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De là on peut recueillir ces quatre axiomes in dubitables.

1. AXIOM E.

L'attribut eft mis dans le fujet per la propofition affirmative felon toute l'extenfion que le fujet a dans la propofition. C'eft-à-dire, que fi le fujet eft univerfel, l'attribut eft conçu dans toute l'extenfion du fujet; & fi le fujet eft particulier, l'attribut n'eft conçu que dans une partie de l'extenfion du fujet. Il y en a des exemples ci-deffus.

2. AXIOME.

L'attribut d'une propofition offirmative eft affirmé felon toute fa comprehenfion, c'est-à-dire, felon tous fes attributs. La preuve en eft cideffus.

3. AXIO ME.

L'attribut d'une propofition affirmative n'eft' point affirmé felon toute fon extenfion, fi elle est de foi-même plus grande que celle du fujet. La preuve en eft ci-deffus.

4. AXIOM E.

L'extenfion de l'attribut eft reserrée par celle du fujet, en forte qu'il ne fignifieplus que la partie de fon extenfion qui convient au fujet; comme quand on dit que les hommes font animaux le mot d'animal ne fignifie plus tous les animaux : mais feulement les animaux qui font

hommes.

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CHAPITRE XVIII.

De la converfion des propofitions affirmatives. N appelle converfion d'une propofition, lorfqu'on change le fujet en attribut, & l'attribut en fujet; fans que la propofition ceffe d'ê

tre vraie, fi elle l'étoit auparavant, ou plutôt en forte qu'il s'enfuive neceffairement de la converfion qu'elle eft vraie, fuppofé qu'elle le fût.

Or ce que nous venons de dire fera entendre facilement comment cette converfion fe doit faire. Car comme il eft impoffible qu'une chose foit jointe & unie à une autre, que cette autre ne foit jointe auffi à la premiere, & qu'il s'enfuit fort bien que fi A eft joint à B, B auffi eft joint à A, il eft clair qu'il eft impoffible que deux chofes foient conçues comme identifiées, qui eft la plus parfaite de toutes les unions, que cette union ne foit reciproque, c'eft-à-dire, que l'on ne puiffe faire une affirmation mutuelle des deux termes unis en la maniere qu'ils font unis. Ce qui s'appelle converfion.

Ainfi comme dans les propofitions particulieres affirmatives, par exemple, lorfqu'on dit: Quelque homme eft jufte, le fujet & l'attribut font tous deux particuliers, le fujet d'homme étant particulier par la marque de particularité que l'on y ajoûte, & l'attribut de jufte l'étant auffi, parceque fon étendue étant refferrée par celle du fujet, il ne fignifie que la feule justice qui eft en quelque homme il eft évident que fi quelque homme eft identifié avec quelque jufte, quelque jufte auffi eft identifié avec quelque homme; & qu'ainfi il n'y a qu'à changer fimplement l'attribut en fujet, en gardant la même particularité, pour convertir ces fortes de propofitions.

On ne peut pas dire la même chofe des propofitions univerfelles affirmatives, à caufe que dans ces propofitions il n'y a que le fujet qui foit univerfel, c'est-à-dire, qui soit pris felon toute fon étendue, & que l'attribut au-contraire eft limité & reftreint, & ainfi lorfqu'on le rendra fujet par la converfion, il lui faudra garder fa

même reftriction, & y ajoûter une marque qui le détermine, de peur que l'on ne le prenne generalement. Ainfi quand je dis que l'homme eft ani mal, j'unis l'idée d'homme avec celle d'animal, reftreinte & refferrée aux feuls hommes. Et ainfi quand je voudrois envisager cette union comme par une autre face, & commençant par l'animal, en affirmant enfuite l'homme, il faut conserver à ce terme la même reftriction, depeur que l'on ne s'y trompe, y ajoûter quelque note de déter

mination.

De forte que de ce que les propofitions affirmatives ne fe peuvent convertir qu'en particulieres affirmatives, on ne doit pas conclure qu'elles fe convertiffent moins proprement que les autres; mais comme elles font composées d'un sujet general & d'un attribut reftreint, il eft clair que lorfqu'on les convertit, en changeant l'attribut en. fujet, elles doivent avoir un fujet reftreint & refferré, c'eft-à-dire, particulier.

De là on doit tirer ces deux regles.

I. REGLE.

Les propofitions universe!les affirmatives se peuvent convertir en ajoûstant une marque de particularité à l'attribut devenu fujet.

2. REGLE.

Les propofitions particulieres affirmatives fe doi vent convertir fans aucune addition ni changement, c'est-à-dire, en retenant pour l'attribut devenu fujet, la marque de particularité qui étoit au premier fujet.

Mais il eft aifé de voir que ces deux regles fe peuvent reduire à une feule qui les comprendra toutes deux.

L'attribut étant reftreint par le sujet dans toutes les propofitions affirmatives,fi on le veut faire devenir fujet, il lui faut conferver sa restriction; &

par confequent lui donner une marque de particu larité, foit que le premier sujet fût universel, soit qu'il fût particulier.

Néanmoins il arrive affez fouvent que des propofitions univerfelles affirmatives se peuvent convertir en d'autres univerfelles. Mais c'eft feulement lorsque l'attribut n'a pas de foi-même plus d'étendue que le fujet, comme lorfqu'on affirme la difference ou le propre de l'efpece, ou la définition du défini. Car alors l'attribut n'étant pas reftreint, fe peut prendre dans la converfion auffi generalement que fe prenoit le fujet. Tout homme eft raifonnnable. Tout raisonnable eft homme.

Mais ces converfions n'étant veritables qu'en des rencontres particulieres, on ne les compte point pour de vraies converfions, qui doivent être certaines & infaillibles par la feule difpofition des termes.

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CHAPITRE XIX.

De la nature des propofitions négatives:

A nature d'une propofition négative ne fe peut exprimer plus clairement, qu'en difant que c'eft concevoir qu'une chofe n'est pas

une autre.

Mais afin qu'une chofe ne foit pas une autre, il n'eft pas neceffaire qu'elle n'ait rien de commun avec elle, & il fuffit qu'elle n'ait pas tout ce que l'autre a, comme il fuffit, afin qu'une bête ne foit pas homme, qu'elle n'ait pas tout ce qu'a l'homme, & il n'eft pas neceffaire qu'elle n'ait rien de ce qui eft dans l'homme. Et de là on peur tirer cet axiome.

5. AXIOME.

La propofition négative ne fepare pas du fujes toutes les parties contenues dans la comprehenfion de l'attribut: mais elle fepare feulement l'idée totale entiere composée de tous fes attributs unis. Si je dis que la matiere n'eft pas une substance qui penfe, je ne dis pas pour cela qu'elle n'eft pas fubftance, mais je dis qu'elle n'eft pas fubftance penfante, qui eft l'idée totale & entière que je nie

de la matiere.

Il en est tout au-contraire de l'extenfion de l'idée. Car la propofition negative fepare du fujet l'idée de l'attribut felon toute fon extenfion. Et la raifon en eft claire. Car être fujet d'une idée, & être contenu dans fon extension, n'eft autre chofe qu'enfermer cette idée; & par confequent quand on dit qu'une idée n'en enferme pas une autre, qui eft ce qu'on appelle nier, on dit qu'elle n'eft pas un des fujets de cette idée.

Ainfi fi je dis que l'homme n'eft pas un être infenfible, je veux dire qu'il n'eft aucun des êtres infenfibles, & par confequent je les fépare tous de lui. Et de là on peut tirer cet autre axiome.

6. ΑΧΙΟ ΜΕ.

L'attribut d'une propofition negative eft toûjours pris generalement. Ce qui fe peut auffi exprimer ainfi plus diftinctement : Tous les fujets d'une idée qui eft niée d'une autre, font auffi niés de cette autre idée; c'est-à-dire, qu'une idée eft toûjours niée felon toute fon extenfion. Si le triangle eft nié des quarrés, tout ce qui eft triangle fera nié du quarré. On n'exprime ordinairement dans l'école cette regle en ces termes, qui ont le même fens: Si on nie le genre, on nie auffi l'espece. Car l'efpece eft un fujet de genre, l'homme eft un fujet d'animal, parcequ'il eft contenu dans fon extenfion.

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