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CHARLOTTE.

Le vlà qui est pour le dire, si je n'ai pas raisón.

MATHURINE.

Le vlà qui est pour me démentir, si je ne dis pas vrai,

CHARLOTTE.

Est-ce, monsieu, que vous lui avez promis de l'épouser ?

DON JUAN, bas, à Charlotte.

Vous vous raillez de moi.

MATHURINE.

Est-il vrai, monsieu, que vous lui avez donné pa role d'être son mari?

DON JUAN, bas, à Mathurine. Pouvez-vous avoir cette pensée?

CHARLOTTE.

Vous voyez qu'al le soutient.

DON JUAN, bas, à Charlotte.

Laissez-la faire.

MATHURINE.

Vous êtes témoin comme al l'assure.
DON JUAN, bas, à Mathurine.

Laissez-la dire.

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Oui, Mathurine, je veux que monsieu vous montre votre bec jaune.

MATHURINE.

Oui, Charlotte, je veux que monsieu vous rende

un peu camuse.

CHARLOTTE.

Monsieu, vuidez la querelle, s'il vous plaît.

MATHURINE.

Mettez-nous d'accord, monsieu.

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Que voulez-vous que je dise? Vous soutenez également toutes deux que je vous ai promis de vous prendre pour femmes. Est-ce que chacune de vous ne sait pas ce qui en est, sans qu'il soit nécessaire que je m'explique davantage ? Pourquoi m'obliger là-dessus à des redites? Celle à qui j'ai promis effective. ment n'a-t-elle pas en elle-même de quoi se moquer des discours de l'autre ? et doit-elle se mettre en peine, pourvu que j'accomplisse ma promesse? Tous les discours n'avancent point les choses. Il faut faire, et non pas dire; et les effets décident mieux que les paroles. Aussi n'est-ce que par-là que je vous veux mettre d'accord; et l'on verra, quand je me marierai, laquelle des deux a mon cœur. (bas, à Mathurine.) Laissez-lui croire ce qu'elle voudra. (bas, à Charlotte.) Laissez-la se flatter dans son imagination. (bas à Mathurine.) Je vous adore. (bas, à Charlotte.) Je suis tout à vous. (bas, à Mathurine.) Tous les visages sont laids auprès du vôtre. (bas, à Charlotte.) On ne peut plus souffrir les autres quand on vous a vue. ( haut.) J'ai un petit ordre à donner; je viens vous retrouver dans un quart-d'heure.

SCENE V I.

CHARLOTTE, MATHURINE, SGANARELLE. CHARLOTTE, à Mathurine.

Je suis celle qu'il aime, au moins.

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MATHURINE, à Charlotte.

C'est moi qu'il épousera.

SGANARELLE, arrétant Charlotte et Mathurine. Ah! pauvres filles que vous êtes, j'ai pitié de votre innocence, et je ne puis souffrir de vous voir courir à votre malheur. Croyez-moi, l'une et l'autre : ne vous amusez point à tous les contes qu'on vous fait, et demeurez dans votre village.

SCENE VII.

DON JUAN, CHARLOTTE,
MATHURINE, SGANARELLE.

DON JUAN, dans le fond du théâtre, à part. Je voudrois bien savoir pourquoi Sganarelle ne me suit pas.

SGANARELLE.

Mon maître est un fourbe; il n'a dessein que de vous abuser, et en a bien abusé d'autres : c'est l'épouseur du genre humain, et... ( appercevant don Juan.) Cela est faux; et quiconque vous dira cela, vous lui devez dire qu'il en a menti. Mon maître n'est point l'épouseur du genre humain, il n'est point fourbe ; il n'a pas dessein de vous tromper, et n'en a point abusé d'autres. Ah! tenez, le voilà; demandez-le plutôt à lui-même.

DON JUAN, regardant Sganarelle, et le
soupçonnant d'avoir parlé.

Qui!

SGANARELLE.

Monsieur, comme le monde est plein de médisants, je vais au-devant des choses; et je leur disois que, si quelqu'un leur venoit dire du mal de vous, elles se gardassent bien de le croire, et ne manquassent pas de lui dire qu'il en auroit menti.

Sganarelle!

DON JUAN.

SGANARELLE, à Charlotte et à Mathurine. Oui, monsieur est homme d'honneur; je le garantis tel.

Hon!

DON JUAN.

SGANARELLE.

Ce sont des impertinents.

SCENE VIII.

DON JUAN, LA RAMÉE, CHARLOTTE,
MATHURINE, SGANARELLE.

LA RAMÉE, bas, à don Juan. Monsieur, je viens vous avertir qu'il ne fait pas bon ici pour vous.

Comment?

DON JUAN.

LA RAMÉE.

Douze hommes à cheval vous cherchent, qui doivent arriver ici dans un moment. Je ne sais par quel moyen ils peuvent vous avoir suivi; mais j'ai appris cette nouvelle d'un paysan qu'ils ont interrogé, et auquel ils vous ont dépeint. L'affaire presse; et le plutôt que vous pourrez sortir d'ici sera le meilleur.

SCENE IX.

DON JUAN, CHARLOTTE,
MATHURINE, SGANARELLE.

DON JUAN, à Charlotte et à Mathurine. Une affaire pressante m'oblige de partir d'ici; mais je vous prie de vous ressouvenir de la parole que je vous ai donnée, et de croire que vous aurez de mes nouvelles avant qu'il soit demain au soir.

SCENE X.

DON JUAN, SGANARELLE.

DON JUAN.

Comme la partie n'est pas égale, il faut user de stratagême, et éluder adroitement le malheur qui me cherche. Je veux que Sganarelle se revête de mes habits; et moi...

SGANARELLE.

Monsieur, vous vous moquez. M'exposer à être tué sous vos habits, et...

DON JUAN.

Allons vîte, c'est trop d'honneur que je vous fais; et bienheureux est le valet qui peut avoir la gloire de mourir pour son maître.

SGANARELLE.

Je vous remercie d'un tel honneur. (seul.) O ciel, puisqu'il s'agit de mort, fais-moi la grace de n'être point pris pour un autre !

FIN DU SECOND ACTE.

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