Images de page
PDF
ePub

ment poursuivi que pendant les années précédentes, a conduit enfin les digues jusqu'à leur extrémité du côté de l'Ouest. Pendant les quatre années employées à leur construction en petites pierres, on n'a cessé d'avoir la sonde à la main pour observer les effets de la mer agitée sur les digues. L'observation a fait connaître que, pour rendre ces digues immuables, il fallait que la surface supérieure et le talus du côté du large, exposés à l'action de la lame, fussent recouverts en matériaux beaucoup plus gros que ceux employés jusqu'alors.

Au commencement de 1791, le gouvernement adopta le projet qui lui fut présenté de recouvrir la surface supérieure de la digue et le talus du côté du large, jusqu'à 3 à 4 mètres en contre bas de la basse mer, en gros blocs depuis un demi-mètre cube jusqu'à un mètre cube ( 15 à 30 pieds cubes ). Ce nouveau genre de travail, commencé en juillet 1791, fut assez avancé à la fin de la campagne pour montrer ce qu'on pouvait en espérer. Une tempête violente survenue les 17, 18, 19 et 20 février 1792, n'a produit sur la partie de digue ainsi couronnée que le renversement de quelques blocs mal assis.

1

Le corps législatif, vers la fin de mai de la même année prit connaissance de ce qui avait été fait jusqu'alors, et de ce qu'il convenait de faire pour porter à sa perfection cet important travail. La loi du 1er août mit à la disposition du ministre de la marine des fonds pour le continuer et ordonna qu'une

Commission d'ingénieurs et de marins examinerait ces travaux.

La première et la plus importante opération de cette Commission fut de constater, à la fin de 1792, la situation de la partie de digue couronnée en gros blocs et de la comparer, le printemps suivant, à celle qu'elle s'est trouvée avoir à la suite de plusieurs coups de vent assez violens. Le résultat satisfaisant de sa comparaison servit de base aux projets qu'elle proposa pour perfectionner la digue.

D'après le système adopté par la Commission, on travailla, pendant la campagne de 1793, à élever une vigie à l'extrémité Ouest de la digue, et à enrocher la caisse qui sert également de vigie à l'extrémité Est.

La vigie de l'Ouest, isolée et en prise aux tempêtes de toutes directions, n'a pas eu le même succès que celle de l'Est, qui a pour point d'appui sa caisse tronquée. Le peu d'activité qu'on mit à l'élever la laissa en prise aux coups de vent de l'hiver, qui, l'attaquant en dessus, en dessous et de tous côtés, la firent écroulér. On ne peut cependant raisonnablement en tirer aucune conséquence contraire au système de couronnement en gros blocs, puisque la partie de digue, couronnée en 1792, est encore dans la situation qu'elle a prise par le coup de vent de février de cette même année.

Pendant l'an IV (1796) jusqu'à l'an XI (1803), l'administration de la marine s'est bornée à réparer le cône de l'Est et à augmenter l'enrochement en gros blocs au pied de cette caisse. 8*

[ocr errors]

La digue, telle qu'elle est maintenant, a 3767 mètres de longueur, mesurée depuis le centre du cône qui fait l'extrémité Est de la digue et le centre de celui qui est à l'extrémité Ouest, qui a été recépé.

Elle forme dans son plan un angle obtus, saillant vers le Nord d'environ 169 degrés; ce qui la divise en deux branches, dont la Ire, du côté de l'Ouest, a 2231 mètres de longueur, et la 2o, du côté de l'Est, 1535 mètres.

Chaque année, on continua à y travailler avec plus ou moins d'activité; mais après le coup de vent de février 1809, qui culbuta tous les ouvrages, balaya en quelque sorte la superficie de la digue, détruisit les parapets, et renversa la superbe plate-forme de la batterie Napoléon formée au centre, les blocs répandus ayant donné plus de largeur à la superficie de la digue, on augmenta sa base sur le côté large, et l'on changea son système de défense. La baiterie a été remplacée par une grosse tour oblongue, dont le grand axe est de 67 mètres 184 millimètres, le petit axe de 36 mètres 368 millimètres, et la hauteur de 19 mètres,, fondée sur le côté de la digue qui regarde la ville, et bâtie assez fortement pour résister à tous les efforts de la mer.

Les pierres de couronnement de la digue sont d'un volume et d'un poids considérables. Quelques-unes pèsent de 5 à 6oo myriagram. (10 à 12000 livres ). Les extrémités de cette digue seront également fortifiées. C'est alors que la rade elle même ne sera plus qu'un vaste

bassin situé dans l'emplacement le plus favorable aux expéditions et au refuge de nos escadres.

La montagne du Roule fournit les blocs qui forment la digue, et, pour en faciliter le transport, on a fait un chemin de fer qui, du pied de la montagne, en décrivant une jolie courbe et traversant une partie du Cauchin, va se rendre à l'un des angles du bassin. Uu seul cheval traîne plusieurs charriots chargés d'énormes blocs, qui, arrivés à destination, sont enlevés, au moyen d'une machine des plus ingénieuses, supportée par une solide charpente, et placés comme avec la main dans les bateaux chargés de les transporter en pleine mer.

PORT MILITAIRE OU GRAND PORT DE CHERBOURG.

Les malheurs de la Hougue firent sentir à Louis XIV le besoin de fortifier ses frontières maritimes. Le maréchal de Vauban fut chargé, par ses ordres, de visiter la côte de Normandie, de mettre à l'abri d'entreprises hostiles tous les lieux favorables au débarquement, et de donner ses projets sur les travaux qu'il jugerait nécessaires.

[ocr errors]

Après avoir ordonné à la Hougue des batteries, une tour qui subsiste encore et un hôpital d'une vaste étendue en forme de lazaret, ce grand homme, dont le génie embrassait tous les intérêts publics, par

courut les côtes de Cherbourg, dont la rade offrait des moyens de défense, d'attaque et de protection, capables d'influer sur les guerres maritimes et nos rapports commerciaux avec les puissances du Nord.

Le maréchal, qui appelait Cherbourg l'auberge de la Manche, désigna et fit acheter, pour y faire creuser des bassins, une prairie qui porta long-temps le nom du pré du Roi. Ce terrein se trouvait entre le parc au bois, les terres qui avoisinent l'hôpital de la marine et celles qui bordent l'entrée du fort du Hommet. Âu levant, il n'était séparé de ia mer, qui tendait sans cesse à l'inonder, que par une chaussée, entre le roc Nazer et le fortin du Galet. En face du fort Hommet, l'entrée du chenal était en partie creusée et naturellement indiquée. Immédiatement au pied du même roc commence la rade proprement dite, et les criques qui l'environnent semblent, avec les terreins voisins destinés aux ateliers, aux cales et aux formes de construction.

Ce qui avait été conçu par le génie de Vauban, sous le règne de Louis-le-Grand, reçut un commencement d'exécution et un grand accroissement sous l'empire.

Les plans adoptés et joints à l'arrêté du gouvernement, en date du 25 germinal an XI, sont en majeure partie le résultat perfectionné du travail de la Commission établie par la loi du 1er août 1792. Ce travail a-t-on dit avec justice, peut être considéré comme un traité complet de toutes les parties. de cette grande entreprise.

« PrécédentContinuer »