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» paroles le pain est le vrai corps de Jésus-Christ, » le même qui est né de la Vierge et qui devoit » être livré à la croix; et le vin son vrai sang » naturel, le même qui devoit être répandu pour »> nos péchés (1) »; et tout cela, «< sans délai, » et au moment même, et d'une présence très» réelle et très - véritable (2) », præsentissimè, comme ils parlent. Et le sens figuratif leur parut, disent-ils, si odieux dans un de leurs synodes, qu'un des leurs nommé Jean Czizco, qui avoit osé le soutenir, fut chassé de leur communion (3). Ils ajoutent qu'ils ont publié divers écrits contre cette présence en signe, et que ceux qui la défendent les tiennent pour leurs adversaires; qu'ils les appellent des papistes, des Antechrists et des Idolâtres (4).

La même chose ap

C'est encore une autre preuve de leur senti- CLXXXV. ment de dire que Jésus-Christ est présent dans le pain et dans le vin par son corps et par son sang: puyée. autrement, continuent-ils (5), « ni ceux qui sont » dignes ne recevroient que du pain et du vin, ni >> ceux qui sont indignes ne seroient coupables du » corps et du sang, ne pouvant être coupables » de ce qui n'y est pas ». D'où il s'ensuit qu'ils y sont, non-seulement pour les dignes, mais encore pour les indignes.

La manière dont ils refu

Il est vrai qu'ils ne veulent pas qu'on adore Jé- CLXXXV. sus-Christ dans l'Eucharistie pour deux raisons : l'une, qu'il ne l'a pas commandé; l'autre, qu'il sent l'adora

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(1) Prof. fid. ad Ladisl. ibid. p. 27. Apol. 66, etc. (2) Ibid. Apol. 132, 1. part. 290. 299.-(5) Ibid. 309.

(3) Ibid. p. 298,- (4) Ibid. p. 291,

me qu'ils cru

tion confir- y a deux présences de Jésus-Christ, la personrent la réali- nelle, la corporelle et la sensible, laquelle seule té, et même doit attirer nos adorations; et la spirituelle ou hors l'usage. sacramentelle, qui ne les doit pas attirer (1). Mais

encore qu'ils parlent ainsi, ils ne laissent pas de
reconnoître la substance du corps de Jésus-Christ
dans le sacrement (2): « il ne nous est pas or-
» donné, disent-ils (3), d'honorer cette substance
» du corps de Jésus-Christ consacré; mais la sub-
»stance de Jésus-Christ qui est à la droite du
» Père ». Voilà donc dans le sacrement et dans
le ciel la substance du corps de Jésus-Christ; mais
adorable dans le ciel, et non pas dans le sacre-
ment. Et de peur qu'on ne s'en étonne, ils ajou-
tent que Jésus-Christ « n'a pas même voulu obli-
>> ger
les hommes à l'adorer sur la terre, encore
qu'il y fût présent, à cause qu'il attendoit le
>> temps de sa gloire (4) » : ce qui montre que
leur intention n'étoit pas d'exclure la présence
substantielle, en excluant l'adoration; et qu'au
contraire ils la supposoient, puisque s'ils ne l'eus-
sent pas cru, ils n'auroient eu en aucune sorte à
s'excuser de n'adorer pas dans le sacrement ce
qui en effet n'y eût pas été.

Ne leur demandons pas au reste où ils prennent cette rare doctrine, qu'il ne suffit pas de savoir Jésus-Christ présent pour l'adorer, et que ce n'étoit pas son intention qu'on l'adorât sur la terre, ni autre part que dans sa gloire : je me con

(1) Apol. ad Lad. p. 67, et alibi passim.
306, 307, 309, 311, etc.
(4) Prof. fid. ad Lad. p. 29. Apol. ad eumd. p. 68.

(2) Ibid. p. 301, (3) Apol. ad Lad. Ibid. p. 67. —

tente de rapporter ce qu'ils prononcent sur la présence réelle, et encore sur la présence réelle, non à la mode des Mélanctonistes, dans le seul usage, mais incontinent après la consécration.

tées.

titude et

Avec des expressions apparemment si précises CLXXXVIL et si décisives pour la présence réelle, ils s'em- Leur incerbarrassent ailleurs d'une si étrange manière, qu'ils leurs ambisemblent n'avoir rien tant appréhendé que de guités affeclaisser un témoignage clair et certain de leur foi: car ils répètent sans cesse que Jésus-Christ n'est pas en personne dans l'Eucharistie (1). Il est vrai qu'ils appellent y être en personne, y être corporellement et sensiblement (2): expressions qu'ils font toujours marcher ensemble, et qu'ils opposent à une manière d'être spirituelle qu'ils reconnoissent. Mais ce qui les rejette dans un nouvel embarras, c'est qu'ils semblent dire que JésusChrist est présent dans l'Eucharistie de cette présence spirituelle, comme il l'est dans le Baptême et dans la prédication de la parole (3); comme il a été mangé par les anciens Hébreux dans le désert; comme saint Jean-Baptiste étoit Elie. On ne sait aussi ce qu'ils veulent dire avec cette bizarre expression: Jésus-Christ n'est pas ici avec son corps naturel d'une manière existante et corporelle, existenter et corporaliter; mais il y est spirituellement, puissamment, par manière de bénédiction, et en vertu; spiritualiter, potenter, benedictè, in virtute (4). Ce qu'ils ajoutent n'est

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(1) Apol. ad Lad. ibid. p. 68, 69, etc. 71, 73. — (2) Ibid. p. 301, 306, 307, 369, 311, etc. - ▪ (3) Ibid p. 302, 304, 307, 308. (4) Ibid. 74.

L

pas plus intelligible, que Jésus-Christ est ici dans la demeure de bénédiction; c'est-à-dire, selon leur langage, qu'il est dans l'Eucharistie, comme il est à la droite de Dieu, mais non pas comme il est dans les cieux. S'il y est comme à la droite de Dieu, il y est donc en personne. C'est ainsi qu'on devroit conclure naturellement; mais comment distinguer les cieux d'avec la droite de Dieu? C'est où on se perd. Les Frères avoient parlé précisément, en disant : « Il n'y a qu'un Seigneur » Jésus, qui est tel dans le sacrement avec son >> corps naturel; mais qui est d'une autre manière » à la droite de son Père: car c'est autre chose » de dire : C'est là Jésus-Christ, ceci est mon corps; » autre chose de dire, qu'il y est de telle ma» nière (1) ». Mais ils n'ont pas plutôt parlé nettement, qu'ils s'égarent dans des discours alambiqués où les jette la confusion et l'incertitude de leur esprit et de leurs pensées, avec un vain désir de contenter les deux partis de la Réforme. Plus ils alloient en avant, plus ils devenoient Les Luthé importans et mystérieux; et comme chacun les vouloit tirer à soi, ils sembloient aussi de leur côté vouloir contenter les deux partis. Voici enfin ce qu'ils dirent en 1558, et c'est à quoi ils vers les pre- parurent s'en vouloir tenir. Ils se plaignent d'a

CLXXXVIII.

riens et les Calvinistes

les veulent ti

rer à eux. Ils penchent

miers.

bord qu'on les accuse « de ne pas croire que la

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présence du vrai corps et du vrai sang soit pré» sente (2) ». Bizarres expressions, que la présence soit présente! C'est ainsi qu'ils parlent dans la préface: mais dans le corps de la Confession ils (1) Apol. ad Lad. ibid. p. 78. — (2) P. 162.

enseignent « qu'il faut reconnoître que le pain » est le vrai corps de Jésus-Christ, et que la coupe » est son vrai sang, sans rien ajouter du sien à ses >> paroles ». Mais pendant qu'ils ne veulent pas qu'on ajoute rien aux paroles de Jésus-Christ, ils y ajoutent eux-mêmes le mot de vrai qui n'y est pas; et au lieu que Jésus-Christ a dit, Ceci est mon corps, ils supposent qu'il ait dit, Ce pain est mon corps; ce qui est fort différent, comme on l'a pu voir ailleurs. Que s'il leur a été libre d'ajouter ce qu'ils jugeoient nécessaire pour marquer une vraie présence, il a été libre aux autres d'ajouter aussi ce qu'il falloit pour ôter toute équivoque; et rejeter ces expressions après les disputes nées, c'est être ennemi de la lumière, et laisser les questions indécises. C'est pourquoi Calvin leur écrivit qu'il ne pouvoit approuver leur obscure et captieuse brièveté, et il vouloit qu'ils expliquassent comment le pain est le corps de Jésus-Christ; à faute de quoi il soutenoit que leur Confession de foi ne pouvoit être souscrite sans péril, et seroit une occasion de grandes disputes (1). Mais Luther étoit content d'eux, à cause qu'ils approchoient de ses expressions, et qu'ils inclinoient davantage vers la Confession d'Ausbourg. Car même ils continuoient à se plaindre de ceux qui nioient que le pain et le vin fussent le vrai corps et le vrai sang de Jésus-Christ, et qui les appeloient des Papistes, des Idolatres, et des Antechrists (2), à cause qu'ils reconnoissoient la véritable présence. Enfin pour faire voir com(1) Calv. Epist. ad Vald. p. 312 et seq. (2) Ibid. 195.

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