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fuite des antiques donnés par ce Savant : la collection que je préfente, eft d'autant plus intéreffante, qu'elle renferme la mythologie des anciens Eduens ( la premiere République des Gaules) que l'on ne trouve nulle part; les Auteurs en parlent quelquefois à la vérité, mais comme en paffant, & fans en donner une suite exacte ni un détail qui contentent la curiofité.

Beaune d'ailleurs, l'une des principales Villes de la Province, étoit fi peu connu de nos meilleurs Historiens, que l'un d'eux l'appelle une bicoque, une Ville d'hier ou d'aujourdhui : il ignoroit, fans doute, les prérogatives dont cette Ville a joui pendant plufieurs fiecles. On verra qu'elle a été long-temps comme la Capitale de la Bourgogne, le féjour des Ducs de la premiere Race, honorée de la visite de plusieurs de nos Rois, le lieu d'affemblée des Jours & des Etats généraux de la Province, où le Parlement tenoit ordinairement fes féances & où fiégeoient les Juges d'appeaux, ce Tribunal qui remplaçoit en quelque façon le Parlement avant qu'il fut fédentaire.

Dès le huitieme fiecle, Beaune étoit le chef-lieu d'un Pays considérable; il avoit, comme les grandes Villes, des Comtes pris dans la premiere Nobleffe de la Province, dont quelques-uns même étoient alliés

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à des Maifons fouveraines. Auroit-on donné le Gouvernement d'une bicoque à de grands Seigneurs, comme Manassès de Vergy, Chef de l'une des quatre grandes Maifons de la Province; à Gilbert, fils de Richard, Duc de Bourgogne & beau-frere de Raoul, Roi de France; au Comte Otte-Guillaume, dont la veuve du Marquis d'Yvrée, avoit épousé Henri, premier Duc propriétaire de Bourgogne, & frere d'Hugues Capet: Beaune fut encore dans le quatorzieme fiecle, l'une des principales Villes de la Province, qui fournirent des otages au Roi d'Angleterre pour racheter la Bourgogne du pillage; ce n'eft pas là une Ville d'hier ou d'aujourdhui.

mere

Il faut avouer auffi que Beaune n'eft point la Bibracte dont parle Céfar, cette ancienne Ville qui étoit comme la mere des Gaules, tandis que Rome étoit encore au berceau. Il eut été flatteur pour moi d'écrire l'Histoire d'une Ville auffi célebre dans l'antiquité: j'aurois fuivi avec plaifir l'opinion de MM. de Salins, Maumenet, Vigenere & autres, fi elle m'avoit paru fondée; mais je conviens de bonne foi que tout parle en faveur d'Autun.

Beaune, il est vrai, a perdu depuis trois fiecles toutes les prérogatives; les Ducs & la Nobleffe l'ont

quitté dès le quinzieme fiecle, le Parlement & les Etats généraux ont été transférés à Dijon, les Juges d'Appeaux fupprimés, la Chambre des Comptes rendue à la Capitale; notre Manufacture est tombée, il ne nous refte que le commerce des vins.

Ma carriere eft donc bornée, je n'ai ni voyages amusans à raconter, ni batailles ni conquêtes à expliquer; je n'aurai point de naiffances ni morts de Princes à rappeller, ni leurs deffeins, leurs confeils ou leurs maximes à développer: cette partie de l'Hiftoire est ordinairement la plus agréable aux gens fenfés & la plus utile. Pour éviter une prolixité ennuyeuse, j'ai paffé fous filence tous les faits minutieux & incertains, ou qui ne m'ont point paru utiles à mon deffein; & dans le choix des preuves, je n'ai employé que le témoignage des Auteurs connus & eftimés, les chartres & les archives du pays que je cite, fans en donner des copies, pour ne pas trop groffir mon ouvrage. Je me fuis encore fervi des monumens antiques qui ont échappé à la révolution des fiecles, & j'en donne les figures.

Je crains feulement que l'on ne trouve ici trop de citations; j'ai cru pourtant ne pouvoir m'en dispenser dans la circonstance: il est à propos que les Savans

qui daigneront lire ce petit ouvrage, puissent juger fi ma narration eft fidelle, & fi j'ai dû m'écarter des récits peu exacs de la plupart des Auteurs qui ont parlé de Beaune. Pour ne pas charger les marges de citations & ne point partager l'attention du Lecteur qui ne voudra pas vérifier les faits, je renvoie à la fin du livre les citations & les preuves, dans le même ordre que la table que l'on y trouvera. J'ai placé à la fuite de l'hiftoire une notice des Bourgs & Villages du reffort de notre Bailliage, leurs différens noms, le temps à peu près où ils fe font formés, les fruits & les denrées qu'ils produisent, les curiofités naturelles & les chofes qui peuvent mériter l'attention du Voyageur; les noms des Seigneurs anciens & modernes, auxquels ces Terres ont appartenu ou appartiennent à présent; leur pofition & leur distance de Beaune, leurs Jurifdiction & recette, les vocables des Eglifes paroiffiales, les Patrons des Cures & l'Archiprêtré où elles font fituées.

Je donne enfuite quelques obfervations fur l'Hiftoire naturelle du Pays, & fur-tout fur les vignes & les vins qui font notre principale richesse.

L'Hiftoire eft agréable, dit Cicéron, de quelque

maniere qu'elle foit écrite ; en apprenant ce qui s'eft paffé, elle conduit à la connoiffance de l'avenir, elle eft comme un tableau où les hommes paroiffent fucceffivement fous différentes formes: les caracteres, les paffions & les préjugés font les mêmes, il n'y a de différence que dans la maniere dont ils tendent à leur fin; ainfi en les retraçant dans les différens fiecles, on voit leurs différens mobiles, & l'on peut profiter des fautes qu'ils ont faites & prendre en conféquence de fages mesures.

Plufieurs Villes de la Province ont eu leurs Hif toriens Munier & Thomas ont écrit celle d'Autun; Perry & Berthaut, celle de Châlon; Legrand, celle de Châtillon, &c. Beaune a produit de bons Poëtes, de favans Théologiens, de célebres Avocats, d'habiles Médecins, d'illuftres Magiftrats, & tous l'ont laiffé dans l'obscurité. J'ai tâché d'écrire cette Hif toire d'un style égal & fuivi, en me renfermant dans les bornes étroites de la vérité; j'ai évité les digref fions, les réflexions fréquentes & les moralités qui auroient pu blesser la délicatesse du Le&eur qui veut les faire lui-même.

M. Monge, Profeffeur dans l'école du Génie de Maizieres, M. Fyon, Ingénieur, & M. Pazumot,

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