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de Trente est en opposition manifeste avec l'Evangile. Effectivement, il est dit dans l'Evangile que l'homme ne sépare point ce que Dieu a uni; et comme les Juifs objectoient au Sauveur que Moïse leur avoit permis de répudier leurs femmes, il leur répond que Moïse ne le leur a permis qu'à cause de la dureté de leur cœur, et que, dans l'origine, il n'en étoit point ainsi. Les rédacteurs trouvent-ils que ce soit là autoriser le divorce? Ils prétendent que les décrets du concile de Trente n'ont jamais été reçus en France. Il est bon de leur apprendre que les décrets du concile sur le dogme ont toujours été reçus en France, et que ceux qui ne les recevroient pas ne seroient pas catholiques. La plupart des décrets sur la discipline avoient même passé dans notre législation. Avis à MM. du Journal des connoissances útiles, pour ne pas faire d'excursions sur un terrain qu'ils ne connoissent pas. Ces excursions sont non-seulement inutiles dans leur journal, mais elles sont encore déplacées; elles peuvent égarer des fidèles trop confians, et elles doivent déplaire souverainement aux ecclésiastiques qui reçoivent ce journal.

Dans le même numéro de janvier, on trouve que c'est un inconvénient que les ecclésiastiques distribuent des secours indépendamment du bureau de bienfaisance; et, pour prévenir l'abus grave qui en peut résulter, on les engage à remettre chaque semaine au bureau de bienfaisance la note des effets et sommes qu'ils auroient distribués, avec indication des individus secourus. Que cela est heureusement imaginé! Ainsi l'aumône, que l'Evangile nous recommande de faire en secret, seroit publiée sur les toits; ainsi un curé feroit connoitre les pauvres honteux de sa paroisse; il s'exposeroit au contrôle du bureau de bienfaisance, qui blâmeroit tantôt ceci, tantôt cela. Ce seroit un moyen d'arriver à tout concentrer dans les mains du bureau. Combien les pauvres auroient à s'en féliciter! Alors les aumônes seroient bien plus abondantes sans doute, les bureaux de bienfaisance jouissant tous, comme on sait, de l'entière confiance des personnes les plus charitables. Nous ne serions pas surpris que quelque jour les philanthropes ne réalisassent leur idée, et n'obligeassent les curés à rendre compte de leurs distributions. Ce seroit un excellent moyen pour dessécher la source des charités publiques.

Dans le même numéro se trouve encore un article infiniment

sage; il a pour titre : Apologie du prolétaire. C'est une comparaison entre le propriétaire et le prolétaire; elle est trèspropre à exalter les passions de l'un, à l'aigrir contre l'autre, à lui faire hair un ordre de choses qui consacre une si injuste inégalité. Voici l'article:

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Le propriétaire a ses revenus, le prolétaire a son industrie. Le propriétaire vit du présent, le prolétaire vit de l'avenir. Le prolétaire travaille de six heures du matin à minuit, le propriétaire se repose. Le propriétaire use et consomme, le prolétaire invente et produit. Le propriétaire est de sa nature stationnaire, le prolétaire est de nécessité progressif. Le prolétaire aime la liberté, le propriétaire aime le pouvoir. Le prolétaire est pour les capacités, le propriétaire pour les catégories. Le propriétaire veut l'ordre par intérêt, le prolétaire par raison. Le propriétaire est sûr de vivre, il n'a besoin de rien savoir; le prolétaire ne tire ses moyens d'existence que des efforts de son courage et de son esprit. Le propriétaire, pour payer l'impôt, prend sur ses jouissances; le prolétaire, pour acquitter les taxes, prend sur ses besoins. Le propriétaire a toutes les joies, le prolétaire tous les chagrins. Non, les chagrins ne sont pas tous pour le prolétaire; il a ses nobles idées, ses plans de réforme sociale, ses projets de bien public; il a ses vertus modestes, son mérite acquis et le sentiment intérieur de son mérite et de sa force. Le propriétaire a bien des craintes, des entraînemens, des vices, des heures de vide et de marasme, des repentirs et des remords. Oh! quoi qu'ils fassent, le sort a réservé pour tous les états une part de biens et de maux et de larges compensations.

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Ainsi toutes les vertys sont d'un côté, les vices sont de l'autre. Les propriétaires sont nécessairement des paresseux et des idiots; les prolétaires ont pour eux l'esprit, la raison, le mérite, le courage, et surtout la force. Il est assurément très - prudent de les exciter à s'en servir. Tout ce parallèle a été dicté par une haine aveugle. On reproche au propriétaire d'user et de consommer; mais, s'il use et consomme, tant mieux pour le prolétaire à qui cette consommation procure du travail. Il faudroit montrer au peuple que toutes les classes ont besoin les unes des autres, et on irrite au contraire celle qui a besoin de la classe riche; on l'exalte par des éloges outrés, on l'encourage à faire des plans de réforme sociale. Les plans de réforme sociale d'un chaudronnier et d'un savetier seroient curieux. Il est à désirer, pour la société, que le Journal des connoissances utiles compte peu de lecteurs parmi les prolétaires : quant aux propriétaires abonnés, je ne sais s'ils seront bien

charmés de la part qu'on leur fait dans cet aimable et impartial portrait.

A la vérité, dans un article subséquent, l'auteur a essayé d'atténuer ce qu'il vient de dire; il reconnoit que le propriétaire et le prolétaire ont besoin l'un de l'autre, et que leur union fait leur vertu. Alors il ne falloit pas les diviser et les aigrir par un parallèle faux, injuste et passionné. On peut être assuré d'ailleurs que le correctif ne dissipera pas les mauvaises impressions qu'aura fait naitre le parallèle entre le propriétaire et le prolétaire. Quand on jette un appât aux passions, elles s'en saisissent avidement, et font peu d'attention aux calmans qu'on cherche ensuite à leur administrer. Quand on commence par adresser des injures à des gens, c'est une risée de prétendre les apaiser par quelques vaines formules de politesse qu'on leur adresse après coup.

Nous avons encore d'autres remarques à faire sur quelques cahiers du même Journal. Aujourd'hui nous nous bornons à annoncer un recueil conçu dans un esprit tout différent; c'est le Moniteur des villes et des campagnes, journal des intérêts moraux et matériels. Ce recueil est destiné principalement à remplacer ou à combattre le Journal des connoissances utiles; il sera en trois parties: la première de nouvelles, la seconde, qu'on peut appeler morale, et qui offrira des traits édifians et honorables, et la troisième, qui renfermera des articles sur l'agriculture, l'économie domestique, le commerce, l'industrie, les découvertes, etc. Il paroîtra chaque mois une livraison de 72 pages grand in-18; le prix est de 3 fr. 75 cent. franc de port pour toute la France.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

ROME. Le 27 octobre, le saint Père a visité la basilique de SaintPaul sur le chemin d'Ostie, et a examiné avec beaucoup de soin les travaux qui se font pour la restauration de cet antique édifice. Ces travaux avancent, déjà beaucoup de colonnes sont posées. On a élevé l'ancien plan de l'église pour la rendre moins humide et une partie peut être consacrée au culte divin. Le même jour, Sa Sainteté a transféré sa résidence du Quirinal au Vatican. Le 29, elle a visité le couvent de la Trinité-du-Mont occupé par les dames du Sacré-Cœur, et a voulu même aller dans la chambre de la mère générale qui étoit retenue chez elle par indisposition. On sait que ces dames sont françaises, et ont formé un établissement d'éducation à Rome sous les auspices de Léon XII.

La veille de la Toussaint, on célébra les premières vêpres dans la chapelle de Sixte IV, au Vatican. Grégoire XVI y assista avec les cardinaux et prélats. Le lendemain, le pontife assista à la messe solennelle célébrée par M. le cardinal Falzacappa. Jean Diehl, élève du collége germanique, prononca le discours latin. Dans l'après-midi, le saint Père assista aux matines pour les morts; et le lendemain au service solennel, où M. le cardinal de Grégorio, grand pénitencier, officia.

PARIS. M. L'archevêque de Paris, à la prière de MM. les grandsvicaires-capitulaires de Versailles, a bien voulu aller faire dimanche dernier, dans cette ville, une ordination extrà tempora.

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M Patrice Mac Sweeny, supérieur du séminaire des Irlandais à Paris, vient de recevoir du saint Siége une marque éclatante de bienveillance et de satisfaction. M. le cardinal Pedicini, préfet de la Propagande, vient de lui adresser un diplôme de docteur en théologie. Ce diplôme, conçu dans les termes les plus honorables, est daté du 15 mai dernier. Il porte que M. Mac Sweeny devra seulement faire sa profession et prêter le serment de fidélité. En effet, il a rempli l'une et l'autre formalités le 24 octobre dernier entre les mains de M. le docteur England, évêque de Charleston, qui se trouvoit alors à Paris. Un acte en a été dressé et signé par le prélat. M. Mac Sweeny est du diocèse de Cork en Irlande; il a imprimé une bonne direction au séminaire des Irlandais, qui compte aujourd'hui 72 élèves.

On savoit déjà que Châtel prétendoit ordonner des prêtres. Il avoit ordonné Plumet et peut-être Normant, Journiac et Jullien, qui ont paru successivement dans son église. On vient d'avoir la preuve authentique qu'il a ordonné le sieur Heurtaut, qui s'est fait intrus à Boulogne. Celui-ci, à qui on contestoit sa qualité de prêtre, l'a justifiée par un certificat en forme, où M. FerdinandFrançois Chatel, évêque, primat des Gaules, déclare avoir ordonné prêtre, le 24 décembre 1831, dans son église primatiale, avec les cérémonies prescrites par la sainte église, François - Bernardin Heurtaut, qu'il avoit ordonné sous-diacre et diacre la surveille. L'acte est daté du 28 décembre-et signé du vénérable primat et de son vicaire primatial, Auzou, qui n'avoit pas encore fait schisme avec son chef. Heurtaut appartenoit au diocèse de Chartres, il a été tonsuré en 1828 et minoré en 1829. Il paroît qu'au séminaire on n'a pas cru devoir l'admettre aux autres ordres, et en effet son éducation semble laisser quelque chose à désirer sous le rapport du style et même de l'orthographe. On dit que, dans une lettre adressée au sergent-major de la garde nationale, il se plaint d'être obligé de rappeler à chaque instant à l'autorité locale sa stupide et crosse ignorance concernant les lois sorties des pavés ensanglantés des bar-` ricades de 1830 que tout cœur français, c'est-à-dire aimant sa patrie,

devroit avoir gravées intérieurement en caractère ineffaçable. Nous laissons le lecteur admirer ce style gracieux, ces épithètes polies, ces barricades qui devroient être gravées dans tous les cœurs. Heurtaut signe șa lettre à l'instar d'Auzou, curé par élection du peuple; sur quoi il est à remarquer que le peuple qui l'a élu se borne à moins d'une douzaine d'individus, et qu'à ce compte il pourroit y avoir dans une paroisse bien des curés élus par le peuple; ce qui contribueroit beaucoup sans doute à y entretenir la paix et la bonne harmonie.

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La Gazette de Picardie, en se félicitant d'avoir à annoncer la cessation du choléra à Amiens après six mois d'alarmes et de ravages, paye un tribut d'éloges au zèle des autorités, au dévoûment des médecins, à la bienfaisance des habitans. N'oublions pas surtout, dit-elle, ce clergé si charitable, si modeste, qui, parmi nous comme dans toute la France, ne s'est pas contenté de porter aux agonisans ces paroles de paix et de consolation qui adoucissent et sanctifient l'heure suprême des chrétiens, mais qui a concouru avec tant d'abnégation de lui-même, non-seulement à sauver les malades vivans, mais encore à aider les familles en deuil dans les derniers devoirs à rendre aux morts.

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. L'arrestation de madame la duchesse de Berri a donné lieu à une foule d'actes de dévoûment et d'offres généreuses que l'histoire doit recueillir. Dès que M. de Châteaubriand a appris à Genève cet événement, il s'est mis en route pour Paris. Il a envoyé au ministre, de la justice, avec prière de la faire parvenir à la princesse, une lettre dans laquelle il supplioit S. A. R. de l'admettre au nombre de ses défenseurs. Il demande cette faveur en mémoire d'un prince dont Madame vouloit bien le nommer l'historien. Il l'espère, ajoute-t-il, comme le prix du sang de sa famille, son frère ayant eu la gloire de mourir avec son aïeul, M. de Malesherbes, défenseur de Louis XVI, sur le même échafaud, et pour la même cause. D'autres voix non moius honorables se sont fait entendre pour l'auguste princesse. M. Hyde de Neuville a fait parvenir à la princesse une lettre fort touchante, où, dans l'espoir qu'on ne refusera pas un conseil à S. A. R., il la prie de l'agréer pour tel. M. Pardessus, ancien conseiller de cassation, qui alloit partir pour l'Italie, est resté à Paris, attendant la réponse à des offres semblables. M. de Montarand, ancien magistrat à la cour royale d'Orléans, a aussi sollicité auprès de la princesse l'honneur de la défendre. M. de Conny exprime le vœu que de tous côtés s'élèvent d'énergiques protestations contre l'arrestation de la duchesse. M. L. de Givry a proposé à tous les royalistes de faire parvenir une adresse à Madame. M. le comte de Vaucelle, maréchal-de-camp, et ancien inspecteur des gardes nationales de la Vienne, a écrit de La Roche-Amenon le 11 novembre, à la Gazette de l'Ouest, qu'il s'offroit comine otage pour Mme la duchesse de Berri. M. de Mey, docteur-médecin, à Paris, a écrit au ministre de l'intérieur, pour offrir

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