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mais par la vérité dite à tous avec une égale bonne foi et une inflexible fermeté. Le fanatisme exclusif et le philosophisme étroit sont également intolérans et passionnés ; les préventions de municipalité et les superstitions de paroisse doivent s'éteindre en même temps. Plus d'absolutisme sous aucun titre. » Le bon ecclésiastique qui avoit envoyé les préceptes est bien mal récompensé de son zèle ; il ne s'attendoit pas sans doute à cette verte mercuriale et à ce ton hautain. Les curés sauront donc que le Journal des connoissances utiles n'entend ménager ni le fanatisme exclusif, ni les superstitions de paroisse. Ce dernier trait explique et confirme tout ce que nous avons vu précédemment sur la conduite des premiers chrétiens, sur le divorce, sur le concile de Trente, sur le sacerdoce orgueilleux, sur la vieillesse superstitieuse. Tout cela jette un grand jour sur l'esprit du journal et sur le but où il tend.

Nous sommes persuadé que les ecclésiastiques le reconnoitront de plus en plus. Le rédacteur du Journal des connoissances utiles félicite le clergé de s'associer à son œuvre et d'en comprendre l'utilité; nous ne voyons pas trop l'utilité des passages et des maximes que nous avons cités. Au surplus, le moment actuel va montrer ce qu'en pense le clergé, puisque le journal touche à une époque de réabonnement. Le rédacteur paroit redouter un peu cette épreuve, qui, dit-il, est fatale aux journaux nouvellement établis, qui n'ont pas satisfait les espérances qu'ils avoient fait naître. Or, d'après tout ce qui précède, il me semble que les espérances du clergé n'ont pas lieu d'être satisfaites.

On a donc été un peu surpris de voir dans le dernier cahier une lettre de M. l'abbé Methivier, curé de Grigneville, diocèse d'Orléans, qui félicite les rédacteurs de soutenir avec un noble courage la grande cause, la cause du peuple, son bien-être, son émancipation, et qui leur promet dans le clergé un infatigable auxiliaire. Il est vrai que M. le curé de Grigneville, tout occupé des intérêts de sa paroisse et surtout de ceux des pauvres, vouloit obtenir pour eux quelque faveur de la Société pour l'émancipation intellectuelle, et que c'est peutêtre pour cela qu'il a exagéré son utilité et ses services. Il a trop d'esprit, de zèle et de piété pour être dupe des gens qui se moquent du sacerdoce orgueilleux et des superstitions de paroisse.

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Nous avons parlé du Moniteur des villes et des campagnes, qu'on se propose d'opposer au Journal des connoissances utiles. Le Moniteur commencera à paroître au mois de janvier prochain. On s'abonne rue du Pot-de-Fer-St-Sulpice, n° 5.

NOUVELLES ECCLÉSIASTIQUES.

PARIS. Le mercredi 21, jour de la fête de la présentation de la sainte Vierge, M. l'archevêque a fait au séminaire Saint-Sulpice la cérémonie annuelle de la rénovation des promesses cléricales, et a prononcé un discours plein de piété et d'onction sur ces paroles: Dominus pars... Plusieurs ecclésiastiques du dehors étoient venus prendre part à cette édifiante cérémonie.

Nous savons qu'un évêque qui avoit eu à réclamer auprès du ministère contre des mesures vexatoires prises à l'égard des membres de son clergé, faisoit sentir combien ces mesures en général étoient contraires à l'intérêt même du gouvernement. Elles alarmoient les catholiques, elles mécontentoient tous les hommes droits. L'arbitraire et l'injustice révoltent. Quoi! tandis que la politique d'un gouvernement sage devroit être de calmer, de pacifier, d'adoucir, on iroit réchauffer les passions, ranimer les haines, créer de nouveaux embarras et de nouveaux obstacles! Ce seroit une marche qui ne pourroit qu'être funeste à l'autorité et lui susciter de nouveaux embarras. Le prélat insistoit encore sur un autre point, c'est qu'il étoit étonnant que, pour avoir des renseignemens sur des ecclésiastiques, on ne s'adressât point à l'autorité ecclésiastique qui pouvoit, qui devoit connoître les faits. On accueilloit les plaintes, les dénonciations, les accusations contre le clergé ou contre ses membres, et on ne prenoit pas ensuite le moyen d'éclaircir les sujets de reproches et de vérifier l'exactitude des griefs. De là des injustices, des mesures précipitées, des rigueurs dont peut-être on aura reconnu trop tard les fâcheux résultats, puisqu'elles contribuent à faire naître ou à entretenir le mécontentement et l'agitation dans les esprits. Puissent les dépositaires de l'autorité comprendre la sagesse des conseils qu'on leur adressoit!

-Nous avons rendu compte, il y a quelques mois, d'une brochure intitulée : Conseils au clergé sur les refus de sépulture, et nous croyons avoir montré qu'elle renfermoit plusieurs choses fausses, hardies ou déplacées, surtout de la part d'un ecclésiastique qui devroit donner l'exemple du respect pour les règles de discipline reçues dans l'Eglise. Toutefois, nous avons vu cette brochure annoncée successivement avec éloge dans deux ou trois journaux ; il y a pourtant un léger changement dans le titre. L'écrit qu'ils annoncent est intitulé: Lettre au clergé, au lieu de Conseils. Mais l'auteur est le même, et il y a tout lieu de croire que c'est le même ouvrage. On dit que cet écrit est substantiel, qu'il jette une grande

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lumière dans la question des sépultures, et que les ecclésiastiques le liront avec fruit. La bonne foi des rédacteurs qui en ont fait cet éloge a sans doute été surprise; ils auront reçu de confiance une note trop favorable. Il paroît même qu'un d'eux a déjà conçu quelques soupçons sur le mérite de la lettre; il annonce qu'il l'examinera. S'il veut bien lire l'article de notre no 2003, nous nous flattons qu'il reconnoîtra la justesse de nos observations, et qu'il ne pourra approuver ni le ton, ni les maximes de M. Juin. Les mêmes journaux ont annoncé en même temps, et toujours avec éloge, un nouveau recueil périodique qui va paroître sous le titre d'Etudes religieuses. L'annonce porte que ce recueil convient aux bureaux ecclésiastiques. Nous ne savons ce que c'est que ces bureaux; mais si l'auteur de ce recueil est, comme on l'assure, le même que celui de la Lettre au clergé, on peut craindre de n'y pas trouver toute l'exactitude et toute la sagesse désirables. D'ailleurs, un curé en province, qui veut faire un journal à Paris, risque beaucoup de négliger ou sa paroisse ou son journal, et peut-être même les deux à la fois.

- Le règne de la légalité devient de jour en jour plus ombrageux, et ses soupçons tombent sur les personnes les plus paisibles. M. l'abbé Aubergier, simple prêtre du diocèse de Vannes, homme sage et modeste, et qui n'a rien d'un conspirateur, n'a pu néanmoins échapper aux douceurs de notre régime de liberté. Il avoit été obligé de faire un voyage à Paris, et se félicitoit sans doute, à son retour, d'avoir été préservé des désagrémens et des avanies que des ecclésiastiques ont à craindre aujourd'hui dans les voitures publiques; mais il n'a pu se soustraire aux soupçons d'une police inquiète. Son voyage coïncidoit avec l'arrestation de madame la duchesse de Berri; il habite, à Vannes, chez M. le comte de Francheville, que sa qualité d'ancien député royaliste et sa fidélité, toute bretonne, ne recommandent pas auprès du nouveau gouvernement. Il n'en faut pas davantage pour conclure que M. Aubergier est un conspirateur, qu'il a été chargé de quelque mission importante, et qu'il est urgent de s'assurer de lui. En effet, les gendarmes sont allés le prendre, et l'ont conduit, à travers la ville étonnée, au parquet du procureur du Roi. Long a été l'interrogatoire. Après les plaintes et les reproches généraux sur le désir de dominer des prêtres, on a lu à M. l'abbé Aubergier une lettre du préfet du Morbihan, qui, conformément aux ordres du ministre de l'intérieur, le signaloit comme agent carliste, et chargé des intérêts de Henri V, dans le Morbihan. En conséquence, il demandoit qu'on fit chez l'ecclésiastique une visite domiciliaire. Les intentions du vigilant préfet ont été remplies, la visite a eu lieu. Le procureur du Roi et le juge d'instruction, accompagnés de gendarmes et d'un greffier, se sont transportés au domicile de M. Aubergier. Tout a été fouillé avec grand soin; on

et

a même voulu lire toute la correspondance d'un prêtre qui exerce à Vannes le ministère, et dont les secrets devoient être respectés. Une prière, un ruban blanc, une médaille de piété, étoient, à des yeux prévenus, des signes de conspiration. Ces simples mots : Marie a été conçue sans péché, qu'il est d'usage, dans quelques communautés, d'inscrire sur les murs, ou de mettre sur des images, pour rappeler un ineffable mystère, étoient des mots d'ordre et de ralliement. M. Aubergier fit quelques représentations: Bah! lui dit-on, vous devriez nous remercier, cela vous vaudra un évéché sous Henri V. C'est ainsi que ces messieurs mêloient agréablement leurs ingénieuses plaisanteries à leurs recherches rigoureuses. Il est inutile de dire que, dans cette visite si scrupuleuse, on n'a rien trouvé, par cette raison assez naturelle, c'est qu'il n'y avoit rien à découvrir. Etoit-ce la peine de faire tant de bruit, et de tourmenter si long-temps un ecclésiastique, sans aucun prétexte?

On nous parle souvent de conspiration, de conspiration carliste, de conspiration républicaine; il en est une autre qui se suit sans relâche, et qui ne néglige aucun moyen pour réussir : c'est la conspiration anti-prêtre. Elle a des journaux à ses ordres, elle a des agens et des colporteurs, elle a des charlatans et des émissaires de toute sorte. Dernièrement un charlatan a distribué pendant plusieurs jours, sur la place publique de Cambrai, un prétendu Recueil historique où se trouvoit un article fort court et fort insignifiant sur le choléra. Mais ce n'étoit là que le passeport, et le reste du recueil se partage entre la constitution de la nouvelle église française, la loi qui rétablit le divorce, et un tableau des crimes et des attentats des Jésuites. En tête est un portrait du vénérable Achille de Châtel (car c'est ainsi qu'on l'appelle), quoique Châtel n'ait jamais pris ce prénom ni le de. On dit qu'il est né à Paris en 1780, qu'il étoit aumônier de la cour, qu'il est homme de lettres; tout cela est faux. On prétend qu'il célèbre ses cérémonies avec avantage dans plusieurs églises de Paris et dans plusieurs départemens; et le fait est qu'il n'a point d'église à Paris, et qu'il n'a d'abord eu qu'une chambre, puis une salle de bal, puis un hangard; ce qui n'est pas un avantage. On assure que plusieurs monumens ont été érigés à cet égard, et doivent fixer les regards de tout bon citoyen. Or, tout Paris sait qu'il n'y a et ne peut y avoir aucun monument érigé par ou pour Châtel. On donne en 12 articles la constitution de ce qu'on appelle la nouvelle église française, et ces articles ne sont pas tout-à-fait les mêmes que ceux que Châtel a proclamés. C'est une variante au symbole de la nouvelle église ; église bien respectable, puisque la voilà proclamée sur la place publique par un crieur des rues. Cependant les gens des campagnes ont dans leur simplicité acheté le Recueil; ils ont eu doublement tort de se presser si fort d'y dépenser leur argent, car, quelques

jours après, cet écrit se distribuoit gratis dans les campagnes environnantes. Déjà les patriotes du pays se réjouissoient d'apprendre qu'ils auroient des curés mariés, dont toutes les fonctions seroient gratuites, et qui en outre seroient obligés de distribuer aux pauvres tout ce qu'ils auroient au-delà de 1200 fr. Mais, loin d'avoir du superflu, comment pourroient vivre des prêtres qui ne recevroient rien? Saint Paul a dit que ceux qui servent à l'autel doivent vivre de l'autel. Les prêtres ont besoin de nourriture et de vêtement comme le reste des hommes, et il est tout simple qu'ils aient dans leurs travaux une existence honnête et assurée. Châtel, qui avoit promis de faire tout gratis, a bientôt senti que cela avoit beaucoup d'inconvéniens dans l'application, et aujourd'hui il fait payer les chaises dans son église ; il a établi des quêtes à tous les offices, et il sollicite par tous les moyens les assistans de contribuer au soutien de l'église française. Pour revenir au Recueil soi-disant historique, le dernier article qui concerne les Jésuites est un tissu d'horreurs et de mensonges. L'auteur a mis sur le compte de ces religieux des crimes auxquels ils sont tout-à-fait étrangers. Il annonce hypocritement qu'il ne prétend pas attaquer la religion catholique dans laquelle il est né, et les ministres des autels, qui, à tous égards, méritent nos respects. Qui pourroit être dupe d'une telle protestation? La plaisante manière de témoigner son respect aux prêtres, que de diffamer, de calomnier tout un corps respectable d'ecclésiastiques, qui ont honoré l'Eglise par leur piété, leur zèle et leurs services, et qui ne sont odieux aux ennemis de la religion qu'à cause de leurs vertus! Enfin, une misérable gravure est accolée à ce misérable Recueil; elle vous apprend qu'une grande conspiration a éclaté dernièrement à Paris; ce sont les Jésuites qui en sont les auteurs : vous les voyez rangés en bataille et déguisés en habit bourgeois. Mais, ce qui ne vous surprendra pas moins, c'est que cette conspiration est celle des 5 et 6 juin, qu'on ne s'étoit pas avisé jusqu'ici d'attribuer aux Jésuites. Les amis du général Lamarque, les gens du mouvement, les républicains seront sûrement piqués qu'on veuille leur ravir la gloire de cette insurrection patriotique. Ce qu'il y a encore d'assez curieux dans la gravure, c'est qu'on y voit le portrait de M. Pineau, curé dans la Vendée, qui a été accusé d'avoir pris part à l'insurrection de ce pays; ce portrait est absolument le même que celui de Châtel : l'auteur a voulu sans doute s'économiser la dépense d'une nouvelle gravure. Au reste, il n'a pas voulu que nous ignorassions son nom, et, au bas de la gravure, on lit: Rédigé et distribué par Bonnet. Bonnes gens des campagnes, méfiez-vous de ce qui vous viendra d'une telle main!

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M. Joseph-Antoine Salzmann, évêque de Bâle, qui a été établi à la résidence de Soleure, et qui a sous sa juridiction la plus grande partie de la Suisse occidentale, a adressé la circulaire

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