rapport de ce dernier talent à celui de la Grece: on lui dit qu'il étoit de très-peu plus. grand, & qu'on pouvoit fans une erreur confidérable les regarder comme égaux l'un à l'autre ; en effet nous avons trouvé que le talent Afiatique étoit de 57 livres du poids de marc de Paris, & le talent Attique d'environ 55. Hérodote adopte donc le talent Afiatique pour le talent Attique ou Euboïque, & demande enfuite quel eft le rapport du talent Babylonien au talent Afiatique qu'il regarde comme égal à celui d'Athenes; on lui répond qu'il eft d'un fixieme plus grand or comme le talent Attique eft de 60 mines Attiques, Hérodote ajoute le fixieme de 60, & la fomme eft 70 mines Attiques pour la valeur du talent de Babylone, valeur que des Hiftoriens poftérieurs, comme Pollux, ont copiée & confignée dans leurs ouvrages. Mais ce n'étoit pas cela; le talent de Babylone étoit d'un fixieme de lui-même plus grand que le talent courant de l'Asie, enforte que celui-ci contenant 50 mines Afiatiques, l'autre en contenoit 6o, qui reviennent à 75 mines Attiques ou Euboïques. C'eft d'après un raifonnement & des renfei

gnemens tout femblables, que le talent de Babylone se trouve évalué à 72 mines Attiques ou Euboïques dans plufieurs endroits de Plutarque, & dans Elien (Var. hift. lib. I.). Le talent commun de l'Asie étant réputé égal au talent Attique, on demandoit quel étoit le rapport du talent de Babylone au talent Afiatique fuppofé égal à celui de la Grece; la réponse étoit que celui de Babylone furpaffoit l'autre d'un cinquieme: on prenoit donc le cinquieme de 6 mines Attiques, favoir 12, que l'on ajoutoit à 60, & la fomme 72 mines Attiques étoit cenfée être la valeur du talent de Babylone. Mais celui qui donnoit ces inftructions entendoit qu'il falloit prendre le cinquieme de 50 mines Afiatiques, favoir 10, pour avoir 60 mines Afiatiques, valeur du talent Babylonien, ce qui revient toujours à 75 mines Attiques ou Euboïques. Ainfi Pollux a raifon de dire que le talent de Babylone étoit compofé de 60 mines, mais que ces mines étoient plus grandes que celles d'Athenes.

Malgré le vice qui regne dans le rapport affigné par Hérodote, entre le talent Attique & le talent Babylonien, je trouve qu'on peut rectifier à peu près cet Auteur par fes propres réfultats; car il fait monter la fomme des talens d'argent réduits au poids Euboïque à 9540 talens : mais si l'on veut se donner la peine de raffembler fes taxes partielles, on verra que la fomme s'en monte à 774 talens Babyloniens: divifant donc 572400 mines Euboïques, valeur de 9540 talens Euboïques, par 7740 talens Babyloniens, on aura au quotient 73 mines Euboïques pour la valeur d'un talent de Babylone; apparemment que ce n'étoit pas Hérodote lui-même qui avoit fait cette réduction, mais qui l'avoit trouvé toute faite d'après des rapports plus exacts que les fiens.

Enfin le talent de Babylone étoit de 60 mines Afiatiques, comme le font obferver les Commentateurs de la Bible fur Efther (III, verf. 9.), dans un endroit où il s'agit du talent de la Ville de Sufe en Perfe: Si tibi placet, decerne ut pereat (gens Judaica), & decem millia talentorum appendam arcariis gaze tuæ. On peut ajouter encore que ce même talent de Babylone fe trouve évalué dans quelques Auteurs à 150 litres Afiatiques. Voyez l'Epitome du Traité des mefures & poids de George Agricola, par Philandre, dans

Vitruve.

De tout ce que nous avons dit il résulte que pour réduire les talens de Babylone à ceux d'Athenes, il faut ajouter le quart. Ainfi

7740 talens Babyloniens d'argent, plus 240 talens provenant de la pêche du lac Méris (Herod. lib. II, cap. CXLIX.), font 7980 talens Babyloniens, lefquels augmentés du quart, reviennent à 9975 talens Attiques d'argent. Il y a en outre 360 talens Asiatiques communs d'or, qui font 375 Attiques d'or; pour les avoir exprimés en valeur d'argent, il faut les multiplier par 13, qui eft la proportion affignée entre ces deux métaux, on trouve 4875; ajoutant cette fomme à la précédente, il vient enfin 14850 talens d'argent poids d'Athenes pour le montant général de tous les tributs de l'Afie, de l'Egypte & des Indes. Cette fomme revient à 90 millions de la monnoie actuelle de France; & tel étoit le tribut impofé fur toute l'étendue d'un des plus grands Empires qui aient jamais été. Il est vrai qu'outre cet impôt quelques Nations faifoient aux Rois de Perfe des préfens : les Ethiopiens lui apportoient tous les trois ans deux chénices d'or brut, deux cents faifceaux d'ébéne, cinq enfans d'Ethiopiens, & vingt grandes dents d'éléphans. Les habitans de la Colchide & d'autres peuples des environs du Caucafe envoyoient de cinq en cinq ans cent garçons & cent filles. Les Arabes apportoient chaque année le poids de mille talens d'encens. Mais il eft temps de reprendre la fuite de l'énumération des poids de l'antiquité.

cintar

Le petit talent des Egyptiens, des Arabes & des Juifs cinchar ou cincharès, cicar, cicará, cacerá, kentenarion, centenarium, contenoit 40 mines Afiatiques, 50 mines Attiques, 66 mines Romaines, 100 litres ou rotules Afiatiques, 800 onces Romaines, 1200 onces Afiatiques, 2400 ficles, 4800 didrachmes, 5000 drachmes Attiques, 5600 deniers de Papyrius, 6400 deniers de Néron, 9600 drachmes Afiatiques, & 45.66 livres du poids de marc de Paris. Il est évalué à 100 litres ou rotules, à 2400 stateres, & à 9600 drachmes ou zuzs par les Ecrivains Juifs & Arabes. C'eft ce poids que Flavius Jofephe (Ant. Jud. lib. III, cap. VII.) définit en difant que cent mines font le cincharès, qui eft chez les Hébreux ce que le talent eft chez les Grecs; mais il ne faut pas croire avec Jofephe que ce poids convienne dans l'endroit où il le place; car il s'agit là du talent de Moïse, qui étoit de cent vingt-cinq litres.

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Le talent Attique & Euboïque contenoit cintar 48 mines Afiatiques, 60 mines Attiques, 80 mines Romaines, 115 mines Talmudiques, 120 litres ou rotules, 960 onces Romaines, 1440

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onces Asiatiques, 2880 ficles, 5760 didrachmes Asiatiques, 6000 drachmes Attiques, 6720 deniers de Papyrius, 7680 deniers de Néron, 11520 drachmes Asiatiques, & 54.79 livres poids de marc de Paris. Il contenoit 60 mines ou 6000 drachmes Attiques (Livius Fannius, Pollux, Athenæus, è Diodoro Suidas, Euftathius, Etym. M. & Ms. Dardanus apud Prifc. & Ulpianus.), 24000 fefterces Romains, 24000 nummorum feftertiorum (Cicero, Livius, lib. 34, 50 & pasfim.), five 24 feftertia (Seneca, Gellius, Prifcianus.), 6000 deniers fuppofés égaux à 6000 drachmes Attiques (Livius è Polybio, à Livio Prifcianus: Feftus, Gellius, Varro apud Plinium: Judæorum Deuterotæ febiit C. I. & O. Bartenorius : &Q. Curtius ad Diodorum compofitus.), 80 livres Romaines (Varro apud Plinium fub falfo nomine talenti Ægyptii, Livius.), 120 litres Asiatiques (Bar-Bahlul.), 120 rotules (Onom. copt.). Vitruve (lib. X, cap. XXII.) parlant de la tortue d'Agétor de Byzance, dit: Gubernabant eam homines C. habentem pondus talentûm quatuor millium quod fit CCCCLXXX. pondo. Cent hommes gouvernoient cette machine, dont le poids étoit de quatre mille talens, ce qui fait quatre Cents quatre-vingts mille livres. De ce paffage de Vitruve il réfulte que le talent valoit 120 livres : cet endroit eft une traduction littérale de quelque Auteur Afiatique ou Egyptien, & le talent dont il y eft question, n'est que le talent Attique évalué en litres ou rotules Afiatiques.

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Le talent Afiatique, Egyptien, Hébraïque de Moife, d'Alexandrie &c. cicar, cacerá, cicará, cinchar, pikinfor, vefna, badza, con tenoit talent Attique, cintar ou kentenarion, 50 mines Afiatiques, 62 mines Attiques, 83 mines Romaines, 125 litres ou rotules, 1000 onces Italiques, 1500 onces Afiatiques, 3000 ficles, 6000 didrachmes Afiatiques, 6250 drachmes Attiques; 7000 deniers de Papyrius, 8000 deniers de Néron, 12000 deniers ou drachmes Afiatiques, & 57.08 livres du poids de marc de Paris. Il cóntenoit 83 livres Romaines & quatre onces (Prifciarzes Serviufque Grammatici quafi à Livio & Comicis.), 62 litres (Maimonides.). Le talent d'Alexandrie contenoit 125 litres (D. Halic.), 12000 deniers (Feftus.) 12000 drachmes (Varro de L. L.), 12000 drachmes (Bar-Bahlul.), 3000 ficles (Mofes ipfe Ex. x. cap. XXXVIII.), 125 litres, 1500 onces, 3000 ftateres (Epiphanius & ab illo Hefych. & M. Gr. in Vaticano.). Pline, d'après Varron, évalue le talent d'Egypte à 80 livres Talentum autem

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