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Ferguson et Gibbon ont développé son plan philosophique avec plus d'étendue; tous ces écrivains distingués n'ont servi qu'à rehausser, pour ainsi dire, sa gloire. Il semble avoir hérité de l'ame de Corneille et de l'énergie de Tacite. *

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,, Montesquieu marche, dans cet ouvrage, à de géant dans la carrière du génie. Je le vois aux prises, pour ainsi dire, avec les maîtres du monde. Il demande compte aux Romains de leur agrandissement et de leur décadence. La fortune aveugle n'a point d'autels aux yeux de cet examinateur ,, judicieux et sévère. Chaque effet a son ,, principe, et il sait le trouver: il analyse les événemens; il décompose le coeur de l'homme, qui n'a rien d'obscur

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* Nous renvoyons le lecteur à l'extrait de son ouvrage dans l'Éloge de Montesquieu par d'Alembert: c'est

un modèle d'analyse, de netteté et de précision.

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lui. L'apparence du vrai n'est jamais le vrai devant lui: il distingue le prétexte

du motif. La politique du sénat de

Rome, quelque profonde qu'elle soit, ,, n'échappe point à ses regards; il pénètre ,, tout, il démasque tout. Il regarde les vaincus d'un oeil attentif, comme il a ,, regardé les vainqueurs. Toutes les nations passent successivement devant lui; il se donne l'expérience de plusieurs. siècles, et s'ouvre la route à un ouvrage ,, plus admirable encore.

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Un président du parlement de Bordeaux, à qui il avoit confié son manuscrit, en le priant de lui dire son avis, lui conseilla de le supprimer, comme trop foible et fort au-dessous des Lettres persanes.

* Ce morceau, digne de son héros, est extrait de l'Éloge de Montesquieu par M. de Châteaubrun, qui lui succéda à l'académie française, quand M. l'abbé d'Olivet en étoit directeur.

Notre philosophe l'écoute sans humeur; il ne fait qu'ajouter cette épigraphe à son ouvrage: Docuit quae maximus Atlas.

Nous plaçons à la suite de ses Considérations sa Dissertation politique sur la religion des Romains, quoique, dans l'ordre chronologique des manuscrits nouveaux que notre édition renferme, celui-ci dût être inséré à l'époque où il l'avoit lu à l'académie de Bordeaux (1716); mais l'ordre des matières exigeoit qu'on réunît tous les ouvrages relatifs au même peuple. On reconnoît dans cette dissertation le génie observateur de Montesquieu. La mort ou la prudence ne lui permirent pas d'achever ce fragment. Ce sont des matériaux destinés à l'immortalité, quoiqu'imparfaits. Sur ces pierres d'attente nous avons cru voir gravés ces mots: Nous appartenons à la postérité. Nous les lui devions.

Les Discours * qui suivent cette dissertation furent prononcés par Montesquieu aux séances publiques de l'académie des sciences de Bordeaux, depuis 1716 jusqu'en 1727. Il y annonce les sujets proposés pour les prix, ou il rend compte des mémoires qui les ont remportés. Quoiqu'ils n'inspirent pas tous un égal degré d'intérêt, on retrouve cependant par-tout cette grace aimable qui anime les sujets les plus arides, ces saillies de raison qui ravissent, et cette fleur d'esprit qui fait aimer l'érudition. L'Éloge du duc de la Force respire une douce sensibilité, et le charme d'une philosophie indulgente. Son Distours sur les sciences honore son coeur et son esprit. On aime à voir Montesquieu, dès l'âge de vingt-cinq ans, à la hauteur

* Pour ne pas trop grossir ce volume, nous avons renvoyé au septième volume de cette édition in-8, les discours dont il est ici question.

NOTE DE L'ÉDITEUR.

des lumières de son siècle, former le plan d'un ouvrage immense, * malgré les grandes occupations de son état, et parcourir le cercle des connoissances physiques avec la même rapidité qu'il parcouroit celui des connoissances morales. C'est un spectacle bien intéressant que le tableau des progrès de l'esprit d'un grand homme.

* Projet d'une histoire physique du monde,

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