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Aussitôt que, d'après les différentes adjudications relatives aux ouvrages déterminés, des appels furent faits, par les préfets de plusieurs départemens, aux ouvriers de tous les genres, une affluence considérable de travailleurs se réunit à Cherbourg. Des militaires de la garnison de Cherbourg s'honorèrent, à l'exemple des soldats romains, de contribuer à la prospérité de leur patrie, en avançant les travaux d'un port déjà célèbre. Des ateliers nombreux s'installèrent, et l'on vit bientôt des approvisionnemens se faire, les bassins et les fondations se creuser les lignes se tracer, tous les bâtimens s'élever. L'art et la patience ont enfin triomphé de difficultés qui paraissaient insurmontables, et un vaste port s'est établi à l'abri de toutes les insultes de la mer et des attaques de l'ennemi. Les pierres avec lesquelles ses murs sont construits sont de beau granit. Par un travail immense, on a creusé 60 pieds dans le roc vif, un bassin extrêmement vaste qui reçut, le 27 août 1813, les eaux de la mer au moyen de la destruction d'un batardeau qui les avait retenues pendant 6 ans.

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En creusant le roc pour construire ce nouveau port, on trouva plusieurs lames d'eau douce, qui, rassemblées avec soin, ont produit une fontaine inépuisable. Cette fontaine, placée dans un angle au fond de la cale, donne cinq pintes d'eau par minute; c'est un trésor inappréciable pour les marins.

Ce grand bassin qui sert d'avant-port, placé, ainsi que le bassin des cales, à l'Est et celni de Grémont à l'Ouest, juste entre

deux forts déjà construits, est séparé de la rade par une jetée de granit, dont l'une des extrémités s'appuie vers le Nord contre le fort du Hommet, l'autre se termine au Sud contre le roc Nazer, qui n'est séparé du fort Hommet que par un chenal naturellement creusé dans le roc.

C'est ce chenal qui forme l'entrée de l'avantport d'où les vaisseaux peuvent s'introduire, soit directement dans l'arrière-bassin qui sera le port principal, soit dans le bassin duNord, au moyen d'une écluse, au-dessus de laquelle on a établi un superbe pont-tournant servant à la communication des quais entre

eux.

Ainsi, des trois bassins qui doivent compléter ce port, les deux premiers sont disposés vers la rade, sur une même ligne; et divisés entr'eux par un terre-plein portant écluse de communication. Le troisième, aussi grand que les deux autres ensemble, et derrière lesquels il est placé, contiendra la moitié du parallelogramme qu'ils formeront ensemble. Leur surface entière sera d'environ 24 ares ou 600 toises carrées. Toutes les parties de ce port royal sont bordées de quais magnifiques, distinguées par des terrespleins réguliers, alimentées par une route. centrale et seront ornées de tous les édifices relatifs au genre de service auquel elles seront destinées.

Des deux côtés du chenal, dont la partie méridionale présente l'ouverture, sont deux môles ou musoirs qui en défendent l'entrée. Là s'élèveront deux phares circulaires qui

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formeront péristile à leur base. Ces deux phares éclaireront non seulement, pendant la nuit, la communication du port avec la rade, mais ils serviront encore aux signaux des mouvemens. Les matelots destinés à les exécuter, seront stationnés dans les galeries des deux péristiles; ils y trouveront un asile perpétuel et les moyens de pourvoir à leur subsistance.

Sur le môle même, vers le fort du Hommet, doit s'établir une corderie couverte, d'environ 200 mètres de longueur, avec une largeur convenable. Au rez-de-chaussée de ce bâtiment sera la corderie proprement dite; son premier étage doit servir au filage et le second sera le magasin aux chanvres. Cet ouvrage d'un grand extérieur, aura, comme la plupart des autres, des masses correspondantes et analogues.

Autour des différens bassins et sur leurs terres-pleins intermédiaires, toutes les parties de la construction et du radoub des vaisseaux, la mâture, le gréement, la garniture, l'armement, l'administration, les mouvemens journaliers et l'inspection du service trouveront leurs magasins, leurs établissemens, leurs ateliers, leurs bureaux dans la position la plus commode et la plus rapprochée des objets auxquels ils se rapportent.

Du centre du port, où le magasin général sera placé, toutes les espèces d'approvisionnemens se verseront avec facilité dans les magasins particuliers, chaque vaisseau de l'Etat aura son dépôt, chaque matière son emplacement, l'arsénal, les casernes,

l'hôpital de la marine, la banque, le parc au bois, la boulangerie, les chantiers de constructions, y compris ceux des canots et des péniches, se trouveront à portée des autres établissemens.

Le chantier (dit du quartier Chantereine) est un grand établissement, situé non loin du grand port, qui sert de parc au bois de construction. On vient d'y terminer un grand hangard de 900 pieds de longueur sur 100 de largeur, supporté par un grand nombre de pilastres d'ordre Pæstum. Il sert à abriter pour plusieurs millions de bois de toute espèce. Le chantier renferme d'autres magasins d'une grande étendue et contient en superficie 987 ares 83 centiares.

La corderie seule, dont les rouets sont couverts, et qui est abondamment fournie de tous leurs ustensiles, occupe 245 brasses de longueur sur 11 de largeur pour le filage et le comitage. Près de là la salle d'espadage, vaste bâtiment en bois, où les cordiers préparent les chanvres et les lins avant de les livrer aux fileurs.

Les salaisons, qui sont toujours en activité pour une partie du service des grands ports de la marine royale, occupent un magasin d'environ 109 mètres de longueur sur une largeur proportionnée. Cet objet essentiel de subsistances se trouve à Cherbourg de la plus excellente qualité.

On voit encore dans ce vaste établissement qui, vers l'Est, n'est séparé de la mer que par une chaussée revêtue de granit, près de laquelle furent construites deux cales pour

des vaisseaux de ligne, des scieries couvertes, des forges, des fonderies, des magasins aux fers, aux planches, aux chanvres, aux fils, aux cables; des esparderies, des peigneries, et toutes les dispositions nécessaires pour agrandir ces objets jusqu'à volonté.

Les parties de l'administration qui ont quitté l'ancien arsénal pour occuper, dans le nouveau, à l'extrémité du chantier, de superbes bureaux construits à cet effet, sont : les ingénieurs constructeurs, les recettes et manutention de bois de construction, les forges et fonderies.

En face du chantier et avant d'arriver aux casernes de la marine, on trouve, sur la même ligne et en face le magasin des salaisons, la boulangerie de la marine.

Quatre fours d'environ 3 mètres de diamètre peuvent cuire, en 24 heures, 1122 myriagrammes (23000 livres de pain ). Le même bâtiment qui contient les forges renferme aussi les bureaux de distribution et autres objets de détail.

Les greniers servent au dépôt des biscuits. Indépendamment de ces greniers, on trouve à 4 mètres de distance, un magasin destiné à recevoir les approvisionnemens en farine, et où est la bluterie.

Sur la gauche de la route de Querqueville, en face le chantier Chantereine, est un corps de caserne, altenant à la boulangerie. It a été construit pour loger 6oo hommes de troupe de la marine, appelés à Cherbourg pendant la construction des caisses coniques. Sa longueur est de 146 mètres et sa largeur

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