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que Louis-Philippe étoit un gueux, un mauvais gas, un usurpateur, et que, malgré l'ordre qu'il avoit reçu, il ne chanteroit pas la prière pour lui. Ce curé est le même qui, il y a quelques mois, fut condamné à vingt-cinq francs d'amende pour avoir maltraité un couvreur qui venoit de placer un drapeau tricolor sur l'église. Il a fait défaut dans la dernière affaire, et la cour a prononcé un arrêt qui porte que le fait est constant et a eu lieu le 11 août dernier à Saint-Georges-du-Bois. Les termes dont s'est servi le curé sont, dit l'arrêt, bien plus repréhensibles encore dans la bouche d'un ecclésiastique, qui doit donner l'exemple de la modération et de la soumission aux lois; ils constituent le délit prévu par l'article 86 du code pénal. Mais, considérant l'âge avancé du prévenu, la violence extraordinaire et l'irréflexion habituelle de son caractère, le petit nombre des personnes présentes et l'espèce d'intimité existant entre elles, ce qui permet d'admettre des circonstances atténuantes, la cour a condamné M. Charenton à un mois de prison, cinquante francs d'amende et au remboursement des frais envers l'Etat. Il semble que si la cour avoit des soupçons sur les témoins, elle auroit pu y avoir encore plus d'égards dans la condamnation et qu'elle auroit pu aussi s'abstenir de qualifier aussi durement le caractère du prévenu.

Lorsque nous avons rendu compte, dans un de nos derniers numéros, de l'affaire des Soeurs de Binic, nous n'avions pas sous les yeux le texte précis de l'arrêt de la cour de cassation sur cette affaire. Cet arrêt vient d'être publié et fait connoître l'avis de la cour de cassation sur plusieurs points importans. La cour estime que les écoles primaires de filles doivent être sous la surveillance des préfets, mais elle reconnoît que les institutrices d'écoles de filles, appartenant à des congrégations, sont assimilées aux Frères des écoles chrétiennes pour leur brevet de capacité; elle reconnoît encore que les décrets de 1808 et de 1811 ne sont pas applicables aux écoles de filles, quant à l'amende. On a cru rendre service en insérant ici la partie principale du long considérant de l'arrêt de la cour, afin d'indiquer aux personnes intéressées dans cette question, le fondement des difficultés qu'on leur oppose :

« Attendu que, suivant l'ordonnance du 3 avril 182ò, les disposstions de l'ordonnance du 29 février 1816 sont déclarées applicables aux écoles de filles comme aux écoles de garçons; que la surveillance attribuée à la commission de l'instruction publique sur les écoles de garçons, est confiée pour les écoles de filles aux préfets des départemens; que, suivant l'art. 3, les institutrices d'écoles de filles, appartenant à des congrégations religieuses légalement reconnues, sont assimilées aux Frères des écoles chrétiennes, en ce point que leurs brevets de capacité seront expédiés sur la présentation de leurs lettres d'obédience, et que ces brevets seront déposés dans les mains des supérieures des congrégations; que, par l'ordonnance

du 31 octobre 1821, les maisons d'éducation de filles, de degrés supérieurs, sont comme les écoles primaires de filles, maintenues sous la surveillance des préfets des départemens; qu'aucune école primaire, pension ou institution de filles ne peut être ouverte sans que la maîtresse se soit pourvue d'une autorisation du préfet du département; que les contraventions aux dispositions ci-dessus doivent être, ainsi que le prescrit l'art. 5, poursuivies d'après les règlemens de police municipale, sans préjudice de peines plus graves qui pourroient être requises pour des cas prévus dans le Code pénal;

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Qu'enfin, d'après l'art. 1er de l'ordonnance royale du 21 avril 1828, les ordonnances des 29 février 1816 et 3 avril 1820, concernant l'institution primaire, doivent être exécutées dans tout le royaume, sauf les modifications qui suivent, en ce qui concerne les écoles catholiques, modifications sans importance sur l'espèce dont il s'agit présentement, d'autant plus que l'art. 10 maintient et confirme par cela même les dispositions de l'art. 3 de celle du 3 avril 1820, relativement à la délivrance des brevets de capacité, sur le vu des lettres d'obédience à l'égard des Frères des écoles chrétiennes et des membres de toute association charitable également autorisée;

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› Attendu qu'il suit de ce qui précède que la cour royale de Rennes, en statuant par son arrêt du 25 juillet dernier, sur l'appel interjeté par les sœurs Sainte-Ursule et Saint-Augustin de la congrégation du Saint-Esprit, établie à Binic, du jugement contre elles rendu le 23 avril précédent, par le tribunal de police correctionnelle de Saint-Brieux, par lequel elles avoient été condamnées par défaut en 100 francs d'amende et aux frais, par application de l'art. 56 du décret dú 15 novembre 1811, comme convaincues d'avoir enseigne publiquement et tenu une école de jeunes filles sans autorisation dans la commune de Binic, a pu, en réformant ce jugement, quant à l'amende, déclarer que les décrets du 7 mars 1808 et du 15 novembre 1811, n'étoient pas applicables aux écoles de filles; mais qu'en ne faisant pas défense aux sus-nommées de tenir une école de jeunes filles en la commune de Binic sans autorisation et sans avoir obtenu un diplôme ou certificat de capacité, en conformité des ordonnances du Roi, citées ci-dessus, et en ne prononçant pas contre elles l'amende de police municipale fixée par les art. 600 et 606 du code du 3 brumaire an IV, applicable à toutes les contraventions de simple police pour tous les cas non prévus par le code pénal, la chambre des appels de police correctionnelle a violé l'art. 2, no 3 de la 3o sect. du décret du 22 décembre 1789, les art. 2 et 3 de l'ordonnance du Roi du 3 avril 1820, l'art. 5 de l'ordonnance du 31 octobre 1821 et l'ensemble des dispositions de celle du 21 avril 1828, concernant l'instruction primaire, et les art. 600 et 606 du code du 3 brumaire an IV. »

NOUVELLES POLITIQUES.

PARIS. Les réclamations en faveur de madame la duchesse de Berri se multiplient chaque jour. De nouvelles adresses à S. A. R. ont été signées par des habitans du Quercy, par ceux des villes de Castres, de Bergerac, de Cette, de Thorigny, de

Compiègne, de Dinan, de Niort, de Barre ( Lozère), de Tourves (Var), de SaintLaurent-Aigouzes (Gard), par ceux du canton de Claret (Hérault), par les dames de Sumène et de Gignac (Gard), et par celles de la province du Quercy. Un certain nombre de demoiselles des montagnes du Périgord ont écrit à Miles Stylite de Kersabiec, pour lui exprimer combien elles envient son sort. Les habitans de Saint-Affrique, de Milhau, et MM. les comtes Christophe et Amblard de Beaumont à Buzet (Lot-et-Garonne), ont signé une protestation contre la mesure arbitraire dont la princesse est l'objet. Les anciens conseillers de préfecture et secrétaire-général de ce département ont souscrit à l'adresse des royalistes d'Agen. Madame Bayard, née de Witte, nourrice de M. le duc de Bordeaux, et domiciliée à Lille, a demandé avec les plus grandes instances, au ministre de la justice, la permission de servir Madame pendant sa captivité. De nouvelles offres de services ont été faites à la princesse par M. d'Orville, ancien secrétaire de ses aumônes; madame de Boisdoré, qui étoit attachée à sa maison, et par M. de Pignol, ancien sous-préfet de Dax, domicilié à Sarlat. La Gazette du Midi reçoit journellement des adhésions à la protestation de Marseille. La souscription ouverte au bureau de ce journal royaliste s'élevoit, le 30 novembre, à 10,139 fr. Dans cette somme figure 3,000 fr. donnés par M. et madame de Sairas, et le modeste tribut de plusieurs artisans et des dames de la Halle-Vieille. Les souscriptions ouvertes par différentes feuilles de Paris et de province, pour les fidèles Marie Bossi et Charlotte Moreau, grossissent chaque jour.

Les journaux de la révolution font continuellement remarquer à la royauté citoyenne qu'elle auroit grand tort de ne pas se fier aux hommes de l'opposition, ́actuelle, parce que véritablement ils ne lui veulent aucun mal, et que toutes leurs sympathies sout pour elle. Oui, cette opposition est à vous, lui disent-ils, et vous n'avez pas de meilleure amie. Elle se regarde comme inséparable du trône de juillet; elle a les mêmes intérêts que lui, elle veut la dynastie de la révolution, et elle se feroit plutôt tuer que d'y renoncer. Au fond, tout cela est un peu vrai; les libéraux sont infiniment plus sincères envers Louis-Philippe qu'ils ne l'étoient envers Charles X, du temps de la comédie, et nous les croyons réellement moins disposés à trahir la branche cadette que la branche aînée. Mais ce n'est pas là précisément la question entre les patriotes de juillet dans les querelles qui les divisent. On sait très-bien que ce n'est pas la place du Roi citoyen qu'ils veulent, et qu'au contraire ils sont d'accord pour la lui laisser. Mais les autres places ! Voilà de quoi ils se tourmentent, et ce qui rend la guerre si chaude entre les gens qui cherchent à prendre le budget d'assaut et ceux qui veulent le garder. Eh! mon Dieu, nous savons bien de quelle manière l'opposition et les embarras pourroient cesser: tout le malheur vient de ce que nous n'avons pas deux budgets.

On a beaucoup vanté les sacrifices qu'a faits l'administration pendant le choléra, et la générosité avec laquelle elle n'a pas épargné les dépenses pour le traitement des personnes attaquées du terrible fléau et reçues dans les hospices. La dépense s'est, dit-on, montée à 2 millions, indépendamment des dons qui ont été faits. Maintenant, qui paiera cette somme? Le gouvernement ne veut pas s'en

charger; la ville de Paris n'en a pas le moyen. On a donc signifié à l'administration des hospices que c'étoit à elle à supporter ces frais extraordinaires. Mais comment y suffire au milieu des dépenses journalières des hospices? Est-ce par des retranchemens sur les gros traitemens des fonctionnaires supérieurs? Oh! non; il n'est pas permis d'y toucher. Les seules réductions possibles, c'est sur le nombre et les gages des gens de service, sur leur nourriture, sur celle des religieuses, et enfin, qui le croiroit? sur les besoins mêmes des malades. Les infirmiers avoient 10 fr. par mois, ils n'en auront plus que 8; ils avoient une livre et demie de pain, ils n'en auront plus qu'une livre. Des gens de peine, des charretiers qui se lèvent à quatre heures du matin, et qui font un service très fatigant, éprouvent la même diminution; on leur retranche également une portion de viande à diner, et le soir, à souper, ils n'auront que des légumes. Les religieuses sont sujettes, comme les autres, à ces retranchemens; et des filles qui ont un service journalier et pénible, et dont plusieurs sont jeunes, vont jeûner et ruiner leur santé, au risque de ne pouvoir continuer leurs soins aux malades. Ce n'est pas tout; elles sont assimilées, pour le choix et la quantité des alimens, aux domestiques des hospices, et sont de ce qu'on appelle le second réfectoire. Tels sont les égards qu'on leur témoigne pour un dévoûment qui toucheroit les cœurs les plus barbares; telle est la reconnoissance que l'on montre pour un service quotidien, inspiré et soutenu par les vertus les plus pures. Les économies se borneront-elles là? Non. Des philanthropes ont beaucoup crié contre le précepte de l'Eglise sur l'abstinence du vendredi et du samedi; c'étoit une superstition, une puérilité, une tyrannie. Eh bien! l'administration est plus sévère que l'Eglise; elle a décidé que tous les employés, les religieuses, les gens de service, feroient trois jours maigres par semaine, les mercredi, vendredi et samedi. Voilà donc une espèce de petit carème toute l'année. Bien des estomacs s'en accommoderont-ils ? c'est ce dont on se soucie fort peu. Du moins, cette fureur d'économiser ne tombera pas sur les malades, et c'est peut-être pour avoir davantage à leur donner qu'on a opéré tant de réductions. Illusion! Les malades ont aussi leur tour. D'habiles spéculateurs ont calculé qu'il y avoit du luxe jusque dans la tisane; en conséquence, il a été décidé qu'on supprimeroit 60,000 fr. sur les 100,000 fr. qui étoient destinés au sucre, au miel et aux sirops pour les tisanes. Ainsi les tisanes dans les hospices ne seront plus que de l'eau; les malades les plus pauvres pourroient en avoir autant chez eux. Aussi ils disent eux-mêmes qu'il n'est pas nécessaire d'aller à l'hospice pour y être ainsi soigné. Après une économie de cette force, il ne faut plus s'étonner et se plaindre de rieñ. Nous ne réclamerons donc pas contre la suppression des sacristains pour les chapelles des hospices, ni contre la suppression d'un des aumôniers de la Salpêtrière; ces mesquines économies sont en harmonie avec tout ce que nous venons de voir,

Les conseils municipaux de Nevers, de Château-Chinon et de Saverne ont refusé de voter une adresse sur l'évènement du Pont-Royal. Celui de La Flèche avoit voté, à la majorité d'une voix, une adresse à Louis-Philippe, pour avoir, dit cette pièce, échappé, comme par miracle, à l'horrible attentat. On a consenti ensuite à

retrancher ces mots, par miracle, sur les observations d'un esprit fort, membre du conseil, qui a représenté que cela ressentoit l'ancien régime et la superstition, et qu'on ne pouvoit ainsi parler à un Roi qui ne l'est pas par la grâce de Dieu. Le vote d'une adresse semblable, au conseil municipal de Dieppe, a donné lieu à de fâcheux débats. M. de Lamarre, l'un des conseillers, a protesté contre cette adresse, et a déclaré qu'il alloit se pourvoir contre qui de droit à l'effet d'obtenir l'annulation d'un acte qu'il considère comme illégal et contraire aux attributions du conseil.

Des personnes qui connoissent le théâtre des opérations de siége d'Anvers ne peuvent s'empêcher de plaindre le général Sébastiani, auquel il est échu de manœuvrer sur la rive gauche de l'Escaut. On ne se fait pas d'idée d'une situation comme la sienne, qui le condamne à reculer devant des nappes immenses d'inondation, contre lesquelles nul effort ni aucune tactique militaire ne peuvent rien. Il est impossible de comprendre ce qu'on veut faire de lui dans la position qui lui est assignée. Les approches d'Anvers lui sont interdits à la distance de plus d'une lieue; et un bon batelier, qui auroit quelques petites barques à sa disposition, seroit d'un plus grand service que lui avec toute sa division. La seule chose qu'on puisse raisonnablement supposer, c'est qu'on l'a mis où il est dans l'espérance de tirer quelque parti de lui pour gêner la retraite des Hollandais, quand l'heure d'abandonner la citadelle sera venue. Mais dans cette saison de l'année, aucun calcul de ce genre ne sauroit être établi que par un froid continu de douze à quinze degrés. Autrement, tout le littoral de la rive gauche de l'Escaut appartient à qui est maître des digues et des écluses, et cent mille hommes n'y feroient pas plus que deux mille. Si donc le général Sébastiani fait des bulletins, ils se réduiront nécessairement à constater les crues des inondations, સે peu près comme l'échelle des piles du Pont-Neuf sert à mesurer la hauteur de la

Seine.

M. de Saint Didier, préfet de l'Aube, est nommé préfet du département de Seine-et-Marne, en remplacement de M. Boby de La Chapelle, appelé à la préfecture de la Mayenne.

M. le général Bugeaud est nommé au commandement d'une brigade d'infanterie de la garnison de Paris.

- M. Aymonet de Contréglise, colonel du 37° régiment de ligue, est promu au grade de maréchal-de-camp.

M. Max. Cerfbeer, chef de bataillon d'état-major, vient d'être attaché, en cette qualité, au cabinet de M. le général Schneider, directeur du personnel de la guerre. M. Cerfbeer eşt Juif.

Les colléges électoraux de Dôle (Jura), Mortain (Manche), Altkirch (HautRhin), Luçon (Vendée), et Avallon (Yonne), sont convoqués pour le 27 décembre à l'effet de nommer chacun un député, en remplacement de MM. Lempereur, Leverdays, de Reinach, Marchegay et Finot, démissionnaires.

-

M. de Kermorial a été réélu à Quimperlé. Il avoit pour concurrent M. le duc de Fitz-James.

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