Images de page
PDF
ePub

Manichéens avec ceux qui nioient la Trinité sainte, et que par cette considération ils aient pu leur donner le nom d'Ariens.

Pour revenir au manichéisme de ces hérétiques,

XLI. Manichéens

Nogent.

Guide Nogent, célèbre auteur du douzième siècle, à Soissons. et plus ancien que saint Bernard, nous fait voir Témoignage autour de Soissons des hérétiques, qui « faisoient de Gui de » un fantôme de l'Incarnation; qui rejetoient le » baptême des petits enfans; qui avoient en hor» reur le mystère qu'on fait à l'autel; qui pre>> noient pourtant les sacremens avec nous; qui » rejetoient toutes les viandes et tout ce qui sort » de l'union des deux sexes (1) ». Ils faisoient, à l'exemple de ces hérétiques que nous avons vus à Orléans, une Eucharistie et un sacrifice qu'on n'ose décrire; et pour se montrer tout-à-fait semblables aux autres Manichéens, ils se cachoient comme eux et se couloient en secret parmi nous, avouant et jurant tout ce qu'on vouloit, pour se sauver du supplice.

XLII.

ge de Radul

nois.

Ajoutons à ces témoins Radulphus Ardens, auteur célèbre du onzième siècle, dans la peinture Témoignaqu'il nous fait des hérétiques d'Agénois, qui «se phus Ardens » vantent de mener la vie des apôtres; qui disent sur les héré» qu'ils ne mentent point; qu'ils ne jurent point; tiques d'Agé» qui condamnent l'usage des viandes et du ma»riage; qui rejettent l'ancien Testament et ne >> reçoivent qu'une partie du nouveau; et, ce qui est de plus terrible, admettent deux Créa» teurs; qui disent que le sacrement de l'autel » n'est que du pain tout pur; qui méprisent le (1) De vitá sua, lib. 111, c. 16.

[ocr errors]

XLIII. Les mêmes hérétiques

[ocr errors]

Baptême et la résurrection des corps (1) ». Sont-ce là des Manichéens bien marqués? Or on n'y voit point d'autres caractères que dans ces Toulousains et ces Albigeois, dont nous avons vu que la secte s'étoit répandue en Gascogne et dans les provinces voisines. Agen avoit eu aussi ses docteurs particuliers; mais quoi qu'il en soit, on voit partout le même esprit, et tout y est de même sorte.

Trente de ces hérétiques de Gascogne se réfugièrent en Angleterre en l'an 1160. On les en Angleter- appeloit Poplicains ou Publicains. Mais voyons

re.

quelle étoit leur doctrine par Guillaume de Neudbrige, historien voisin de ce temps, dont Spelman, auteur protestant, a inséré le témoignage dans le second tome de ses Conciles d'Angleterre : « On fit, dit-il (2), entrer ces hérétiques » dans le concile assemblé à Oxford. Girard, qui » étoit le seul qui sût quelque chose, répondit » bien sur la substance du Médecin céleste: mais » quand on vint aux remèdes qu'il nous a lais» sés, ils en parlèrent très-mal, ayant en horreur » le Baptême, l'Eucharistie et le Mariage, et » méprisant l'unité catholique ». Les Protestans rangent parmi leurs ancêtres ces hérétiques venus de Gascogne (3), à cause qu'ils parlent mal du sacrement de l'Eucharistie, selon les Anglais de ce temps qui étoient persuadés de la pré

(1) Radulp. Ard, serm. in Dom. vi. post. Trin. t. II. (2), Guil. Neudb, Rer. Angl. lib. 11. c. 13. Conc. Ox. tom. 11. Conc. Ang. Conc. Labb. tom. x, an. 1160. col. 1405. (3) La Roq. hist. de l'Euc. c. 18. p. 400.

sence réelle. Mais ils devroient considérer que ces Poplicains sont accusés, non pas de nier la présence réelle, mais d'avoir en horreur l'Eucharistie, aussi bien que le Baptême et le Mariage, trois caractères visibles du manichéisme: et je ne tiens pas ces hérétiques entièrement justifiés sur le reste, sous prétexte qu'ils en répondirent assez bien; car nous avons trop vu les artifices de cette secte; et en tout cas ils n'en seroient pas moins Manichéens, quand ils auroient adouci quelques erreurs de cette secte.

XLIV.

Publicains

chéens.

Le nom même de Publicains ou de Poplicains étoit un nom de Manichéens, comme il Que les Poplicains ou paroît clairement par le témoignage de Guillaume le Breton. Cet auteur, dans la vie de Phi- sont Manilippe Auguste, dédiée à Louis son fils aîné, parlant des hérétiques qu'on appeloit vulgairement Poplicains, dit «< qu'ils rejetoient le ma»riage; qu'ils regardoient comme un crime de » manger de la chair; et qu'ils avoient les autres » superstitions que saint Paul remarque en peu >> de mots (1) » : c'étoit dans la première à Ti-. mothée.

XLV.

Les minis

Cependant nos Réformés croient faire honneur aux disciples de Valdo, de les mettre au tres font les nombre des Poplicains (2). Il n'en faudroit pas Vaudois Madavantage pour condamner les Vaudois: mais nichéens, en je ne me veux point prévaloir de cette erreur: plicains. je laisserai aux Vaudois leurs hérésies particu

(1) Philip. lib. 1. Duch. t. v, Hist. Franc. p. 102. - (3) La Rog. 455.

les faisant Po

XLVI. Manichéens d'Ermen

gard.

lières; et il me suffit d'avoir fait voir que les Poplicains sont convaincus de manichéisme.

:

Je reconnois avec les Protestans (1) que le traité d'Ermengard n'a pas dû être intitulé contre les Vaudois, comme il l'a été par Gretser; car il ne parle en aucune sorte de ces hérétiques mais c'est que du temps de Gretser on nommoit du nom commun de Vaudois toutes les sectes séparées de Rome depuis l'onzième ou douzième siècle jusqu'au temps de Luther; ce qui fit que cet auteur, en publiant divers traités contre ces sectes, leur donna ce titre général, contre les Vaudois mais il ne laissa pas de conserver à chaque livre le titre qu'il avoit trouvé dans le manuscrit. Voici donc comme Ermengard ou Ermengaud avoit intitulé son livre: Traité contre les hérétiques qui disent que c'est le démon et non pas Dieu, qui a créé ce monde et toutes les choses visibles (2). Il réfute en particulier chapitre à chapitre toutes les erreurs de ces hérétiques, qui sont toutes celles du manichéisme que nous avons tant de fois marquées. S'ils parlent contre l'Eucharistie, ils ne parlent pas moins contre le Baptême s'ils rejettent le culte des saints et d'autres points de notre doctrine, ils ne rejettent pas moins la création, l'incarnation, la loi de Moïse, le mariage, l'usage de la viande et la résurrection (3); de sorte que se prévaloir de l'au

:

1233.

(1) Aubert. La Roq. — (2) Tom. x. Bibl. PP. 1. part. p.
· (3) Ibid. cap. x1, x1, xш, Ibid. c. 1, 11, III, v11. Ibid. x, xv, xvi.

torité de cette secte, c'est mettre sa gloire dans l'infamie même.

XLVII.

On passe à

l'examen des

Je passe plusieurs autres témoins, qui ne sont plus nécessaires après tant de preuves convaincantes : mais il y en a quelques-uns qu'il ne faut pas oublier, à cause qu'insensiblement ils nous traitent des introduisent à la connoissance des Vaudois.

auteurs qui

Manichéens et des Vau

XLVIII.

Preuve par

Je produis d'abord Alanus, célèbre moine de dois. l'ordre de Cîteaux, et l'un des premiers auteurs qui ont écrit contre les Vaudois. Celui-ci dédia Alanus, que un traité contre les hérétiques de son temps au les héréticomte de Montpellier son seigneur, et le divisa quesde Montpellier sont en deux livres. Le premier regarde les hérétiques Manichéens, de son pays. Il leur attribue les deux principes et la fausseté de l'incarnation de Jésus-Christ avec son corps fantastique, et toutes les autres erreurs des Manichéens contre la loi de Moïse, contre la résurrection, contre l'usage de la viande et du mariage: à quoi il ajoute quelques autres choses que nous n'avions pas vues encore dans les Albigeois; entre autres, la damnation de saint Jean-Baptiste, pour avoir douté de la venue de Jésus-Christ (1); car ils prenoient pour un doute du saint précurseur ce qu'il fit dire au Sauveur du monde par ses disciples: Etes-vous celui qui devez venir (2) ? Pensée très-extravagante, mais très-conforme à ce qu'écrit Fauste le Manichéen, au rapport de saint Augustin (3). Les autres auteurs qui ont écrit contre ces nouveaux Mani

(1) Alan. p. 31. (2) Matt. xI. 3. - (3) Lib. v. cont. Faust c. 1. tom. VIII, col. 195.

« PrécédentContinuer »