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me.dans ce même Ouvrage, cela eft tout auffi manifeste; la Méchanique n'étant que la fcience des Forces mouvantes, & M. Newton ne traitant que des Forces motrices, centripetes, centrales, centrifuges, accélératrices & autres, des Aftres, & de tous les Corps de l'Univers.

Je ne dis rien de la Partie ftatique de la Méchanique, que je doute que M. Newton ait trop connuë; mais pour la partie Dynamique dont M. Leibnitz a donné de grandes idées, mais vagues, j'en regarde M. Newton comme le vrai Fondateur, le vrai Inventeur même.

Le morceau des Forces centripetes appliqué au systême de la Nature, eft tout de la façon du Géometre Anglois.

Sauf les droits que le célébre M. Huguens peut y prétendre avec raison, fur la primeur de l'invention générale, par rapport aux Machines artificielles & aux Horloges.

3°. Mais c'eft la Géométrie, plus que toute autre chofe, qui rend Newton fi difficile à déchifrer, & comme impoffible à refuter, en droiture, & ad hominem, comme on dit : puifque ce n'eft même que par la Géométrie que fon Aftronomie eft fi au-deffus des Phyficiens vulgaires.

Car, il ne faut pas dire tout court que Newton eft Af tronome & Méchanicien; mais il faut ajouter le Correctif, & dire qu'il eft Aftronome Géometre, & Mécha

nicien Géometre ; & tout de fuite, fans aucun Pléonaf me, achever le tableau, en disant auffi, non qu'il est Géometre tout court, mais Géometre Géometre, & tri. plement même Géometre ; & cela dans la Physique, peut-être plus encore que dans la Géométrie.

Car la Géométrie de Descartes n'a été bien éclaircie que 60 ou 80 années après fa Phyfique, fa Phyfique étoit toute claire en naiffant : ce qui eft dans l'ordre.

La Physique eft de foi fimple, naturelle & facile, je dis facile à entendre. On en fait les termes on en connoît les objets.

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Naturellement nous obfervons, & nous éprouvons la plupart des choses, la lumiere, la chaleur, le froid, le vent, l'air, l'eau, le feu, la pefanteur, le reffort, la dureté, &c. Chaque coup d'oeil eft une observation de la Nature: chaque opération de nos fens & de nos mains eft une expérience.

Tout le monde eft un peu Phyficien, plus ou moins fuivant qu'on a l'efprit plus ou moins attentif, & capable d'un raifonnement naturel.

Au lieu que la Géométrie est toute abstraite & mysterieufe dans fon objet, dans les façons, jufques dans fes termes. Chez Newton, cet ordre eft renversé.

Sa Géométrie n'en eft pas plus claire; mais elle l'eft à proportion, & abfolument même plus que fa Physique. La Géométrie propre de Newton, fon Calcul infinite

fimal, fes feries, fes Quadratures, fes lignes mêmes du troifiéme Ordre, sont à peu-près éclaircies désormais, à la portée des Géometres.

Mais fa Phyfique eft bien éloignée de l'être à la portée des Phyficiens. Je n'avance rien fans preuve. L'Attraction, la Gravitation, l'Action en distance, dont on compose le fonds du Systême Newtonien, ne font qu'un jargon, dont Newton proteste en vingt endroits, qu'il n'employe les termes que pour la commodité du Discours; en Mathématicien, en Géometre, sans prétendre y attacher aucune vraye expreffion, aucune vraye idée primitive de Physique raisonnée & systématique.

Ce n'eft que l'écorce, & tout au plus un dernier résultat du Systême de Newton. C'eft pourtant la feule Phyfique qu'on ait éclaircie fous le nom de ce fameux Géo

metre.

Sa vraie Phyfique, s'il en a une, est donc encore sous la triple enveloppe de Géométrie, de Méchanique & d'Aftronomie, qu'il appelle les Principes Mathématiques de la Philofophie naturelle.

Poffedât-on la Géométrie propre de Newton, croit-on qu'on feroit encore beaucoup avancé, pour entendre celle qui couvre absolument sa Physique? Il y a dans cette Phyfique bien des morceaux de Géométrie pure ou mixte de la façon de cet Auteur.

Mais communément ce ne font point les plus difficiles.

Il les énonce affés diftin&tement, & les démontre suffifament, & il ne faut qu'être un peu Géometre pour les entendre. Il avoit intérêt qu'on les entendit affés, pour fçavoir qu'ils étoient de lui.

Ce n'eft pas la Géométrie que Newton énonce, c'est celle qu'il fuppofe, qui eft difficile à entendre ; soit parce qu'elle eft fort élevée, foit parce qu'il la suppose, le plus fouvent purement, par voye de fait, & sans en articuler un mot, fans avertir qu'il la suppose, sans indiquer sa supposition.

Comme s'il écrivoit pour des Géometres de sa force, quoiqu'il n'écrive que Phyfique, & par conféquent pour les Phyficiens, pour ceux même qui ne l'étant pas, voudroient le devenir.

Newton dans le courant de fa Physique, c'est-à-dire, de fes Principes, suppose fur-tout quatre ou cinq Auteurs qui ne font pas tous également connus des Géometres vulgaires, & dont le premier seul est à peine connu du commun des Phyficiens. Quels font donc ces Auteurs ?

1o. Euclide: c'est peu.

2o. Apollonius & Pappus : c'est quelque chose.

3o. Archimede: c'est beaucoup.

4°. Grégoire de Saint Vincent : c'est tout.

Newton a-t'il jamais cité Gregoire de Saint Vincent ? voilà le nœud de l'affaire,

Car

Car un Auteur comme celui-là ne fe devine pas ; & peu de gens font en état de le suppléer lorsqu'il manque, furtout lorfqu'on ignore même qu'il manque quelque

part.

On fent un grand yuide à remplir. On fent qu'il manque quelque chofe : c'est-à-dire, on sent fon incapacité pour lire Newton, & on le laiffe là, ou bien on le fuppofe lui-même à fon tour; & l'on s'accroche par voye fuppofition à l'Attraction & à tout ce qu'on veut.

de

Mais de tout ce Syftême qu'on prête à ce grand Géometre, il n'y a que le Vuide auquel on ait droit abfolument de s'accrocher. Il l'a formellement adopté au Coroll. 3. Prop. 6. liv. 3.

Encore n'eft-ce qu'un réfultat, & comme on voit un Simple Corollaire philofophique, & par conféquent bien ou mal déduit & très-litigieux; & plutôt une Hypothese qu'autre chose. Car Newton n'a conclu pour le Vuide à la fin de ses Propositions, que parce que dans fes Préliminaires, il l'avoit tacitement fuppofé.

Mais l'Attraction, quoique peut-être il la suppose auffi, nulle part il ne l'adopte. En bien des endroits même il la rejette, ou en fait au moins l'honnête femblant; l'Attraction pure furtout qui exclud l'impulfion.

Il confent même qu'on explique tout par cette impulfion;. & il indique enfin ailleurs une maniere d'expliquer la Gravité par le Méchanifme de l'impulfion d'un

B

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