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ceffaire fi le fyllogifme eft bon, c'eft-à-dire, que fuppofé la verité des prémiffes, il faut neceffairement que la conclufion foit vraie.

Ileft vrai que l'on n'exprime pas toujours les deux prémiffes, parceque fouvent une feule fuffit pour en faire concevoir deux à l'efprit. Et quand on n'exprime ainfi que deux propofitions, cette forte de raifonnement s'appelle enthymême, qui eft un veritable fyllogifme dans l'efprit, parcequ'il fupplée la propofition qui n'eft pas exprimée; mais qui eft imparfait dans l'expreffion, & ne conclut qu'en vertu de cette propofition sousentendue.

J'ai dit qu'il y avoit au-moins trois propofitions dans un raisonnement; mais il y en pourroit avoir beaucoup davantage fans qu'il fût pour cela défectueux, pourvû qu'on garde toûjours les regles. Car fi après avoir confulté une troifiéme idée, pour favoir fi un attribut convient ou ne convient pas à un fujet, & l'avoir comparé avec un des termes, je ne fai encore s'il conpas vient ou ne convient pas au fecond terme ; j'en pourrois choifir un quatrième pour m'en éclairfuffit cir, & un cinquiéme fi celui-là ne jusqu'à ce que je vinffe à un terme qui liât l'attribut de la conclusion avec le sujet.

pas,

Si je doute, par exemple, fi les avares font miferables, je pourrai confiderer d'abord que les avares font pleins de defirs & de paffions: Si cela ne me donne pas lieu de conclure, donc ils font miferables, j'examinerai ce que c'est que d'être plein de defirs, & je trouverai dans cette idée celle de manquer de beaucoup de chofes que l'on defire, & la inifere dans cette privation de ce que l'on defire; ce qui me donnera lieu de former ce raisonnement: Les avares font pleins de defirs: Ceux qui font pleins de desirs manquent

de beaucoup de chofes, parcequ'il eft impoffible qu'ils fatifaffent tous leurs defirs: Ceux qui manquent de ce qu'ils defirent font miserables: Done les avares font miserables:

Ces fortes de raisonnemens compofés de pluheurs propofitions, dont la feconde dépend de la premiere, & ainfi du refte, s'appellent forites. Et ce font ceux qui font les plus ordinaires dans les Mathématiques. Mais parceque quand ils font longs, l'efprit a plus de peine à les fuivre, & que le nombre de trois propofitions eft affez proportionné avec l'étendue de notre esprit, on piis plus de foin d'examiner les regles des bons & des mauvais fyllogifmes; c'eft-à-dire, des argumens de trois propofitions; ce qu'il eft bon de fuivre, parceque les regles qu'on en donne se peuvent facilement appliquer à tous les raifonnemens compofés de plufieurs propofitions ; d'autant qu'ils fe peuvent tous reduire en fyllogifmes, s'ils font bons.

CHAPITRE IL

Divifion des Syllogismes, en fimples & en cone jonctifs, des fimples en incomplexes & en complexes.

L

Es fyllogifmes font our fimples ou conjonctifs. Les fimples font ceux où le moyen n'eft joint à la fois qu'à un des termes de la conclufion: Les conjonctifs font ceux où il eft joint à tous les deux. Ainfi cet argument eft fimple.

Tout bon Prince eft aimé de fes fujets:
Tout Roi pieux eft bon Prince:

Donc tout Roi pieux eft aimé de fes fujets. Parceque le moyen eft joint feparément avec Ro

pieux qui eft le fujet de la conclufion, & avec a mé de fes fujets qui en eft l'attribut. Mais celui-ci eft conjonctif par une raifon contraire :

Si un état électif eft sujet aux divifions, il n'eft pas de longue durée;

Or un état électif eft fujet aux divifions:

Donc un état électif n'eft pas de longue durée ; puifque état électif, qui eft le fujet, & de longue durée, qui eft l'attribut, entrent dans la majeure.

Comme ces deux fortes de fyllogifmes ont leurs regles feparées, nous en parlerons fepa

rément.

Les fyllogifmes fimples, qui font ceux où le moyen eft joint feparément avec chacun des termes de la conclufion, font encore de deux fortes.

Les uns, où chaque terme eft joint tout enrier avec le moyen, fçavoir avec l'attribut tout entier dans la majeure, & avec le fujet tout entier dans la mineure.

Les autres, où la conclufion étant complexe, c'eft-à-dire, compofée de termes complexes, on ne prend qu'une partie du fujet, ou une partie de Pattribut, pour joindre avec le moyen dans l'une des propofitions, & on prend tout le refte qui n'eft plus qu'un feul terme, pour joindre avec le moyen dans l'autre propofition. Comme dans cet argument:

La loi divine oblige d'honorer les Rois.
Louis XIV. eft Roi:

Donc la loi divine oblige d'honorer Louis XIV. Nous appellerons les premieres fortes d'argumens, démêlés & incomplexes, & les autres impliqués ou complexes; non que tous ceux où il y a des propofitions complexes foient de ce dernier genre, mais parcequ'il n'y en a point de ce dernier genre où il n'y ait des propofitions complexes.

Or quoique les regles qu'on donne ordinairement pour les fyllogifmes fimples puiffent avoir lieu dans tous les fyllogifmes complexes en les renverfant néanmoins, parceque la force de la conclufion ne dépend point de ce renversement-là, nous n'appliquerons ici les regles des fyllogifmes fimples qu'aux incomplexes, en refervant de traiter à part des fyllogifmes complexes.

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Regles generales des fyllogifmes fimples incomplexes.

Ce Chapitre & les fuivans jufqu'au douzième font de ceux dont il eft parlé dans le difcours, qui contiennent des chofes fubtiles & necellaires pour la fpeculation de la Logique, mais qui font de peu d'ufage.

& un

Ous avons déja vu dans les Chapitres précedens, qu'un fyllogifine fimple ne doit avoir que trois termes, les deux termes de la conclufion feul moyen, dont chacun étant repeté deux fois, il s'en fait trois propofitions: la majeure où entre le moyen, & l'attribut de la conclufion appellée le grand terme; la mineure où entre auffi le moyen & le fajet de la conclufion appellée le petit terme ; & la conclufion dont le petit terme eft le fujet, & le grand terme l'attribut.

Mais parcequ'on ne peut pas tirer toutes fortes de conclufions de toutes fortes de prémiffes, y a des regles generales qui font voir qu'une conclufion ne fauroit être bien tirée dans un fyllogifme où elles ne font pas obfervées. Et ces regles font fondées fur les axiomes qui ont été établis dans la feconde partie touchant la nature des propofitions affirmatives & negatives,

univerfelles, & particulieres, tels que font ceux ci, qu'on ne fera que propofer, ayant été prou vés ailleurs..

1. Les propofitions particulieres font enfermées dans les generales de même nature, & non les generales dans les particulieres, I. dans A. & O dans E. & non A. dans I. ni E. dans O..

2. Le fujet d'une propofition pris univerfellement ou particulierement, eft ce qui la rend univerfelle ou particuliere..

3.L'attribut d'une propofition affirmative n'ayant jamais plus d'étendue que le fujer, eft toujours confideré comme pris particulierement; parceque ce n'eft que par accident s'il eft quelquefois pris generalement..

4. L'attribut d'une propofition. négative eft toûjours pris generalement..

C'eft principalement fur ces axiomes que font fondées les regles generales des fyllogifmes qu'on ne fauroit violer fans tomber en de faux raisonne

mens..

I. REGLE.

Le moyen ne peut être pris deux fois particulie rement, mais il doit être pris au-moins une fois univerfellement.

Car devant unir ou défunir les deux termes de la conclufion, il eft clair qu'il ne le peut faire s'il eft pris pour deux parties. differentes d'un mêmetout, parceque ce ne fera pas peut-être la même partie qui fera unie ou défunie de ces deux termes. Or étant pris deux fois particulierement, if peut être pris pour deux differentes parties du même tout; & par confequent on n'en pourra rien conclure au-moins neceffairement ce qui fuffit pour rendre un argument vicieux, puifqu'on n'appelle bon fyllogifme, comme on vient de dire, que celui dont la conclufion ne peut:

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