Images de page
PDF
ePub

VINGT ET UNIÈME LEÇON

LA CONFÉRENCE DE VENISE DE 1897.

La Conférence sanitaire internationale ouverte à Venise le 16 février 1897 s'est séparée le 19 mars après avoir arrêté les mesures nécessaires à la protection de l'Europe contre la peste.

Pour apprécier exactement les résultats qu'elle a obtenus, il fallait jeter un coup d'œil sur les travaux de ses devancières et rétrograder jusqu'à la première Conférence sanitaire internationale convoquée à Paris sur la proposition du gouvernement français en 1851. C'est ce que nous avons fait dans la leçon précédente.

La France en prenant cette initiative restait fidèle à son rôle humanitaire, civilisateur et désintéressé. Elle appelait l'Europe à concourir à une véritable croisade contre les épidémies; croisade favorable avant tout aux peuples orientaux, puisque c'est en Orient que naissent la plupart des épidémies.

La Conférence de Venise de 1897 a confirmé les résolutions adoptées à Venise en 1892, à Dresde en 1893 et à Paris en 1894.

Quelques questions préliminaires ont servi de point. de départ. Nos sujets musulmans provenant généralement de l'Algérie et de la Tunisie, pays indemnes, n'apportaient aucun élément dangereux au pèlerinage. Nous

.

leur avions néanmoins défendu d'y prendre part (1). Toute autre était la situation des sujets musulmans de l'Inde, qui, venant pour la plupart de Bombay, créaient un péril redoutable. Nous réclamions de l'Angleterre à leur égard une interdiction formelle. Le gouvernement anglo-indien essaya des concessions, comme de ne plus les embarquer à Bombay mais à Calcutta, puis, cédant à la demande unanime de la Conférence, défendit le pèlerinage à tous ses sujets indiens. L'acquiescement de l'Angleterre à une mesure prohibitive de cette importance constitue pour l'Europe une sauvegarde précieuse et restera, nous l'espérons, au cas où les circonstances l'exigeraient de nouveau, un précédent qui ne sera pas oublié.

La délégation britannique avait communiqué préalablement à la Conférence la nouvelle de la ratification de la Convention de Paris que la France demandait depuis longtemps.

La Turquie ratifia comme l'Angleterre la convention de Paris, sauf quelques réserves.

La Conférence adopta le plan que je lui proposais de se diviser en deux commissions pour l'ordre des travaux : 1° une commission technique composée des médecins de la Conférence; 2° une seconde commission, composée des diplomates, pour l'étude des voies et moyens.

La commission technique s'occupa de deux ordres de questions, les unes scientifiques, les autres prophylactiques.

Le gouvernement austro-hongrois avait proposé le programme suivant :

(1) Les cas de peste qui viennent de se montrer à Djeddah montrent que nous avons été sagement inspirés.

Projet d'un programme pour la Conférence sanitaire internationale de Venise.

I. PARTIE GÉNÉRALE.

Examen du caractère particulier de la peste sur la base des expériences et études les plus récentes.

a) Par rapport aux lieux d'origine.

b) Par rapport aux voies de propagation de terre et de mer. c) Par rapport à la période d'incubation.

Application des résultats de cet examen aux titres I à IV et VII de la convention de Dresde.

II. MESURES A PRENDRE POUR PRÉVENIR L'INVASION

DE LA MALADIE, A SAVOIR :

1° Mesures à prendre aux pays d'origine.

a) Dans le trafic par terre et sur mer dans les ports eux-mêmes. b) Par rapport aux pèlerinages par terre et par mer à La Mecque et dans la Mésopotamie.

c) Par rapport au service d'information à établir dans ces pays (création de postes sanitaires fixes sur les points les plus exposés avec des fonctionnaires sanitaires européens, - réforme du Conseil sanitaire international à Téhéran).

2o Mesures à prendre pour le trafic maritime avec les ports infectés.

a) Au départ, à savoir:

a. Des navires destinés au transport des voyageurs.

B. Des navires destinés au transport des marchandises. 7. Des navires à pèlerins.

6. D'autres navires.

b) Pendant la traversée :

a. Des navires destinés au transport des voyageurs.

B. Des navires destinés au transport des marchandises.

[ocr errors][merged small][merged small]

Examen de la question s'il y aurait lieu d'établir une revision sanitaire dans les échelles intermédiaires pour ces catégories de navires.

c) Au port d'arrivée :

a. Des navires destinés au transport des voyageurs.

B. Des navires destinés au transport des marchandises. y. Des navires à pèlerins.

6. D'autres navires.

Examen de l'opportunité qu'il y aurait de modifier les dispositions du titre VIII de la convention de Dresde et d'apporter certains changements aux disposition de la convention de Venise sur le transit en quarantaine.

Nécessité d'assurer aux résolutions de la dernière Conférence sanitaire internationale de Paris l'assentiment et la ratification de toutes les puissances.

III. MESURES A PRENDRE DANS LE CAS DE L'APPARITION

DE LA PESTE EN EUROPE.

Application ou modification éventuelle des dispositions de la Conférence de Dresde.

Je proposais à la Conférence de modifier le programme de la façon suivante :

PREMIÈRE PARTIE: Questions scientifiques.
Origine et genèse de la peste.

Sa transmissibilité, et par quels modes.
Durée de l'incubation.

Procédés de désinfection.

La Conférence s'occuperait ensuite de la deuxième partie ayant trait aux questions de prophylaxie.

A. Prophylaxie dans l'Inde.

Mesures à prescrire pour les embarquements. B. I. Prophylaxie hors de l'Inde.

Mesures à prescrire sur :

1° La voie de terre.

2o La voie maritime.

a. Mer Rouge.

b. Golfe Persique.

II. Prophylaxie en Europe.

Mesures à prendre dans les ports d'Europe.

M. Van Ermengem chargé du rapport sur les questions scientifiques s'exprima ainsi :

<< Il a paru nécessaire de fixer autant que possible en un ensemble doctrinal les notions principales qui peuvent être considérées comme certaines dans l'état actuel de la science.

« Il est universellement admis que la peste est d'origine microbienne et due au bacille isolé à Hong-Kong en 1894 par Kitasato et par Yersin. Mais la découverte du germe spécifique de la maladie, bien qu'elle jette les plus vives lumières sur son étiologie, soulève des problèmes nombreux qui attendent encore leur solution.

« L'existence d'une forme larvée de peste a attiré l'attention de la Conférence sur les services que pourrait rendre la recherche bactériologique. Il n'est point douteux qu'elle puisse suppléer au diagnostic clinique et lui fournir un élément décisif. Malheureusement, jusqu'à ce jour, les incertitudes de l'examen microscopique des produits suspects, la nécessité de recourir à des cultures et à des inoculations limitent son application dans la pratique.

<«< Enfin, la Conférence a abordé l'étude des modifications que les progrès de la science indiquent d'apporter aux procédés de désinfection usités jusqu'ici; les instructions contre le choléra admises par la première Conférence de Venise ont été acceptées comme base de la discussion.

« Il a paru que ces instructions pouvaient être mises aisément au courant moyennant quelques modifications. >> Pour atteindre le but que se proposaient les promoteurs de la Conférence, il a été nécessaire que chacun fit des concessions à l'intérêt commun.

Aucun des États qui ont pris part à cette réunion n'a pu avoir la prétention de voir affirmer dans la Convention toutes les opinions qu'il eût désiré faire triompher.

« PrécédentContinuer »