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pouvoit ensuite les distribuer à volonté. Cet événement fut célébré par des sonnets et des stances, qui se trouvent dans les recueils de ce temps. Ils durent flatter Riquet bien moins que les lettres de M. Colbert. « J'ai >> reçu, lui écrivoit ce ministre le 14 août 1665, vos deux lettres du dernier juillet et » 4 août, par lesquelles je suis très-aise de >> voir l'espérance (1) où vous êtes du succès » du grand dessein de la jonction des mers; » et comme vous avez été celui qui l'avez » fait renaître de notre temps, et qui y avez » donné les premières dispositions, vous ne >> devez pas douter qu'outre la gloire que » vous en acquerrez, le Roi ne vous en sache beaucoup de gré, Sa Majesté ayant résolu » de le faire exécuter par vos soins par pré» férence à tous autres. Ainsi, quand la rigole » d'essai sera achevée, à quoi vous ne trou>>vez pas autant d'obstacles qu'on avoit » d'abord appréhendé, vous pourrez vous » mettre en chemin pour venir ici : vous

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(1) Les originaux des lettres de M. de Colbert sont entre les mains des héritiers de Riquet. Une partie de ces lettres a été imprimée dans le livre de M. de Lą Lande, page 126 et suivantes.

priant cependant de bien discuter tous les » moyens que vous avez en main pour faire >> trouver au Roi celui d'y fournir en partie, >> afin qu'étant digérés, nous puissions ici » les proposer à Sa Majesté. Je vois, lui » écrivoit-il le 9 octobre, que, outre vos >> espérances, votre travail a encore mieux » réussi que vous ne vous l'étiez promis : et » qu'à présent il n'y a plus personne qui ne » soit persuadé de la possibilité du grand >> dessein dont j'ai beaucoup de joie. Vous » pourrez, avant que de partir, concerter » avec MM. les intendans de Languedoc le projet d'affiches pour ces ouvrages, afin >> que votre sentiment étant approuvé ou » rectifié par le leur, on voye ici avec plus » de fondement et de sûreté les mesures qui >> seront à prendre ».

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CHAPITRE II.

Secours demandé

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par le Roi à la province de Languedoc, pour la construction du Canal. Devis de M. de Clerville. Édit pour la construction du Canal,Erreur intervenue dans cet édit, corrigée trois jours après par des lettres-patentes. Offres de Riquet. Acceptation de

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ses offres. Ordre de ses travaux. — Sa correspondance avec Colbert. - Première pierre posée soit au magasin de SaintFériol, soit à l'écluse de Toulouse.-Inscriptions placées sur ces pierres, de Riquet pour étendre jusqu'à Castres la navigation du Canal de dérivation.

MESSIEURS

Essai

ESSIEURS de Bezons et de Tubeuf, intendans de Languedoc, allèrent, le 9 novembre 1665, examiner la rigole de dérivation que Riquet venoit de faire creuser depuis la montagne Noire jusqu'aux Pierres de Naurouse. Ils rendirent compte de leur visite à M. Colbert, et lui envoyèrent les plans des lieux

où cette rigole passoit, avec des détails sur la nature du terrain. Le succès de ce premier essai montroit la possibilité de fournir une quantité d'eau suffisante au Canal de navigation, qui devoit joindre les deux mers. Dès-lors il n'y avoit plus d'obstacle à l'exécution de ce grand ouvrage, et Louis xiv se détermina à le faire construire.

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Une aussi vaste entreprise ne pouvoit réussir sans des dépenses considérables. Le Languedoc en devoit retirer la principale utilité. Le prince de Conti, gouverneur de cette province, proposa, le 2 décembre 1665, à l'assemblée des Etats, de contribuer aux frais du Canal. « Ceux, disoit-il, qui ont fait » attention à la grandeur et à l'étendue du Languedoc, ont avoué qu'il n'y avoit pas >> de province que le ciel regardât d'un œil >> plus favorable, et où la terre produisît avec plus d'abondance toutes les choses néces»saires à la vie. Si l'on avoit quelque chose » à desirer pour l'achèvement de son bon>> heur, l'on auroit souhaité le rétablissement >> du commerce et des manufactures >> Canal pour la communication des mers, » et un port pour débiter leurs fruits et re> cevoir avec facilité ce qui vient de l'étran

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» ger. Mais ces souhaits auroient paru plu» tôt l'effet de l'inquiétude de l'esprit, qui » desire toujours les choses qu'il n'a pas, que » la possibilité de vaincre en cette occasion >> les obstacles de la nature.

» L'on a discuté la possibilité de la jonc» tion des mers. Cette pensée hardie, qui a » été l'objet des souhaits de quantité de Prin» ces depuis plusieurs siècles, se trouve une » chose facile dans l'exécution. Il a déjà été » dépensé cent mille livres pour en faire >> l'essai, et convaincre, par une expérience » sensible, de la possibilité de l'ouvrage, que » nous avions déjà reconnu faisable.

» L'on cherchoit autrefois de toutes parts >> des hommes intelligens dans la conduite » des eaux, pour couper des montagnes et » embellir des palais que l'on bâtissoit du » sang du peuple; présentement, l'on dé>> tourne le cours des rivières, l'on rassemble » des eaux de toutes parts; on les conduit » avec soin, artifice et dépense; mais ce n'est » ni pour embellir le jardin de Lucullus, ni » pour satisfaire au luxe de Séjan. Tout se >> rapporte au bien public, à la grandeur de » l'Etat, et à l'avantage des peuples. De > toutes les dépenses qui se font pour le Lan

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