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leur habitation, quatre dans la tribu de Zabulon, & huit dans les tribus de Ruben & de Gad, de l'autre côté du Jourdain. Voici le texte qui regle la quantité de terrein que pourront pofféder les Lévites :

Hac quoque locutus eft Dominus ad Moyfen in campeftribus Moab Super Jordanem contra Jericho. Præcipe filiis Ifrael ut dent Levis de poffeffionibus fuis urbes ad habitandum, & fuburbana earum per circuitum: ut ipfi in oppidis maneant, & fuburbana fint pecoribus ac jumentis: quæ à muris civitatum forinfecus per circuitum, mille paffuum fpatio tendentur. Contra orientem duo millia erunt cubiti, & contra meridiem fimiliter erunt duo millia: ad mare quoque, quod refpicit ad occidentem, eadem menfura erit, & feptentrionalis plaga æquali termino finietur, eruntque urbes in medio, & foris fuburbana (Num. XXXV.).

Pour mesurer & évaluer l'étendue de ce terrein accordé aux Lévites, il faut connoître deux chofes : 1°. l'efpece de coudée qui en affigne les dimenfions; 2°. la forme & l'étendue du plan de chaque Ville Lévitique, dont dépend l'étendue de la banlieue,

fuivant la Loi ci-deffus.

A l'égard de la coudée, fon efpece eft caractérisée par le texte même de la Loi, qui égale deux mille coudées à mille pas, pas, ou mille bêmes aploun; il s'agit donc du pygon ou de la coudée commune, égale à 12.84 pouces du pied de Roi.

Quant à l'étendue des Villes Lévitiques, on peut l'évaluer fur le nombre des habitans qu'elles devoient contenir. Le nombre des Lévites depuis l'âge d'un mois, fe montoit à 23000 fous Moïfe, & à 22000 fous Jofué. Ajoutant les femmes, on trouvera 46000 ames fous Moïfe, & 44000 fous Jofué : fuppofant 48000 ames, c'en étoit mille pour la population de chaque Ville Lévitique. En accordant que cette population ait été doublée dans la fuite, comme le fut la population des autres tribus, la population de chaque Ville Lévitique n'a pu être que de deux mille habitans; & d'ailleurs, fi elle a été plus grande, il n'en résultera rien pour le calcul que nous voulons faire, parce qu'il n'a pas été possible que la Nation ait augmenté le domaine Lévitique à raison de ce que cette tribu fe multiplioit, parce que la population croiffoit également dans les autres tribus, & que d'ailleurs il étoit expreffément défendu par la Loi de déplacer les bornes qui avoient été mises par les Anciens. Pour la forme de chaque Ville, le texte semble

femble indiquer que fon enceinte devoit être circulaire, quæ à muris civitatum forinfecùs per circuitum mille paffuum fpatio tendentur; mais pour ne nous point tromper en donnant trop peu d'étendue à la bande extérieure de terrein qui doit servir de banlieue & de territoire, fuppofons que le plan de la Ville eft quarré, & que la bande territoriale qui l'environne fert à compléter un quarré plus grand.

Ces points éclaircis, je compare l'aire de chaque Ville Lévitique à l'aire de Paris, & je compte dans cette Ville 589000 habitans. Or l'aire de Paris avec fes fauxbourgs eft de 6188 arpens; donc, à proportion de la population, l'aire de chaque Ville Lévitique n'aura été que d'un peu plus de 21 arpens, qui font un quarré de 168 toifes en tout fens. Les terres des Lévites s'étendoient à l'entour à la distance des murs de mille bêmes aploun, ou de 2000 pygons, qui font 357 toifes environ par conféquent la bande de terre en quarré qui environnoit la Ville valoit 557 arpens. Les Prêtres poffédoient treize Villes; donc ils jouiffoient de 7241 arpens; & les Lévites, qui en avoient trente-cinq, jouiffoient de 19495 arpens.

L'étendue de la Terre-fainte, fur l'Orbis Romanus de M. d'Anville, contiendroit environ fix millions d'arpens. Je fuppofe avec M. Templemann qu'elle n'en contenoit qu'un peu plus de cinq millions; & je trouve que fur ce pied les Prêtres Juifs poffédoient en terres la 706 partie de toutes celles de l'Etat; & les fimples Lévites, la 262° partie.

On objectera peut-être que les Villes chez les Juifs n'étoient pas élevées, & les maifons compofées de plufieurs étages, comme elles le font à Paris; mais outre qu'il ne s'agiroit ici que d'une conjecture, je réponds que dans l'étendue de Paris je renferme beaucoup de terrein employé en jardins, en potagers, en places, le baffin de la Riviere, les Quais, les Eglifes, les Palais, &c. qui ne se trouvoient pas dans les Villes Lévitiques d'ailleurs nous nous logeons plus fpacieusement que ne faifoient les Ifraëlites, & que ne font encore aujourd'hui les peuples d'Orient.

:

Le Prophete Ezéchiel (cap. XLV & XLVIII.) de la part de Dieu rappelle aux Ifraëlites, 'lorfqu'ils vont être rétablis dans l'héritage de leurs peres au retour de la captivité de Babylone, les Loix concernant le domaine du Prince ou du Roi, celui des Prêtres, & celui des Lévites. Il commence par divifer toute la TerreBbb b

fainte en treize parties. Ces portions font autant de lifieres ou bandes paralleles entr'elles & à l'Equateur, qui traversent d'occident en orient tout le pays depuis la mer Méditerranée jusqu'aux déferts de l'Arabie du côté de l'Euphrate & du golfe Perfique. Douze de ces divisions font pour les douze tribus qui devoient avoir part aux terres, & la treizieme doit renfermer le domaine. du Roi, celui des Prêtres, & celui des Lévites. Ces parts font affignées, dans l'ordre qui fuit, à chacune des tribus, en partant du nord fur les frontieres de la Syrie pour defcendre vers le midi jufqu'aux frontieres de l'Arabie; favoir, Dan, Afer, Nephthali, Manaffé, Ephraïm, Ruben, Juda; enfuite les Prémices, c'eft-àdire, le domaine du Roi, des Prêtres & des Lévites; puis Benjamin, Siméon, Iffachar, Zabulon & Gad.

La Zone destinée pour le domaine du Roi & de la tribu de Lévi, eft réglée à vingt-cinq mille coudées de largeur; & comme il paroît qu'elle devoit avoir une de fes extrêmités appuyée fur la mer entre Joppé & Accaron pour paffer par le nord du lac Afphaltite, & traverfer tout le midi de la Pérée, on peut lui donner trente lieues, de 25 au degré, de longueur. Du milieu de cette Zone, le Prophete retranche un terrein quarré de vingt-cinq mille coudées fur chaque côté & en tout fens. Ce quarré contient la part des Prêtres, celle des Lévites avec l'emplacement d'une Ville, fes fauxbourgs, fon territoire, fes jardins & fes vergers. Le furplus de la Zone, après la fouftraction de ce quarré, eft le domaine du Roi. Le terrein des Prêtres eft un rectangle ou quarré long, ayant vingt-cinq mille coudées de longueur fur dix mille de largeur. Le terrein des Lévites eft de même forme & de même grandeur. Celui de la Ville & de fes dépendances eft un rectangle de vingt-cinq mille coudées de long fur cinq mille de large. La Ville doit être au milieu de ce dernier rectangle, & fon aire fera un quarré de quatre mille cinq cents coudées fur chaque côté, fans comprendre fes fauxbourgs; ce qui fait un périmetre de dixhuit mille coudées, valant trente-fept ftades nautiques & demi. La nouvelle Ville avec fes fauxbourgs doit être également un quarré de cinq mille coudées fur chaque côté, & de vingt mille de circuit, faifant quarante-un ftades nautiques & deux tiers.

J'ai déja dit que la coudée dont il s'agit dans tous ces mefurages eft la coudée commune ou le pygon, qui avoit un palme de moins que la coudée lithique ou coudée vraie & de mefure natų

relle. Je le prouve encore par Ezéchiel même, lequel, après avoir donné (cap. XLIII.) les dimensions du Temple & de l'Autel, dit qu'à l'égard de ces mefures de l'Autel, elles étoient prifes avec la coudée véritable, qui valoit une coudée & un palme: Ifta tem menfuræ Altaris in cubito veriffimo qui habebat cubitum & palmum; ce que certainement il ne fait obferver que parce que les autres mesures, dont il parlera dans la fuite, font évaluées sur la coudée commune.

Ces chofes ainfi convenues, on aura les répartitions fuivantes dans la Palestine.

227200 arpens, total des prémices de la terre pour le domaine du Roi & celui de la tribu de Lévi; c'eft entre la 22° & la 23o partie des terres de l'Etat.

212416 arpens, domaine particulier du Roi ou du Prince; c'est la vingt-quatrieme partie des terres de l'Etat.

14784 arpens, terrein de la Ville & de la tribu de Lévi. 5914 arpens, domaine particulier des Prêtres ; c'eft la 865 partie des terres de 1Etat.

5914 arpens, domaine des fimples Lévites, égal à celui des Prêtres.

2957 arpens, aire & territoire de la Ville.

591 arpens, aire de la Ville & de fes fauxbourgs.

479 arpens, aire de la Ville fans fes fauxbourgs; c'est un peu
plus que
la treizieme partie de Paris & de fes fauxbourgs,
& beaucoup plus que la cinquieme partie de Paris dans fes

remparts.

de

On doit penfer que ces Réglemens concernant le partage des terres entre le Prince des Juifs & les tribus, ne furent qu'une rénovation des ufages qui avoient été reçus avant la captivité, & auxquels ils étoient conformes. Ainfi, fi nous croyons que le domaine des Rois chez les Juifs étoit, au temps de Salomon, même étendue qu'il est réglé ici, on en inférera qu'un arpent de terre rendoit en Palestine, au propriétaire qui ne le faifoit pas valoir par ses mains, la fomme de 235 liv. de notre monnoie : car le domaine de la Couronne rendoit tous les ans à Salomon une somme de 666 talens d'or, qui font 49950000 liv. (III. Reg. X.); & il faut remarquer que dans ce revenu, qui étoit celui des terrea B b b b ij

de la Couronne, on ne comprenoit pas une autre fomme qu'ap portoient dans les coffres du Roi les Intendans des impôts, les Commerçans, les Marchands, les Princes Arabes, & quelques autres qui étoient fes tributaires (II. Paral. IX.); on n'y comprenoit pas non plus ce que la flotte de Salomon lui apportoit d'Ophir & de Tharfis, favoir une fomme de quatre cents vingt talens d'or (31500coo liv.) de trois en trois ans (II. Paral. VIII, 18; & IX, 21. III. Reg. IX, 26, 27, 28.).

:

Ce que nous venons de dire du domaine Royal, nous devons le croire de celui de la tribu de Lévi; il a dû être toujours de la même étendue ; & Ezéchiel, qui étoit lui-même de la famille facerdotale, n'en a pas retranché au détriment de ses confreres, & contre l'efprit de la Religion, qui défendoit également d'y ajouter. En effet, on voit d'un côté que la tribu de Lévi ne pouvoit augmenter ses poffeffions, & la Loi ne lui permettoit aucun moyen pour cela. Les Ifraëlites des autres tribus pouvoient à la vérité vouer & confacrer à Dieu une portion de leur héritage, ce qui tournoit au profit des Prêtres; mais ceux-ci ne pouvoient la garder ils étoient obligés de la vendre. Le donataire pouvoit la racheter lui-même en payant un cinquieme en fus de l'eftimation qui en étoit faite; mais s'il refusoit de le faire, on étoit obligé de la vendre à un autre ; & alors le donataire n'étoit plus autorifé à rentrer dans fa terre, pas même lors de l'année Jubilaire. Toute terre acquife & confacrée par l'acquéreur, pouvoit être également vendue par les Prêtres; mais l'année du Jubilé, elle étoit réunie à l'héritage dont elle avoit été détachée en premiere origine. Voyez le dernier Chapitre du Lévitique. D'un autre côté, les maifons des Prêtres & des Lévites, fituées dans les Villes, pouvoient être vendues, mais auffi la Loi leur permettoit de les racheter en tout temps; & lorfqu'elles n'avoient pas été rachetées l'année du Jubilé, elles retournoient à leurs anciens maîtres. A l'égard des terres de la banlieue des Villes Lévitiques, il étoit défendu de les vendre : Ædes Levitarum quæ in urbibus funt femper poffunt redimi. Si redemptæ non fuerint, in Jubileo revertentur ad Dominos, quia domus urbium Levitarum pro poffeffionibus funt inter filios Ifrael. Suburbana autem eorum non veneant, quia poffeffio fempiterna eft (Levit. XXV.).

Ainfi, par le fait de la Loi, voilà la treizieme partie de la Nation fans poffeffion territoriale: car la 432° partie des fonds

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