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Dans le nom de Blancmesnil, la seconde partie est l'altération bien connue (on en peut citer plus de cent exemples) de mansionale (parva mansio) devenu d'abord Mansionile, puis Mesnile. Ce qui est plus singulier, c'est que Blanc est dérivé de Blavus ou Blavum. On doit admettre une forme intermédiaire Blaun (prononcée comme Laon), et croire que l'addition du C s'est produite à une époque où l'on en était arrivé à ignorer complètement l'origine du nom. C'est ainsi que très récemment le nom de Celles-sur-Cher est devenu Selles; et que l'on a donné le titre incompréhensible de Saint-André-desArts à une rue de Paris, qui jusque-là nous avait rappelé la vieille église de Saint-André et les arcs hospitaliers de son porche.

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LE JOCONDALE

(Extrait du tome XV (nouvelle série) de la Revue numismatique,
1874-77, pp. 110-112.)

Le dictionnaire français-anglais de Cotgrave, imprimé à Londres en 1660, sous ce titre : A dictionarie of the French and English tongues, compiled by Randle Cotgrave (pet. in-fol°), contient, au mot Jocondale, cette traduction : « A Doller, a piece of mony worth about 3 s. sterl. » Ainsi donc, à s'en tenir à ce seul renseignement, Jocondale serait le nom français d'une monnaie de l'espèce des Daler ou Thaler. On nous a demandé quel pouvait être le type de cette monnaie et d'où provenait son nom. Nous croyons qu'il s'agit des grands écus frappés au XVIe siècle par les comtes Schlick. De mème que, sous l'influence du flamand, on a fait rixdale de Reichsthaler et léondale de Lowenthaler, on aura, dans le même système de corruption ou d'arrangement, donné le nom de Jocondale au Jochenthaler ou Joachimsthaler, ainsi appelé à cause de la figure de saint que cette monnaie représente.

Si l'on ouvre le placard d'Anvers, imprimé par Christophe Plantin en 1575, sous le titre de Dongheualueerde gouden ende silueren Munte, etc., on verra (au feuillet K vi, recto), sous le titre de daler van Bohemen, deux écus portant les dates 1525 et 1526 et dont voici la description:

LVDOWICVS PRIM.D.GRACIA REX BO, el LVDOWIC. PRIM. DEI GRA.REX.BOEMIE; lion couronné rampant, armes du roi de Bohème.

R. AR.DOMI.SLI.ST.Z.FRA.COM.D.BA., et AR.DO.SLIC.STE. ET.FRA.CO.DE.BA. (arma dominorum Sliconum, Stephani et fratrum comitum de Basano) (1); saint Joachim debout appuyé sur un bâton, et ayant à ses pieds l'écu des comtes. Schlick; dans le champ, S.I. (Sanctus Joachimus). On trouve cinq variétés de cette pièce dans le placard de Leipsig, imprimé en 1572 (pages 8 et 9), deux variétés dans le placard de La Haye (in s'Gravenhaghe) imprimé en 1595, par Heyndricksz (feuillet G ij, recto), enfin cinq variétés dans le New Münzbuch imprimé en 1597 à Munich, par Adam Berg (feuillet 41, verso).' Kähler, dans ses Münzbelustigungen (XVI© vol., 1744, p. 49 et suiv.) a donné la description des écus des comtes Schlick, et l'on trouve aussi beaucoup de détails sur ces monnaies dans l'ouvrage de Voigt: Beschreibung der bisher bekannten Bohmischen Münzen (vol. II, 1772, p. 361 et suiv.; vol. III, 1774, p. 142 et suiv., 201 et suiv., 247 et suiv.).

Madaï leur a consacré une page dans son Vollständiges Thaler-Cabinet, 1765, t. I, p. 602, no 1870.

Le Joachimsthaler fut imité par divers princes et le nom s'étendit à des espèces émises par d'autres que les Schlick. En France, au xvi° siècle même, on ignorait l'étymologie de Jocondale. Aussi voyons-nous ce nom appliqué à des thalers portant toutes sortes de types (2). Ainsi, dans l'Ordonnance du Roy pour le reiglement général de ses monnoies (Paris, may 1572), on voit: Iocondalles de Hungrie, Saxe, Bavieres, Cleves, d'Oust, Weerdt (feuillet F. iv, verso), et plus loin autres Iocondalles de Hongrie, Scafhousen, Hame, Magunce et Ulme,... de Hernord (sic), Soleurre et Melchdelbourg; autre Iocondalle de Mansfeld (feuillets G 11, verso; G 1, verso; et G iv, verso). Dans l'Ordonnance du Roy contenant le cours, poix et pris

(1) C'est la transcriplion de M. Reichel, appuyée sur des monnaies de sa collection, aujourd'hui au musée de Saint-Pétersbourg. (V. Die Reichelsche Münzsammlung, t. III, 1842, nos 1266 à 1310). Kohler, suivi par divers autres, a écrit Slicniorum.

(2) Joan. Georg. Wachter, Glossarium Germanicum, Leipsig, 1737; col. 1680, Thaler, moneta maxima Germaniæ, omnium consensu sic dicta quasi vallensis, quia primi (ut ferunt), thaleri in valle Joachimica Bohemiæ cusi.

donné par ledit Sieur aux escuz-sols, etc. (Paris, 1573), on retrouve les mêmes mentions, sauf que la pièce de Mansfeld est remplacée par un jocondalle de Liége. Dans l'Ordonnance du Roy (Lyon, 1577), nous voyons Iocondales de Hongrie..... Amesterdame, Halberstat (p. 91, 94, 98); le nom paraît ici avec un seul L, comme dans le dictionnaire de Cotgrave. Ce nom avait donc pris rang dans le vocabulaire français, et l'on s'étonne de ne pas le rencontrer dans le Traité des monnoies en forme de dictionnaire d'Abot de Bazinghen (1764), et dans le Recueil des monnoies de Salzade (1767).

ALFONSE DE PORTUGAL

COMTE DE BOULOGNE.

(Extrait du tome XV (nouvelle série) de la Revue numismatique, 1874-77, pp. 144-150.)

Lorsque Alexandre Hermand écrivait, en 1843, son Histoire monétaire de la province d'Artois et des seigneuries qui en dépendent, il s'exprimait ainsi dans le chapitre relatif aux comtes de Boulogne: « Les successeurs de Renaud (de Dammartin) ne laissèrent sans doute pas tomber en désuétude les droits monétaires des comtes de Boulogne, et l'on retrouvera probablement des monnaies de beaucoup de ces comtes, dont l'usage de frapper monnaie n'est pas encore constaté. Il serait par trop étonnant que Philippe de France et Alfonse de Portugal, premier et second maris de la comtesse Mahaut, fille de Renaud et d'Ide, se soient abstenus d'émettre des monnaies. boulonnaises marquées de leurs noms. »

Une monnaie d'Alfonse de Portugal a été retrouvée. M. Christian Jürgensen Thomsen, directeur du musée des antiquités du Nord, à Copenhague, étant mort en 1865, la collection de médailles qu'il avait formée fut vendue aux enchères, à l'exception des séries relatives au moyen âge, qui furent, quelques années plus tard, achetées par une association de grands propriétaires danois, et furent données par eux à l'État, à la condition qu'on en dresserait un catalogue. Ce travail a été confié à un jeune antiquaire, M. Kr. Erslev. Un premier volume a été publié en 1873, et j'en dois un exem

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