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servée; et le pain azyme, avec le vin pur, sans aucun mélange d'eau, fut seul employé dans le saint sacrifice de la messe. La rigidité des jeûnes et de l'abstinence a de tout temps caractérisé la discipline ecclésiastique du peuple arménien naturellement sobre, sachant vivre de peu et se livrant avec amour aux plus austères mortifications. Dans leur carême, beaucoup plus long que le nôtre, ils s'abstiennent de chair et de poisson, d'œufs, de beurre, de lait et de fromage, en ne faisant qu'un repas par jour, au coucher du soleil. Le vin est également interdit dans ces jours par les anciens canons. Les Grecs, dont la discipline n'était point aussi sévère, les avaient engagés, au concile d'Erzeroum, à réformer cette partie réglementaire, qui, ne touchant point au fond immuable des dogmes, peut être modifiée suivant les temps et les circonstances. Les évêques y avaient consenti; mais le peuple, invariablement attaché à la tradition de ses pères, s'imagina qu'on changeait toute la religion; et, à cette occasion, il manifesta l'opposition la plus violente, déclarant qu'il voulait suivre les pratiques de son Église, quelque rigoureuses que fut leur observance.

La voie dans laquelle le patriarche Nerses III avait engagé l'Église d'Arménie la séparait totalement de l'Église grecque et du reste de la chrétienté. Cependant il ne faut pas croire que le monophysisme prédominât exclusive

comme, suivant l'ancienne philosophie, par l'union physique de notre corps et de notre âme, il se forme une seule nature, en sorte que ces deux parties de nous-mêmes concourent ensemble à toutes nos actions, l'âme aux mouvements du corps, le corps aux mouvements de l'âme, ainsi ils prétendent que, par l'union hypostatique, la divinité et l'humanité en J. C. sont devenues un seul principe actif de toutes nos opérations, de maniere que ses actions, je veux dire celles qui répondent aux nôtres, ne sont pas seulement divines par l'excellence qu'elles tirent de la divinité, mais encore parce qu'elles en émanent. Cette observation peut conve nir aussi aux Cophtes et aux Éthiopiens, et à la plus grande partie des Jacobites.

ment; la masse des fidèles suivait ses pasteurs, sans entrer dans les querelles théologiques qui les divisaient, et, même dans le clergé, la majorité, amie de l'union et de la paix, gémissait sans doute en secret des divisions que l'esprit sophistique des Grecs semait dans leur sein. Les plus ardents entraînaient les autres, et ceux-ci, au bout de quelque temps, effrayés de l'abîme où on les conduisait, revenaient sur leurs pas; en sorte qu'il y eut dans leur Église, pendant plus d'un siècle, des fluctuations continuelles, semblables à l'agitation d'une mer tourmentée par des vents contraires. C'est ce que nous démontre l'avénement du patriarche Jean IV, dit Imasdaser ou le Philosophe, homme d'une capacité rare, et profondément versé dans la science théologique. Lorsqu'il fut monté sur le siége patriarcal, il frappa un coup violent sur les monophysites, et nous possédons le beau discours qu'il prononça dans cette circonstance, vrai chef-d'œuvre de logique et d'éloquence. Ainsi, puisque l'orthodoxie revenait de temps à autre à la tête des affaires ecclésiastiques, on ne peut douter que le parti de l'union ne fût considérable et puissant parmi le peuple. Jean IV présente dans son règne le dernier terme nettement distinct de cette série de patriarches orthodoxes ou dissidents qui se succèdent depuis saint Grégoire l'Illuminateur. Entre ces deux époques, il s'était écoulé 416 ans, et environ trente-cinq patriarches avaient occupé successivement le siége. Les vingt-deux premiers, jusqu'à Nersès II d'Aschdarag, ont une foi évidemment à l'abri de tout soupçon. On ne peut en dire autant des six patriarches qui suivirent Nersès III; il est beaucoup plus probable qu'ils partagerent les idées de rupture ou d'opposition. Mais les six autres, qui précédèrent Jean le Philosophe, appartiennent à la liste des patriarches orthodoxes.

A mesure que nous avançons dans l'histoire religieuse de l'Arménie, il devient toujours plus difficile d'apprécier la pureté de la foi des pasteurs. Les uns, emportés par un zèle national

trop ardent, se déchaînent contre le concile de Chalcédoine, parce qu'ils voient dans ses décisions un acte arbitraire de l'Église grecque, toujours trop exigeante pour eux. Ils ressemblent beaucoup à nos gallicans modernes, jaloux de l'Église romaine, et voulant conserver, au prix même de l'orthodoxie, ce qu'ils appellent leurs

libertés. Les autres se renferment dans un silence absolu, lequel ne permet pas d'interpréter leurs actes en aucune façon. Plusieurs, en attaquant le parti dissident et en défendant la dualité des natures, ont peine à dégager leur foi des obscurités propres à la rendre suspecte à l'orthodoxie romaine, et c'est ainsi que le discours (*) du patriarche Jean IV, dont nous avons parlé précédemment, a été mis dernièrement à l'index par la censure ecclésiastique de Rome.

Les invasions et les guerres cruelles des Arabes qui avaient subjugué le pays, où ils établirent un 'gouverneur sous le nom d'osdigan, mirent un terme aux discussions religieuses. Les alarmes continuelles qui tenaient en éveil la nation, ne permettaient point aux évêques et aux princes de s'assembler pour traiter des questions théologiques. En outre, les vainqueurs voulaient imposer aux vaincus la foi musulmane, et les persécutions suscitées au christianisme portèrent les esprits à défendre leur foi plutôt avec la résignation du martyre qu'avec les armes de la dialectique.

Lorsque l'habileté de la famille des Pagratides eut déjoué les projets des musulmans, et que le valeureux Achod eut relevé le trône d'Arménie, la paix renaissante ouvrit un libre cours aux controverses religieuses. Le trop célèbre Photius, avant de consommer le schisme des Grecs avec l'Église latine, avait travaillé à la réunion de l'Église arménienne. A cet effet, il avait écrit au patriarche Zacharie Ier, pour lui donner certaines explications relatives

(*) Il a été publié par les Arméniens de Venise en 1816; le texte est accompagné d'une traduction latine.

au concile de Chalcédoine: elles avaient pour but de dissiper les préjugés et de détruire l'antipathie de la nation pour les Grecs. Le roi Achod désigna pour répondre à ces lettres un certain İsaac Meroud, homme violent et emporté, qui, loin d'accéder aux conditions de paix, se répandit en invectives contre l'Église grecque. Néanmoins l'entremise de Vahan, archevêque de Nicée, parvint à rétablir pour quelque temps la concorde, et l'on réunit un concile dans lequel les décisions de l'assemblee de Chalcédoine furent acceptées, tandis qu'on anathématisa celles qui avaient été prises à Manacerte et au dernier synode de Tovin.

Peu de temps après Zacharie Ier, le siége patriarcal fut illustré par deux hommes d'un rare talent: le premier est Maschdots, abbé du monastère de Sévan. Son savoir était vaste; on lui attribue la rédaction du rituel et du recueil d'hymnes qui portent son nom. Il eut pour disciple et successeur Jean VI, surnommé l'historien par excellence, à cause de l'éclat et de l'originalité de son style. Jean était un zélé défenseur du parti des dissidents, et la passion avec laquelle il attaque l'Église grecque défigure malheureusement son histoire d'Arménie, si remarquable sous d'autres rapports. Pour prouver au lecteur la justesse de notre observation, nous citerons un passage extrait de cet ouvrage inédit.

A cette époque, dit-il, mourut le bienheureux empereur Zénon, si agréable à Dieu par ses mœurs et par l'intégrité de sa foi. Sous son règne, il avait dissipé l'ombre et les nuages du détestable et turbulent concile de Chalcédoine, pour ramener dans l'Église de Dieu la lumière resplendissante et glorieuse de la foi apostolique. Ensuite le grand patriarche Papgen convoqua un concile des évêques de l'Arménie, de la Géorgie et de l'Albanie; car on n'avait pas encore accepté des traditions destructives du monde, et on se tenait fermement sur le même fondement que saint Grégoire; aussi, dans ce temps, la foi et la piété florissaientelles universellement dans le pavs das

Grecs, des Arméniens, des Géorgiens et des Albaniens. Mais, après trentecinq ans d'orthodoxie constante, lorsque, Anastase étant mort, l'impie Justinien, cet empereur plein de malice, abolissant et renversant ces décisions, rétablit la pernicieuse doctrine de Chalcédoine, alors il persécuta par des supplices atroces et intolérables les saints hommes qui persistaient dans l'orthodoxie, et il inonda de sang le pavé de l'Église de Dieu. »

En lisant ces lignes, on doit se demander si l'auteur a réellement voulu parler des hommes et des événements que nous connaissons d'après d'autres Sources; et, en songeant aux malheureuses préventions de l'esprit de parti qui enveniment les querelles religieuses, on ne reconnaît que trop la possibilité de semblables jugements.

L'état intérieur de l'Eglise dépend toujours de ses chefs. Ainsi dès que la puissance patriarcale était remise au pouvoir d'un prélat agitateur et turbulent, toutes les questions dangereuses que la prudence tenait assoupies, se ranimaient comme la flamme d'un foyer mal éteint, et l'incendie étendait derechef ses ravages au loin. La pacification opérée par le concile de Zacharie Ier, tenu à Schiragvan, ne fut pas de longue durée: le parti national, qui était le plus opposé aux Grecs, travaillait toujours à détruire les bons résultats obtenus par les efforts des amis de

l'union.

Au commencement du douzième siècle, la division allait croissant, et il fallait chercher de nouveau des moyens de conciliation. Le siége patriarcal était dignement occupé : Grégoire III, surnommé Bahlavouni, parce qu'il était issu de la race des Arsacides, administrait l'Église d'Arménie. Il avait pour frère le gracieux Nersès (*), ainsi nommé à cause de la douceur et de la pureté de son style, qui le classent à la tête des écrivains arméniens. Lorsqu'il eut succédé à Grégoire III, il conçut le généreux dessein de porter un dernier coup à l'esprit de discorde

() Voy. figure no 13.

qui déchirait l'Église, et il réunit le grand synode de Romcla, plus connu dans l'histoire ecclésiastique sous le nom de synode de Tarse, parce que l'archevêque de Tarse, Nersès dit Lampronensis, y prononça à l'ouverture son discours, qui est demeuré un des premiers monuments de l'éloquence arménienne. Les propositions faites aux dissidents étaient celles-ci : Nous vous demandons, 1o d'anathématiser les partisans de l'unité de nature, comme Eutychès, Dioscore, Timothée, Élurus et leurs autres adhérents; 2° nous demandons que vous confessiez NotreSeigneur Jésus-Christ, fils unique, seul Christ, seul Dieu, hypostase une, sans division, sans changement, sans altération, sans confusion; que vous confessiez que le fils de Dieu n'est point autre que le fils de la Vierge, mère de Dieu, et fils de l'homme; que vous reconnaissiez dans ses deux natures l'unité de sa divinité, et son unité dans la dualité des natures, le même Christ ayant deux opérations conformes à sa nature, l'une divine et l'autre humaine, sans qu'elles soient contraires, puisque en effet l'opération humaine concorde avec l'opération divine; 3° nous demandons que vous récitiez le Trisagion sans l'addition de ces mots: Qui crucifixus es pro nobis, Qui es crucifié pour nous.

Telles étaient les principales propositions auxquelles la majorité des prélats assemblés répondirent qu'ils les acceptaient avec soumission et humilité. Nerses foudroya des traits de son éloquence tous les fauteurs du désordre qui ne cherchaient qu'à troubler la paix de l'Eglise. On crut quelque temps à un accommodement définitif; mais la mort de l'empereur Manuel, celle de Nersès Lampronensis et du patriarche Degha, successeur de Nersès le Gracieux, firent évanouir ces heureuses espérances. Les actes arbitraires de quelques fanatiques grecs en furent l'occasion; de l'aversion on pasṣa à la haine, et la séparation des deux Églises fut complète. Le schisme effectue précédemment par Photius, et ensuite par Michel Cérulaire, légitimait, sous un rap

port, les appréhensions des Arméniens. Séparés entièrement des Grecs et du reste de la chrétienté, les Arméniens se trouvèrent réduits à leur propre individualité, et cet isolement, causé par un motif religieux, ne leur fut pas moins nuisible sous le rapport intellectuel que politique. Lorsque les dernières lumières de l'Église arménienne, représentées par les deux Nersès, eurent disparu, une nuit longue et triste se fit chez ce peuple. La civilisation diminua à mesure que l'ignorance allait croissant; comme si le génie intellectuel de la nation, desséché tout à coup en ses racines, n'eut plus eu la force de rien produire, il se tourna à l'imi tation froide et servile des autres peuples, notamment des Grecs et des Latins. Ce fut le temps des traductions, et pendant quelques siècles les Arméniens ne firent que reproduire des œuvres étrangères, au moyen de leur langue, qui, par sa nature, se prêprêtait merveilleusement à cette sorte de travail. Deux écoles littéraires se formèrent dans ce but, écoles ennemies et diamétralement opposées, qui perpétuèrent la lutte vive et soutenue que nous avons vue diviser les croyances des fidèles, selon la double disposition qui se manifestait depuis longtemps, ou de se rattacher au centre de la chrétienté ou de s'en séparer définitivement. Il faut avouer que le parti véritablement national était pour le schisme, parce qu'on lui faisait envisager ce moyen comme le seul compatible avec la conservation de l'indépendance et de l'honneur de la nation. Dans la fondation des deux écoles dont nous parlons, la même chose arriva.

La première, véritable association, désignée sous le nom des Frères Unis, fut établie par Jean de Kerni, dans l'espoir de travailler à réunir l'Eglise arménienne et l'Église d'Occident. Cette société avait des ramifications chez les Latins, parmi les dominicains, et leur but, non publiquement avoué, était d'éclairer le peuple, et de combattre les erreurs qui tenaient toujours les esprits divisés. Elle traduisit plusieurs ouvrages, organisa des missionnaires,

et s'étendit sur la face du pays. Comme un faux zèle engagea les frères dans des voies d'opposition à l'esprit public, en tant qu'ils faisaient cause commune avec les Latins, l'attention et la défiance furent éveillées parmi les chefs du parti contraire, et l'école rivale se forma. Elle avait son centre dans le célèbre couvent de Datev, l'un des plus considérables de l'Arménie. Celui qui la fonda était un moine violent et superbe nommé Grégoire, et, comme il était supérieur de ce monastère, il est connu sous le nom de Grégoire de Datev (*). Il engagea une polémique acerbe et passionnée contre les frères unis, attaquant les Églises grecque et latine, et, non content de s'opposer à toute espèce d'accommodement, il mit en œuvre tous les moyens propres à fomenter la division. L'argument principal qu'il faisait valoir contre ses adversaires, était leur attachement à une Église étrangère, qui cherchait, assurait-il, à ravir à l'Eglise d'Arménie et son indépendance et ses vieilles constitutions. Ses paroles trouvèrent un accueil trop facile dans l'esprit de la multitude, et les frères unis ne purent réaliser leurs intentions louables.

Eugène IV, en montant sur le trône pontifical, résolut d'opérer la réunion des Églises d'Orient à la grande communion chrétienne. Vers la moitié du quinzième siècle, il fit un appel aux chefs du clergé, et le lieu de l'assemblée fut fixé à Florence. L'Arménie envoya plusieurs représentants à ce concile, grâce au zèle de son patriarche, qui était alors Constantin V. Les légats se montrèrent empressés de souscrire à tous les actes tendant à renouveler l'union des Églises d'Orient et d'Occident. Le pape, plein d'un con

(*) Il est l'auteur du livre des Demandes et réponses, où il traite des erreurs des Juifs, des Manichéens, des Mahometans et d'autres hérésiarques. Grégoire avait des vues philosophiques étendues, et il traite dans cet ouvrage des questions difficiles, telles que celles relatives à la création, à la fin du monde, etc., etc. Ses œuvres ont été publiées dans un volume in-folio, à Constantinople, en 1729.

tentement inexprimable, salua l'aurore d'une paix universelle dans l'Église. Les Grecs, de leur côté, avaient témoigné le désir d'un accommodement, et tout faisait espérer que la concorde serait durable. Mais, lorsque les légats arméniens furent retournés dans leur pays, la révolution qui s'opéra au sein de leur propre Eglise, détruisit les résultats heureux du concile de Florence.

L'occasion des troubles survenus dans l'Église fut le changement du siége patriarcal. A l'origine, les patriarches résidaient dans la ville de Vagharschabad, que les anciens rois avaient choisie pour leur capitale. C'est là que siégeait saint Grégoire l'Illuminateur. Ses successeurs restèrent dans la même ville pendant un siècle et demi, jusqu'à ce qu'ils en fussent chassés par l'épée des conquérants. Ils se réfugiérent, en 452, dans la ville de Tovin, qui devint la capitale du royaume, et, jusqu'à la fin du dixième siècle, ils continuèrent d'y fixer leur résidence. Étant tombée au pouvoir des Turcs Seldjoucides, le roi Aschod III, qui avait transféré sa cour à Ani, ville qui contenait au onzième siècle cent mille maisons et mille églises, il appela les patriarches, qui y demeurèrent jusqu'à l'an 1113. Alors les nécessités des temps obligèrent les patriarches de changer plusieurs fois de séjour et d'errer dans les villes situées sur les bords de l'Euphrate. Le concile tenu à Romela prouve qu'à cette époque cette cité était devenue le siége patriarcal. Lorsque le sultan d'Égypte se fut emparé de cette place, en 1294, les patriarches suivirent à Sis le roi Léon II, qui y fixa sa résidence, et ils n'eurent pas d'autre siége jusqu'à la mort de Joseph III. Grégoire IX, son successeur, ayant fait quelques innovations dans son Eglise, quatre évêques de la Cilicie rédigèrent une lettre adressée à tout le clergé arménien, dans laquelle ils se plaignaient et de sa conduite et de l'état déplorable où était réduit le siége de Sis. On résolut de transférer à Eczmiazin le siége patriarcal, et dans ce but une assemblée fort nombreuse, composée d'évêques, de supérieurs de

4 Livraison. (Arménie.)

monastères, d'ermites et de simples prêtres, fut réunie à Eczmiazin même; et comme Grégoire persistait à rester à Sis, on procéda à l'élection d'un patriarche nouveau et universel. Le sort tomba sur Syriaque, abbé du monastère de Virap. Ayant réuni les voix des quatre premières Églises particulières de l'Arménie, dont l'assentiment était nécessaire pour légitimer son élection, on le regarda comme le véritable et suprême patriarche, décoré du titrede Catholicos. A partir de cette époque, les patriarches d'Eczmiazin exercèrent une pleine juridiction spirituelle, et ceux de Sis ne furent placés qu'au second rang. D'un autre côté, en 1113, David, archevêque d'Agthamar, petite ville située au milieu du lac de Van, dans une île du même nom, se rendit indépendant du patriarche universel, et s'arrogea la même dignité. Ainsi l'Église d'Arménie se trouvait divisée en trois Églises distinctes, ayant chacune ses rivalités, ses intérêts et son rite, funeste source de troubles et de disputes interminables. Chacune de ces Églises a conservé ses patriarches. Sis en compte environ trente-quatre depuis l'érection de son siége. La juridiction de son patriarche est assez vaste; elle s'étend, hors de l'Arménie, sur les Églises de la Cilicie, de la Syrie, de l'Égypte et de la Palestine; l'évêque arménien, résidant à Jérusalem, lui est aussi soumis. L'élection du patriarche est un droit réservé aux douze premiers évêques les plus rapprochés; l'influence du peuple et du gouverneur politique du pays détermine souvent leurs suffrages.

Le patriarche d'Eczmiazin a toujours été généralement considéré, ainsi que nous l'avons dit, comme le Catholicos ou primat universel. On a prétendu que ce qui avait donné à cette Eglise sa prééminence, c'était la translation d'un bras de saint Grégoire dans le reliquaire de la cathédrale. Cette opinion est dénuée de fondement, vu que l'Église de Sis est toujours restée en possession de cette relique, et ou doit plutôt attribuer cet avantage à l'établissement primitif du même siége

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