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BATARD, SECT. II, §. III.

enfans naturels dont les pères mourraient après la publication de cette loi

L'affaire est renvoyée à la cour d'appel d'Agen, où Jean dit Lalo y conclud à ce qu'il soit déclaré enfant naturel légalement reconnu de Jean Lalo, et à ce qu'en conséquence ses heritiers collatéraux soient condamnés à lui abandonner les trois quarts des biens qu'il a laissés, conformement à la loi du 14 floreal an 11 et à l'art. 757 du Code civil.

1769, passée entre Marie Renom et Jean Lalo, n'est qu'un acte tendant à éteindre un procès, et fait seulement pour terminer la contesta tion qui s'était élevée entre ladite Renom et ledit Lalo, sur la plainte portée par la première contre le dernier; que ledit Lalo ne reconnait d'aucune manière dans cet acte, être le père de l'enfant dont ladite Renom était accouchée; qu'une reconnaissance de paternité doit être libre et spontanée; qu'on ne peut pas voir cette liberté dans un acte consenti pour se délivrer des poursuites rigoureuses d'une procédure criminelle et de ses suites, surtout lorsque le traité n'a pour but que de faire cesser la captivité et les craintes que peuvent inspirer les suites d'un procès criminel; que ledit Jean n'a jamais eu la possession d'état d'enfant de Jean Lalo; qu'il ne rapporte point un titre authentique de reconnaissance, tel

Les héritiers collatéraux répondent que, devant le tribunal de première instance de Lesparre, il n'a pas été question de la prétendue filiation de Jean Lalo; que le jugement de ce tribunal n'a rejeté provisoirement sa demande, qu'à raison de la lacune alors existante dans la loi du 12 brumaire an 2; qu'ainsi, la cour d'appel d'Agen ne peut que confirmer ce jugement; que, si cependant elle croit pouvoir prononcer sur le fond, ils ne s'y op-qu'il est exige par l'art. 334 du Code civil; et posent pas; mais qu'alors il y aura lieu de recevoir l'appel incident qu'ils déclarent subsidiairement interjeter de ce même jugement, en ce qu'il n'a statué que sur la provision; émendant quant à ce, debouter definitivement Jean dit Lalo de toutes ses demandes. Le 17 prairial an 12, la cour d'appel d'Agen pose ainsi les questions à juger :

« 1.0 Peut-il être prononcé sur l'étatde l'appelant, ou les parties doivent-elles être renvoyées en premiere instance sur cette qualité? 2. La transaction du 21 avril 1769 est-elle un titre authentique, tel qu'il est exigé par le Code civil, pour établir la filiation? 3.0 Si cette transaction était insuffisante pour établir la filiation, ne devrait-elle pas encore régler les droits de l'enfant, conformément à l'art. 3 de la loi du 14 floréal an 11?

» Et attendu 1.o (continue-t-elle) que Jean se disant Lalo n'a introduit son action devant le juge de Lesparre, qu'en qualité de fils naturel de Jean Lalo; que la délivrance de la succession de ce dernier, demandée par ledit Jean, n'était que la conséquence directe de cette qualité; que, si le tribunal de Lesparre n'a pas cru devoir prononcer définitivement sur cette question, il n'en résulte pas moins que la qualité d'enfant naturel de Jean Lalo a été agitée devant lui, ce qui résulte surtout du jugement du tribunal d'appel de Bordeaux qui déclara ledit Jean, fils naturel de Jean Lalo, et lui attribua sa succession; qu'il suit de là que la cour, nantie de l'appel du jugement du tribunal de Lesparre, doit juger la cause dans l'état où elle fut présentée à ce tribunal, mais sur la législation qui règle aujour d'hui cette matière ;

>> Attendu 2.o que la transaction du 21 avril

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que ledit Jean Lalo est décédé depuis la publication de la loi du 12 brumaire an 2;

» Attendu 3.o que, si l'on pouvait considérer la transaction de 1769 comme un acte authentique de reconnaissance, et tel qu'il est cxigé par le susdit art. 334, les droits de l'enfant naturel se trouveraient réglés dans cet acte; et aux termes de l'art. 3 de la loi du 14 floreal an II, ledit Jean n'aurait à prétendre sur la succession de Jean Lalo, que ce qui lui est atladite transaction; tribué

par

» La cour met l'appellation et ce dont a été appelé au néant, emendant, deboute ledit Jean de toutes ses demandes par lui formees devant ledit tribunal de Lesparre, comme fils naturel de Jean Lalo...... ».

et

Jean dit Lalo se pourvoit en cassation, soutient 1.o que la cour d'appel d'Agen a prononcé sur des demandes qui n'avaient pas été formées en première instance, que par-là elle a excédé ses pouvoirs, et contrevenu à l'art. 7 de la loi du 3 brumaire an 2; — 2.0 qu'au fond, elle a violé les lois relatives à l'état et aux droits des enfans naturels.

« Le moyen de forme que vous propose le demandeur (ai-je dit à l'audience de la section des requêtes, le premier messidor an 13) n'est ni recevable ni fondé.

» Il n'est pas recevable, car c'est le demandeur lui-même qui, devant la cour d'appel d'Agen, a pris, sur le principal, les conclusions dont elle l'a débouté; et conséquemment, si en prononçant sur ces conclusions, la cour d'appel d'Agen avait violé la loi du 3 brumaire an 2, ce serait le demandeur lui-même qui l'y aurait provoqué.

» Il n'est pas fondé; car, en quelle qualité le demandeur avait-il intenté devant les pre

miers juges son action à fin d'envoi en possession de l'hérédité de Jean Lalo? Il l'avait intentée comme fils naturel de celui-ci; il avait donc soumis aux premiers juges la question de savoir si véritablement Jean Lalo était son pére naturel.

» Et il importe peu que les premiers juges L'eussent pas décide cette question. Il n'était pas nécessaire qu'ils l'eussent décidé pour que la cour d'appel eût le pouvoir de la décider elle-même : il suffisait pour cela qu'ils eussent été mis à même d'y statuer; et la cour d'appel a pu y statuer à leur défaut, d'après le principe general qui veut que les juges d'appel fassent tout ce qu'ont pu et dù faire les juges de premiere instance.

» Au fond, que prétend le demandeur, lorsqu'il allegue vaguement que la cour d'appel d'Agen a violé les lois relatives à l'état et aux droits des enfans naturels? Il veut dire sans doute qu'en écartant la transaction du 21 avril 1769, cette cour a violé, et l'art. 338 du Code civil qui porte : la reconnaissance d'un enfant naturel sera faite par un acte authentique, lorsqu'elle ne l'aura pas été dans son acte de naissance; et l'art. 3 de la loi du 14 floréal an 11, aux termes duquel toutes les conventions qui ont fixé l'état et les droits des enfans naturels dont les pères sont morts dans l'intervalle de la publication de la loi du 12 brumaire an 2 à celle du Code civil, doivent avoir leur pleine exécution.

» Mais d'abord, l'art. 334 du Code civil ne parle que de la reconnaissance libre et spontanée ; il ne parle pas de la reconnaissance arrachée par la crainte des suites d'un proces, soit civil, soit criminel; et ce qui prouve invinciblement que tel est l'esprit dans lequel il dispose, c'est que par l'art. 340 il interdit toute recherche de la paternité. On ne peut donc pas appliquer sa disposition aux reconnaissances qui, dans le temps où la recherche de la paternité était permise, n'ont été données, même par acte authentique, que pour faire cesser des poursuites judiciaires.

>> Et non seulement tel est l'esprit, telle est la volonté bien prononcée du Code civil ; mais c'est ainsi que vous le jugiez, même avant sa promulgation; c'est ainsi que vous le jugiez, même à l'égard des enfans dont les pères étaient morts avant la loi du 12 brumaire an 2 (1).

» Mais, disait le demandeur à la cour d'Appel d'Agen, cette jurisprudence doit aujourd'hui flechir devant l'art. 3 de la loi du 14 flo

(1) V. le Plaidoyer du 18 floréal an 13 rapporté ci-dessus.

réal an 11 cet article ordonne que les con»ventions et les jugemens passés en force de » chose jugée, par lesquels auraient été fixés » l'état et les droits des enfans naturels (dont » les pères sont morts depuis la promulgation » de la loi du 12 brumaire an 2, et avant celle » du Code civil), seront exécutés selon leur » forme et teneur ». Il assure donc son plein et entier effet à la transaction du 21 avril 1769; il veut donc que je sois, conformément à cette transaction, traité comme l'enfant naturel de Jean Lalo; il déclare dont légale et suffisante la reconnaissance de mon état d'enfant naturel de Jean Lalo, écrite dans cette tran

saction.

» Mais quelles sont les conventions, quels sont les jugemens que maintient cet article? Ce sont, et ce sont uniquement les conventions faites, les jugemens rendus entre les enfans naturels et les héritiers de leurs prétendus pères. C'est ce que la section civile vient de juger de la manière la plus positive.... (1).

» Nous ne pouvons donc ici avoir aucun égard à la transaction du 21 avril 1769; et dèslà, le demandeur se trouve dénué de reconnaissance authentique de sa prétendue filiation; dès-là, par conséquent, sa requête doit être rejetée, et c'est à quoi nous concluons ». Arrêt du premier messidor an 13, au rapport de M. Doutrepont, qui,

« Attendu que, pour qu'une reconnaissance d'enfant naturel ait les effets qu'ont voulu lui donner les lois nouvelles, il faut qu'elle soit faite par le père, de la manière la plus libre; et que celle faite par Jean Lalo entre les deux guichets, et pour éviter une poursuite criminelle, n'a pas ce caractère ;

» Attendu qu'il est évident que l'art. 3 de la loi du 14 floréal an 11 n'est applicable qu'aux conventions faites entre l'enfant naturel et les héritiers de son père prétendu; et que d'ailleurs la prétendue reconnaissance, faite par Jean Lalo dans l'acte notarié du 21 avril 1769; ne peut avoir d'autres effets que ceux que cet acte lui attribue ; » Rejette le pourvoi.... »,

S.IV. 10. Les enfans naturels légalement reconnus, peuvent-ils exercer contre des tiers-acquéreurs qui ont traité avec l'héri tier légitime, les droits que leur confère le Code civil dans la succession de leur père? Ces droits leur donnent-ils une action réelle sur les biens héréditaires, ou sculement une action personnelle contre l'héritier?

(1) Ibid.

2o. Les enfans naturels légalement reconnus, dont les pères sont morts dans l'intervalle de la publication de la loi du 12 brumaire an à elle du Code civil, peuvent-ils, en vertu de l'art. 3 de la loi du 14 floré an 11, faire valoir contre des tiers-acquéreurs les transactions par lesquelles, dans ce même intervalle, ils avaient obtenu des héritiers légitimes, non-seulement les portions que le Code civil a depuis déclaré leur appartenir dans les biens héréditaires, mais même la totalité de ces biens?

Le 4 germinal an 3, mort de Jean-Baptiste Delasalle, laissant un frère, Louis-Frédéric, avec lequel étaient communs par indivis tous les biens qu'ils avaient, l'un et l'autre, recueillis des successions de leurs parens.

Le 7 vendémiaire an 4, Louis-Frédéric Delasalle, se regardant, par la mort de son frère, comme héritier de sa portion dans ces biens, et par conséquent comme proprietaire du tout, vend aux sieurs Lefebvre le domaine de Cumières, qui en faisait partie, moyennant 2,000,000 liv. en assignats, dont 1,000,000 liv. lui sont payés comptant.

Le 16 du même mois, la demoiselle Rolandeau se fait nommer tutrice d'une fille naturelle qu'elle a mise au monde le 19 février 1791, et que Jean-Baptiste Delasalle a reconnue le 19 mars suivant, en signant son acte de baptême.

Le 20 et le 21 du même mois, et le 15 brumaire de la même année, elle fait, en cette qualité, des oppositions mobilières et immobilières sur tous les biens laissés par le père de sa fille.

La seconde de ces oppositions est formée spécialement entre les mains des sieurs Lefebvre, comme acquéreurs de la portion indivise de Jean-Baptiste Delasalle dans le domaine de Cumières.

Le 5 brumaire an 4, les sieurs Lefebvre la dénoncent à Louis-Frédéric Delasalle, leur vendeur, demandent qu'il soit condamné à leur en rapporter la main-levée, et concluent à ce qu'il leur soit permis de consigner le res tant de leur prix, aux risques et périls de qui il appartiendra.

Le 6 frimaire an 4, jugement du tribunal civil du département de la Marne, qui ordonne qu'à la diligence de Louis-Frédéric Delasalle, la demoiselle Rolandeau sera mise en cause. En exécution de ce jugement, Louis-Fré déric Delasalle fait assigner la demoiselle Rolandeau à l'audience du 16 du même mois.

Le 16, jugement contradictoire entre les sieurs Lefebvre et le sieur Delasalle, qui donne

acte aux premiers de la réalisation de leurs offres ; mais, attendu la non-comparution de la demoiselle Rolandeau et l'insuffisance du délai de son assignation, ordonne, avant de statuer ultérieurement, que la cause sera continuée au 24.

Le 24, la demoiselle Rolandeau comparaît, et demande son renvoi devant le juge de son domicile à Paris.

Le sieur Delasalle combat ce déclinatoire, et soutient, au fond, que c'est entre ses mains, comme unique héritier de son frère, que doit être versée en totalité la somme offerte réellement par les sieurs Lefebvre.

Les sicurs Lefebvre, à qui ces débats sont étrangers, persistent dans leur demande en permission de consigner aux frais et risques de qui il appartiendra.

Le même jour, jugement qui déboute la demoiselle Rolandeau de son déclinatoire; ordonne provisoirement, sans préjudice aux droits des parties au principal, que les sieurs Lefebvre consigneront entre les mains du receveur du district de Reims, aux risques de qui il appartiendra, à la charge de l'opposition de la demoiselle Rolandeau ; ordonne que celle-ci défendra au fond, et continue la cause au 24 nivose suivant.

Le 12 nivose an 4, les sieurs Lefebvre consignent, en vertu de ce jugement, sans ap. peler ni le sieur, Delasalic, ni la demoiselle Rolandeau.

Le 21 du même mois, ils font sceller leurs lettres de ratification, à la charge des oppositions existantes.

Le 14 pluviose suivant, jugement contradictoire entre les sieurs Lefebvre et le sieur Delasalle, mais par défaut à l'égard de la demoiselle Rolandeau. Par sa première disposi tion, il déclare définitive la consignation faite en vertu du jugement provisoire du 12, et les sieurs Lefebvre bien et valablement décharges, tant envers le sieur Delasalle qu'envers tous autres; par la seconde, il donne defaut contre la demoiselle Rolandeau, déclare son opposition nulle, et autorise le sieur De lasalle à retirer la somme consignée par les sieurs Lefebvre.

La demoiselle Rolandeau forme opposition à ce jugement, non contre les sieurs Lefebvre, mais seulement contre le sieur Delasalle; et elle la fonde sur la loi du 12 brumaite an 2, qui appelle les enfans naturels à la succession de leurs pères et mères.

Assignée en débouté de cette opposition, la demoiselle Rolandeau propose diverses excep. tions déclinatoires qui sont rejetées par juge. ment du 24 ventose an 4.

Le 14 thermidor suivant, jugement contradictoire qui admet la demoiselle Rolandeau à la preuve de differens faits tendans à établir les droits de sa fille.

Le 29 thermidor an 5, le sieur Delasalle vend aux sieurs Lefebvre une maison située à Reims, et faisant partie des biens qui avaient été indivis entre lui et feu Jean-Baptiste Delasalle. Le prix de cette vente est fixé à 21,000 livres, dont 6,000 lui sont payées comptant.

Le premier vendémiaire an 6, il leur vend encore une rente de 250 livres, au principal de 5,000 livres, moyennant 3,000 livres qu'il reçoit et dont il donne quittanee.

Le lendemain, il leur vend encore une maison et un domaine situés à Rilly, moyennant la somme de 60,200 livres, à compte de laquelle il reçoit 19,200 livres.

Cependant il poursuit le jugement de l'op. position de la demoiselle Rolandeau ; et le 24 thermidor an 6, il en obtient un par défaut qui, sans avoir égard à cette opposition, or donne que celui du 14 pluviose an 4 sera exécute purement et simplement.

La demoiselle Rolandeau se rend appelante de ce jugement, et n'intime sur son appel que la partie qui l'avait obtenu, c'est-à-dire, le sieur Delasalle.

Le 6 vendémiaire an 8, transaction par laquelle le sieur Delasalle reconnait la fille de la demoiselle Rolandeau, héritière universelle de Jean-Baptiste Delasalle, et lui abandonne en cette qualite tous les biens laissés par celui-ci.

Le 27 brumaire de la même année, jugement passé de concert, d'après cette transaction, entre le sieur Delasalle et la demoiselle Rolandeau, par lequel le tribunal civil du département de l'Aisne dit qu'il a été mal jugé par le tribunal civil de la Marne; déclare l'enfant de la demoiselle Rolandeau, fille naturelle et héritière universelle de Jean-Baptiste Delasalle; l'envoye comme telle en possession de tous les biens composant sa succession; ordonne à Louis-Frederic Delasalle et à tous autres détenteurs de les lui remettre ; et déclare valable l'opposition formée par la demoiselle Rolandeau, le 21 vendémiaire an 4, entre les mains des sieurs Lefebvre.

Le 13 germinal an 8, munie de cette transaction et de ce jugement, la demoiselle Rolandeau fait assigner les sieurs Lefebvre au tribunal de première instance du département de la Seine, pour se voir condamner à lui délaisser, comme provenant de Jean-Baptiste Delasalle, la moitié des biens qu'ils ont acquis de Louis-Frédéric Delasalle; et subsidiairement à lui en payer la valeur, d'après l'estimation qui en sera faite.

Les sieurs Lefebvre forment une tierce-opposition au jugement du 27 brumaire an 8; et comme cette tierce-opposition ne peut être jugée que par la cour d'appel de Paris, le tribunal de première instance ordonne qu'il sera sursis à toute procédure devant lui, jusqu'au jugement à rendre par cette cour.

Devant la cour d'appel de Paris, la demoiselle Rolandeau déclare qu'elle n'entend pas se prévaloir contre les sieurs Lefebvre, de la disposition du jugemeut du 27 brumaire an 8, qui ordonne aux tiers détenteurs de délaisser à sa fille les biens de Jean-Baptiste Delasalle; et elle conclud à ce qu'au moyen de cette déclaration, dont elle demande acte, les sieurs Lefebvre soient déclarés non-recevables dans leur tierce-opposition.

Le 18 ventose an 11, arrêt de la cour d'appel de Paris, qui donne acte à la demoiselle Rolandeau de sa déclaration; et attendu qu'en conséquence, les sieurs Lefebvre n'ont aucun intérêt de contester l'état de l'enfant dont il s'agit, déclare leur tierce-opposition non-recevable.

En exécution de cet arrêt, la demoiselle Rolandeau fait réassigner les sieurs Lefebvre devant le tribunal de première instance du département de la Seine; et elle leur oppose l'art. 3 de la loi transitoire du 14 floréal an 11, concernant les droits des enfans naturels.

Les sieurs Lefebvre citent en garantie LouisFrédéric Delusalle, et demandent qu'en cas de dépècement de la maison de Reims, de la rente de 250 livres, et des biens de Rilly, les ventes de ces trois objets soient résiliées. Louis. Frédéric Delasalle comparait, et se réserve envers la demoiselle Rolandeau tous les droits qui résultent en sa faveur, tant de la transac tion du 6 vendémiaire an 8, que de tous actes y relatifs.

Le 14 fructidor an 11 " jugement par le. quel,

« Considérant que, jusqu'à la promulgation de la loi du 14 floréal an 11, il n'existait au cune loi qui reglat les droits des enfans naturels, dont les pères et mères sont décédées dans l'intervalle du 12 brumaire an 2 au 29 germinal dernier, époque de la promulgation du Code civil sur les successions;

» Que l'art. 1 de la loi du 14 floréal an 11 porte que les droits des enfans naturels recon. nus, et dont les pères et mères sont morts depuis la loi du 12 brumaire an 2, juqu'à la promulgation du Code civil, seront regles de la manière prescrite par ses dispositions; que l'art. 756 du Code civil décide que les enfans naturels ne sont point heritiers, et que la loi ne leur accorde des droits sur les biens de

leurs pères et mères, que lorsqu'ils ont été légalement reconnus; que l'art. 757 porte que, si lesdits pères et mères n'ont point laissé de descendans, mais des frères ou sœurs, les droits des enfans naturels sont de la moitié des biens de la succession de leurs père et

mère ;

» Que l'héritier, ayant la saisine légale de l'hoirie, a pu valablement disposer des biens qui la composent ; et que l'enfant naturel n'a que le droit d'exercer contre l'héritier de son père, et sur les biens de la succession, les répetitions qui lui sont accordées par la loi, après toutefois le prélèvement des dettes ;

» Considérant, dans l'espèce de la cause, qu'en point de fait, Jean-Baptiste Delasalle est décédé le 4 germinal an 3, laissant pour son seul et unique heritier, Louis-Frédéric Delasalle, son frère;

» Que ledit Delasalle, par des contrats des 7 vendémiaire an 4, 29 thermidor an 5, 1 et 2 vendémiaire an 6, a vendu différens immeubles auxdits Lefebvre : savoir, le domaine de Cumières en assignats, et les autres en numé raire; et que ce n'est que par une transaction du 6 vendémiaire an 8, et un jugement du 29 brumaire suivant, et du consentement des parties, que la qualité de fille naturelle de la mineure Delasalle a été définitivement reconnue;

» Que, si, par le jugement du tribunal d'appel du 18 ventose dernier, lesdits Lefebvre ont été déboutés de leur tierce-opposition au jugement du 27 brumaire an 8, ce jugement a décidé en même temps que les dispositions de celui-ci ne préjugeraient rien contre les titres de leurs acquisitions, ainsi que la tutrice de la mineure Delasalle l'a elle-même déclaré et reconnu dans le même jugement;

» Que l'opposition formée à la requête de la demoiselle Rolandeau és noms, entre les mains de Lefebvre, au paiement du prix des terres, maisons et dépendances provenant de la succession dudit Delasalle, ensemble les inscriptions formées au bureau des hypotheques, ne sont que des actes conservatoires de ses droits sur les sommes dues pour raison desdites acquisitions, déduction des paiemens legalement faite;

>> Le tribunal, sans s'arrêter aux demandes tant dudit Delasalle que de la demoiselle Rolandeau, en qualité de tutrice de sa fille mineure, dont ils sont déboutés, ordonne que les actes de vente ci-dessus seront exécutés ; en conséquence, que les acquéreurs demeureront propriétaires des objets vendus, sauf les droits ci-dessus de ladite mineure, pour les exercer sur partie du prix de la manière et ainsi qu'il va y être statue;

» Considérant que la mineure Delasalle n'a droit, suivant la disposition de la loi, que pour un quart dans le prix desdits biens ; et que l'autre quart ne lui appartient qu'au moyen de l'abandon qui lui en a été fait par ledit Delasalle, par l'acte de transaction susdate: en sorte que cette cession de droits ne peut être considérée que comme une acquisition faite par la mineure, dont l'effet se trouve restreint sur les sommes dont lesdits Lefebvre peuvent être redevables pour le restant du prix de leurs acquisitions ;

"Que les lettres de ratification obtenues ont été scellées à la charge d'oppositions formées, tant à la requête de plusieurs créanciers des successions des père et mère dudit Delasalle, d'où procèdent les biens, qu'à celle desdits Lefebvre, acquéreurs, conservatrices de l'hypothèque résultant, en leur faveur, de la garantie stipulée par leurs contrats d'acquisition, antérieure à celle acquise à la mineure Delasalle; ce qui ne les rend comptables envers elle du restant du prix de leurs acquisitions, que déduction faite des paie

mens;

» Que, si la consignation faite en assignats par lesdits Lefebvre, de la somme dont ils étaient débiteurs sur le domaine de Cumières, leur a procure une valable décharge vis-à-vis dudit Delasalle, avec lequel le jugement qui l'a ordonnée a été rendu, cette consignation ne peut nuire ni à la mineure ni aux créanciers opposans;

» Le tribunal, sans s'arrêter aux demandes de la demoiselle Rolandeau, et ayant égard aux autres demandes respectives des parties, ordonne qu'à la requête de la demoiselle Rolandeau és noms, il sera procédé entr'elle, ledit Delasalle et lesdits Lefebvre, acquéreurs, à la liquidation des droits des parties, sur les prix provenus des ventes des biens, le tout à l'amiable, sinon en justice; en conséquence, ordonne que, par experts...., le domaine de Cumières sera estimé à sa valeur en numéraire au jour de la vente... ; et que, sur le montant des sommes qui, par l'événe. ment de ladite liquidation, pourront revenir à ladite mineure, il sera fait distraction du quart attribué par la loi dans les biens provenant de la succession de son père, acquise par lesdits Lefebvre, avec les intérêts, tels que de droit ; •

>>En conséquence, autorise la demoiselle'Rolandeau à toucher le montant dudit quart sur les sommes restant dues par lesdits Lefebvre, du prix de leurs acquisitions....; et dans le cas où, pour quelque cause que ce soit, les acquéreurs scraient tenus de payer des som

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