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elles, comme dans le mot de canon, ou en ont quelqu'un, comme lorfqu'un mot étant principalement joint à une idée, on ne le joint à une autre idée, que parcequ'elle a un rapport de caufe, ou d'effet, ou de figne, ou de reffemblance à la premiere; & alors ces fortes de mots équivoques s'appellent analogues; comme quand le mot de fain s'attribue à l'animal, à l'air, & aux viandes. Car l'idée jointe à ce mot eft principalement la fanté qui ne convient qu'à l'animal, mais on y joint une autre idée approchante de celle-là, qui eft d'être caufe de la fanté, qui fait qu'on dit qu'un air eft fain, qu'une viande eft faine, parcequ'ils fervent à conferver la fanté.

Mais quand nous parlons ici des mots generaux, nous entendons les univoques qui font joints, à des idées univerfelles & generales.

Or dans ces idées univerfelles il y a deux chofes qu'il eft très-important de bien diftinguer, la compréhenfion & l'étendue.

J'appelle compréhension de l'idée, les attributs qu'elle enferme en foi, & qu'on ne lui peut ôter fans la détruire, comme la comprehenfion de l'idée du triangle enferme extenfion, figure, trois lignes, trois angles, & l'égalité de ces trois angles à deux droits, &c.

J'appelle étendue de l'idée, les fujets à qui cette idée convient, ce qu'on appelle auffi les inferieurs d'un terme general, qui à leur égard eft appellé fuperieur, comme l'idée du triangle en general s'étend à toutes les diverfes efpeces de triangles.

Mais quoique l'idée generale s'étende indiftintement à tous les fujets à qui elle convient, c'està-dire, à tous les inferieurs, & que le nom commun les fignifie tous, il y a néanmoins cette difference entre les attributs qu'elle comprend, & les fujets aufquels elle s'étend, qu'on ne peut lui ôter

aucun de fes attributs fans la détruire, comme nous avons déja dit, au-lieu qu'on peut la refferrer quant à fon étendue, ne s'appliquant qu'à quelqu'un des fujets aufquels elle convient, fans que pour cela on la détruife.

Or cette reftriction ou refferrement de l'idée generale quant à fon étendue, fe peut faire en deux

manieres.

La premiere eft, par une autre idée distincte & déterminée qu'on y joint, comme lorfqu'à l'idée generale du triangle, je joins celle d'avoir un angle droit, ce qui refferre cette idée à une feule efpece de triangle, qui eft un triangle rectangle.

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L'autre, en y joignant feulement une idée indiftincte & indéterminée de partie, comme quand je dis, quelque triangle: & on dit alors que le terme commun devient particulier, parcequ'il ne s'é tend plus qu'à une partie des fujets aufquels il s'étendoit auparavant, fans que néanmoins on ait de terminé quelle eft cette partie à laquelle on la ref ferre.

CHAPITRE VII.

Des cinq fortes d'idées univerfelles.Genres, Efpeces, Differences, Propres, Accidens.

CE que nous avons dit dans les chapitres pré

cedens, nous donne moyen de faire entendre en peu de paroles les cinq Univerfaux qu'on explique ordinairement dans l'école.

Car lorfque les idées generales nous reprefentent leurs objets comme des chofes, & qu'elles font marquées par des termes appellés fubftantifs ou abfolus, on les appelle genres ou especes.

Des Genres.

On les appelle genies quand elles font tellement communes, qu'elles s'étendent à d'autres idées qui font encore univerfelles, comme le quadrilatere eft genre à l'égard du parallelograme & du trapêze: la fubftance eft le genre à l'égard de la fubftance étendue qu'on appelle corps, & de la fubftance qui penfe qu'on appelle efprit.

De l'Espece.

Et ces idées communes qui font fous une plus commune & plus generale, s'appellent efpeces; comme le parallelograme & le trapêze font les efpèces du quadrilatere, le corps & l'efprit font les efpeces de la substance.

Et ainfi la même idée peut être genre, étant comparée aux idées aufquelles elle s'étend, & efpece étant comparée à une autre qui eft plus generale, comme corps, qui eft un genre au regard du corps animé & du corps inanimé, & une efpece au regard de la fubftance; & le quadrilatere qui eft un genre au regard du parallelograme & du trapêze, eft une efpece au regard de la figure.

Mais il y a une autre notion du mot d'efpece qui ne convient qu'aux idées qui ne peuveut être genres. C'eft lorfqu'une idée n'a fous foi que des individus, & des finguliers, comme le cercle n'a fous foi que des cercles finguliers que font tous d'une même efpece. C'eft ce qu'on appelle efpece derniere, fpecies infima..

Et il y a un genre qui n'eft point efpece, fçavoir le fuprême de tous les genres, foit que ce genre foit l'être, foit que ce foit la fubftance, ce qu'il eft de peu d'importance de favoir, & qui regarde plus la Métaphyfique que la Logique..

J'ai dit que les idées generales qui nous repréfentent leurs objets comme des chofes, font appellées genres ou efpeces. Car il n'eft pas neceffaire

que

les objets de ces idées foient effectivement des chofes & des fubftances; mais il fuffit que: nous les confiderions comme des chofes, en ce que lors même que ce font des modes, on ne les rapporte point à leurs fubftances; mais à d'autres idées de modes moins generales ou plus generales comme la figure qui n'eft qu'un mode au regard du corps figuré, eft un genre au regard des figures. curvilignes & rectilignes, &c.

&

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Et au contraire, les idées qui nous représentent les objets comme des chofes modifiées qui font marquées par des termes adjectifs ou con→ notatifs, fi on les compare avec les fubftances que ces termes connotatifs fignifient confufément quoique directement, foit que dans la vérité ces termes connotatifs fignifient des attributs effenciels qui ne font en effet que la chofe même > foit qu'ils fignifient de vrais modes, on ne ̄les: appelle point alors genres ni efpeces, mais ou differences, ou proprs. ou accidens.

On les appelle differences, quand l'objet de ces idées eft un attribut effenciel qui diftingue une efpece d'une autre, comme étendu, pefant, raifonnable.

On les appelle propres, quand leur objet eft un attribut qui appartient en effet à l'effence de la chofe; mais qui n'eft pas le premier que l'on confidere dans cette effence, mais feulement une dépendance de ce premier, comme, divisible, immortel, docile.

Et on les appelle accidens communs, quand leur objet eft un vrai mode qui peut être féparé, aumoins par l'efprit, de la chofe dont il eft dit acci-. dent; fans que l'idée de cette chofe foit détruite dans notre efprit; comme rond, dur, jufte, prudent. C'eft ce qu'il faut expliquer plus particulie

rement.

De la Difference.

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Lorfqu'un genre a deux efpeces, il faut neceffairement que l'idée de chaque efpece comprenne quelque chofe qui ne foit pas compris dans l'idée du genre. Autrement fi chacune ne comprenoit que ce qui eft compris dans le genre, ce ne feroit que le genre & comme le genre convient à chaque efpece, chaque efpece conviendroit à l'autre. Ainfi le premier attribut effenciel que comprend chaque efpece de plus que le genre, s'appelle fa difference, & l'idée que nous en avons eft une idée universelle, parcequ'une feule & même idée nous peut repréfenter comme difference par-tout où elle fe trouve, c'eft-à-dire, dans tous les inferieurs de Pefpece.

Exemple. Le corps & l'efprit font les deux efpeces de la fubftance. Il faut donc qu'il y ait dans P'idée du corps quelque chofe de plus que dans celle de la fubftance, & de même dans celle de l'efprit. Or la premiere chofe que nous voyons de plus dans le corps, c'est l'étendue, & la premiere chofe que nous voyons de plus dans l'efprit, c'eft fa penfée. Et ainfi la difference du corps fera l'étendue, & la difference de l'efprit fera la penfée, c'eft-à-dire , que le corps fera une fubftance étendue, & l'efprit une fubftance qui pense.

De-là on peut voir, 1. que la difference a deux regards, l'un au genre qu'elle divife & partage, Pautre à l'efpece qu'elle conftitue & qu'elle forme faifant la principale partie de celui qui eft enfermé dans l'idée de l'efpece felon fa comprehenfion. D'où vient que toute efpece peut être exprunée par un feul nom, comme efprit, corps; ou par deux mots, favoir par celui du genre, & par de fa difference joints enfemble, ce qu'on appelle éfinition, comme fubftance qui penfe, fubftance étendue.

B.vj.

celui

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