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veillées. On redouble chaque jour de précautions. Le Journal de la Guyenne, qui seroit le mieux en position pour être bien informé, est réduit à donner trèspeu de détails. On n'est même pas bien sûr que Madame reçoive les journaux qui lui soní adressés ; cependant le Journal de la Guyenne et la Gazette de France assment que ces deux fenilles lui parviennent. La princesse se promène dans le jardin, quand le temps le permet. On avoit répandu le bruit que M. de Ménars et Mademoiselle de Kersabieç devoient être séparés d'elle; nous ne pouvons croire à cet acte de rigueur qui laisseroit l'illustre captive dans une solitude désespérante. Il seroit cruel qu'elle fût condamnée à un si profond isolement dans le moment même où tant de voix généreuses s'élèvent de toutes parts pour réclamer l'honneur de s'enfermer avec elle.

Des voix s'élèvent de toutes parts en faveur de madame la duchesse de Berri; chaque jour de nouvelles adresses se signent. Nous avons à citer aujourd'hui celles des avocats du barreau d'Aix, des étudians de Toulouse au nombre de 240, des habitans de Toulon, de Moulins, d'Aix, de Carpentras, d'Orange, d'Avignon, d'Agen, de Sisteron, de Tarascon, de Florac (Lozère), de Poitiers, de Blois, de St-Sauveur-le-Vicomte (Manche), de Clermont-Ferrand, de Moissac, des communes de Léberon et Cadenet (Vaucluse); et celles des dames de Marseille, d'Aix et de Beaucaire. C'est aux deux magistrats de Poitiers que les habitans de Salon (Bouches-du-Rhône) ont cru devoir faire connoître l'expression de leur douleur. Un grand nombre d'habitans de Rennes préparent une pétition aux chambres contre l'illégalité de l'arrestation de la princesse. Ceux de Carpentras et d'Orange ont fait parvenir une protestation au président du conseil. M. Lodoïx de Gombert, magistrat démissionnaire, domicilié à Aix, a souscrit une adhésion à l'adresse de Nîmes, qu'il trouve la plus conforme à ses sentimens. MM: de Kergorlay père et fils, détenus à Aix; M. Sermet de Tournefort, avocat au Val; M. d'Esclevin, chevalier de St-Louis à Antibes; M. de Durantie, à SaintZacharie, M. Gibert, ancien émigré de Condé, à Arles, et M. le docteur Trucy ́on't adhéré à celle de Marseille. Les journaux royalistes de province sont remplis de semblables protestations. La Gazette de Guyenne contient, entre autres, celles de M. le comte L. de Calvimont et de M. Moulins, chevalier de la Légiond'Honneur; la Gazette du Périgord, celles de MM. Villatte, ancien juge-depaix, et Gardonne. M. le vicomte X. de Reynier, à Marvejols, s'est associé aux sentimens exprimés par M. de Conny dans la Quotidienne. M. Condurier, vendéen, qui a perdu presque tous ses parens en 1793, et qui a vu périr sous ses yeux cinq de ses enfans par suite de la révolution de 1830, s'est offert en otage pour madame la duchesse de Berri, avec sa femme et les débris de sa famille. Des offres semblables ont été transmises au ministère par M. le marquis de Villette, ancien écuyer du duc de Bourbon, et fils d'un député à la Convention, M. Didier, chevalier de le Légion-d'Honneur à Angers, M. de Villeperdrix, ancien maire de Pont-St-Esprit, M. le comte de Chabrière et madame de Balz de Trenquelléon, à Gajean (Gironde). M. Lapierre, ancien receveur des contributions indirectes à la Penne-lez-Aubagne, a écrit directement à Louis-Philippe pour obtenir pour lui,

sa femine et sa fille, la faveur d'être renfermés dans le château de Blaye, afin d'y servir S. A. R. M. de Mauduit, ancien officier de la garde royale, a proposé à la Quotidienne d'ouvrir, comme la Gazette du Lyonnais, une souscription pour lui assurer tout ce dont elle pourroit avoir besoin pendant sa captivité. MM. de Kergorlay, de St-Priest, de Bourmont fils et les autres détenus par suite de l'affaire de Marseille, ont embrassé les premiers cette proposition, et ont souscrit de suite pour 3,200 fr.; M. Paira, ancien officier de la garde royale, pour 100 fr. A Paris, enfin, le centre du libéralisme, des dames avoient recueilli 50,000 fr. à la nouvelle de l'arrestation de la princesse, et cette somme fut employée en quelques heures à l'achat de différens objets qui pouvoient lui être nécessaires, et qui la précédèrent à Blaye. M. le docteur de Verneuil fait partie des médecins qui s'étoient proposés pour donner des soins à la princesse. M. Casimir de Sèze, ancien procureur du Roi à Pont-Audemer, MM. le baron de Croze, ancien préfet, et Joyau, bâtonnier de l'ordre des avocats de Caen, avoient été aussi oubliés parmi les jurisconsultes qui lui ont offert l'appui de leur talent. M. le vicomte de Mostuejorels, ancien député de l'Aveyron, doit être encore cité parmi les personnes qui ont signé individuellement des protestations contre l'arrestation de la princesse. M. l'abbé de Briand, prêtre à Saintes, est du nombre des ecclésiastiques qui avoient sollicité l'honneur de servir d'aumôniers à S. A. R. Plusieurs journaux contenoient ces jours derniers une lettre de M. Hyde de Neuville, sur le refus que lui a fait le président du conseil d'être admis comme conseil auprès de MADAME. Le ministre s'est borné à répondre que le gouvernement avoit pris le parti d'interdire toute communication avec elle. Ce rôle de police, que remplit ainsi le maréchal Soult, paroît à M. Hyde de Neuville flétrir ses anciens lauriers., Sous la terreur de 1793, ajoute-t-il, il étoit permis de faire parvenir des consolations aux prisonniers du Temple.

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Un mot de M. Thiers à la chambre des députés a trahi la haute pensée politique qui préoccupe les ministres. Cette pensée, à laquelle paroît tenir la paix de leur conscience, est le témoignage qu'ils peuvent se rendre d'avoir fait tout ce qui dépend d'eux pour étre compromis. Leur grande consolation, suivant M. Thiers, est de sentir au fond du cœur qu'ils y ont réussi, et que l'arrestation de madame la duchesse de Berri les a compromis autant qu'ils pouvoient le désirer. Singuliers hommes d'Etat que les nôtres, qui croient que tout est dit pour le bonheur de la France, parce qu'ils se sont mis la corde au cou pour se pendre à la branche cadette! Eh! ils sont bien bons de se tourmenter l'esprit là-dessus; tout le monde est parfaitement convaincu qu'ils n'ont aucun intérêt à se séparer d'elle, et qu'ils n'ont rien de mieux à faire que de vivre ensemble le plus long temps possible. Seulement ils out tort d'imaginer qu'il y ait un si grand mérite de leur part à être compromis vis-à-vis de la branche aînée, parce qu'ils savent bien qu'on ne l'est jamais avec elle, et qu'on ne isque rien à la persécuter tant qu'on veut. Elle leur a prouvé assez souvent, Dieu merci, qu'elle ne garde point la mémoire des offenses, et qu'il y a toujours eu grande facilité pour ses ennemis à rentrer auprès d'elle en grâce et en place.

Aussi ne faut-il pas faire trop d'attention non plus à un autre mot de M. OdilonBarrot, qui disoit, ces jours-ci, à la chambre des députés, que, hors de la monarchie de juillet, il n'y a que des impossibilités. Des impossibilités !... Ah! messieurs, vous savez bien pourtant qu'avec l'autre monarchie il y avoit bien moyen de s'arranger entre vous et elle, et que son grand malheur a été précisément de n'avoir jamais su vous rien refuser.

M. Salvandy a publié tout récemment un écrit politique où il établit que, dans l'affaire de l'état de siége, le ministère se trouve être le seul et unique condamné, et que d'avance il s'est lui-même reconnu pour tel, afin d'éviter les disputes là-dessus. Cependant nous connoissons des condamnés qui empêchent le ministère d'être le senl et unique, comme on le prétend dans la brochure, et qui auroit certainement beaucoup gagné à changer de sort avec lui, si le marché avoit pu se faire. Tels sont les Caro, les Secondi et tant d'autres que nous pourrions citer comme plus malheureux que lui dans l'affaire de l'état de siége. On voit bien que l'ouvrage de M. Salvandy a été publié avant l'adresse des chambres. S'il étoit à recommencer, il est probable qu'il verroit quelque chose à corriger dans le chapître où il a si mal rencontré le seul et unique condamné; à moins qu'il ne voulût absolument s'en tenir à dire comme l'abbé de Vertot: Tant pis! mon siége est fait.

Il paroît que M. Thiers a voulu se donner le petit amusement d'envoyer un de ses journalistes au siége de la citadelle d'Anvers. Gens plus sérieux que nous, les Anglais ont mieux aimé y envoyer un commissaire; et nous croyons qu'ils ont raison. Quoi qu'il en soit, il est plaisant de voir un rédacteur de journal au milieu des sapeurs et des pionniers, prendre des notes dans la tranchée pour M. Thiers. C'est tout au plus si Buonaparte auroit osé se permettre ce luxe d'historiographes pour les bulletins de sa grande armée. Mais il faut bien passer quelque peu d'enfantiilage aux débutans qui n'ont jamais rien vu. Outre que ce doit être un grand plaisir pour M. le ministre de l'intérieur, de pouvoir lire aux curieux de la Bourse et de la chambre des députés les rapports qu'on lui adresse de la tranchée d'Anvers, cela lui aidera plus tard à justifier, auprès des contribuables, du bon emploi des millions qu'ils lui confient pour ses frais de police secrète. Seulement, nous croyons devoir l'avertir charitablement qu'on lui écrit des baliverues. Car, en même temps qu'on lui représente le théâtre du siége comme un terrain où l'on ne peut donner un coup de pioche sans en faire jaillir de l'eau, on l'avertit que le général Chassé pourroit bien avoir caché là-dessous des mines auxquelles il ne faut pas se fier. Or, le remède seroit ici à côté du mal, puisque le gouverneur de la citadelle ne sauroit mettre le feu à ses poudres sans que l'eau se trouve là pour l'empêcher de prendre.

L'adresse de la chambre des députés a été présentée le 4, à midi, par M. Dupin, président, suivie de la députation tirée au sort, et dont MM. Dupont (de l'Eure), Royer-Collard et Mauguin faisoient partie. Nous comptions donner cette adresse, mais elle n'a point été publiée depuis ses modifications. On la re

garde, à ce qu'il paroît, comme assez insignifiante. Voici, au surplus, la réponse de Louis-Philippe :

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MM. les députés, l'adresse que vous me présentez me cause une vive satisfaction. Les sentimens qu'elle exprime et ceux que vous m'avez manifestés, il y a peu de jours, lorsque vous êtes venus en masse auprès de moi, me touchent profondément. Entouré de cinq fils que je laisserai à la France pour la défendre, je crains peu les criminelles tentatives des factions. Tous mes vœux sont pour la liberté, la prospérité et la gloire de la France; ces vœux sont aussi les vôtres. C'est avec une parfaite sincérité que mon gouvernement travaille à les accomplir, et ce n'est qu'avec votre concours qu'il peut travailler utilement. Je suis heureux de vous voir vous associer à ses vues; votre adhésion est la plus sûre garantie de leur sagesse. Cette heureuse harmonie des pouvoirs de l'Etat assurera le maintien de l'ordre et des lois, imprimera le plus grand essor à notre prospérité, et inspirera à l'Europe cette sécurité qui est la base de la paix générale. Bientôt noos verrous nos soldats, nos enfans, rentrer avec honneur sur le sol de la patrie, et nous rapporter, des bords de l'Escaut, un nouveau gage de la conservation de la paix. Ce jour, que nous attendons avec impatience, et qui ne sauroit être éloigné, donnera la plus sûre, la plus éclatante démonstration de la sagesse du système que nous soutenons ensemble avec tant de persévérance. Je vous remercie encore une fois de l'appui que vous accordez à mon gouvernement, pour m'aider à remplir les vœux de la France et assurer ses destinées. »

Une ordonnance du 12 novembre a ouvert au ministère de la justice un crédit supplémentaire de 24 millions 820,000 fr., pour dépenses non prévues au budget, et qui s'appliquent à la répression des troubles dans le Midi et dans l'Ouest, à la mobilisation de l'armée du Nord, à l'expédition de Bone en Afrique, à l'occupation d'Ancône, etc.

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Le Moniteur du 1er décembre contient un long rapport de M. d'Argout sur la situation générale du commerce et de l'industrie. Le ministre rend compte des progrès ou des souffrances de chacune de leurs branches depuis la révolution de juillet, de l'emploi des secours votés par les chambres, etc. Il termine en annonçant l'intention de présenter aux chambres des projets de loi sur l'expropriation pour cause d'utilité publique, sur les moyens d'achever les canaux et sur la police du roulage.

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- M. de Garaube, qui, à raison de sa promotion au grade de colonel, a été soumis à la réélection, a été réélu.

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Au collège de Martel (Lot), il y a eu trois tours de scrutin: au premier, M. Soulhié, candidat libéral, a eu 55 voix; M. Hennequin, avocat, candidat royaliste, 38 voix, et M. Touron, 35. Au second tour, M. Soulhić a eu 83 voix, et M. Touron, 79. Il a été procédé à un scrutin de ballottage entre ceux-ci, et M. Touron a été élu.

Les professeurs du collège de France ont nommé, aux deux chaires d'histoire de la philosophie ancienne et de langue sanscrite, MM. Jouffroy et Eug. Burnouf.

L'élection des nouveaux membres de l'académie des sciences morales et politiques, qui devoit avoir lieu le 3, a été remise au 8, les votans n'ayant pu s'entendre.

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Il y a eu en France, depuis la révolution de juillet jusqu'au 1′ octobre dernier, 281 saisies de journaux et 251 jugemens. Les rédacteurs ou gérans ont été condamnés ensemble à 1226 mois de prison et à 347,550 francs d'amende, Quatre-vingt-six journaux ont été frappés, dont 41 à Paris seulement. Tels sont les résultats de la liberté de la presse, pour laquelle on s'est battu dans les glo rieuses journées.

Jeanne, l'un des principaux insurgés du cloître St-Méry, avoit reçu de la famille régnante, sur des protestations de dévoûment, 405 fr. en huit fois, depuis le 5 juin 1831. Cet individu avoit servi en Espagne sous le drapeau blanc, dans la campagne de 1823, et il étoit parvenu ensuite à se faire attacher au secré tariat de la duchesse de Berri. Il jouissoit, depuis la révolution de juillet, à las quelle il prit une part active, d'une pension de 400 fr., et il avoit obtenu la décoration spéciale.

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Le sieur Laurent, directeur de Tivoli, ouvert sans autorisation, s'étoit pourvu devant la cour royale contre l'arrêté du préfet de police qui lui a fait fermer cet établissement. Le préfet de la Seine, prétendant que la question est du ressort de l'autorité administrative, a fait signifier un arrêté de conflit à la cour royale. La cour a sursis à toutes procédures jusqu'à ce que le conseil d'Etat ait prononcé sur ce conflit.

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M. Charles de Brouckère, ancien ministre de la guerre en Belgique, est arrivé à Paris. L'affaire du coup de pistolet n'est pas éclaircie. Voici encore un incident: Dans la soirée du 3, un individu d'une trentaine d'années se présenta chez lę préfet de police en disant qu'il avoit une révélation importante à faire. 1 Introduit auprès de M. Gisquet, il déclara que c'étoit lui seul qui étoit coupable de l'attentat, qu'il s'étoit déterminé à se livrer à la justice pour sauver les personnes innocentes qui ont été arrêtées; mais il ne voulut pas se nommer. Le lendemain, il fit appeler M. Parquin, bâtonnier de l'ordre des avocats, pour le consulter sur les dangers que courroient son père et sa mère s'il faisoit connoître son nom; et, ayant été rassuré à cet égard, il dit qu'il se nommoit Courtois, et qu'il étoit maître maçon à Versailles. Ayant craint ensuite que sa famille fût interrogée, il rétracta ses aveux, en ajoutant qu'il ne s'étoit offert ainsi à la mort que parce qu'il étoit malheureux. Le nommé Courtois est retenu en prison jusqu'à plus ample information.

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MM. Hennequin, Guillemin, de Belleval, Bouhier de l'Ecluse, et autres avocats de Paris, ont été choisis pour défenseurs par les Vendéens qui vont être jugés à Chartres.

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M. Castan, arrêté sous la prévention de complot, vient d'être mis en liberté. On l'a retenu pendant 80 jours au secret le plus rigoureux. La restauration n'offre pas d'exemple de ces rigueurs.

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