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Ce n'est point au refte la qualité de freres & d'amis du Peuple VI: romain, qui a rendu les Eduens célebres. Long-temps avant des Eduens République leur alliance avec Rome; ils étoient à la tête de l'une des deux factions qui divifoient les Gaules, lorfque Céfar en fit la conquête: ils furent, à la vérité, les premiers Gaulois admis dans le Sénat de Rome; mais ce fut par reconnoiffance des fervices importans qu'ils avoient rendus à la République romaine; elle les aida auffi dans les guerres qu'ils eurent avec les Rhémois, les Auvergnats & les Séquanois. Après que les Gaules furent paffées fous le joug des Romains, les Eduens conferverent le glorieux titre d'Alliés & de Confédérés; & quoiqu'ils eussent joint leurs forces à celles des autres Gaulois pour la défense d'Alize, ils furent traités comme anciens amis, plutôt que fuc le pied de Peuple vaincu & tributaire.

Leur République s'étendoit à l'Orient jufqu'à la Saone; elle avoit à l'Occident la Loire & l'Allier, les ruiffeaux de Roins & d'Ardiere au Midi, les terres des Langrois & l'Auxerrois au Nord; enforte qu'elle renfermoit ce qui compofe aujourd'hui les Dioceses d'Autun, de Châlon, Nevers & Mâcon elle avoit auffi dans fa dépendance, les Peuples du Forez & du Beaujolois, une partie du Lyonnois, les Infubres & quelques. autres Peuples voifins, dont on ignore à préfent la position. Les Sénonois & les Berruyers étoient fous fa protection : ceux du Beauvaifis, les plus puiffans des Belges, regardoient les Eduens comme leurs Patrons & leurs Amis. Cette République étoit divifée en plufieurs cantons, dont chacun avoit fon cheflieu qui reffortiffoit à Bibracte; c'étoit la Ville principale des Eduens, où réfidoit le fouverain Magistrat, appellé Vergobiet,, & le Sénat qui partageoit avec lui l'autorité fuprême & le foin. des affaires..

VII.

Son étendue.

VIII.
Ses richeffes.

IX.

Gouverne

duens.

Ce n'étoit pas feulement par l'étendue de fon territoire, le nombre & les forces de fes Cliens & de fes Alliés, que cet Etat étoit confidérable : fa fituation, la forme de fon gouvernement, fon commerce & les écoles célebres de fa Capitale, fervirent encore à fa grandeur & à fon opulence. Les Eduens placés entre trois grandes rivieres, dans le centre de la Gaule celtique, avec des communications faciles avec l'Océan & la Méditerranée, dans une terre fertile & abondante en pâturages, avoient un débit ailé de leurs denrées & de leur bétail, qui furent dabord leurs principales richesses : dans la suite, la jeune Nobleffe attirée de toute part à Bibracte,

, par la célébrité de fes écoles, aida à la confonimation des denrées, fit fleurir les fciences & les arts, & y apporta l'argent de l'Etranger. Sous l'empire de Tibere, on comptoit un grand nombre d'Etudians dans cette Académie; elle donna lieu auffi à des correfpondances utiles, qui étendirent le commerce des Eduens par toutes les Gaules.

Leur gouvernement étoit aristocratique, deux Ordres, les ment des E- Druides & les Nobles, partageoient entre eux les honneurs & les privileges; le Peuple étoit ferf & n'avoit aucune part à l'administration des affaires publiques. On choisissoit chaque année dans la Nobleffe, le Vergobret & les Généraux qui devoient commander les Troupes. Lorfque les Suiffes entrerent fur les terres des Eduens, cinquante-deux ans avant Jesus-Christ, Lifque étoit Vergobret, & Dumnorix, frere de Divitiac, Chef des Druides Eduens, commandoit la Cavalerie: elle étoit compofée de la Nobleffe des Eduens & de leurs Alliés, & paffoit pour la meilleure des Gaules; dans la fuite elle fervit utilement les Romains.

Χ.

Les Druides.

Le premier Ordre parmi les Eduens, étoit celui des Druides;

on les tiroit des familles les plus diftinguées; la noblesse de leur extraction, jointe à la dignité de leur état, leur attiroit la vénération du Peuple & leur donnoit un fi grand crédit, qu'ils arrêtoient quelquefois deux armées prêtes à combattre. Les Druides des Gaules avoient un fouverain Pontife, auquel ils obéiffoient, & qui avoit fur eux une autorité abfolue: à fa mort, le plus confidérable d'entr'eux lui fuccédoit ; & s'il y avoit quelque conteftation à ce fujet, on la décidoit par l'élection & quelquefois par la voie des armes.

XI.
Leur auto-

fonctions.

Les Druides ainfi nommés d'un mot grec, qui fignifie chêne, ou du celtique Déruyd, qui défigne un Théologien, habi- rité & leurs toient ordinairement les forêts où ils vivoient en commun. Ils étoient les Pontifes, les Théologiens, les Juges, les Philofophes, les Poëtes & les Savans de la Nation. Leur principale superstition étoit de couper le guy de chêne en cérémonie, le fixieme de la lune de chaque mois, au commencement de chaque année & la trentieme année de chaque fiecle : ils étoient alors vêtus d'une longue tunique ou robe blanche rayée de pourpre ou d'autres couleurs. Ils attribuoient à cet arbriffeau des vertus admirables & en faifoient un remede à tous maux. On voit encore en Bourgogne, en Picardie & en quelques autres Provinces de France, des veftiges de la cérémonie du guy de la nouvelle année, que le vulgaire appelle, le guy lan neuf le premier jour de l'an, les enfans, à l'imitation des Druides, chantent quelques couplets pour avoir des étrennes.

L'éducation de la jeuneffe étoit confiée aux Druides, & ils avoient fur elle un pouvoir absolu; ils avoient auffi l'adminiftration de la Justice, & le droit d'élire avec la Nobleffe le fouverain Magiftrat; les affaires civiles & criminelles étoient portées à leur tribunal, & ils les décidoient fans appel. Pour

'XII.

Leurs études

себ

donner plus de poids à leurs Jugemens, ils ajoutoient ordinairement contre les réfractaires, une espece d'excommunication qui privoit de la communion de leurs myfteres & des avantages de la fociété civile: chaque année ils s'assembloient dans le Pays chartrain, & l'on y décidoit les affaires les plus importantes. Pour entrer dans leur Corps, il falloit avoir été élevé parmi eux dès la jeuneffe: on y employoit jufqu'à vingt années à apprendre une prodigieufe quantité de vers, qui renfermoient la religion & l'histoire de la Nation, car ils n'écrivoient rien : c'eft ainfi qu'ils tenoient le Peuple dans l'ignorance.

Les Druides faifoient une étude particuliere de la nature, ils & leurs fcien- observoient le cours des aftres, difcourcient fur la figure, la grandeur & les productions de la Terre; ils portoient même leurs raisonnemens jufques fur la nature & la puiffance des Dieux, fur l'immortalité de l'ame & la métempsycofc.

'XIII.

Les Bardes & les Embages.

XIV.

College des Druides.

Ils n'étoient pas les feuls qui cultivaffent les fciences: les Bardes chantoient auffi fur la lyre les faits de leurs Héros, en récitant des vers à leur honneur; & les Embages, plus Physiciens que Théologiens, recherchoient les fecrets de la Nature; mais les Druides étoient les plus cftimés, foit parce qu'ils étoient mieux inftruits des droits divins & humains, foit parce qu'ils paffoient pour les plus chaftes & qu'ils avoient un air plus auftere.

Les Druides avoient plufieurs Colleges chez les Eduens; il en refte encore quelques veftiges: leur principale Académie étoit dans un bois fur la montagne, qu'on appelle mont-dru, mons Druidarum, à une lieue d'Autun. Sa figure efst ronde, sa croupe chargée de hautes futaies avec des cavernes fur les flancs. On voyoit dans le fezieme fiecleles ruines d'un ancien bâtiment que l'on croit être celui des Druides, c'est maintenant une petite Chapelle en mauvais état; il n'étoit pas fort spacieux, quoique

ce

ce fût leur chef-lieu durant la belle faifon; ce qui fait croire que leur College n'étoit pas nombreux : ceux de Mavilly devoient être en plus petit nombre. On voit fur les monumens qui nous en reftent, deux Augures, un Phyficien & un ou deux Sacrificateurs.

On découvre auffi quelques reftes d'un autre College de Druides, près d'Alize & de Flavigny; ils en avoient un troisieme fur la colline où eft bâti le Village de Mavilly, à deux petites lieues de Beaune; cette colline eft environnée de hautes montagnes, autrefois couvertes de bois, dont la fituation reffemble affez à celle du fameux Temple de Delphes. On trouve aussi à Mavilly, plufieurs monumens de la haute antiquité, qui marquent que ce lieu a été autrefois habité par les Druides: ces monumens nous aideront à connoître la religion des Eduens avant l'établissement des Romains dans la Gaule celtique.

Après qu'une partie des Druides eût été chaffée des Gaules, on continua d'envoyer la jeuneffe aux célebres écoles d'Autun; on les appelloit moéniennes, parce qu'elles étoient proche les murs dans la Ville, au lieu que les Colleges des Druides étoient à la campagne on y enfeignoit la Religion, les Loix, l’Histoire, les Langues, les Arts libéraux, la Géographie & les connoiffances utiles à la Société; les habiles Maîtres qu'on y attiroit & que les Empereurs y envoyoient, s'appliquoient auffi à former les mœurs de la jeuneffe qui leur étoit confiée.

XV.

Les Ecoles

moéniennes de Bibracte.

XVI.
La Noblefle

La Noblesse tenoit le fecond rang dans la République des Eduens; on tiroit de ce Corps, le Vergoberet, les Sénateurs, des Eduens, les Généraux d'armée & les Druides. Les Nobles combattoient toujours à cheval, c'eft pourquoi Céfar les appelle Cavaliers. Ce Corps fervit utilement les Romains; en effet, la Cavalerie Gauloife paffoit pour la meilleure de l'Europe: il est vrai que

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