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SÉANCE DU 23 SEPTEMBRE. APRÈS-MIDI.

LA SÉANCE EST OUVERTE A 3 HEURES ET DEMIE.

M. GOBAT. A la suite de la décision que vous avez prise ce matin, le bureau a envoyé le télégramme suivant à Sa Majesté Impériale et Royale apostolique:

„A Sa Majesté Impériale et Royale apostolique François Joseph Premier,

Vienne,

La Conférence interparlementaire, réunie à Budapest, forme des voeux sincères pour le bonheur de Sa Majesté et de ses peuples, prie Sa Majesté de prendre ses travaux sous sa direction, et lui présente ses profonds et respectueux hommages."

M. LE PRESIDENT.

Nous abordons l'ordre du jour.

LA COUR PERMANENTE INTERNATIONALE D'ARBITRAGE. VOIES ET MOYENS A EMPLOYER POUR ASSURER LA RÉALISATION DES RÉSOLUTIONS DE LA CONFÉRENCE INTERPARLEMENTAIRE.

M. LE CHEVALIER DESCAMPS.

Messieurs, en déposant sur le bureau de la Conférence le Mémoire aux puissances, que j'ai eu l'honneur de rédiger à votre demande, je dois quelques explications à la Conférence en ce qui concerne le double mandat qui m'a été confié à Bruxelles.

Voici dans quels termes m'a été confié ce mandat:

,,La Conférence interparlementaire réunie à Bruxelles ect." Considérant la fréquence des cas d'arbitrage international, ie nombre et l'extension des clauses compromissoires dans les traités;

Désirant voir s'établir sur des bases stables uue justice et une judicature internationale;

Charge son Président de recommander à l'examen bienveillant des Etats civilisés les dispositions suivantes qui pourront faire l'objet d'une conférenoe diplomatique ou de conventions spéciales."

A la fin de ce projet, la Conférence avait adopté la résolution suivante:

La Conférence charge son Président d'examiner et s'il est possible de s'assurer si des Gouvernements au nombre de deux ou de plusieurs seraient disposés à prendre l'initiative d'établir une Cour pour la solution de leurs différends par des moyens pacifiques."

J'ai rempli la première partie de ma tâche par la composition de l'Essai sur l'arbitrage international."

J'ai adressé le Mémoire à tous les gouvernements des Etats civilisés et les réponses que j'ai reçues attestent tout l'intéret que les puissances portent à nos travaux et les sympathies dont jouit la cause que nous defendons.

Permettez-moi de mentionner particuliérement ici une de ces lettres à cause de la situation spéciale de l'Etat dont elle émane, vis à vis de la Conférence interparlementaire. En répondant par de très gracieux remerciements à l'envoi du Mémoire S. E. le prince de Lobanow dont uous regrettons tous la perte récente et si prématurée a tenu à déclarer qu'il appréciait hautement les principes dont s'inspire la Conférence interparlementaire de Bruxelles."

C'est avec un souvenir ému et reconnaissant que la Conférence recueille aujourd'hui ce témoignage d'une voix d'outre tombe. (Sensation.)

J'arrive à ce qui concerne la seconde partie de ma mission; il s'agissait de pressentir un certain nombre de gouvernements touchant l'intention qu'ils pourraient avoir de créer entre eux une Cour permanente restreinte d'arbitrage. L'idée qui avait présidé à cette proposition m'indiquait suffisamment qu'il s'agissait surtout de trois petits Etats: La Belgique, la Hollande et la Suisse.

Le gouvernement suisse se trouve dans une situation particulièrement délicate: il a fait des propositions semblables aux

Etats-Unis d'Amérique et n'a pas encore reçu de réponse. Il lui est difficile dans ces conditions de prendre encore une initiative. Le gouvernement hollandais pense qu'il y a lieu de rechercher si les grands Etats ne prendraient pas plus facilement l'initiative que les petits; il réserve cependant d'examiner ultérieurement la question.

Le gouvernement belge, par la raison qu'a signalé l'honorable M. Beernaert, n'a pu prendre position.

Telles sont, messieurs, les explications que j'ai cru devoir vous donner, d'abord en ce qui concerne la recommandation que je devais faire du projet de Cour internationale adopté par la Conférence de Bruxelles, ensuite en ce qui concerne l'entente éventuelle entre quelques Etats pour l'établissement d'une Cour restreinte d'arbitrage.

(Très bien! Très bien!)

RAPPORT DE M. DE BERZEVICZY. Le groupe parlementaire hongrois m'a chargé de faire rapport sur la question des voies et moyens à employer pour assurer la réalisation des résolutions de la Conférence interparlementaire.

L'éminent président de la session de Bruxelles de l'année passée, auteur du mémoire aux puissances, si avantageusement connu et représentant si supérieurement nos buts et nos arguments devant tout le monde, vient de nous soumettre un rapport sur les démarches faites en faveur de la réalisation de notre résolution la plus importante, à savoir notre projet d'une institution d'une Cour permanente d'arbitrage international, et sur l'état actuel de cette question.

Permettez que je rattache ce que je dois dire à ce rapport, et que je vous invite à entrer en discussion sur la question de la réalisation de l'arbitrage international et sur la question des moyens à employer généralement pour mettre en valeur les résolutions de la Conférence.

Eu égard à la circonstance que notre session présente a lieu dans un pays où, comme dans l'Europe plus orientale, les travaux précédents de la Conférence sont peu connus, et au fait qu'on ne peut traiter la question en discussion sans envisager toutes les résolutions déjà prises par la Conférence, je vais essayer de passer rapidement en revue les travaux et les déci

sions de la Conférence jusqu'à ce jour, autant qu'il a été possible de les recueillir.

eu,

Comme on sait, la Conférence interparlementaire a jusqu'ici, six sessions: la première en 1889 à Paris, réunion qui, du reste, était la conséquence d'une assemblée tenue également à Paris par les membres des parlements anglais et français; la seconde en 1890 à Londres, la troisième en 1891 à Rome, la quatrième en 1892 à Berne, la cinquième en 1894 à la Haye, et la sixième en 1895 à Bruxelles. Au cours de ces six sessions, on a pris 47 décisions, dont, il est vrai, un grand nombre traitent de l'organisation, des statuts, de l'époque et du lieu de réunion, de la création des organes permanents de la Conférence ellemême; une partie des résolutions ont un caractère de circonstance, comme par exemple les félicitations adressées à certains parlements à l'occasion de démarches faites dans l'intérêt du but que se propose la Conférence; il y a des décisions qui ne contiennent que des invitations générales adressées aux électeurs des Etats parlementaires, aux puissances, à la presse et aux membres de la Conférence, en faveur de la paix, du droit des gens et de la fraternité des peuples. La plus grande partie des décisions de la Conférence se rapportent à la mise en pratique du principe de l'arbitrage international, à savoir: en partie en vue de faire inscrire (comme une sorte de mesure préparatoire) des clauses d'arbitrage dans les questions litigieuses touchant l'interprétation et l'exécution des conventions à conclure entre les différents Etats, se rapportant au commerce et à la navigation ou aux conventions concernant la propriété industrielle, littéraire et artistique; en partie en vue d'une Cour permanente d'arbitrage international, pour laquelle la Conférence de La Haye a jugé nécessaire la convocation d'un congrès international. La Conférence de Bruxelles a rédigé une proposition concernant l'organisation de la Cour à établir.

Enfin, la Conférence a voté des décisions spéciales qui se rapportent à l'inviolabilité de la propriété privée sur mer en temps de guerre, à une union destinée à la publication des conventions internationales et à la reconnaissance comme tels des Etats désireux de proclamer leur neutralité.

La Conférence, reconnaissant qu'elle ne dispose, pour la réalisation de ses décisions, que de moyens moraux, n'a pas eu

recours et ne pouvait avoir recours, dans ce but, à d'autres mesures que de prier instamment, à plusieurs reprises, ses membres de se servir de leur influence, dans leurs parlements et en dehors de ceux-ci, dans l'intérêt des décisions de la Conférence, pour provoquer des votes parlementaires qui aboutissent à des traités spéciaux, ou des congrès internationaux chargés de la mise en pratique des réformes que nous projetons; en outre, la Conférence a invité la presse à l'aider, particulièrement en trai-, tant les questions internationales avec calme et modération, et elle a proposé à une certaine occasion aux différents groupes parlementaires la publication, dans la langue de chaque Etat, du rapport présenté par notre honorable collègue, M. Stanhope, concernant l'arbitrage international. Tout dernièrement, la Conférence de Bruxelles a chargé son président, notre très distingué collègue qui vient de parler avant moi, d'adresser directement aux puissances un mémoire au nom de l'Union interparlementaire, mission dont M. Descamps, comme j'ai déjà eu l'honneur de le reconnaître, s'est brillamment acquitté, et dont il a rendu compte dans le discours que nous venons d'entendre.

Avant d'exposer mes idées sur les mesures à prendre ultérieurement dans l'intérêt du but que nous nous sommes tracé, qu'il me soit permis de rechercher si, dans l'Etat qui a eu le bonheur de rassembler dans sa capitale les membres de la Conférence, les principes pour la victoire desquels nous combattons ont été appliqués jusqu'ici et dans quelle mesure?

Je suis forcé de constater que les conventions conclues jusqu'ici par la monarchie austro-hongroise ne contiennent que dans des cas très restreints des dispositions relatives à l'arbitrage proprement dit. Je dois ici faire remarquer, pour l'édification de nos collègues étrangers, que, bien que la Hongrie soit un Etat indépendant, ses affaires étrangères comme les affaires de l'armée lui étant communes avec l'Autriche, et en outre une · convention de douane et de commerce existant entre les deux Etats, lorsque nous parlons de conventions internationales, il faut entendre les traités conclus en commun par l'Autriche et la Hongrie avec un troisième Etat.

Si mes recherches sont exactes, parmi les traités actuellement en vigueur, il n'y en a que deux, touchant en partie au commerce, dans lesquels on trouve on trouve une clause d'arbitrage: ce

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