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Non feulement les propofitions negatives feparent l'attribut du fujet felon toute l'extenfion de l'attribut; mais elles feparent auffi cet attribut du fujet felon toute l'extenfion qu'a le fujet dans la propofition, c'eft-à-dire, qu'elle l'en fepare univerfellement fi le fujet eft univerfel, & particulierement s'il eft particulier. Si je dis que nul viciex n'eft heureux, je fepare toutes les perfonnes heureufes de toutes les perfonnes vicieuses, & fi je dis que quelque docteur n'eft pas docte, je fepare docte de quelque docteur : & de là on doir

tirer cet axiome.

7. AXIOM E.

Tout attribut nié d'un fujet, eft nié de tout ce qui eft contenu dans l'étendue qu'a ce sujet dans la propofition.

CHAPITRE X X.

De la converfion des propofitions negatives." Omme il eft impoffible qu'on fepare deux chofes totalement, que cette feparation ne foit mutuelle & reciproque, il eft clair que fi je dis que nul homme n'eft pierre, je puis dire auffi que nulle pierre n'eft homme. Car fi quelque pierre étoit homme, cet homme feroit pierre, & par confequent il ne feroit pas vrai que nul homme ne fût pierre. Et ainfi.

3. REGLLE.

Les propofitions univerfelles negatives, fe peu vent convertir fimplement en changeant l'attribut en fujet, confervant à l'attribut devenu sujet, la même univerfalité qu'avoit le premier fujet.

Car l'attribut dans les propofitions negatives eft toujours pris univerfellement, parcequ'il eft

eft nié felon toute fon étendue, ainfi que nous l'a◄ vons montré ci-deffus.

Mais par cette même raison on ne peut faire de converfion des propofitions négatives particulieres, & on ne peut pas dire, par exemple, que quelque medecin n'eft pas homme, parceque l'on dit que quelque homme n'eft pas medecin. Cela vient, comme j'ai dit, de la nature même de la negation que nous venons d'expliquer, qui eft que dans les propofitions négatives l'attribut eft toûjours pris univerfellement & felon toute fon extenfion; de forte que lorsqu'un fujet particulier devient attribut la converfion dans une propar pofition négative particuliere, il devient univerfel, & change de nature contre les regles de la veritable converfion, qui ne doit point changer la reftriction ou l'étendue des termes. Ainfi dans cette propofition: Quelque homme n'eft pas medecin, le terme d'homme eft pris particulierement. Mais dans cette fauffe converfion, quelque medecin n'eft pas homme, le mot d'homme eft pris univerfellement.

Or il ne s'enfuit nullement de ce que la qualité de medecin eft feparée de quelque homme dans cette propofition: quelque homme n'eft pas medecin, & de ce que l'idée de triangle eft feparée de celle de quelque figure en cette autre propofition quelque figure n'eft pas triangle, il ne s'enfuit, dis-je, nullement qu'il y ait des medecins qui ne foient pas hommes, ni des triangles qui ne foient pas figures.

TROISIEME

TROISIEME PARTIE

DE LA

LOGIQUE

Du raisonnement.

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Ette partie que nous avons maintenant à traiter, qui comprend les regles du raifonnement, eft eftimée la plus importante de la Logique & c'eft prefque l'unique qu'on y traite avec quelque foin. Mais il y a sujet de douter fi elle eft auffi utile qu'on fe l'imagine. La plûpart des erreurs des hommes, comme nous avons déja dit ailleurs, viennent bien plus de ce qu'ils raifonnent fur de faux principes, que non pas de ce qu'ils raifonnent mal fuivant leurs principes. Il arrive rarement qu'on fe laiffe tromper par des raifonnemens qui ne foient faux que parceque la confequence en eft mal tirée : & ceux qui ne feroient pas capables d'en reconnoître la fauffeté par la feule lumiere de la raison, ne laifferoient pas ordinairement d'entendre les regles que l'on en donne, & encore moins de les appliquer. Néanmoins quand on ne confidereroit ces regles que comme des verités fpeculatives, ciles ferviroient toûjours à exercer l'efprit: Et de plus on ne peut nier qu'elles n'ayent quelque ufage er quelques rencontres, & à l'égard de quelques

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perfonnes, qui étant d'un naturel vif & penetrant, ne fe laiffent quelquefois tromper par de fauffes confequences, que faute d'attention, à quoi la reflexion qu'ils feroient fur ces regles feroit capable de remedier. Quoi qu'il en foit, voilà ce qu'on en dit ordinairement, & quelque chofe même de plus que ce qu'on en dit.

CHAPITR PREMIER.

De la nature du raisonnement, & des diverfes efpeces qu'il y en peut avoir.

A neceffité du raisonnement n'eft fondée que fur les bornes étroites de l'efprit humain, qui ayant à juger de la verité ou de la fausfeté d'une propofition, qu'alors on apppelle quefla contion, ne le peut pas toûjours faire par fideration des deux idées qui la compofent, dont celle qui en eft le fujet eft auffi appellée le petit terme, parceque le fujet eft d'ordinaire moins étendu que l'attribut, & celle qui en eft l'attribut eft auffi appellée le grand terme par une raifon contraire. Lors donc que la feule confideration de ces deux idées ne fuffit pas pour faire juger fi l'on doit affirmer ou nier l'une de l'autre, il a befoin de recourir à une troifiéme idée, ou incomplexe, ou complexe (fuivant ce qui a été dit des termes complexes) & cette troifiéme idée s'appelle moyen.

par

Or il ne ferviroit de rien, pour faire cette comparaifon de deux idées ensemble l'entremife de cette troifiéme idée, de la comparer feulement avec un des deux termes. Si je veux favoir, par exemple, fi l'ame eft fpirituelle, & que ne le penetrant pas d'abord, je choififfe pour m'en éclair

cir l'idée de pensée, il eft clair qu'il me fera inutile de comparer la pensée avec l'ame, fi je ne conçois dans la pensée aucun rapport avec l'attribut de fpirituel, par le moyen duquel je puiffe juger s'il convient ou ne convient pas à l'ame. Je dirai bien, par exemple, l'ame pense; mais je n'en pourrai pas conclure, donc elle eft fpirituelle, fi je ne conçois aucun rapport entre le terme de penfer, & celui de fpirituelle.

Il faut donc que ce terme moyen foit comparé, tant avec le fujet ou le petit terme, qu'avec l'attribut ou le grand terme, foit qu'il ne le foit que feparément avec chacun de ces termes, comme dans les fyllogifines qu'on appelle fimples pour cette raifon, foit qu'il le foit tout à la fois avec tous les deux, comme dans les argumens qu'on appelle conjonctifs.

Mais en l'une ou l'autre maniere, cette compa raifon demande deux propofitions.

Nous parlerons en particulier des argumens conjonctifs; mais pour les fimples cela eft clair, parceque le moyen étant une fois comparé avec l'attribut de la conclufion ( ce qui ne peut être qu'en affirmant ou niant) fait la propofition qu'on ap pelle majeure, à caufe que cet attribut de la conclufion s'appelle grand terme.

Et étant une autre fois comparé avec le fujet de la conclufion, fait celle qu'on appelle mineure, à cause que le fujet de la conclufion s'appelle pe

tit terme.

Et puis la conclufion, qui eft la propofition même qu'on avoit à prouver, & qui avant que d'être prouvé s'appelloit question.

Il eft bon de favoir que les deux premierespropofitions s'appellentauffi prémiffes (pra miss2) parcequ'elles font mifes au moins dans l'efprit avant la conclufion, qui en doit être une fuite ne

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