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» récompeuse en argent. Les Cohortes Prétoriennes avoient-elles >> donc de plus grands rifques à courir qu'eux ? que cependant elles >>> recevoient deux deniers (20 as) de paye, & après feize ans de fervice » elles avoient la liberté d'aller revoir leurs Pénates. Que fi l'on ne >> devoit pas leur faire un reproche de ce que leur service se faifoit » à la ville, au moins falloit-il confidérer que faifant le leur au » milieu des nations barbares, ils voyoient l'ennemi de leurs

>> tentes >>.

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Cur paucis Centurionibus, paucioribufque Tribunis, in modum fervorum obedirent? Quando aufuros expofcere remedia, nifi novum & nutantem adhuc Principem precibus vel armis adirent? Satis -annos ignaviâ peccatum, quod tricena aut quadragena ftipendia Jenes, & plerique truncato ex vulneribus corpore, tolerent; ne dimiffis quidem finem effe militia, fed apud vexillum retentos, alio vocabulo seofdem labores perferre; ac fi quis tot cafus vitâ fuperaverit, trahi adhuc diverfas in terras, ubi per nomen agrorum, uligines paludum, vel inculta montium accipiant. Enim verò militiam ipfam gravem, infructuofam. Denis in diem affibus animam & corpus æftimari; hinc veftem, arma, tentoria, hinc fævitiam Centurionum & vacationes munerum redimi; at herculè verbera & vulnera, duram hiemem, exercitas æftates, bellum atrox, aut fterilem pacem, fempiterna: nec aliud levamentum, quàm fi certis fub legibus militia iniretur; ut fingulos denarios mererent; fextus decimus ftipendii annus finem adferres, nec ultrà fub vexillis tenerentur; fed iifdem in caftris præmium pecunia folveretur. An prætorias cohortes quæ binos denarios acciperent, quæ poft fexdecim annos Penatibus fuis reddantur, plus periculorum fufcipere? Non obtrectari à fe urbanas excubias : fibi tamen apud horridas gentes, è contuberniis hoftem afpici.

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Dans l'époque précédente, les fimples foldats étoient payés probablement de quatre mois en quatre mois, à raison de trois auréus valant foixante-quinze deniers ou douze cents as. Mais le denier ayant encore été altéré & diminué de poids après le regne de Tibere, la paye du foldat ne fe trouva plus fuffisante; il fallut l'augmenter de nouveau, ce qui n'arriva pourtant que fous l'empire de Domitien. Alors on paya les foldats également de quatre en quatre mois, à raifon de quatre auréus valant cent deniers ou feize cents as. C'étoit par mois un auréus valant vingtcinq deniers ou quatre cents as; & par jour, un trentieme d'auréus faifant cinq fixiemes de denier, ou treize as & un tiers,

ce

ce qui fait de notre monnoie 13 fous. Cette derniere augmentation fe prouve par deux autorités : la premiere, de Suétone, (in Domitian. c. 7.) qui dit que Domitien gratifia le foldat d'une quatrieme paye ou de trois auréus: addidit & quartum ftipendium militi, aureos ternos la feconde, de Zonare, qui nous apprend que Domitien augmenta la paye du foldat, de maniere que comme auparavant on ne lui donnoit que foixante-quinze deniers, il fut réglé qu'on lui en donneroit cent: τοῖς τρατιώταις ἐπήυξησε την μισθοφοράν, τάχα διὰ τὴν νίκην. Πέντε γὰρ καὶ ἑβδομήκοντα δραχμάς ἑκατον χαμβάνοντος, ἑκατὸν ἐκέλευσε διδόσθαι

De ce que nous avons dit de la folde des troupes dans l'antiquité, il résulte, 1°, qu'au temps de Demofthenes, le fantaffin Grec gagnoit par an 120 liv., le cavalier 360 liv.; 2o. que le fantaffin Grec, foudoyé par les Perfes, gagnoit 300 liv.; 3°. què le fantaffin Grec, foudoyé par Cyrus le jeune, gagnoit 450 liv.; 4°. que le matelot ou le foldat employé fur la fotte Athénienne qui fut envoyée en Sicile, gagnoit 365 liv.; 5°. que dans les premiers temps où les troupes Romaines furent payées par la Répu blique, le fantassin gagna probablement 120 liv., & le cavalier 360 liv.; 6°. qu'au temps de Polybe, le piéton Romain gagnoit 115 liv., le centurion 230 liv., & le cavalier 345 liv.; 7°. qu'au temps de Jules-Céfar, le fantaflin avoit par an 205 liv., le centurion probablement 410 liv., & le cavalier 615 liv. 8 que fous empire de Domitien, le fantaffin eut 237 liv.; 9o. que fous Valentinien III, il paroît que le foldat avoit 450 liv.

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Aujourd'hui en France un fufilier ou fimple foldat fantaffin a par jour 6 f. 4 d., ce qui fait par an 114 liv.; le grenadier & le huffard 7 f. 4 d., c'est par an 132 liv. ; le dragon, pour fa perfonne feulement, 7 f. 2 d., c'est par an 129 liv.; & enfin tout autre simple cavalier, pour fa perfonne feulement, 7 f. 8 d. par jour, & par an 138 liv.

Enfin je conclus de tout ce qui précéde, que l'argent & For monnoyés n'étoient pas plus ou n'étoient guere plus utiles dans l'antiquité qu'ils ne le font de nos jours, & que pour la même quantité de ces métaux on n'avoit pas plus des chofes de premiere néceffité.

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CHAPITRE VII.

De l'ufure.

Près avoir traité affez amplement des monnoies des Anciens, il pourroit refter quelque chofe à désirer fi j'omettois de parler de la maniere dont ces peuples faifoient valoir leur argent. Je préviens que je ne ferai prefque que tranfcrire ici ce que le favant & laborieux M. Dupuy a écrit für cette matiere à la fuite de fon Mémoire fur l'état de la monnoie Romaine ; je n'aurai guere d'autre mérite que celui d'y ajouter la théorie de l'ufure parmi nous.

Avant la renaiffance des Lettres, on ignoroit jufqu'aux termes & aux expreffions dont les Grecs & les Romains avoient fait ufage en cette matiere. On ne favoit quelle idée fe former de l'ufure centieme, ni de fes parties. Hermolaus Barbarus fut le premier qui, guidé par Columelle, découvrit l'erreur des Jurifconfultes qui l'avoient précédé.

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Budée fit enfuite briller à nos yeux, une lumiere plus vive. Depuis lui, bien des Auteurs n'ont pas laiffé de s'égarer. Saumaise luimême, qui avoit fort étudié ce fujet, eft tombé dans quelques méprises; & aujourd'hui encore nous voyons des Ecrivains qui n'ont pas, fur cette matiere, des idées bien juftes ni bien nettes. A remonter aux temps les plus reculés, on ne voit pas que les Loix ayent ordinairement permis une ufure plus forte que la centéfime, c'est-à-dire, d'un pour cent par mois, ou de douze par an. Car quoiqu'au rapport de Démofthenes, la femme répudiée fut autorisée par la loi de Solon, à retirer la centieme & demie de fa dot, fi le mari différoit à la lui rendre, ce cas particulier ne doit être regardé que comme une peine, qui prouve que cette efpece d'ufure n'étoit pas ordinaire. C'eft à cette centéfime que les Romains réduifirent tout leur calcul en ce genre : ils la regarderent comme un as ou un tout, & la foumirent ainsi à toutes les divifions reçues de l'as. L'ufure étoit-elle plus forte ? l'expreffion qui la défignoit fe rapportoit toujours à la centéfime. On di

foit donc la fefqui-centéfime, ou l'ufure par mois d'un & demi pour cent, ou de dix-huit par an. La double centéfime (binæ centefimæ), ou celle de deux pour cent par mois, ce qui fait vingt-quatre par an; ainsi des autres. Etoit-elle plus foible? les parties de l'as, appliquées à la centéfime, en caractérifoient l'efpece; d'où l'on voit que l'usure onciere (foenus unciarium) eft l'once, ou le dou zieme de la centieme, c'est-à-dire, le douzieme d'un

par mois. On lit également dans les anciens Ecrivains ces autres exprefsions, femunciarium fœnus, fanus trientarium, ufuræ fextantes, quadrantes, trientes, quinamces, femiffes, feptunces, beffes, dodran

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dextantes, deunces. Les Grecs s'exprimerent fouvent d'une paniere femblable, τρίτη, τετάρτη, δωδεκάτη, &c. ἑκατοσῆς : & cette analogie fe remarque dans les autres efpeces d'ufure.

Pour n'avoir pas bien compris le principe fur lequel rouloit le calcul des Romains à cet égard, je ne fais combien d'Auteurs

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ont confondu l'ufure onciere avec la centéfime. Un Ecrivain célebre (M. de Montefquieu), que l'Europe entiere regrette, bien vu que depuis le temps où les loix Romaines mirent un frein à l'avidité des créanciers, l'ufure onciere ne pouvoit pas fignifier

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pour cent par mois, parce qu'autrement les Empereurs qui permirent l'ufure quarte, tierce, fémisse, l'auroient fixée à trois, quatre & fix pour cent par mois; ce qui fans doute eût été ab furde, comme il le dit: car les loix faites pour réprimer l'ufure auroient été plus cruelles que les ufuriers. Mais il s'eft perfuadé que dans les commencemens l'ufure onciere étoit d'un pour cent par mois, & qu'elle ne défigna un pour cent par an que longtemps après.

Examinons & tâchons d'approfondir cette théorie de l'ufure chez les Romains, en fuivant la route de celui qui n'en ayant encore aucune idée, chercheroit à en pénétrer le myftere. On voit bien en général que ufuræ unciaria déclare un intérêt d'une once; que ufura femiffes indique une ufure de fix onces; que ufura deunces fignifie une ufure de onze onces; mais nous ne voyons pas encore clair dans ce fyftême numérique. En effet, payer onze onces d'intérêt fur un as, ou les onze parties d'un tout, foit par mois, foit par an, cela n'est pas admissible. Usuræ centefimæ paroît annoncer un intérêt d'un pour cent, mais eft-ce par an? eft-ce par mois? Par an, un pour cent feroit peu; par mois, un pour cent, ce feroit douze pour cent par an. L'intérêt paroît fort, mais

il peut avoir eu lieu en certaines circonftances. Suppofant donc que ufuræ centefimæ énonce des intérêts à douze pour cent par an, on eft porté à croire que les Romains auroient bien pu tirer généralement les intérêts d'une fomme à tant pour cent par an, ou par mois, en prenant pour base de tout leur calcul un centieme ou la centieme partie de cent. Dans ce cas, il feroit très-probable qu'ils auroient confidéré comme un as, ou une unité, cette centieme partie, centefima ufura; c'est-à-dire, que fur cent ils auroient pris un, l'auroient appellé as, & qu'ils auroient divifé cet as en douze onces, comme la livre & leurs autres entiers; de maniere que centefima ufura fignifiant un ou pour cent, deunces ufuræ fignifieroient pour cent, femiffes ufuræ pour cent, unciaria ufuræ pour cent, ufuræ femunciaria pour cent, le tout à raifon de l'efpace d'un mois. Ce fyftême paroît affez plaufible: car fi centefima ufura femblent une ufure un peu forte dans cette hypothefe ; d'un autre côté, ufura unciaria paroiffent un intérêt trop modique. Mais eft-ce-là véritablement la théorie de l'ufure chez les Romains? & fi ce l'eft, eft-il certain que c'étoit à raifon du mois qu'elle étoit due? Columelle (lib. 111, cap. III.), par le calcul qu'il en fait, va nous l'apprendre. Cet Ecrivain traitant de la culture de la vigne, après avoir ajouté ensemble les prix d'un esclave vigneron, de fept jugeres de terre, des marcottes néceffaires pour le plant de ce terrein, des échalas & des ofiers, fait monter cette fomme à vingt-neuf mille festerces, dont il tire les ufuræ femiffes qu'il évalue à trois mille quatre cents quatre-vingts fefterces pour deux années: Fit tum in affem confummatum pretium feftertiorum xxix millium. Huc accedunt femiffes ufurarum feftertia tria millia & quadringinti octoginta numi biennii temporis, quo velut infantia vinearum ceffat à fructu. Fit in affem fumma fortis & ufurarum xxxij millium quadringentorum lxxx numorum. Prenant donc la moitié de 3480, nous aurons 1740 fefterces pour les femiffes ufurarum d'un an fur un capital de 29000 sesterces; faifant cette proportion: 29000 fefterces donnent par an 1740 fefterces d'intérêt, comme 100 fefterces donnent un quatrieme terme, c'est 6 : donc ufuræ femiffes exprime un intérêt à fix pour cent par an, & ou fix onces de l'as centéfime par mois. Voilà le développement du fyftême numérique de l'ufure chez les Romains; & je ferois furpris que l'Auteur d'un Livre intitulé: Recherches fur la valeur des monnoies & fur le prix des grains avant & après le Concile de Francfort;

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