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détail de tout ce que j'ai sou-jépingles longues comme le bras; ffert.....

Amél. Ah, mon Dieu !

Zél. Et cela dès le lendemain de mon arrivée à Paris....

Ros. Comment donc ?

étez.

ensuite on mit là-dessus je ne sais combien de faux cheveux.

Amél. De faux cheveux ? Et vous en avez de si beaux!

Zél. N'importe, il faut des faux Zél. Le premier jour on m'arra-cheveux; ils aiment tant l'art, cha deux dents; le lendemain, on qu'ils l'emploient même quand il me mit deux mille papillotes; le n'est bon à rien, et très-souvent troisième, on m'essaya un corps quand il enlaidit; c'est ainsi qui m'étouffait; et le huitième....qu'avec leur maudit hérisson, ils Ah, ce fut là le vrai supplice. me firent une tête monstrueuse.. Amél. Réellement vous m'inqui- Et par-dessus cela on plaça un grand chapeau; et par-dessus le Zél. Le huitième on me niena au chapeau, de la gaze et des rubans; bal. et par-dessus les rubans, un boiRos. Comment, ce n'est quesseau de fleurs; et par-dessus les cela; mais je me faisais du bal fleurs, une demi-douzaine de une idée délicieuse.... plumes, dont la plus petite avait Zél. Ah, juste Ciel! dans quelle au moins deux pieds de hauteur.. erreur vous étiez.... La prépara- Ros. Mais finissez donc, vous tion seule en dégoûterait pour la exagérez, ma chère Zélis; vie.... Si vous saviez ce que c'est mment pouviez-vous avoir la force qu'une toilette pour le bal, c'est la de porter tout cela?.......... chose la plus douloureuse, et en Zél. Aussi étais-je accablée sous même temps la plus comique.... le faix; je ne pouvais ni remuer, ni Ros. Ah, contez-nous donc cela. tourner la tête; car le moindre Zél. Moi, j'étais charmée d'aller mouvement me faisait perdre au bal....Hélas, je ne le connai-l'équilibre et m'entraînait....Enssais pas. On m'avait seulement suite on m'habilla, on me mit mon parlé de danses et de collations, je corps neuf, qui me serrait à m'ôter n'en avais pas demandé davantage, la respiration; on me passa une et j'attendais le jour dn bal avec considération...

Co

impatience; enfin il arrive, et l'on Amél. Qu'est-ce que c'est que me dit qu'on va m'habiller en ber- cela

gère. Zél. C'est une espèce de panier Amél. En bergère ! L'habit, du rempli de crin, et fait avec du fer, moins, était bien choisi; il doit et excessivement lourd; on me être commode pour danser. para d'un habit tout couvert de

Zél. Oui, commode, joliment. guirlandes, et puis on me conduisit Ils ont à Paris une drôle d'idée des au bal! et l'on me dit: Prenez bergères, vous allez voir. D'abord garde d'ôter votre rouge, de vous on commence par m'établir sur la décoiffer, et de chiffonner votre tête un énorme coussin.... habit, et divertissez-vous bien.

Ros. Un coussin?

Ros. Ah, pauvre malheureuse!

Zél. Oui. Ils appellent cela.... Et pûtes-vous danser? une tocque. Et puis on attache Zélis. Hélas! je pouvais à peine cette tocque avec de grandes/marcher....

Amél. Cependant on vous lâcha Amél. Non, ma sœur, n'imitons jamais ce que nous condamnons; dans le bal? Zél. Oh! vous n'y êtes pas. Onêtre l'objet d'une moquerie est un m'établit sur une banquette, où petit malheur; et c'en est un grand l'on m'ordonna d'attendre qu'on de se livrer à ce penchant dangevint me prier. J'attendis long-reux, puisqu'on prouve par là qu'on tems; j'avais l'air si triste et si est injuste et cruel.

malheureux, que personne ne s'avi

Ros. Il est triste pourtant qu'il sait de penser que j'eusse la moin-faille être l'opprimé, pour avoir le dre envie de danser. A la fin, beau rôle.

pourtant, je fus priée; mais la Amél. Oui, mais l'opprimé, dans place était prise, et je revins à ma ce cas, gagne l'intérêt de tous les bons cœurs; comptez-vous cela banquette.

Ros. Comment, la place était pour rien? prise?

Ros. Oh, non; car j'aimerais Zél. Et vraiment oui; à ces mieux le suffrage d'Amélie, que les bals les demoiselles qui courent le applaudissemens de toutes ces mieux sont celles qui dansent le méchantes petites demoiselles qu' plus; elles vont retenir leurs places.. riaient de la peine et du maintien Mais enfin, achevez Amél. Comment! il n'y en a pas de Zélis. donc, Zélis, le récit de votre bal; pour tout le monde? Ros. Mais d'ailleurs, cela est finîtes-vous par danser? bien impoli d'empêcher les autres Zel. Mon Dieu, non, la place était toujours prise; et bientôt je de danser. Zél. Oh! j'ai trouvé au bal des fus entièrement délaissée par tous demoiselles qui étaient bien pis les danseurs. Ros. La malheureuse! quelle qu'impolies car elles étaient cruelles; elles se moquaient de mon pitié cela fait!....Et la salle du air souffrant et embarrassé; elles bal était-elle bien belle?

avec une

mine....une

me regardaient de la tête aux pieds Zél. Point du tout: et il y fevilaine sait un chaud si insupportable, que Et puis elles quoique immobile sur ma banquette, mine, je vous assure. riaient entre elles, et aux grands j'étais en nage. éclats.

Amél. Et voilà ce qu'ils appeAmél. Fi donc! Eh bien, dellent un grand plaisir, une fête !... tout ce que vous nous avez conté, Ah, quelle différence de cela à nos voilà ce que je conçois le moins. bals champêtres sur la grande pe

Zél. J'étais sans doute ridicule; louse, où l'on n'étouffe point, où mais j'avais l'air timide et mal à l'on danse tant qu'on veut, et où mon aise; n'auraient elles pas dû l'on est si gai!.... me plaindre et m'excuser?

Zél. Oh, je suis d'une joie de me Ros. Oh bien, s'il en vient ja- retrouver ici!.... Mais revenons à mais ici avec leurs tocques, leurs nos projets pour demain? je serais considérations, leurs perruques, et bien tentée d'aller à la ferme : il y leur rouge, je me moquerai d'elles a de si bon lait!....à propos, coaussi, et je les défierai à la course :mment se porte la bonne mère Nicosi elles pourront le, n'est-elle pas bien vieillie?.. Amél. Non, toujours de même, toujours de bonne humeur...

nous verrons

m'atteindre, et si elles sauteront un
fossé mieux que moi.

Zél. Et le petit agneau blanc qu'elle m'avait promis?

¿

Amél. Oh, je m'en separe le moins qu'il m'est possible.

Ros. (à part.) Ne dirait-on pas

Je n'y

Amél. Ah! Zélis, il est mort.. Zél. Ah! Dieu!.... Eh bien, qu'elle parle d'une amie? j'en avais un pressentiment quand puis plus tenir. (Elle fait quelje le quittai, vous en souvenez-ques pas ponr sortir.) Amél. On allez-vous donc, Ro

vous ?

Amel. Oui, je me le rappelle...sine?.... Mais Nicole vous en élève un autre. Ros. Je vais chercher des fleurs Zél. Et vous, Rosine, avez-vous que je veux donner à Zélis. bien des fleurs cette année ? Amél. Venez nous rejoindre à la Ros. Le myrte que vous m'avez volière, j'y vais conduire Zélis. donné, est plus joli que jamais: il Ros. Il suffit. (à part) J'y sem'a causé de l'inquiétude pendant rai avant elles. (Elle sort en deux jours, un vent du Nord l'avait courant).

frappé; mais, grâce aux soins de Colin, il a repris sa fraîcheur.

Zél. Ah, Colin! je serais charmée de le revoir....

Amél. Vous le trouverez prodigieusement grandi.

SCÈNE IV.

Zélis, Amélie.

Zélis (regardant sortir Rosine.)
Comme elle nous quitte brusque-

Zél. (à Amélie.) Et la volière? Amél. Ah, Zélis, depuis trois ment!.... A qui en a-t-elle ?.... mois, j'ai une colombe charmante; Amél. Je l'ignore....Vous saelle me fait négliger tous mes autres vez, Zélis, que souvent Rosine a oiseaux; elle m'entend, me co-des caprices dont on ne peut exnnaît, vient à moi....et elle est pliquer la cause: elle est bonne, jolie!....

Zél. Blanche, je parie?....
Amél. Oui.....

Zél. Un collier noir ?....
Amél. Justement.

sensible; mais elle s'inquiète et s'agite presque toujours sans rai

son.

Zél. Oui, elle a des idées singullières. Elle se plaît à se tourmen

Zél. Oh, je meurs d'envie de later; par exemple, elle vous aime

yoir.

beaucoup, mais elle ne vous aime

Amél. Je vous y menerai tout-à-pas bien; car elle ne compte pas l'heure. entièrement sur vous; un rien la Zél. Et elle vous est attachée? fàche, ou l'alarme: cela s'appelle, Amél. Oh, d'une manière surpre-je crois, de la jalousie.

nante.

Amél. Mais j'ai dit à Rosine Zél. Prenez bien garde de la qu'elle était la plus chère de mes perdre. amies. Si elle doute de ma bonne

Amél. Je n'ai pas eu le courage foi, comment peut-elle m'aimer ende lui couper les ailes, ce qui me core? Si elle me croit, comment laisse un peu d'inquiétude. peut-elle être jalouse?.... Dans Ros. à part. Voilà une conver-l'une ou l'autre supposition, je ne comprends pas sa jalousie.

sation bien intéressante.

Zél. La menez-vous à la promenade?

Zél. C'estque vous êtes raisonnable, et Rosine à cet égard ne l'est pas.

Amél. Comment s'y prendre, Amél. N'entends je-pas ma pour la guérir de cette cruelle fan-sœur?

taisie?....

Zél. Je ne sais, je crains que

cela ne soit fort difficile.

Amél. Allons la retrouver••••

Zél. Oui, c'est elle.

Amél. Eh, bien, Rosine, ma colombe!....

Ros. Je sais votre malheur, et

Mais que nous veut Colin?....Ilje vois qu'il est encore plus grand

a l'air bien effaré....

SCÈNE V.

Zélis, Amélie, Colin.

Amél. Que voulez-vous, Colin?
Col. Ah, mademoiselle!
Amél. Eh bien?..........

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Zel. Parlez qu'est-il donc arrivé?..

Col. Un malheur!....

que je ne l'imaginais; car vous m'en paraissez accablée.

....

Ma

Amel Quel ton d'ironie!. sœur... Ah! quand vous étiez inquiète de votre myrte, je ne me suis pas moquée de vous.

Ros. (à part.) Ce reproche me touche... je le mérite donc? (Elle réve).

Zél. Amélie, vous êtes injuste; Rosine, vous aime, ainsi elle doit partager toutes vos peines; et

Amél. Ah, Ciel! ma colombe.. moi, ne viens-je pas de pleurer

Col. Elle est perdue.

Amél. Ah, grand Dieu!....

votre colombe?... L'amitié de Rosine pour vous serait-elle moins

Col. J'ai tronvé la volière ouver-tendre ?" te, et la colombe n'y était plus.

Amél Chère Rosine, vous aurais

Zél. Allez, Colin, laissez-nous je affligée?.... Oh, pardonnez-moi. ....(Colin sort). Ma chère Amé- Ros. (à part). Mon embarras lie, je vous proteste que je me redouble.... Ah! qu'ai-je fait ?.. m'afflige mille fois davantage de Amél. Embrassez moi, ma sœur la perte de votre colombe, que de.... Mais, qu'avez-vous donc ? celle de mon agneau blanc. parlez....

Amél. Ah, ma pauvre petite colombe! Encore si vous l'aviez

vue.

Ros. (l'embrasse). Amélie.

Amél. Eh bien?....

Ros. (avec embarras). Si vous

Zél. Peut-être pourra-t-on la retrouviez votre colombe, seriez

retrouver.

Amél. Je ne m'en flatte pas.
Ah, si je lui avais coupé les ailes!..
Zél. Hélas, j'y pensais!....
mais je n'osais le dire.

SCÈNE VI, et dernière.

Zélis, Amélie, Colin, Rosine tenant un papier fermé.

vous bien contente?....

Amél. Quoi, sauriez vous?. . . . Ros. (du même ton). Non c'est une simple question....

Zél. Cette question m'étonne.. Rosine, vous baissez les yeux, vous paraissez interdite.... Ah! la colombe n'est pas perdue, vous savez où elle est....

Amél. Que dites-vous, Zélis?Quoi, vous pourriez croire ma

Rosine s'arrête au fond du théâtre, soeur capable de vouloir m'affliger,

et dit;

Elles sont consternées.

de se faire un jeu de mon inquiéItude, et de dissimuler avec moi?

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.....

Non, Rosine est susceptible, elle Ros. Ah! Zélis, quelle amère et est injuste quelquefois; mais elle cruelle plaisanterie !•••• est aussi franche que sensible; je Zél. Dans ce genre vous n'en connais son cœur, et je ne puis le trouverez jamais de bonnes. Amel. Ne la tourmentez pas Zel. Qu'elle se justifie donc! davantage; mais je ne puis revenir Mais regardez, regardez comme de ma surprise. Vous, Rosine, elle rougit...Oh, quelle mine jalouse! et de quoi? d'un oiseau? coupable! Zél. Elle l'était de moi, quand

soupçonner.

Amél. Que signifie l'état où jenons étions ensemble; et dans mon vous vois, ma sœur? serait-il possi-absence, elle s'est rejetée sur la ble?.... Ros. Ah, ma chère Amélie !....de la bonne mère Nicole, ou bien pauvre colombe. Elle l'aurait été (Elle pleure). d'autre chose; car je vois que les Amél. Rosine.... Qu'est-elle jaloux, pour se livrer à leurs fandevenue, ma colombe? Ne me le taisies, n'ont besoin ni de prétextes, cachez pas. ni d'objets raisonnables.

Zél. Eh bien, Rosine l'a volée, cela est clair.

Ros. Hélas! elle a raison.
Amél. Quoi, Rosine, vous pou-

Amél. Vous ne dites rien, maviez penser que j'aimais mieux ma

sœur.

colombe que vous ?..

Mais elle vous en parliez sans

Zél. Jerépondrai pour elle. Eh! L'histoire de la colombe est écrite occupait, vous Ros. Oh, non•••• sur son visage. Rosine était ja cesse.... louse de la colombe, et elle a volé et enfermé sa rivale.

;

Amél. Ah! je ne vous conçois pas; si je souffre, vous souffrez comme moi. Cette épine hier qui

Amél. Rosine!.... Ros. Ah, ma sœur, que vous me blessa la main, fit couler vos dirai-je ?....Zélis l'a deviné.... larmes: pourquoi donc de même Oui, j'ai votre colombe. Je comp-ne partagez-vous pas mes plaisirs? tais cependant vous la rendre Ros. Je suis corrigée pour ma mais je ne veux point chercher à vie de ces cruels caprices, du moins m'excuser. Je sens tout mon tort; je l'espère. Votre douceur, votre j'ai causé votre peine, je vous ai raison, votre amitié surtout me font trompée, je suis ingrate, extrava- connaître enfin tout l'excès de mon gante; enfin, je ne mérite plus injustice....Venez, ma sœur, vel'amitié d'Amélie. Vous n'aimerez nez retrouver votre colombe; elle plus que Zélis, je dois m'y attendre est ici près dans le petit bosquet de ...J'en mourrai, cela est sûr... ... roses•••• Ah! du moins, ma sœur, accordez- Amél. Je ne la reprendrai pas, moi votre pitié. Amél. (l'embrasse). Injuste etla, et que la main qui vous l'offre je vous la donne. Rosine; gardezchère amie!

Ros. Quoi, vous m'aimez tou

jours?....

Zél. (en riant). Oui après vous serez l'amie la plus d'Amélie.

moi,

vous la rende chère!

Ros. Ah, ma sœur!. vais l'aimer désormais.

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Zél. Oui, mais prenez garde qu'à chère son tour Amélie n'en devienne ja

louse....

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