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Toutefois, malgré les lumières de cette assemblée, il était difficile qu'un si grand ou

ehamp que la seule division des matières ouvrait aux combinaisons du législateur; mais s'il y a quelque fruit à recueillir de ces profondes méditations des jurisconsultes et des publicistes, c'est en les rattachant à la loi par des points imperceptibles. La métaphysique et la législation ont des formes et un langage différents.

Loin donc de multiplier les cadres princivrage atteigne, dès le début, toute la perfec-paux, le projet de la loi resserre même ceux tion dont il était susceptible. qui existent aujourd'hui.

Aussi le Code pénal de 1791 a-t-il déjà éprouvé d'assez importantes modifications.

L'on entreprend aujourd'hui de l'améliorer encore, et l'auguste chef de l'empire qui a porté son active sollicitude sur les autres parties de la législation, ne pouvait refuser à celle-ci ce vigilant et sage intérêt par lequel son règne sera illustré autant que par ses victoires. Dans les détails qui vout, messieurs, passer sous vos yeux l'on n'a pas oublié que des lois qui statuent sur tout ce que les hommes ont de plus cher, la vie et l'honneur, ne doivent effrayer que les pervers, but qui serait manqué si elles imprimaient trop légèrement le caractère de crime à des actes qui ne sont pas essentiellement criminels.

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L'on a soigneusement cherché à établir de justes proportions entre les peines et les délits.

L'on a enfin mis une extrême attention à n'omettre aucuns délits et à les bien préciser, car dans une société bien organisée, où les hommes sont placés sous l'égide de la loi, de telle sorte que nul ne peut être puni que des peines et pour les délits qui y sont exprimés, une juste inquiétude naîtrait dans l'ame de tous, si un seul pouvait être poursuivi criminellement pour des faits auxquels la loi n'aurait pas attaché ce caractère par une disposition formelle et non équivoque.

Ces idées fondamentales sont des guides dont on ne saurait, dans le travail qui nous occupe, s'écarter un seul instant.

Que dirai-je du plan et de la distribution des matières? deux grandes divisions s'y présentent; d'abord les crimes et délits contre la chose publique, ensuite les crimes et délits contre les particuliers.

Il eût sans doute été facile de multiplier les classes principales: un traité récent et estimé (1) donne un frappant exemple du vaste

(1) Traité de Législation, par Jérémie Bentham. Tome II.

Ainsi dans l'état présent de notre législation, les crimes d'une part et les délits de l'autre sont classés séparément, et placés. même dans deux Codes distincts.

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Au premier aspect, cette division séduit et paraît utile, parce qu'elle s'applique à des faits qui n'ont pas la même gravité, et à des peines qui ne sont pas du même ordre.

Cependant les avantages de cette division ne sont qu'éphémères, et ces inconvénients sont réels; car tel délit de police correctionnelle peut, avec une circonstance de plus, s'élever à la qualité de crime, et tel crime peut, avec une circonstance de moins, n'être plus qu'un délit.

Un fait parfaitement identique, s'il est considéré sans acception de personnes, peut changer de classe selon, par exemple, qu'il a été commis par un fonctionnaire public, ou par un simple particulier, ou suivant qu'il l'a été contre les ministres de la loi ou contre d'autres personnes.

Dans cette position, il a semblé convenable de ne point diviser en plusieurs tableaux les crimes et délits qui s'appliquent à des faits de même cathégorie quoique d'une intensité différente: pourquoi le même titre n'embrasserait-il pas le faux commis dans un testament, comme celui commis dans un passeport? ce qui est important et juste, c'est qu'un délit ne soit pas puni aussi sévèrement qu'un crime, mais ce qui est utile aussi, c'est que l'on puisse embrasser du même coup-d'œil tous les crimes et délits qui s'appliquent à la même cathégorie de faits.

Unir ce qui a de tels rapports, ce n'est point confondre, et la confusion ou du moins l'embarras commencerait bien plutôt, là où il faudrait sur des questions analogues, recourir à des règles éparses.

Le nouveau projet de Code traitera done à-la-fois des crimes et délits sur chaque 64

matière, et des peines qui leur sont applicables.

ART. 1. Au surplus, si, dans le langage ordinaire, le mot délits a une double acception et est pris tantôt pour le genre tantôt pour l'espèce, il n'aura dans notre classification, que cette dernière acception, et ne s'appliquera qu'à des infractions de moindre gravité que les crimes.

Le nouveau projet divise donc les crimes et délits en deux classes principales, les uns contre la chose publique et les autres contre les particuliers: vaste division à laquelle viennent nécessairement aboutir toutes les infractions que l'imagination peut embrasser.

C'est en partant du même point que les lois romaines s'étaient bornées à la distinction des délits publics, pour lesquels le droit d'accusation était accordé à tout citoyen, et des délits privés, dont la réparation ne pouvait être poursuivie que par les parties lésées.

Si le droit d'accusation est chez nous soumis à d'autres règles, et si notre classification des crimes et délits diffère beaucoup dans les détails avec la classification romaine, la division principale en crimes et délits publics et privés, ou, ce qui est la même chose, en crimes et délits contre la chose publique et contre les particuliers, n'en a semblé ni moins juste ni moins utile; non, sans doute, qu'il n'existe entre l'état et ses membres une connexion intime et telle que les membres de l'association souffrent quand le corps de l'état est attaqué et réciproquement à Dieu ne plaise que la division proposée porte jamais à oublier ou méconnaître un principe d'une si haute utilité; mais il est pourtant dans la nature des choses que l'atteinte directe regarde principalement quelquefois la chose publique, quelquefois les particuliers, et cette définition a pu être prise pour base première de la division des crimes et délits.

La loi qui vous est aujourd'hui proposée, messieurs, et celle qui la suivra immédiatement, ne traitent que des crimes ou délits contre la chose pablique.

Ces crimes ou délits sont sous divisés en trois espèces, ceux contre la sûreté de l'état, ceux contre les constitutions de l'empire, et ceux contre la paix publique.

Les crimes ou délits contre la sûreté de l'état sont eux-mêmes de deux sortes; ils at

taquent la sûreté extérieure, ou compromettent la sûreté intérieure.

Sous l'un comme sous l'autre rapport, ils sont d'une extrême gravité : l'on va néaumoins, pour obtenir plus de clarté, retracer séparément les dispositions relatives à chacune de ces espèces, en commençant par les crimes ou délits dirigés contre la sûreté extérieure de l'état.

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ART. 75,76, 77, 80, 81, 82, 83. C'est ici que figureront ces Français dénaturés qui portent les armes contre leur patrie, qui entretiennent des intelligences avec l'ennemi. qui recèlent ses espions, ou qui lui livrent soit des plans, soit le secret d'une négociation.

De si grands crimes n'admettent d'autre peineque la mort; peine terrible que le législateur n'inflige qu'avec regret, mais qui, selon les expressions de Montesquieu (1), est comme le

remède de la société malade.

Toutefois, il convenait de bien caractériser les intelligences criminelles, pour qu'elles ne fussent point confondues avec des correspondances imprudentes.

Il convenait aussi de tracer une ligne de démarcation entre les communications données par les dépositaires eux-mêmes ou par d'autres personnes.

C'est ce qui a été fait en punissant toujours, mais en punissant moins ceux qui sont coupables à un moindre degré.

ART. 84, 85. Ceux qui, par des actions hostiles ou des actes non approuvés par le gouvernement, exposent l'état à une déclaration de guerre, compromettent sans doute la sûreté

extérieure.

La loi les proclamera donc coupables, bien que nul soupçon d'intelligence avec l'ennemi ne plane sur eux; mais comme relativement à leurs actes, leurs actes, il n'est pas d'éléments susceptibles d'indiquer jusqu'à quel point les conséquences pouvaient en être connues de leurs auteurs, ceux-ci ne seront pas punis de la peine capitale, mais déportés ou bannis, selon les suites plus ou moins graves qu'auront eues leurs téméraires démarches.

En suivant l'ordre du projet, je dois maintenant vous entretenir des peines infligées aux crimes dirigés contre la sûreté intérieure de

l'état.

Au premier rang de ces crimes est celui de

(1) Esprit des lois; liv. XII, chap. 4.

lèse-majesté, L'on a long-temps abusé de ce mot: plusieurs lois des empereurs romains déclaraient sacrilèges, ou coupables de lèse-majesté, ceux qui avaient osé douter du mérite des personnes appelées par le prince à quelque emploi (1), ceux qui attentaient contre les ministres ou officiers du prince (2), et même les fabricateurs de fausse monnaie (3).

L'on admit aussi le crime de lèse-majesté divine, et l'on distingua le crime de lèse-majesté proprement dit, en plusieurs espèces; il fut selon les circonstances, qualifié au premier ou au deuxième chef.

Cette législation diminuait, par de fausses applications, l'horreur que doit inspirer le crime de lèse-majesté.

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ART. 86. Ce crime est, par notre projet, réduit à des termes simples; celui-là seul en est coupable, qui a eu part à un attentat ou complot dirige contre la personne ou la vie de l'Empereur, et comme ce crime ainsi qualifié est le plus énorme de tous, il sera puni de la peine réservée au parricide; c'est-à-dire, de la seule qui soumette le coupable à quelques mutilations avant qu'il reçoive la mort.

ART. 87. Si l'attentat ou le complot est dirigé, non contre la personne ou la vie du Prince, mais contre l'autorité impériale ou contre les membres de la famille régnante, un tel crime, quelle que soit sa gravité, ne sera point assimilé au parricide, mais il n'entraînera pas moins la peine capitale, bien due, sans doute, à un forfait qui répand une si grande 'alarme dans la société.

Au surplus, ces mots mêmes, attentat et complot, avaient-ils un sens assez déterminé pour qu'il ne fût pas utile de les définir? Si les définitions ne conviennent point aux faits dont le caractère est vulgairement fixé, et si alors elles sont plus dangereuses qu'utiles, il n'en est pas ainsi quand il s'agit d'imprimer un caractère spécial de crime à des projets qui, s'ils s'appliquaient à des délits ordinaires, seraient toujours odienx, mais ne seraient point alors considérés comme le délit même.

Deux hommes ont-ils le dessein de voler leur

.....

(1) Dubitare an is dignus sit quem elegerit imperator. Leg. 3, C. de Crim. sacril.

(2)

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ART. 90.-La simple proposition non agréée de former un complot est punissable elle-même, mais à un moindre degré; car, bien qu'il n'ait manqué à celui qui a fait la proposition, que de trouver des gens qui voulussent s'associer à ses desseins criminels, cependant le danger et l'alarme n'ont pas été portés au même point que si le complot eût réellement existé.

Hors la classe des attentats ou complots dirigés d'une manière spéciale contre le chef de l'Etat, sa famille ou son autorité, il est d'autres crimes qui compromettent encore la sûreté intérieure.

ART. 91, 92, 93, 94, 95.- Ici se présentent les complots tendant à exciter la guerre civile, le massacre ou le pillage, soit des propriétés publiques, soit de celles qui appartiendraient à une généralité de citoyens; les enrôlements illicites; la rétention illégale du commandement de la force publique; l'emploi de cette force contre la levée des gens de guerre; la destruction des ports, arsenaux et autres établissements de cette espèce; crimes qui sont tous bien dignes du dernier supplice.

Mais, quand quelques-uns de ces crimes, ou d'autres de même nature, seront commis ou tentés par des bandes séditieuses, il faudra infliger les peines avec la juste circonspection que commandent des affaires aussi complexes.

Dans cette multitude de coupables, tous ne le sont pas au même degré, et l'humanité gémirait si la peine capitale était indistinctement appliquée à tous, hors les cas où la sédition serait dirigée contre la personne ou l'autorité du prince, ou aurait pour objet quelques crimes approchant de cette gravité.

ART. 96, 97, 98. Les chefs et directeurs de ces bandes toujours plus influents et plus

Nam et ipsa pars corporis nostri sunt. Leg. 5', C. ad leg. Jul. majest. Majestatis crimen committunt. Leg. 2. C. de coupables ne sauraient être trop punis; en déportant les autres individus saisis sur les lieux,

(3) falsa Monetà.

J

on satisfera aux besoins de la société, sans alarmer l'humanité.

ART. 100. L'on pourra même user d'une plus grande indulgence envers ceux qui n'auront été arrêtés que depuis, hors des lieux de la réunion séditieuse, sans résistance et sans armes. La peine de la sédition sera, sans inconvénients, remise à ceux qui se seront retirés au premier avertissement de l'autorité publique; ici la politique s'allie à la justice, car s'il convient de punir les séditieux, il n'importe pas moins de dissoudre les séditions.

Nous venons, messieurs, de fixer votre attention sur les principales dispositions ayant trait aux crimes et complots qui attaquent la sûreté de l'état : mais comment, en cette matière, traitera-t-on les provocateurs?

ART. 102. Quelque grave que soit la peine que le projet leur destine, puisqu'il les considère comme complices; quand la provocation a été suivie d'effet, ce n'est point sans doute ce qui peut alarmer, si d'ailleurs la provocation est bien caractérisée; or, elle ne pourra résulter que de discours tenus en lieux ou réunions publics ou d'écrits placardés ou imprimés. A ces premiers caractères, il faut en ajouter un autre; la provocation devra être directe.

Ainsi, quelques vœux insensés, ou quelques rêves criminels, couchés sur un papier manuscrit et non colporté, ne constitueront pas la provocation que la loi assimile au crime même, et s'ils sont découverts et de nature à appeler la surveillance de l'autorité publique, ce sera sans excéder les bornes posées par une sage prévoyance un gouvernement fort et juste ne relèvera ni l'échafaud de Sydney, ni celui de ce malheureux Syracusain qui, ayant rêvé qu'il avait tué Denis le tyran, fut condamné à mort parce que ses juges trouvèrent, dans son rêve même, la preuve qu'il s'était occupé de cet objet pendant ses veilles : une telle extension du droit de punir, est trop loin de nos mœurs et de la justice.

Parmi les peines qui seront infligées à certains crimes d'état, je n'ai point nommé encore la confiscation, qui, en cette matière, suivra ordinairement peine de mort.

La confiscation! Ce mot, qui laisse de si tristes souvenirs, sera, dans son application actuelle, facile à justifier.

Il ne s'agit point, comme on vous l'a déjà annoncé, de faire revivre ce systême de confis. cation qui, s'appliquant à une foule de délits

communs, semblait n'exister que pour l'avan tage du fisc ou des seigneurs hauts-justiciers.

C'est avec raison, sans doute, que de graves écrivains ont censuré ce déplorable usage; ils s'étonnaient justement que la législation punit les enfants du crime de leurs pères, et que fise s'enrichît du malheur des familles (1).

le

De si puissantes considérations ne pouvaient manquer de partisans dans le conseil d'un prince qui, lui-même, y rappellerait les idées libérales, si elles cessaient d'y régner; mais odieuse, lorsqu'elle s'étend à une multitude de délits communs, la confiscation n'est plus que juste, quand, restreinte comme dans notre Code, aux principaux crimes d'état et à la fabrication de la fausse monnaie, et ne s'exerçant d'ailleurs qu'après de fortes et nombreuses déductions au profit des familles, elle ne saurait plus être considérée que comme une faible et très-insuff.sante représentation de l'indemnité due à l'Etat pour le vaste et inappréciable dommage qu'il a souffert.

Observons d'ailleurs qu'en admettant, dans des cas peu nombreux et très-graves, la peine de confiscation, qui eût pu recevoir un autre nom, s'il s'en fût présenté un qui eût été jugé propre à ce remplacement, le projet de loi se garde bien d'en étendre les effets au-delà des biens que le condamné possédait lors de sa condamnation, et ne consacre point cette barbare fiction de la corruption du sang, qui rend en Angleterre le fils d'un homme frappé de confiscation, inhabile à succéder à son aïeul (2).

Une telle disposition, évidemment dirigée contre les descendants du coupable, ne pouvait trouver place dans notre législation, et nous ne saurions admettre non plus cette loi romaine (3) qui vouait les enfants des criminels d'état à un tel degré d'abjetion et de pauvreté, que la vie fût pour eux un supplice, et la mort un bienfait: Mors solatium et vita supplicium. Leur condition est assez malheureuse pour ne point l'aggraver par en tel anathême: ah! laissonsleur plutôt l'espoir de recouvrer comme un bienfait du prince, ce qu'ils ont perdu par le

(1) Esprit des lois, tome I, livre V, chap. 11. Beccaria, passim, et Commentaires à la suite, §. 2. Jérémie Bentham, troisième partie, chap. 4. Voyez aussi le Parallèle du Code penal de l'Angleterre avec les Lois pénales de France, par Bexon, chap. 19.

(2) Des Lois de police et criminelles de l'Angleterre, ouvrage traduit de Blackstone, par Ludot, chap. 12. (3) Leg. quisquis 5. Cod. ad leg. Jul. majest.

crime de leurs pères. Cette expectative consolante pour eux, deviendra aussi un moyen politique de les rattacher par la reconnaissance au gouvernement de leur pays.

Je vous ai rendu compte, messieurs, de la partie du projet qui regarde des crimes d'état et fixe les peines qui leur sont applicables.

Mais ici se présente un nouveau sujet de discussion; en matière de complots ou crimes contre l'état, remettra-t-on la peine à ceux d'entre les coupables qui révéleront ce qu'ils savent, ou procureront l'arrestation de leurs complices? infligera-t-on des peines à ceux qui, instruits d'un complot, même non approuvé par eux, ne l'auront point révélé ?

ART. 108 De ces deux questions, , la première, quoique fort controversée dans les assemblées législatives qui ont précédé la constitution de l'an VIII, ne devait pas donner naissance à tant d'hésitation. Si les peines sont instituées dans l'intérêt de la société, comment le même intérêt ne porterait-il pas à en faire la remise, quand la révélation peut procurer de grands avantages à l'état ou le soustraire à de grands dangers?

La deuxième question offrait plus de difficulté. ART. 103. Elle ne saurait être résolue par la loi que le sombre et farouche Louis XI porta contre ceux qui, sachant qu'il existait une conspiration, ne la dénonçaient pas.

L'application qui fut faite de cette loi, dans le proces du Grand Ecuyer d'Effiat Cing-Mars, au malheureux Augustin de Thou, l'a depuis long-temps marquée d'un juste sceau de réprobation.

Tout le monde sait que loin d'approuver le complot plus exactement tramé contre le cardinal de Richelieu que contre le roi Louis XIII, de Thou avait cherché lui-même à en dissuader le Grand-Ecuyer; L'instruction en fournissait la preuve; il n'y avait donc nulle complicité à lui imputer, mais il avait eu connaissance du complot et ne l'avait point révélé; il fut, pour cette réticence, condamné à mort.

L'opinion publique plus forte que les arrêts s'est depuis long-temps prononcée contre cette terrible exécution; mais qu'est-il arrivé? que l'énormité de la peine appliquée, dans cette malheureuse circonstance, n'en a plus laissé appercevoir d'applicable: des hommes éclairés (1)

(1) Voyez notamment le Commentaire sur le Livre des Delits et des Peines, §. 15.

ont même écrit qu'on ne pouvait obliger personne à devenir délateur, ni à s'exposer aux peines de la calomnie en révélant des complots dont ils seraient rarement en état de fournir la preuve.

Ne nous laissons point aveugler par le prestige des mots; le délateur odieux est celui qui crée des complots imaginaires: mais puisque notre législation invite partout les citoyens à faire connaître aux magistrats les délits et leurs auteurs, comment ne pourrait-elle point le leur prescrire sous de certaines peines, relativement aux crimes qui attaquent la sûreté de l'Etat? Si la patrie n'est pas un vain mot, ceci ne saurait être un vain devoir.

Mais si c'est un devoir, il faut le remplir, lors même qu'il en résulterait des embarras ou dangers personnels; la loi d'ailleurs protégera toujours le révélateur véridique.

Qu'y a-t-il donc dans cette matière de sage et utile? C'est qu'en introduisant une peine contre la non révélation des crimes d'Etat, elle ne soit point effrayante par son énormité; par là l'on servira mieux, non-seulement l'autorité publique, mais encore l'humanité, que par un silence absolu sur cette espèce de délit, car que pourrait-il arriver, surtout sous un gouvernement qui serait faible et soupçonneux? qu'au lieu de peines justes et modérées, il porterait, dans son inquiétude, des lois de colère, et irait peut-être jusqu'à frapper la non-révélation de propos simplement indiscrets ou vagues, aussi bien que celle d'un complot réel.

Les peines qu'introduit le projet de Code, au sujet de la non-révélation, seront d'un ordre différent, selon que le complot non révélé regardera ou non la personne du Chef de l'Empire.

ART. 104, 105, 106. Au cas de l'affirmative seulement, il y aura lieu à une peine afflictive; la réticence relative aux autres crimes d'état ne sera punie que de peines de police correctionnelle.

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