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la religion et la vertu, tout ce qui enfin fait le charme et le bonheur de la vie. Combien de pauvres jeunes gens qu'une seule liaison a entraînés de chúte en chûte aux plus grands excès! Il ne faudra pas chercher ailleurs la cause de la plupart des désordres, des scandales et des crimes mêmes qui retentissent chaque jour à nos oreilles, et celui qui interrogeroit ces hommes coupables dont les attentats effraient la société, apprendroit peut-être avec étonnement, s'ils consentoient à lui ouvrir les secrets de leurs cœurs, que l'origine de leur dépravation remonte aux perfides conseils et aux exemples pervers de quelque mauvais ami.

C'est à montrer les suites funestes de ces sortes de liaisons que M. d'Exanvillez a consacré son nouvel ouvrage. Pierre Desbordes étoit un cultivateur aisé et d'une bonne réputation; il étoit rangé dans sa conduite et intelligent dans ses affaires. Une femme, un fils, sembloient lui promettre le bonheur domestique. Une fâcheuse liaison vint tout à coup l'arracher à cette vie paisible, et son caractère facile le disposa à être la dupe des mauvais conseils d'un intrigant adroit. En vain sa femme, en vain son curé cherchèrent à l'éclairer sur les piéges qu'on lui tendoit. Desbordes ferma les yeux à leurs sages avis, changea peu à peu ses habitudes, contracta le goût de la frivolité et de la dépense, négligea ses affaires et finit par se ruiner complètement. Sa femme mourut de chagrin, son fils suivit les exemples pernicieux qu'il lui avoit donnés, et tous deux moururent dans la misère.

Il faut voir dans l'ouvrage par quels degrés le malheureux Desbordes tomba dans ce déplorable état. Nous ne trouverons là que ce que l'on remarque tous les jours dans le monde. M. d'Exauvillez n'a rien outré, nous dirions presque qu'il n'a rien imaginé. Il y a là un bon curé, comme il s'en trouve beaucoup dans nos campagnes, homme droit, prudent, zélé, qui fait tous ses efforts pour empêcher Desbordes de courir à sa perte. L'astuce et la perfidie du faux ami déjouent toutes les mesures de l'ami véritable, et le cultivateur, simple et confiant, est entraîné peu à peu dans l'abîme.

Cet ouvrage est dans le même genre que plusieurs autres du même auteur. Il fait suite au Bon Curé, au Bon Paysan, au Docteur de village, etc. La collection de ces petits livres forme comme une espèce de bibliotèque populaire qui ne sauroit être trop répandue dans les campagnes et dans les classes laborieuses des villes.

Le Gérant, Adrien Le Clere.

Cours des effets PUBLICS.—Bourse du 14 novembre 1832.

Trois pour 100, jouissance du 22 juin, ouvert à 67 fr. 45 c. et fermé à 67 fr. 35 c. Cinq pour 100, jouissance du 22 sept., ouvert à 96 fr. 00 c. et fermé à 95 fr. 85 c. Actions de la Banque.

1660 fr. 00 c.

IMPRIMERIE D'AD. LE CLERE ET COMP.

SAMEDI 17 NOVEMBRE 1832.

(N° 2025.)

Sur une correspondance diplomatique à Rome.

Nous connoissons par les journaux anglais une correspons dance diplomatique qui a eu lieu à Rome entre le ministre anglais en Toscane, M. Seymour, et le gouvernement antri chien, relativement aux changemens demandés dans la legis lation de l'Etat de l'Eglise. Cette correspondance se compose de quatre pièces : la première est une note adressée le 7 sep 49 tembre par M. Seymour à tous les ministres des puissances représentées à la cour de Rome. Le ministre déclaroit que so gouvernement, quoique sans intérêt direct dans les points en discussion, n'en avoit pas moins cru devoir déférer au vœu de ses alliés, en interposant ses bons offices à Rome pour obtenir des mesures qui contribueroient au maintien de la paix générale. M. Seymour finissoit en disant que le gouvernement anglais étoit affligé des efforts tentés depuis dix-huit mois, et que, pour lui, il avoit ordre de retourner à son poste de Florence et de cesser sa mission temporaire à Rome. La seconde pièce est un accusé de réception de l'ambassadeur d'Autriche, M. le comte de Lutzow, qui a transmis au ministre anglais une réponse du prince de Metternich à l'ambassadeur d'Angleterre à la cour de Vienne, sir Frédérick Lamb. M. de Lutzow terminoit ainsi sa note:

« La situation des choses n'ayant pas changé depuis l'époque où fut adressée à sir Frédérick Lamb la réponse de M. de Metternich, le soussigné ne peut partager les appréhensions exprimées par le ministre d'Angleterre il faut espérer que le peuple romain, rappelé au sentiment de ses propres intérêts, repoussera les conseils perfides d'une faction ennemie de tous les trônes, et qui, certes, ne s'occupe pas du bonheur des nations. Tout mène à croire que ce pouvoir occulte, banni comme il l'est aujourd'hui des conseils de tous les souverains, sera apprécié des sujets qu'il excitoit à la révolte. Rien n'empêchera le saint Père de poursuivre à son tour la régénération de ses Etats, et d'éviter les sujets de collision que les princes, comme les individus, ont tous à cœur d'éviter.

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»

La troisième pièce est la réponse même du prince de Metternich, en date du 28 juillet, à sir Frédérick Lamb. Le minis

Tome LXXIV. L'Ami de la Religion.

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tre autrichien, après avoir parlé des délibérations de la conférence à Rome, continuoit en ces termes :

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Le saint Père a refusé seulement deux points principaux :

» 1° L'admission du principe de l'élection popniaire, comme base des assemblées communales et provinciales;

2° La formation d'un conseil d'Etat composé de laïques, qui seroit placé auprès du sacré collége, ou plutôt en opposition avec

lui.

» Il n'appartenoit sans doute ni à l'Autriche, ni à aucune autre puissance de dicter des lois au souverain Pontife, surtout quand il s'agissoit de matières placées hors de la sphère des améliorations administratives sur lesquelles il étoit permis de donner des avis à Sa Sainteté; quand il s'agissoit, en un mot, de choses touchant essentiellement à la forme de son gouvernement, et de tendre à créer un nouveau pouvoir dans l'Etat. Le cabinet autrichien se voyoit obligé de céder sur ce point à la résistance légitime du Pape, aussi bien qu'aux protestations unanimes des autres gouvernemens d'Italie ces derniers, en effet, aux institutions, desquels le principe de l'élection populaire est tout-à-fait étranger, voient dans de pareilles concessions un danger imminent pour la sûreté de leurs Etats. De plus, il a lui-même acquis, par les faits les plus positifs qui ont été communiqués au gouvernement anglais, la conviction complète et profonde que les concessions demandées par les mécontens n'étoient, même à leurs propres yeux, que des armes avec lesquelles ils se proposoient bientôt d'attaquer et enfin de détruire le gouvernement lui-même, en excitant et en entretenant sans cesse des troublès dans l'Etat de l'Eglise.

» L'ensemble des lois et des institutions données par le saint Père a long-temps reçu les suffrages solennels et non équivoques des ambassadeurs des grandes puissances résidant à Rome, par les notes qu'ils ont adressées au cardinal secrétaire d'Etat, le 12 janvier dernier, au moment où les mesures prises par Sa Sainteté pour rappeler à l'obéissance les provinces réfractaires leur ont été annoncées. Les actes officiels en réponse à la note circulaire du 11 janvier ont ainsi obtenu un caractère synallagmatique. Nous n'opposerons certainement pas à la validité de pareils documens celle de l'avis officiel que les mêmes personnages diplomatiques ont adressé à la cour de Rome dans le memorandum dù 21 mai précédent.

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Les événemens qui ont suivi sont bien connus. Depuis que les troupes impériales sont rentrées dans les Légations, et l'occupation d'Ancône de vive force par les Français, le cabinet autrichien a apprécié la valeur de l'opinion exprimée par le gouvernement pontifical, que chaque concession nouvelle faite par ce gouvernement, soit aux demandes de ses sujets mécontens, soit à la requête

d'une nation étrangère, par la voie diplomatique, seroit une dérogation à l'indépendance du souverain, de qui, en apparence du moins, on parviendroit ainsi à l'arracher par la force des armes, et que dans ce fait de concessions obtenues par l'intervention armée des étrangers, les factieux trouveroient un précédent dont ils ne manqueroient pas de profiter pour se faire accorder encore plus, au moyen d'un appel à ces mêmes étrangers.

» Cette manière de voir les choses a été franchement communiquée au gouvernement français et à celui de la Grande-Bretagne; on leur a présenté les concessions dont il s'agit, comme dangereuses pour le reste de l'Italie, et comme une source intarissable de troubles permanens dans l'Etat où elles seroient admises. Pénétré de cette conviction, l'Empereur ne pouvoit en conscience tenir un autre lângage au saint Père.

»

pas

Mais en même temps S. M. I. n'a cessé d'inviter le souverain Pontife, de la manière la plus pressante, non-seulement à maintenir dans une complète exécution les dispositions législatives déjà publiées, mais encore à donner à ces dispositions un caractère de stabilité qui les mettroit à l'abri du risque de changemens futurs sans empêcher d'utiles perfectionnemens. Les preuves de la sollicitude du cabinet autrichien sur ce point ont été placées sous les yeux du cabinet britannique. Mais l'intérêt que l'Autriche éprouve de voir mettre un terme à tous justes sujets de dissensions dans les Etats pontificaux, ne s'est point borné là. Les recommandations les plus sérieuses pour l'établissement du meilleur ordre possible dans les différentes branches de l'administration, n'ont point été épargnées au gouvernement romain. Des fonctionnaires autrichiens, expérimentés et connoissant bien l'Italie, ont été mis à sa disposition, afin de l'aider à introduire toutes les améliorations praticables dans les circonstances difficiles où il est placé, et qui ont été principalement occasionnées par les troubles perpétués depuis dix-huit mois dans une partie considérable de ses provinces.

» Telle est la manière dont l'Autriche a entrepris d'exercer l'influence que le caractère ferme et désintéressé de son gouvernement lui a procurée à la cour de Rome. Repoussant en ce qui la concerne tout agrandissement territorial, fermement résolue à maintenir, de concert avec ses alliés, l'état de possession tel qu'il se trouve établi par les traités dans la péninsule italienne, et particulièrement l'intégrité du saint Siége, l'Empereur est déterminé à s'opposer à tout ce qui tiendroit à subvertir la souveraineté temporelle du saint Siége, ou en détacher quelques unes de ses provinces. S. M. I. conserve la conviction parfaite que les concessions proposées pour changer la forme du gouvernement pontifical n'ont aucun autre mérite, dans la pensée de ceux qui les réclament, que d'être un moyen de parvenir à leur but réel, celui de les affranchir

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entièrement du pouvoir du saint Siége, et que ces concessions ne sauroient avoir d'autre résultat que de conduire à de nouvelles prétentions et à de nouveaux troubles. C'est donc par égard pour le repos de l'Italie que l'Empereur se croit obligé de refuser de soutenir de pareilles demandes. C'est ainsi, qu'obéissant à la voix de sa conscience, il sert véritablement la cause de la paix générale, qui est l'objet de ses vœux et de sa constante sollicitude.

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Rendant pleine justice aux dispositions que le gouvernement français, guidé par les motifs de sa propre conservation, manifeste sous ce rapport, le cabinet autrichien s'abandonne aussi à la confiance qu'il sera toujours facile d'arriver à s'entendre et à se débarrasser ainsi de toutes les difficultés qui peuvent se présenter dans le cours des événemens. Il n'éprouve, en conséquence, aucune crainte d'une complication sérieuse qui prendroit sa source dans les mesures administratives d'un Etat indépendant. Mais, fort de la sincérité de ses sentimens, à la fois pacifiques, justes et conciliatoires, l'Empereur se plaît en même temps à entretenir la ferme persuasion qu'il trouvera, dans tous les cas, S. M. Britannique disposée comme lui-même à maintenir et fortifier les noeuds indissolubles d'amitié et d'alliance qui ont si long-temps uni les deux monarques, et dont la garantie se trouve des deux côtés dans une égale rectitude de principes et dans l'identité de vues et d'intérêts. »

La dernière pièce est la note de M. Seymour du 19 septembre, en réponse à la précédente dépêche. Le ministre ne croit pas les améliorations introduites par le Pape, suffisantes pour répondre aux vœux des puissances. Il sait bien qu'il existe parmi les sujets de S. S. des individus qui appartiennent à la faction dont parle la note ci-dessus, et qui ne se contenteroient d'aucune concession; mais cela n'empêche pas, dit-il, que les vœux d'une partie raisonnable de la population romaine peuvent être satisfaits sur une plus large échelle; ce seroit le moyen d'opérer une scission parmi les mécontens. Le ministre finit en regrettant que toutes les puissances ne soient pas d'accord sur les moyens à prendre pour calmer les esprits.

Cette correspondance est curieuse; elle nous apprend qu'on vouloit obtenir du Pape d'admettre le principe de l'élection populaire. Que le gouvernement anglais réclamât un si grand changement, on le conçoit sous le ministère actuel. Mais les autres puissances, et surtout l'Autriche, n'ont pu donner les mains à un tel projet. Il ne faut pas être bien clairvoyant pour prévoir qu'une fois le principe de l'élection populaire admis dans

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