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La reine régente d'Espagne a levé l'interdit qui existoit pour les ecclésiastiques de se rendre à Madrid et dans les résidences royales, a autorisé l'enseignement de la philosophie dans le collége des Jésuites établi au Passage, à quelques lieues de Bayonne, et a prescrit la fermeture des tribunaux les jours fériés. On a arrêté à Stockholm les barons de Duben et de Vegesack, comme ayant ourdi une conspiration, tendant à faire remonter l'ancienne famille de Suède sur le trône.

Le choléra s'est manifesté, mais foiblement, à Drammen, en Norwège.

Une tempête sans exemple a ravagé, du 21 au 24 septembre, les parages d'Odessa, dans la mer Noire; 40 à 50 bâtimens marchands ont péri.

Le prince Démétrius Ypsilanti, qui a combattu pour l'indépendance de la Grèce, est mort dernièrement dans ce pays. L'assemblée nationale a résolu d'accorder le droit de bourgeoisie à toute la famille du défunt, et de lui laisser la maison qu'il habitoit pour honorer sa mémoire.

M. de Lamartine, après avoir vu Nauplie et Athènes, est arrivé le 10 septembre à Baruth en Syrie, où sa famille passera l'hiver. Le poète emploiera ce temps à visiter la Syrie, à étudier le désert et les ruines de Palmyre. A son retour, il visitera avec sa famille Jérusalem et les lieux saints.

Ali-Pacha, qui s'est emparé du pouvoir à Tripoli de Barbarie, consolide son usurpation. Le parti de Joussouf, dont il est le second fils, s'affoiblit chaque jour, et il n'y a plus guère que le consul anglais, M. Warrington, qui le soutienne. Le jeune Bey a établi, dit-on, des institutions quasi-libérales.

Des colonies de bienfaisance à établir en France, par M. de Monglave, in-8°.

Un auteur espagnol a remarqué que ce qui manque le moins aux pauvres, ce sont les administrateurs. On pourroit dire la même chose des pays où l'on gaspille la fortune publique : ce qui manque le moins, ce sont les économistes. Ils affluent de tous côtés pour vous offrir leurs services et se mettre à votre disposition.

En voici un qui nous arrive encore avec une petite brochure de 15 pages, où il a su faire entrer assez d'idées d'économie pour ruiner tout un royaume. C'est à M. d'Argout qu'il propose ses Colonies de bienfaisance; et, pour ne pas trop l'effaroucher, il commence par lui montrer qu'en créant seulement ponr quarantequatre mille francs d'emplois qu'il lui indique, il trouvera des administrateurs du bien des pauvres qui feront l'affaire.

Malheureusement ce n'est là qu'un des moindres chapitres de la dépense. Il y en a d'autres qui font bien autrement frémir. Dans le plan de l'auteur, il s'agit de procurer des travaux de défrichement à cette innombrable population de prolétaires, de pauvres et d'ouvriers sans ouvrage, dont la France se trouve encombrée. Or, voulez-vous savoir de quelle manière on pourvoit à leur établissement et à leurs moyens d'existence? Après leur avoir donné des landes, des terrains

vagues et des marais à défricher, on leur procurera des instrumens aratoires, des animaux domestiques, des bœufs, des vaches, des chevaux et des moutons; puis on leur fera bâtir des maisons, des écuries et des étables, pour eux et leurs bêtes puis on leur avancera de l'argent pour gagner le temps des récoltes, et attendre les produits de leur culture. Ces avances, du reste, ne dureront que seize ans ; après quoi, messieurs les habitans des colonies de bienfaisance s'arrangeront pour vivre comme ils pourront, et pour essayer de marcher tout seuls.

Mais, d'ici-là, devinez ce qu'il en coûtera au budget de M. d'Argout? L'auteur a pris soin de lui arranger d'avance tous ses calculs, de façon à ce qu'il n'ait plus qu'à payer. Pour simplifier son compte, il n'opère que sur une colonie de six mille individus. Il trouve qu'on peut les établir convenablement, moyennant une avance de quatre millions, et il suffira de la renouveler, dit-il, pendant un ou deux exercices pour que tout soit fini. En prenant le terme moyen de cet un ou deux exercices, cela ne fait qu'un et demi; et, dans ce cas, les avances à faire pour l'établissement de six mille individus dans les Colonies de bienfaisance n'iroient pas au-delà de dix millions. Or, il est évident que, si vous n'avez en France que six mille pauvres qui vous embarrassent, vous pourrez vous délivrer d'eux avec quelques centimes additionnels qui ne grossiront pas prodigieusement votre budget. Mais, si vous en avez soixante mille, au lieu de six, cela fera déjà cent millions de francs à débourser. Et si, au lieu de soixante mille, vous en avez dix fois plus, ceci fera le milliard tout rond. Mais aussi, nous en convenons, vous aurez trouvé un débouché pour six cent mille prolétaires, vagabonds ou mendians, si vous pouvez les décider à travailler dans vos Colonies de bienfaisance.

Il n'y a pas à raisonner sur des choses pareilles; les pauvres de M. de Monglave sont évidemment trop chers, et il n'y a pas en France une maison de Sœurs de Charité qui ne les prît à un rabais considérable. Si M. d'Argout veut seulement dépenser la vingtième partie de ce qui lui est demandé par l'auteur des colouies de bienfaisance, nous nous chargeons volontiers de lui faire trouver son affaire, sans sortir des limites ordinaires de la charité religieuse; mais bien entendu que la philanthropie et les économistes ne s'en mêleront pas, car il leur faut des monts d'or pour faire très-mal ce que la religion sait faire très-bien à meilleur marché. B.

Le Gérant, Adrien Le Clere.

COURS DES EFFETS PUBLICS.-Bourse du 5 novembre 1832.

Trois pour 100, jouissance du 22 juin, ouvert à 67 fr. 55 c. et fermé à 67 fr. 50 c. Cinq pour 100, jouissance du 22 sept., ouvert à 96 fr. 20 c. et fermé à 96 fr. 10 c. Actions de la Banque.

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1655 fr. 00 c.

IMPRIMERIE D'AD. LE CLERE ET COMP".

JEUDI 8 NOVEMBRE 1832.

ROYAL

(N 2021,

Nouvelles Considérations historiques et critiques sur 40 l'auteur et le livre de l'Imitation, par M. Gence, in

in-8

Cet écrit parut d'abord en 1812, mais étoit beaucoup moins considérable qu'aujourd'hui. M. Gence, qui n'avoit point encore donné sa traduction française et son édition latine de l'Imitation, n'avoit pas traité la question de l'auteur avec autant de soin et d'étendue. Il a fait de nouvelles recherches, il s'est livré à un nouvel examen, et se flatte d'avoir épuisé la matière. Déjà il a énoncé son opinion sur l'auteur de l'Imitation dans trois articles de la Biographie universelle, les articles Gersen, Gerson, et Thomas à Kempis. Depuis, il a joint à son édition latine une description très-curieuse et très-soignée des manuscrits et des anciennes éditions de l'Imitation; nous en avons parlé, no 1359, et nous avons, à cette occasion, plutôt exprimé nos doutes sur la question de l'auteur qu'énoncé une opinion. Nous n'aurions osé contredire M. Gence sur un point de critique qu'il a examiné depuis vingt ans avec tout le soin dont il est capable, et nous n'en savions pas assez pour lutter avec lui. Ce que nous avons de mieux à faire en rendant compte de ses Nouvelles Considérations, c'est de mettre sous les yeux du lecteur les raisons et les autorités que M. Gence fait valoir dans sa brochure pour appuyer son sentiment sur le véritable auteur de l'Imitation.

Il est, comme on sait, trois personnages pour lesquels ou revendique principalement l'honneur d'avoir composé l'Imitation, Ces personnages sont Thomas à Kempis, chanoine régulier; Jean Gerson, chancelier de l'église et de l'université de Paris, et Jean Gersen, abbé de Verceil. L'existence de ce dernier personnage est une chose assez douteuse. Le manuscrit d'Arone dans lequel seul Gersen est nommé et qualifié abbé, est le titre principal qui a fait supposer un auteur distinct du chancelier Gerson. Mais l'histoire et les monumens se taisent sur ce Gersen. On le suppose abbé de St-Etienne de Verceil, contemporain de saint François d'Assise et originaire de Cavaglia ou Canabacum, près Verceil; ces suppositions, il faut l'avouer, ne reposent que sur des indices bien foibles et sur

Tome LXXIV. L'Ami de la Religion.

D

nazza,

des données fugitives. Le seul témoignage de quelque poids est le manuscrit d'Arone, manuscrit apporté de Gênes en 1579, et trouvé dans la maison des Jésuites d'Arone, près Milan, qui étoit jadis un monastère de Bénédictins. Ce manuscrit étoit regardé comme très-ancien ; il fut apporté en France en 1686, et livré à l'examen de 19 savans, parmi lesquels Ste-Beuve, le président Cousin, Ducange, Renaudot, Baluze, Alexandre, Ellies Dupin, Hardouin, Bulteau, Chamillart, Oudin, etc., déclarèrent qui, réunis dans l'abbaye St-Germain-des-Prés, dans une espèce de procès-verbal du 28 juillet 1687, que ce manuscrit avoit au moins 300 ans d'antiquité. Mais d'autres savans ont depuis émis une opinion contraire; nous citerons, entre autres, le professeur Hartzheim, le chanoine Amort et le Jésuite Zaccaria. De plus, M. Gence, ayant reçu de M. Verbibliothécaire de Turin, un fac simile de 6 pages du manuscrit d'Arone, l'a soumis à l'inspection de plusieurs savans modernes, qui l'ont jugé du 15° siècle. Tel a été l'avis de MM. Dacier, Gosselin, Van Praët, Petit-Radel, Hase, etc. Dans ce fac simile, que M. Gence a reproduit dans son édition latine de l'Imitation en 1826, le nom de Gersen n'est même pas bien écrit, et on liroit plutôt Gesen. D'autres manuscrits portent le nom de Gessen, et quelques-uns lui donnent la qualité de chancelier de Paris, ce qui indiqueroit que le nom de Gersen étoit une faute de copiste, et que c'étoit Gerson que l'on vouloit désigner. Cependant ce Gersen a eu de nombreux partisans; Cajetan, Valgrave, Mezler, Quatremaire, Deltau, Mabillon, le cardinal d'Aguire, Valart, et en dernier lieu Cancellieri, Napione et de Gregori ont soutenu l'attribution de l'Imitation à Gersen. Seroit-il vrai qu'ils eussent adopté ce sentiment parce qu'ils étoient Bénédictins ou Italiens, et que l'honneur de leur ordre ou de leur patrie ait influé à ce point sur leur jugement et sur leur critique? C'est ce qu'il seroit aussi injuste qu'impoli de dire de tous. Quoi qu'il en soit, M. Gence nous paroit assez fondé dans ce qu'il dit de la foiblesse des motifs sur lesquels repose l'attribution à

Gersen.

L'attribution au religieux à Kempis est peut-être moins aisée à détruire. Thomas Haemerchen ou Haemerlein, en latin Malleolus, étoit né vers 1380 à Kempen, au diocèse de Cologne, d'où lui vint le nom d'à Kempis. Il fit profession

dans la maison des chanoines réguliers de Sainte-Agnès, près Zwoll, dans l'Over-Yssel, et fut fait prêtre en 1413. Il mourut en 1471, en réputation de piété, et on lui attribue plusieurs ouvrages ascétiques. M. Gence lui-même, qui ôte au bon religieux la gloire d'avoir composé l'Imitation, le cite comme auteur d'un assez grand nombre de sermons, d'un traité de Fidelis Dispensator, et d'un dialogue sur le Mépris du monde; du reste, il le considère surtout comme un habile calligraphe. A Kempis, dit-il, copia d'abord des livres de chant, puis deux Missels, puis une Bible entière en 4 vol. in-fol., qui se conservoit au monastère du Corps du Christ, à Cologne. Il transcrivit ensuite le recueil où, en tête de plusieurs traités, se trouvent les quatre livres de l'Imitation. Ce recueil est souscrit de la même formule que la Bible: Finitus et completus anno 1441, per manus fratris Thomæ Kemp. Il est assez remarquable que la même formule se trouve sur la Bible transcrite par le bon religieux en 1439, sur le Missel et sur des opuscules de saint Bernard, copiés également par lui; d'où M. Gence conclut que à Kempis n'a eu d'autre part à l'Imitation que de la copier avec plus d'habileté et d'intelligence. Le mot per manus semble en effet indiquer un travail tout-à-fait manuel. Dans la chronique du couvent de Ste-Agnès, il est dit que à Kempis écrivit la Bible en entier, et beaucoup d'autres livres, pro domo et pretio, c'est-à-dire, sans doute, pour l'usage de la maison, et pour le céder, moyennant un prix, à d'autres communautés : c'étoit un des revenus de la maison.

Le recueil connu sous le nom de Manuscrit d'Anvers existoit chez les Jésuites de cette ville, et a servi aux célèbres Bollandistes. Quatre éditions principales ont été faites sur ce manuscrit par Sommalius, Rosweyde, Bollandus et Chifflet; elles ont été plusieurs fois réimprimées, et passent pour les plus soignées : néanmoins, M. Gence, dans son édition latine de l'Imitation, y a remarqué des variantes plus ou moins vicieuses. Ce Manuscrit d'Anvers, dit M. Gence, est le plus ancien connu avec le nom de Kempis; celui d'Augsbourg, de 1440, supposé sans nom par Bollandus, est réellement anonyme. Il n'en a pas été produit d'antérieur pendant et depuis la contestation élevée au 17° siècle entre Fronteau, Quatremaire et Naudé, sur l'auteur de l'Imitation. Fronteau, qui étoit pour à Kempis, obtint un arrêt du parlement de Paris, du 12 février 1652, qui, sur

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