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payoit feulement trente ficles, qui valent 62 liv. 10 f. L'homme qui s'étoit engagé pour fervir depuis l'âge de cinq jufqu'à vingt étoit obligé pour se libérer de payer feulement vingt ficles, ou 41 livres de notre monnoie, & la femme dix ficles ou 20 livres, &c.

ans

Je trouve que dans l'ancienne Loi (Levit. XXVII, 16.) les terres vouées & confacrées à Dieu fe rachetoient pour une modique fomme. Un terrein capable de recevoir trente modios d'orge, c'est-à-dire, un bethcoron de terre faisant trente aroures, ne coûtoit que cinquante ficles de rachat; ce n'est qu'à raison de argent de France, l'arpent Royal.

23 liv.

Il faut faire attention que dans les deux exemples précédens, les fommes fixées pour le rachat, foit des perfonnes, foit des terres, n'en étoient ni le prix, ni la valeur; l'efprit de la Loi étoit qu'en permettant aux citoyens d'engager leur liberté, il leur fùt néanmoins poffible de la recouvrer pour une fomme médiocre, & qui n'excédât pas les pouvoirs des moins fortunés : d'un autre côté, l'intention du Législateur n'étoit pas de dépouiller les particuliers de la portion qu'ils avoient obtenue dans le partage de la Judée; & en confentant qu'ils s'en défaififfent, il voulut qu'il leur fût facile d'en reprendre la jouiffance; d'ailleurs, à ne confidérer ces engagemens que du côté de la politique, plus il étoit facile de fe libérer après s'être confacré au service du Tabernacle, ou de racheter les terres dont on avoit fait une offrande, plus il étoit facile auffi de se réfoudre à faire de tels facrifices, & plus les offrandes devoient devenir fréquentes: en un mot, on favoit que l'offrande que l'on faifoit étoit la même chofe que fi l'on eût offert la fomme prefcrite par la Loi. Si j'ai rapporté & analyfé les exemples précédens, c'eft afin qu'on ne s'en ferve pas pour prouver que l'argent étoit très-précieux au temps de Moïfe, & que pour une petite quantité de ce métal on avoit beaucoup plus des chofes néceffaires aux befoins de l'homme qu'on n'en a aujourd'hui. Venons à d'autres exemples.

Abimélech, Roi de Gerare, ayant fait enlever Sara, qu'il ne favoit pas être la femme d'Abraham, & bientôt après ayant reconnu fon erreur, la rend à fon mari en lui faifant préfent de mille argyres (Gen. XX, 16.). Je pense que ces mille argyres font mille ficles, qui valent 2083 livres tournois.

Samfon ayant épousé une femme du pays des Philiftins, nom

mée Dalila, les principaux Seigneurs ou les plus riches de la Nation vinrent la trouver pour l'engager à favoir de fon mari d'où lui venoit fa force, & à le leur découvrir, lui promettant pour récompenfe de ce fervice, chacun une fomme de mille cent argyres (Jud. XVI, 5.). On ne fait combien ils étoient de contribuans; mais chacun s'engageoit pour la fomme de onze cens ficles, qui valent 2291 livres.

Le Roi David achete d'un Jébuséen nommé Arauna (II. Reg. XXIV, 24.), une aire ou un petit terrein pour y dreffer un autel, avec les boeufs pour le facrifice, le tout pour la fomme de cinquante ficles, faifant 104 livres tournois. Il y avoit fans doute deux bœufs. Cette fomme n'eft point la valeur des chofes achetées, & cet exemple rentre dans le cas des deux premiers que nous avons rapportés. Arauna, qui n'étoit point de la Nation Juive, craint David, & offre de lui donner gratuitement non-feulement le terrein en queftion, mais auffi les boeufs pour le facrifice, le bois néceffaire, & une charette pour le tranfporter. David ne veut point accepter les offres du Jébuséen fans lui en donner de l'argent, parce qu'il ne veut pas faire au Seigneur une offrande qui ne lui coûte rien; il lui donne cinquante ficles. Abraham (Gen. XXIII, 16.) acheta d'Ephron de Heth, pour une fommė plus confidérable, le champ avec la double caverne qui fut destinée à fervir pour la fépulture de fa famille : il en donna quatre cens ficles, qui valent 833 livres de notre monnoie.

Le fiege de Samarie dura fi long-temps, & la famine fut fi grande dans cette Ville (IV. Reg. VI, 25.), que la tête d'un âne s'y vendoit quatre-vingts argyres, & le quart d'un cab de fiente de pigeons, ou plutôt de grains qu'on leur tiroit de l'eftomach cinq argyres. Ces argyres font des ficles, & la tête d'un âne fe vendoit à Samarie environ 167 livres tournois.

Mais peu de temps après (IV. Reg. VII, 1.), felon la prédiction du Prophete Elisée, les Affyriens qui affiégeoient Samarie ayant pris la fuite, après avoir abandonné leurs provisions & leurs bagages, l'abondance devint fi grande, que le modios de bled ou de fine farine n'y valut qu'une ftatere, & le modios d'orge une demi-statere: c'étoit néanmoins encore fur le pied de 29 liv. 10 f. le fetier de bled mefure de Paris, & de 14 liv. 15 f. le fetier d'orge.

Salomon fourniffoit fes écuries (III. Reg. X, 29 ; & II. Paralip. I, 17.) de chevaux qu'il tiroit de l'Egypte, & qu'il payoit

chacun à raison de cent cinquante argyres (kefeph.): ce font 150 sicles, qui valent 312 liv. 10 f. pour chaque cheval.

Un Lévite de la Ville de Bethléem, d'un caractere inquiet, & qui n'avoit pas apparemment l'efprit de fon état, quitte fa patrie pour courir le pays & chercher fortune. Il va fe rendre fur la montagne d'Ephraïm, chez un Juif idolâtre nommé Michas, à qui il

fait connoître fa fituation & le fujet de fon voyage. Ce Michas l'engage à demeurer chez lui en qualité d'ami & de Prêtre de fon idole. Il lui propofe des honoraires confiftant en dix argyres par an ( Jud. XVII, 10.), deux habits & la table. Ces dix argyres étoient fans doute dix mines talmudiques valant 520 livres tournois : car en les prenant pour des ficles, le Lévite n'auroit eu d'appointemens que 20 livres tournois; ce qui ne me paroît pas admissible.

ne

Un homme étant venu trouver Joab (II. Reg. XVIII, 11 & 12.) pour lui apprendre qu'il avoit vu Abfalom suspendu à un arbre par les cheveux, le Général lui répond: Que ne l'as-tu poignardé ? je t'aurois donné dix ficles d'argent & un baudrier. Cette fomme vaut que 20 livres, fi ce font vraiment des ficles que Joab propofe. Cet homme répond à Joab: Quand vous me donneriez mille argyres, je ne porterois pas la main fur le fils de mon Roi. car nous étions préfens lorfque le Roi vous a ordonné à vous, à Abifaï & à Ethaï, de lui conferver fon fils Abfalom. Cette fomme doit être confidérable dans la bouche d'un homme réfolu de ne pas commettre pour tout au monde un pareil attentat. Mille grands argyres feroient 52083 livres tournois.

pour
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Jofeph, fils du Patriarche Jacob, fut vendu par fes freres à des Marchands Madianites la fomme de vingt argyres (kefeph.). Vingt ficles feroient 41 livres tournois. Jofeph étoit jeune, beau & bienfait; c'étoit une excellente emplette pour des Marchands d'efclaves : & quoique fes freres fuffent principalement guidés par la haine & l'envie, on peut croire qu'ils n'étoient pas moins intéreffés, & qu'ils en exigerent tout ce qui fut poffible, puifqu'en fin ils en exigerent de l'argent. Auffi l'Hiftorien Jofephe (Ant. Jud. lib. II, cap. III.) dit-il que les fils de Jacob vendirent leur frere pour la fomme de vingt mines, c'est-à-dire, vingt mines de celles que nous appellons Talmudiques, ou autrement vingt grands argyres, qui valent 1041 livres de notre monnoie.

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Enfin les trente argyres qui furent le prix de Jefus-Christ & le

:

fruit de la trahifon de Judas (Matth. XXVI, 15, & XXVII, 9; Zachar. XI, 12 & 13.), étoient de grands argyres ou des mines Talmudiques, & valoient 1562 liv. 10 f. Il paroît que c'eft le fentiment de S. Epiphane, de S. Maxime, & de Héron le Martyr; c'est auffi celui de plufieurs autres Ecrivains, & entr'autres de Guillaume Philandre, dans fes Commentaires fur Vitruve (lib. I, cap. IV.), où il s'exprime ainfi Nam argenteos illos, quibus acceptis à Judá fervatorem noftrum Jefum Chriftum proditum in facrá hiftoriâ legimus, id eft, aprúpia, ex Græcorum Commentariis relatum eft fingulos valuiffe minam unam, hoc eft, drachmas centum. En effet, Judas follicité par les Princes des Prêtres & les anciens du peuple, c'eft-à-dire, par les principaux de la Nation Juive, à leur indiquer le lieu où Jefus fe retiroit la nuit, ne fe détermina fans doute que parce que la récompenfe lui parut un peu confidérable, & les Chefs de la Nation n'auroient ofé employer fon miniftere qu'en lui préfentant une fomme capable de le féduire de plus, le difciple perfide après fon repentir, ayant rapporté les trente argyres, on en acheta le champ d'un potier pour être destiné à la fépulture des étrangers. On penfe bien que le terrein aux environs d'une grande Ville comme Jérufalem devoit être cher, & que la fomme ci-deffus ne pouvoit être que fuffifante pour cette acquifition. Cependant d'autres Savans ont été dans la perfuafion que les trente pieces que reçut Judas étoient des ficles; enforte que le difciple fut corrompu par le confeil des Juifs pour la fomme de 62 liv. 10 f. de notre monnoie. Je laiffe le Lecteur libre d'en penfer ce qu'il jugera à propos; & je reprends la fuite de l'énumération des monnoies de l'Afie.

La mine de Moife & d'Ezéchiel, mináh, manéh, menéh, manjá, manes, manéh fchél kódefch, mine facrée, valoit 2 argyres, 2 litres, rotules ou onces d'or, 4 pérèses, 5 ftateres, 10 didrach mes d'or, 15 tétraftateres, 20 deniers d'or, 30 octodrachmes, 40 hexadrachmes, 60 ficles, 80 tridrachmes, 120 didrachmes, 125 livres tournois, 240 deniers, 480 rébiites, 1200 gerahs, 1440 meas, 2500 fous tournois, 2880 pondions, 5760 phollis, 23040 kodrantès, 30000 deniers tournois, 46080 prutas.

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Le cintar, kentenarion, centenarium centipondium, valoit 40 mines facrées, 96 grands argyres, 100 rotules, & 500 livres tournois. Je ne fais fi le cintar étoit en ufage comme monnoie.

Le talent pefant d'argent, talent de Moife, cicár, cicará, cacerá,

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cinchar ou cincharès, valoit cintar, 50 mines facrées, 120 mines Talmudiques, 125 rotules ou onces d'or, 240 pérèses, ftateres d'or, 5oo didrachmes d'or, 750 tétraftateres, 1000 drachmes d'or, 1500 octodrachmes, 2000 hexadrachmes, 3000 ficles, 4000 tridrachmes, 6000 didrachmes, 6250 livres tournois 12000 drachmes, 24000 rébiites, 60000 gérahs, 72000 meas, 125000 fous tournois, 144000 pondions, 288000 phollis, 1152000 kodrantès, 1500000 deniers tournois, 2304000 prutas. Le talent de Babylone valoit talent de Moife, 1 cintar

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60 mines facrées, 144 mines Talmudiques, 150 rotules ou onces d'or 288 pérèses, 300 ftateres d'or, 600 didrachmes d'or, 900 tétraftateres, 1200 deniers d'or, 3600 ficles, & 7500 livres tournois. Il valoit 300 dariques, felon Xénophon (de Exped. Cyr. lib. 1.).

On a pu remarquer que dans ce numéraire de la monnoie Asiatique, une once d'argent valoit 192 onces de cuivre ; & une once d'or, 12 onces d'argent, ou 2304 onces de cuivre.

Dans ce que je viens de dire des monnoies de l'Afie, j'ai cité quelquefois S. Epiphane, Héfychius, Héron le Martyr, S. Maxime Eufebe Pamphile, mais ce n'a été que lorfque je les ai trouvés d'accord avec l'Ecriture & les autres Ecrivains dont j'ai cru devoir préférer les autorités; autrement je les ai rejettés. Par exemple, S. Epiphane dit que la fix-millieme partie du talent s'appelle affarion, & que le denier eft compofé de foixante affarions; d'où il fuit que fon affarion vaudroit deux deniers, & feroit un didrachme. L'Auteur d'un fragment Grec, rapporté par Saumaife dit également que le denier vaut foixante affarions. Héfychius dit que le kodrantès, qui eft auffi le lepton, eft le quart du phollis, & que le lepton eft la fix-millieme partie du talent. Héron dit que le ficle vaut deux leptons, qui font deux drachmes. Saint Maxime parlant des trente argyres qui furent le prix de Jefus-Chrift, dit que les affarions s'appellent auffi leptons ou nummus; qu'il faut foixante affarions pour valoir un denier, & cent deniers pour un argyre. Un autre Auteur cité par Saumaife, traitant des monnoies des Hébreux, dit que le denier étoit de foixante affarions qu'on nommoit auffi leptons. Un autre fragment, rapporté également par Saumaise, dit que le lepton eft le quart de l'once, & que c'eft de lui dont il eft parlé dans l'Evangile, où on lit: Deux passereaux ne se vendent-ils pas un affarion ? Eufebe Pamphile dit

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