ayant pelloient Matrices, dont ils fe fervoient après cela pour fondre des Caractères de cuivre ou d'étain, avec lesquels ils pouvoient imprimer tout ce qu'ils vouloient au lieu qu'auparavant ils les tailloient à la main. Et en effet, l'Art de l'Imprimerie éprouva dans le commencement de fon invention de grandes difficultés, comme je l'ai oui dire il y a plus de trente ans à Pierre OPILIO (Schoiffer) de Gernfheim, citoyen de Mayence, gendre du premier Inventeur de cet Art. Car entrepris l'impreffion d'une Bible, ils depensèrent plus de quatre mille florins avant d'avoir fini la quatrième feuille. Or ledit Pierre Opilio d'abord ouvrier, enfuite gendre, comme je l'ai dit, du premier Inventeur de l'Art de l'Imprimerie, homme ingénieux & adroit, imagina un moyen plus facile de fondre les Caractères, & perfectionna l'Art au point où nous le voyons aujourd'hui. Ces Inventeurs tinrent leur découverte cachée pendant quelque temps, jufqu'à ce que leurs ouvriers la répandirent, d'abord à Stras bourg, enfuite chez les autres nations.... Ces trois Inventeurs, Jean Guttemberg, Jean Jean Fuft & Pierre Schoiffer demeuroient enfemble à Mayence dans une maifon dite Zumjungen, qu'on a appellée depuis jufqu'à ce jour L'IMPRIMERIE. J'ajoûterai ici la foufcription qui eft à la fin d'un autre Ouvrage de Tritheme intitulé, Breviarium Hiftor. de origine regum & gentis Francorum, imprimể du vivant de l'Auteur à Mayence même ; elle porte: Cette présente Chronique a été achevée d'imprimer en 1515, la veille de Sainte Marguerite, dans la célèbre ville de Mayence premier berceau de l'Imprimerie, par Jean Schoiffer petit fils de Jean Fuft citoyen de ladite ville, qui a été le premier inventeur de l'Art fusdit ; lequel Jean Fuft commença à imaginer & inventer par fon génie l'Art de l'Imprimerie en 1450, enfuite il le perfectionna & parvint au point d'imprimer en 1452, aidé cependant du travail & des inventions de Pierre Schoiffer de Gernsheim fon ouvrier & fon fils adoptif, à qui il donna fa fille Chriftine Fuft en mariage comme une jufte récompenfe de fes découvertes. Ces deux hommes, Jean Fuft & Pierre Schoiffer, tinrent cet Art caché, B faifant jurer à leurs ouvriers & domeftiques de garder le fecret, & les obligeant par ferment à ne le divulguer en quelque manière que ce fût. Mais enfin en 1462, il fut répandu par toute la terre par ces mêmes ouvriers, & cet Art fit par-là de nouveaux progrès. On voit dans les paffages que je viens de rapporter, des chofes contradictoires. Trithème y raconte fommairement des faits dont il ne veut donner qu'une idée générale fans entrer dans aucun détail, comme je l'ai dit; c'eft pourquoi il rapporte à un même temps des opérations éloignées les unes des autres, & il présente fous un même point de vue, des artistes ou inventeurs qui ont des prétentions toutes différentes. Il dit d'abord que c'eft Guttemberg qui le premier a inventé & imaginé l'art d'imprimer des livres avec des Caractères, puis plus bas il donne cet · honneur à Fauft. En parlant de Schoiffer, il le dit gendre du premier Inventeur de l'Art; ce qui devroit, felon lui, fe rapporter à Guttemberg qu'il a décoré le premier de ce titre, & cepen dant cela ne peut regarder que Fauft. Il reconnoît enfin tout à la fois pour inventeurs de l'Art, Guttemberg, Fauft & Schoiffer. Ce n'eft pas vraifemblablement qu'il ait ignoré la part différente que chacun avoit à la gloire de cette invention, puifqu'il admet d'abord Schoiffer comme ouvrier dans la première fociété, mais c'est que fon deffein n'étoit que de parler en général. Il agit de même en parlant des progrès des Caractères: Après l'impreffion du Catholicon_ils trouvèrent dit-il, la manière de fondre les formes de toutes les lettres de l'alphabet latin qu'ils appelloient MATRICES, dont ils Je fervirent après cela pour fondre des Caractères de cuivre ou d'étain. La mémoire de l'Auteur eft certainement ici en défaut, les Caractères de fonte ne vinrent point immédiatement après le Catholicon, puifque cette même Bible dont il parle, faite par Guttemberg & Fauft, eft en Caractères mobiles de bois, qui furent le fruit du premier progrès des Caractères après les planches fixes du Catholicon. Quelques années Ce après, la nouvelle fociété de Fauft & de Schoiffer fit encore ufage des Caractères mobiles de bois de deux groffeurs différentes de celle des premiers, avec lefquels ils imprimèrent en 1457 le Pfeautier, dont ils publièrent une nouvelle édition faite avec les mêmes Caractères de bois, le 29 Août 1459. Ce ne fut que deux mois après celle-ci, que parut enfin pour la première fois un livre en Caractères de fonte, intitulé Durandi Rationale divinorum Officiorum, comme nous le verrons plus bas. que dit Trithème de la manière de fondre les formes des lettres appellées MATRICES, fait voir que les idées qu'il avoit là-deffus n'étoient rien moins qu'exactes. Il avoit vû anciennement chez Schoiffer des poinçons d'acier, des matrices de cuivre, & des lettres fondues en étain: fa mémoire ne lui fourniffant point une idée nette de toutes ces parties, & fon peu d'expérience dans l'art ne lui permettant pas d'en faire la diftinction, il n'eft pas étonnant qu'il les ait confondues. Jamais on n'a fondu de matrices; on les a toûjours frappées |