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insigne et le plus effronté s'est emparé de la baguette, qu'il l'exploite d'une manière frauduleuse, et que l'on en est encore à ne pouvoir citer une seule mine, une seule source qui ait été découverte par ce moyen.

Pour nous autres exploitans, nous n'admettons que les indices naturels, et encore ne leur accordons-nous pas à tous le même degré d'importance, et c'est pour cette raison que nous les divisons:

En indices éloignés,

En indices prochains,

Et en indices certains ou affleuremens.

Les indices éloignés sont des roches, des minéraux ou des coquilles fossiles qui caractérisent une formation ou un terrain dans lequel on rencontre ordinairement tel ou tel minerai: ainsi, par exemple, le grès houiller, l'argile schisteuse, sont des indices éloignés de la présence de la houille, parce qu'ils ne font que caractériser la formation houillère, sans indiquer le voisinage du combustible; le soufre et certains gypses sont les indices éloignés de la présence du sel et des sources salées; les coquilles fossiles d'eau douce, disséminées dans certains calcaires, sont les indices éloignés des lignites; certains granits sont les indices éloignés de l'étain, car ce métal se trouve presque toujours disséminé dans cette espèce de roche; mais on ne doit pas conclure l'un de l'autre, c'est-à-dire l'existence de l'étain de la présence du granit.

Les indices prochains sont des roches, des minéraux ou des fossiles qui indiquent le voisinage de tel ou tel minerai, parce qu'ils l'accompagnent toujours ou presque toujours. C'est ainsi que les schistes recouverts d'empreintes de plantes et surtout de feuilles de fougères, , que l'argile noire et charbonneuse, le fer carbonaté pierreux ou les schistes bitumineux, sont les indices prochains de la houille; parce que les empreintes, et surtout l'argile noire, touchent et recouvrent immédiatement les couches de houille, et que le schiste bitumineux, ainsi que le fer carbonaté, sont souvent mêlés avec elle.

L'indice prochain de l'étain est le schéelin ferruginé, autrefois nommé wolfram, parce que ce minéral accompagne toujours l'étain; mais ce n'est cependant point un indice certain, puisque le schéelin abonde en Sibérie et que l'on n'y a pas encore trouvé un atome d'étain.

des

Les argiles salées ou muriatifères sont les indices prochains de la présence du sel, et comme elles sont toujours recouvertes par gypses, les mineurs se regardent comme trèsvoisins des couches salées, quand ils arrivent à ces gypses. Cependant cela ne prouve pas que l'on est voisin d'une couche de sel gemme, mais seulement des argiles salées, ce qui est tout différent, comme nous le verrons en parlant de l'exploitation des salines.

Le quarz, la baryte sulfatée, la chaux car

bonatée spathique, la chaux fluatée, forment les gangues les plus ordinaires des minerais de plomb, de cuivre, de zinc et d'argent; mais on trouve une infinité de filons de quarz, de baryte, de calcaire et de fluor qui sont stériles: ce ne sont donc point encore des indices cer

tains.

Quels sont donc ces indices qui ne laissent aucun doute, et qui donnent toute sécurité à celui qui les a rencontrés? Hélas! il en est fort peu, et à dire vrai, les indices certains de l'existence de la houille et des minerais ne sont autres que la présence de la houille ou des minerais eux-mêmes à la surface de la terre. Ce sont les affleuremens qui se montrent naturellement dans les ravins, les carrières, la berge des torrens, les parois des roches escarpées, ou qui se découvrent audessous du gazon par le travail de la bèche ou de la charrue. La plantation d'un arbre, un défrichement, le fossé d'une route ou la fondation d'un édifice, suffisent parfois pour mettre au jour le sujet d'une vaste entreprise. Cependant, et je m'empresse de le dire, ces indices, tout certains qu'ils sont et tout en démontrant la présence d'un minerai utile, ne doivent autoriser que des recherches faites avec sagesse et réserve; car ils ne démontrent pas d'une manière absolue qu'il existe là une quantité suffisante de minerai ou de combustible pour motiver de grandes dépenses. Un fragment de cuivre gros comme une noisette

suffit pour couvrir tout un rocher de vert de gris. Une veinule de charbon de quelques pouces d'épaisseur peut, en s'éparpillant, noircir un espace de quelques pieds. Il faut faire piocher au vif et y regarder de près. Ce n'est qu'à l'aide de travaux réguliers et toujours assez coûteux que l'on acquiert de la sécurité et que l'on peut apprécier la puissance, la richesse et la constance d'un gîte de minerai quelconque. Il arrive même assez souvent que l'abondance du minerai diminue en profondeur, ou disparaît complétement à quelques mètres du jour, et c'est alors que l'on regrette les dépenses prématurées, les bâtimens de luxe, les maisons de direction désormais sans but, et tous ces frais d'état-major et d'administration dont il faut toujours débarrasser les exploitations naissantes. Quelques baraques en bois, un bon maître mineur, et voilà tout; car les avis de l'ingénieur du département suffisent pour les premières recherches, et l'on ne doit appeler un directeur, un homme de l'art, qu'à l'instant où les premières attaques ont autorisé des travaux de quelque importance, dont la mauvaise exécution pourrait compromettre la fortune de l'entrepreneur ou l'existence de la mine elle-même,

Ainsi, je le répète encore, l'indice certain d'un minerai ou d'un combustible n'est autre chose qu'un affleurement, c'est-à-dire la partie visible au jour d'un filon ou d'une couche

qui se montre à la surface de la terre, et qui peut faire penser avec raison qu'il existe audessous une certaine quantité de telle ou telle substance minérale utile.

L'affleurement d'une couche de houille, pour qu'il puisse inspirer quelque confiance, doit s'offrir sous la forme d'une bande noire d'une certaine épaisseur, droite et bien réglée, et non sous celle d'une veine contournée et irrégulière. Les rognons de houille grasse et brillante qui se trouvent çà et là dans le grès houiller, ne sont pas des affleuremens et ne doivent point entraîner à des recherches coûteuses; mais dans tous les cas on doit bien se persuader qu'il faut beaucoup de temps, d'argent et de constance pour découvrir les mines. Celles d'Anzin en sont un exemple. 1

1

1 En 1716, M. le V.te Désandroun, né Belge, et qui faisait exploiter des mines de houille dans les environs de Charleroy, vint faire des recherches dans le Hainaut français, et s'en occupa sans relâche; mais les obstacles se multiplièrent sous ses pas, et quoique le Gouvernement lui eût accordé, en 1720, des secours pécuniaires, ce ne fut qu'au bout de dix-sept années de travaux et après avoir creusé en vain quatorze puits, après avoir été abandonné plusieurs fois par ses associés et obligé de former de nouvelles compagnies, après avoir luimême sacrifié à cette entreprise une grande partie de sa fortune, qu'il découvrit enfin, le 24 Juillet 1734, sur le territoire d'Anzin, une très-belle couche de houille de la meilleure qualité, qui a donné naissance à l'exploitation la plus vaste, la plus riche et la plus importante de toutes celles qui existent en France.

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