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gnés sous les noms de monumens celtiques ou druidiques, ou de pierres druidiques, parce qu'ils sont surtout répandus dans les pays habités autrefois par les Celtes, et qu'ils ont été pour les Druides un objet de culte..

L'histoire atteste qu'il en a été érigé dès la plus haute antiquité. Dans l'histoire ou cosmogonie des Phéniciens, attribuée par Porphire à Sanchoniathon de Béryle, et dont Eusèbe nous a conservé de grands fragmens, il est dit qu'un certain géant nommé Ousous, érigea deux colonnes, l'une au feu et l'autre au vent, auxquelles il rendit ses adorations et offrit le sang des animaux qu'il prenait à la chasse. La postérité honora comine des dieux ce géant et ses semblables, et leur érigea des balons ou des colonnes. Les idoles du Bacchus de Thèbes et du dieu Elegabal ou le soleil, étaient de simples colonnes de pierre. Les dieux des anciens Arabes étaient des pierres brutes, et chez eux la lune était représentée par une pyramide carrée. La bible parle en plusieurs endroits (1) de ces monumens, qu'on est tout étonné de retrouver et dans des temps si éloignés de nous et dans des pays si distans les uns des autres. Plusieurs qui subsistent sans doute depuis trois à quatre

(1) Voyez en particulier, Genèse, ch. 28, w. 18 et 22; ch. 31, w. 13, 45, 46, 47 el 52; ch. 35, w. 14 et 20. Exode, ch. 30, w. 24 et 25. Lévitique, ch. 26, v. 1er. Nombres, ch. 33, v.152. Deuteronome, ch. 27, w. 2, 3 4,5 et 6. Josué, ch. 4; ch. 8, w. 29, 30, 31 et 32; ch. 21, w. 10, 16, 19, 25, 27 et 34. II. Rois, ch. 18, W. 17 et 18. Proverbes, ch. 26, v. 8, etc.

mille ans, et qui ont vu périr jusqu'au nom des peuples qui les élevèrent, existeront peutêtre encore dans des milliers d'années, tant leur simplicité les rend durables. On pourrait leur appliquer ce beau vers du Poème des Jardins, qu'on a gravé plusieurs fois sur les pyramides de l'Egypte:

« Leur masse indestructible a fatigué le temps. »

Il est vraisemblable que les monumens rus tiques, qui paraissent avoir été érigés par des peuples presque sauvages, sont des restes du culte rendu à la nature. Ce culte, qu'on retrouve toujours au berceau des sociétés, est le plus simple et le plus grossier de tous; mais il a été peut-être le plus universel. En effet, l'histoire et les voyageurs nous peignent l'homme de la nature regardant l'univers comme vivant et animé et même doué d'intelligence et de volonté, et rendant un culte et des hommages au soleil, à la lune et aux autres astres; aux montagnes et aux rochers; aux forêts et aux arbres; aux fontaines, aux rivières, aux lacs et à la mer; à certains animaux, à certaines pierres, au feu, à l'air et aux principaux météores, tels qu'au tonnerre, aux vents, à l'arc-en-ciel, aux nuages,

etc.

L'homme n'a sans doute rendu un culte à ces diverses parties de l'univers que parce qu'il croyait qu'un principe mystérieux mais intelligent y résidait, pouvait l'entendre et lui être favorable.

L'histoire témoigne que les Gaulois, les Germains, les peuples de la Grande-Bretagne

et tous ceux du nord de l'Europe, adoraient la nature et presque toutes ses parties. Les Gaulois, en particulier, rendaient un culte au soleil, aux astres, au feu, aux vents, aux fontaines, aux rivières, aux lacs et aux marais; aux forêts et aux arbres, surtout au chêne; aux montagnes, aux rochers et aux pierres qu'ils croyaient capables de rendre des oracles; enfin à presque toutes les parties de la nature et à ses principaux phénomènes, croyant voir la divinité dans toutes les parties de l'univers et dans toutes ses opérations. A ces cultes variés ils joignaient, dit Péloutier, le culte des esprits ou génies, qui étaient censés résider dans chaque partie de la nature et en avoir la conduite.

De ces fétiches naturels les hommes firent bientôt des extraits ou des images qu'ils érigèrent en monumens, et les fétiches artificiels furent sacrés, comme les objets de la nature dont on les avait séparés, ou qu'ils représentaient ainsi des rochers et des pierres extraits des rochers et des montagnes adorées, et érigés sur les montagnes ou aux environs, furent sans doute les premiers monumens religieux des peuples anciens.

:

Plusieurs motifs purent porter les hommes à ériger de ces pierres, qui, par la suite, ne furent probablement pas toujours extraites des montagnes et des rochers sacrés : ils purent en élever soit sur les sépultures (1), soit

(1) Mais le plus souvent ce fut un tertre conique de terre ou de pierres entassées: un tumuli,

sur les frontières, pour servir de bornes entre les peuples voisins, soit en mémoire de quelque grand évènement, ou d'un traité conclu entre des peuples ou des citoyens, soit comme monumens civils, autour desquels ils s'assemblaient pour délibérer des affaires publiques, pour rendre la justice, etc. Mais quels que fussent les motifs de leur érection, ces diverses pierres paraissent avoir toujours été adorées ou au moins consacrées à un culte; ce qui n'empêchait pas qu'elles ne fussent souvent destinées à d'autres usages.

L'origine que nous donnons à ces monumens est naturelle et conforme à la marche de l'esprit humain et aux traditions historiques.

Les pierres druidiques pourraient aussi avoir été quelquefois érigées et dédiées comme de simples autels pour un culte différent de celui des montagnes, des rochers et des pierres peut-être qu'alors elles n'étaient pas un objet immédiat du culte qui se rapportait sans doute aux feliches naturels pour lesquels elles avaient été élevées. Ainsi il est possible que les monumens druidiques qu'on voit érigés en face de la mer, des rivières, des fontaines, etc., aient été quelquefois consacrés à ces divers objets de la nature; d'autres ont pu être dédiés sur le sommet des montagnes au soleil et aux astres, au tonnerre, aux vents, etc.; d'autres encore aux dieux et aux génies révérés par les peuples. Mais on ne peut sur ces choses émettre que des conjectures.

M. Dulaure dit que ces divers monumens furent d'abord destinés à servir de bornes

sur les frontières où il croit que les anciens peuples placèrent leurs premiers monumens religieux, funéraires, politiques et civils. Quoique les preuves qu'il donne de ces assertions soientassez fortes, néanmoins il paraîtra toujours difficile d'admettre que les pierres érigées, les tumuli, etc., aient toujours été placées sur des frontières. Pour ne citer que les pierres druidiques du Cotentin, quelle apparence que les monumens disséminés comme au hazard dans cette petite presqu'île, aient élé élevés sur des frontières !

M. Dulaure a cru retrouver dans les pierres brutes l'origine des divinités Mercure et Vénus, qu'il prétend n'avoir d'abord été que de simples bornes, des pierres brutes érigées.

Le même auteur pense aussi que ces monumens furent l'origine des autels, des cippes, des obélisques, des pyramides et des temples, et cela semble fort naturel.

Les pierres druidiques se trouvent fréquemment sur le sommet des montagnes et dans des sites pittoresques et extraordinaires, qui étaient propres à frapper l'imagination des peuples. Du temps des Druides, elles étaient cachées dans de sombres et vieilles forêts qu'on regardait comme sacrées et dont on n'approchait qu'en tremblant. C'était dans ces profondes et redoutables solitudes où les diverses classes de Druides demeuraient et s'occupaient des sacrifices, des choses de la religion, de l'instruction de la jeunesse, de la médecine, des affaires de l'état et de celles des particuliers, et même, dit-on, de la contemplation de la nature et du ciel, et

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