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Le bœuf tirant, qu'on nourrit avec deux bottes de foin & quelque peu de fon, lorfqu'il travaille, ne confomme que la récolte de deux arpens de pré naturel. Mais parce qu'on le fait paître, ou qu'on le nourrit de paille, lorsqu'il ne travaille pas, il confomme bien moins que cette quantité. Au refte, il ne faut pas épargner la nourriture à ces animaux. Lorfque les bœufs ne travaillent pas, dit Caton, on les fait paître le jour, & la nuit on leur donne vingt-cinq pondo, c'eft dix-fept livres, poids de marc, de foin par piece; on les nourrit auffi avec de la paille de froment & d'orge, avec de la vefce, des lupins & des balles de féves; mais il ne faut faire paître les boeufs que l'hiver, lorfqu'ils ne labourent point. Quand ils travaillent, Columelle (lib. XI, cap. II.) veut qu'on leur donne à chacun cinquante pondo de foin par jour, ce qui fait trente-quatre livres & un quart poids

de marc.

Voici maintenant le fyftême que je pose, comme devant servir à régler le nombre des troupeaux qu'il convient d'avoir fur une terre de cent vingt-huit arpens, dont trente-deux en bled, autant en menus grains, autant en jacheres ou peut-être en certaines efpeces de légumes, & autant en prairies artificielles. Je fais que ce n'eft point ce qu'on a coutume d'y en mettre, je pense seulement que c'eft la quantité néceffaire pour avoir fuffifamment des engrais; mais comme je ne veux paffer ni pour enthousiaste, ni pour partifan trop crédule du merveilleux, je préviens encore une fois, que c'eft un exemple de combinaifon que je propose, comme pour fervir de modéle à un fyftême plus réfléchi & plus exact. J'entrerai auffi dans le détail du revenu réglé que l'on peut retirer des bestiaux & des grains, en pratiquant cette méthode.

Boeufs, Taureaux & Vaches.

On fuppofe 1°. que quatre boeufs peuvent labourer trente-deux arpens par faifon; 2°. qu'une géniffe eft propre à la génération depuis l'âge de trois ans jufqu'à celui de dix; 3°. que le taureau & les boeufs font formés & propres à faire leur emploi chacun depuis l'âge de quatre ans jufqu'à celui de neuf; 4°. que le taureau peut fervir vingt-une vaches; 5°. que les vaches ont autant de veaux mâles que de femelles, ce qui cependant n'est pas néceffaire

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ici; 6°. que tous les animaux réuffiffent, ce qui souffre fans doute des exceptions. Voici le montant du troupeau :

21 vaches, dont

4 nourrices, & 17 à lait.

1 taureau.

4

bœufs tirans.

3 éleves femelles par an, ce qui fait 9 à charge.

1 éleve mâle par an, ce qui fait 4 à charge.

30 femelles à charge au Laboureur.

9 mâles à charge.

39 bêtes à charge, c'eft la totalité du troupeau. En voici produit par an:

3 vaches de dix ans pour le Boucher.

1 bœuf ou taureau de neuf ans pour le Boucher. 17 veaux de lait pour le Boucher.

Brebis, Béliers & Moutons.

Supposant 10. la brebis propre à la génération depuis 2 jusqu'à fept ans, & le bélier depuis quatre jufqu'à huit; 2°. que l'on peut donner vingt brebis à un bélier; 3°. qu'il y aura autant d'agneaux mâles que de femelles ; 4°. que les moutons feront vendus à l'âge de deux ans; on aura les rapports suivants :

80 brebis.

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16 éleves femelles tous les ans.

1 éleve bélier tous les ans.

39 éleves moutons tous les ans.

40 total des éleves mâles à faire par an.

56 total des éleves mâles & femelles à faire par an.

4 éleves béliers à charge.

32 éleves femelles à charge. 78 éleves moutons à charge.

114 total des éleves à charge.

198 total des bêtes à charge; c'eft le montant du troupeau,

voici le produit:

16 brebis de fept ans pour le Boucher,

dont

1 bélier de huit ans pour le Boucher.

39 moutons de deux ans pour le Boucher. 24 agneaux femelles pour le Boucher.

Cochons, Verrats & Truies.

Il fera difficile de fixer avec précision le nombre des cochons qu'on peut avoir. C'est la quantité de nourriture qu'on a à leur donner, qui doit fervir de regle fur cet article comme fur les précédens; mais dans une ferme on peut avoir, dit l'Auteur du Guide du Fermier, autant de cochons que de vaches. Les rebuts de la laiterie, tels que le petit-lait, le lait écrêmé, les lavages, fuffipour les nourrir.

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On fuppofe qu'une truie eft formée & dans toute fa vigueur depuis l'âge d'un an jusqu'à celui de fix ans; qu'elle fait deux portées au moins par an, chacune de neuf, dix, douze petits; que dix truies peuvent être fécondées par un verrat, lequel eft propre à la génération depuis l'âge d'un an jufqu'à celui de cinq. Mais nous établiffons que les cochons feront engraiffés à l'âge d'un an, & les truies & les verrats à l'âge de deux. Voici le troupeau:

2 truies.

1 verrat.

2 éleves femelles.

15 éleves cochons.

éleve verrat.

21 bêtes à charge. C'est tout le troupeau, dont voici le produit chaque année.

16 cochons mâles d'un an pour le Boucher.

2 truies de deux ans pour le Boucher.

14 cochons de lait, femelles.

Les dix-huit cochons mâles ou femelles ci-deffus feront engraiffés pour faire ce qu'on appelle du porc, du lard ou du falé; mais on ne fera pas cet engrais avec des grains, comme il eft d'usage; ils coûteroient trop. Il faut treize à quatorze boiffeaux de farine d'orge, ou une vingtaine de boiffeaux de pois pour engraisser un cochon. Je fuppofe qu'à l'imitation des Anglois on les nourrira avec des pommes de terre, qu'il eft facile de fe procurer par-tout en abondance, pourvu que les gens de la campagne veuillent fe donner la peine de les cultiver. Je connois un pays, dit l'Auteur

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du Guide du Fermier, dont le fol eft affez pauvre pour ne pouvoir rapporter de grains. Les payfans cependant y font à leur aise; ils cultivent des pommes de terre elles leur fervent d'abord de nourriture; ils nourriffent avec le refte une quantité de cochons. Ils tuent une partie de ces animaux pour leur confommation, & vendent le furplus à leurs voisins. Le prix qu'ils en retirent leur fert à payer les impôts, & à fe procurer des vêtemens. Ils font bien habillés, bien nourris, & ne doivent rien au Collecteur.

Rien ne produit aufli abondamment que ce fruit. Croiriez-vous, 'dit l'Auteur, qu'un arpent, mesure de Paris, de terre fablonneuse, rapporte cinquante fetiers, même mefure, de pommes de terre? Cela eft cependant très-vrai. Quelle plante, quelle femence offre un pareil prodige dans fa production? Elles réuffiffent dans toutes fortes de terres, pourvu que le fol ne foit pas entiérement de pierrotages, & il ne leur faut que peu d'engrais. Les foins qu'elles exigent ne font pas non plus bien multipliés ni difficiles.

Ön lit dans la Gazette du Commerce, article de Londres, daté du 7 Septembre 1773, qu'un habitant d'Easingwold, dans l'Yorckshire, avoit recueilli cette année-là onze cents bushels de pormes de terre fur un champ qui n'avoit que deux acres un quart & fept perches d'étendue. Ramenant les mefures à celles de France, on trouve que l'arpent Royal en pourroit produire, fur ce pied, juf qu'à cent trente-fept fetiers & un quart. On peut donc croire qu'il fera très-avantageux de confacrer une petite portion de la fole des menus grains à la culture des pommes de terre, dont on se fervira pour engraiffer des porcs fans beaucoup de frais. Revenons à notre évaluation du produit des beftiaux.

Je fuppofe que chaque piece ait la valeur fuivante en bled :

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On aura les produits ci-deffous fur une ferme de 128 arpens.

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Le revenu des beftiaux feroit donc, fur ce pied, de la valeur de dix-fept cents quatre-vingt-quatorze boiffeaux de bled, qui font cent quarante-neuf fetiers & demi; enforte qu'il paroît qu'on pourroit égaler le produit des beftiaux à celui de la récolte du bled.

Nous avons trouvé que, payant le cinquieme de la récolte des grains pour les befoins de l'Etat & pour la dîme, il reftoit encore au Laboureur cent trente-deux fetiers de bled, fans y comprendre la femence ni les menus grains, lorsque l'arpent produit six setiers. Si l'on ajoute cette quantité au produit des beftiaux, on trouvera la valeur de deux cents quatre-vingt-deux fetiers de bled. J'ai fuppofé ailleurs que huit hommes fuffifoient pour la culture de 128 arpens. Je n'ai mis fur la ferme ni bergers, ni, &c., parce que les femmes & les enfans des aides-laboureurs peuvent en tenir lieu. J'ai attribué à chacun de ces aides dix-huit fetiers de bled pour tout profit annuel, ce qui fait cent quarante-quatre fetiers en tout pour les huit aides; refte par conféquent cent trente-huit fetiers pour le propriétaire ou le fermier, lefquels vaudroient deux mille fept cents foixante livres, lorsque le fetier de bled vaut vingt lifans compter les menus grains, qui peut-être vaudroient

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