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trop multipliées, la rendirent souffrante, et sa mère, dont elle était l'unique trésor, crut devoir l'arracher à l'exploitation parisienne.

Plusieurs villes importantes de province faisaient des offres à la jeune artiste'.

1 Nombre de biographes prétendent que les Variétés parvinrent à faire rompre à leur profit l'engagement de Virginie avec la rue de Chartres. A les entendre, on avait commandé deux pièces tout exprès pour elle : Quinze ans d'absence et les Petits Braconniers. Cela n'est point exact. Les jeunes actrices qui jouaient dans les vaudevilles dont nous venous de donner le titre étaient mesdemoiselles Aldegonde et Pauline. Déjazet endossa pour la première fois au Gymnase, et non pas aux Variétés, ce frac qu'elle porte encore aujourd'hui avec une hardiesse si gracieuse et que le public salue toujours par de nouvelles ovations. Il est également faux que Brunet et Tiercelin lui aient donné des leçons. Sans doute, ils eussent contribué avec bonheur à développer ce talent original; mais la vérité nous force à rétablir les faits dans toute leur exactitude. Le plus grand tort des biographies, jusqu'à ce jour, a été de se calquer les unes sur les autres.

Déjazet partit pour Lyon. Elle y resta six mois; puis sa mère la conduisit à Bordeaux, où elle tourna la tête aux enfants de la Garonne.

L'exercice, le grand air, les voyages, avaient rendu à Virginie toute sa fraîcheur et toute sa santé. Le petit lutin des Capucines avait grandi; la Fanchon microscopique des jeunes élèves était devenue l'actrice alerte, vive, agaçante, le charmant démon dont le pied leste brûle les planches et dont l'œil incendie les cœurs.

1815 venait d'envoyer Napoléon à Sainte-Hélène.

Le lis effaçait partout l'abeille impériale, et les populations oublieuses saluaient avec enthousiasme les nouveaux maîtres.

1

A l'occasion du mariage de Ferdinand, duc de Berry, avec la princesse Caroline de Naples, le directeur du Gymnase 1 obtint que son théâtre serait placé sons la haute protection de la nouvelle épouse et sc nommerait à l'avenir Théâtre de Madame.

Pour être fin courtisan, ce directeur n'en était pas moins doué de grandes qualités administratives. Il avait du flair, et se mettait à la piste de tous les auteurs à succès, de tous les artistes de talent.

Ce fut lui qui fit la découverte de M. Scribe et de Léontine Fay.

2

Léontine, comme Virginie, avait passé

1 Delestre-Poirson.

1 Le directeur du Gymnase avait collaboré avec M. Scribe au Vaudeville.

des bras de sa nourrice au théatre, le choisissant en quelque sorte pour maison de sevrage. Ses premiers pas avaient été éclairés par les feux de la rampe, le public avait eu son premier sourire.

Mais cette pygmée gracieuse, au milieu d'acteurs géants, rendait la composition des pièces difficile.

On sentait la nécessité de lui adjoindre quelque camarade d'une taille plus en rapport avec la sienne. Le directeur du théâtre de Madame, pensant que l'entrain, la pétulance et la verve comique de l'ancienne Fée Nabote la rendrait très-apte à jouer les rôles de garçons, envoya bien vite à Bordeaux une lettre contenant des propositions d'engagement.

Trois jours après, Virginie décacheta cette lettre et prit la poste avec sa mère.

On la destinait à épouser Léontine Fay dans le Mariage enfantin.

Ici commence l'ère de prospérité du Gymnase. La plume de M. Scribe ne s'arrète plus.

Messieurs les auteurs dramatiques, à cette époque, étaient animés d'une émulation merveilleuse. On créa pour nos petites actrices plusieurs jolies pièces, qu'elles interprétèrent avec une grâce naïve, un comique délicieux et une verve soutenue.

Le public ne se lassait pas d'admirer ces deux miniatures vivantes.

Déjazet partagea les bravos avec Léon

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