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vous voyez à votre gauche le prince des ténèbres sur un trône fort élevé et environné de plusieurs démons, et qu'autour de sa troupe infernale vous découvrez une multitude innombrable de pécheurs et de pécheresses qui, dominés par l'esprit du monde, lui rendent leurs hommages, les uns par un péché, les autres par un autre. Examinez attentivement tous les infortunés courtisans de cet abominable roi. Considérez les uns transportés par l'esprit de colère, de haine et de vengeance; les autres amollis par l'esprit de paresse, qui ne les occupe que de frivoles vanités; ceux-là enivrés de l'esprit d'intempérance, qui en fait des fous et des brutes; ceux-ci enflés de l'esprit d'orgueil, qui en fait des hommes violents et insupportables; quelques-uns possédés par l'esprit d'envie, qui les dessèche et les rend chagrins et rêveurs; plusieurs corrompus jusqu'à la moelle des os par l'esprit de volupté, ou que l'esprit d'avarice inquiète et trouble par ses sollicitudes. Voyez-les tous sans repos et sans ordre ; regardez jusqu'à quel point ils se méprisent les uns les autres, combien ils se haïssent, de quelle manière ils se persécutent, se déchirent, se détruisent et s'entre-tuent. Voilà donc cette république du monde tyrannisée par ce roi maudit; qu'elle est malheureuse et digne de compassion!

20 Considérez à votre droite Jésus-Christ crucifié, qui, avec une tendresse inexprimable, pleine de compassion et d'amour, présente à Dieu son Père ses prières et son sang pour obtenir la liberté de ces malheureux esclaves, et qui les invite à rompre leurs liens pour venir à lui.

Mais arrêtez-vous principalement à regarder cette nombreuse troupe d'hommes pieux et de femmes dévotes qui sont autour de lui avec les Anges: contemplez la beauté du royaume de la dévotion: admirez tant de personnes de l'un et de l'autre sexes dont les âmes sont pures et blanches comme les lis, tant d'autres à qui la mort d'un mari ou d'une femme a rendu la liberté de leurs cœurs, et qui les

consacrent à Dieu par la mortification, par la charité et par l'humilité ; tant d'autres qui élèvent leurs familles dans le culte du vrai Dieu, en accordant la possession de la fortune avec le détachement du cœur, les soins de la vie avec ceux de l'âme, l'amour qu'on s'est promis réciproquement avec l'amour de Dieu, et le respect qu'on se doit avec une douce familiarité. Considérez à loisir, dans cette heureuse société des serviteurs et des servantes de Dieu, le bonheur de leur état, cette sainte tranquillité d'âme, cette suavité d'esprit, cette égalité d'humeur : ils s'aiment d'un amour pur et saint; ils jouissent d'une joie inaltérable, mais également charitable et réglée. Ceux mêmes qui ont des afflictions ne s'en inquiètent point ou très peu, et ne perdent point la paix de leur cœur. Aussi tous ont les yeux attachés sur JésusChrist, qu'ils voudraient avoir dans leur cœur, et qui porte lui-même ses yeux, pour ainsi dire, et son cœur jusqu'au fond de leur âme, pour les éclairer, les fortifier et les consoler.

30 Eh bien, Philothée, il y a longtemps que, par les bonnes résolutions que la grâce vous a inspirées, vous avez abandonné Satan avec sa malheureuse cour; mais vous n'avez pas eu encore le courage d'aller vous jeter aux pieds de Jésus, pour vous engager à son service dans la société de ses plus fidèles serviteurs vous avez hésité entre les deux partis; il faut aujourd'hui vous déterminer tout à fait.

40 La sainte Vierge, avec saint Joseph, saint Louis, sainte Monique, et cent mille autres qui ont formé au milieu du monde le royaume de JésusChrist, vous invitent à les suivre. Ecoutez principalement Jésus, qui vous a appelée par votre propre nom, et qui vous a dit : Venez, ma chère âme, venez, et je vous couronnerai de gloire.

ÉLECTION

1o O monde trompeur, je t'abhorre, toi et tes sectateurs ! jamais on ne me reverra sous tes lois ; c'est pour toujours que je renonce à tes folies, et que je

me délivre de tes vanités. Et toi, Satan, esprit infernal, abominable roi d'orgueil et de malheur, je te renonce avec toutes tes vaines pompes; je déteste à jamais tes œuvres.

2o C'est vers vous, doux et aimable Jésus, Roi de la félicité et de la gloire immortelle, que je me tourne aujourd'hui je me jette à vos pieds, je les embrasse de toute mon âme, je vous adore de tout mon cœur, je vous choisis pour mon roi, et je me soumets à l'obéissance de vos saintes lois. Je vous fais de tout ce que je suis un hommage universel et irrévocable; je l'espère, avec votre grâce.

3o O sainte Vierge, permettez que je vous choisisse aujourd'hui pour me conduire : je me mets sous votre protection, en vous promettant un respect singulier et une spéciale dévotion.

O mon saint Ange, présentez-moi aux saints et aux saintes; ne m'abandonnez pas que vous ne m'ayez fait entrer dans leur bienheureuse société. C'est là qu'ayant renouvelé et confirmé chaque jour le choix que je fais, je dirai éternellement à leur exemple: Vive Jésus! vive Jésus !

CHAPITRE XIX

Comment il faut faire la Confession générale.

Voilà, Philothée, les méditations les plus nécessaires à notre but: quand vous les aurez faites, allez avec courage et humilité faire votre confession générale; mais, je vous en prie, ne vous laissez troubler par aucune vaine frayeur. L'huile de scorpion est le meilleur remède contre le venin du scorpion même ainsi la confession du péché est le souverain remède contre le péché même. Oui, la pénitence a tant de charme et une si suave odeur, qu'elle efface toute la laideur du péché, et en dissipe toute l'in

fection. Simou le lépreux disait que Madeleine était une pécheresse ; mais Notre-Seigneur disait que non, et ne parlait plus que des parfums qu'elle avait répandus, et de la grandeur de sa charité. Si nous sommes bien humbles, Philothée, nos péchés nous déplairont infiniment, parce que Dieu en a été offensé; mais la confession de nos péchés nous sera douce et consolante, parce que Dieu en est honoré. C'est une sorte de soulagement pour un malade de découvrir au médecin les douleurs qu'il éprouve. Quand vous serez aux pieds de votre père spirituel, imaginez-vous être sur le Calvaire, aux pieds de Jésus crucifié, dont le sang précieux coule sur votre âme pour vous laver de vos iniquités; car, bien que ce ne soit pas matériellement le sang du Sauveur qui arrose les pénitents, c'est le mérite de son sang répandu sur la croix qui les sanctifie dans la confession. Ouvrez donc entièremeut votre cœur dans la confession, pour le décharger de vos péchés, et vous le remplirez en même temps de bénédictions, par les mérites de la passion de Jésus-Christ.

Accusez-vous avec beaucoup de simplicité et de sincérité, et, une bonne fois en votre vie, satisfaites si bien votre conscience sur cet article, qu'il ne vous en reste plus d'inquiétude. Puis écoutez avec docilité les avis salutaires du ministre de Dieu et la pénitence qu'il vous imposera. Oui, c'est Dieu que vous écouterez alors, puisqu'il dit à ses ministres : Celui qui vous écoute m'écoute moi-même. Relisez ensuite la protestation suivante, que vous aurez déjà lne et méditée avant la confession, et qui doit terminer cet exercice de la pénitence. Prononcez-la avec le plus d'attention et de componction qu'il vous sera possible.

CHAPITRE XX

Protestation de l'âme à Dieu pour s'établir dans une ferme résolution de le servir, et pour conclure les actes de pénitence.

Je soussignée, très indigne créature, fais la protestation suivante en présence du Dieu éternel et de toute la cour céleste.

Après avoir considéré l'immense bonté de Dieu qui m'a créée, conservée, soutenue, délivrée de tant de dangers et comblée de tant de bienfaits; sa miséricorde incompréhensible, qui m'a supportée dans mes péchés avec tant de douceur, qui m'a rappelée à elle tant de fois par ses aimables et fréquentes inspirations, qui a attendu ma conversion avec tant de patience jusqu'à cette N... année de ma vie, quelque opposition que j'y ai apportée par mon ingratitude, par mes infidélités, par le délai de ma pénitence et par le mépris de ses saintes grâces; après avoir considéré la profanation que j'ai faite si souvent de mon âme et du caractère sacré que j'ai reçu au baptême quand on me voua et consacra à mon Dieu par la promesse qu'on lui en fit alors pour moi; enfin, revenant à moi-même et prosternée de cœur et d'esprit devant le tribunal de la justice de Dieu, je me reconnais et me confesse coupable, entièrement convaincue du crime de lèse-majesté divine et de la mort de Jésus-Christ, qui n'a été attaché à la croix que parce que j'ai péché. Ainsi j'avoue que j'ai justement mérité d'être éternellement damnée.

Après avoir détesté mes péchés de tout mon cœur, je me tourne aujourd'hui vers le trône du Père des miséricordes, et je lui crie: Grâce, mon Dieu, grâce! Je vous la demande avec la rémission entière de mes péchés, au nom de Jésus-Christ votre Fils, qui est mort sur la croix pour mon salut. C'est en lui que

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