Eglife; afin que d'une part elle puft rendre à Dieu un hommage digne de Dieu, ce qui fans cela luy euft efté impoffible; & que de l'autre, elle puft elle-même le faire recevoir de Dieu, en s'offrant à luy conjointement avec fon Fils, qui eft l'unique objet de fa complaifance.

Ce font-là les raifons toutes divines de l'institution du Sacrement & du Sacrifice de l'Euchariftie. Car, comme le Fils de Dieu s'eft réellement revestu de noftre chair dans fon Incarnation,& qu'il a réellement livré cette même chair à la mort pour nous delivrer de la mort;. il nous a auffi voulu donner réellement cette chair vivifiante & toute remplie de l'Efprit divin, afin qu'elle fuft en nous le principe d'une vie divine pour nos ames, & d'une immortalité glorieufe pour nos corps.

Cette union veritable de fon corps avec le noftre eftoit neceffaire, afin qu'il accomplift parfaitement l'office de Mediateur envers chacun de nous. Car nous n'eftions plus en eftat d'eftre unis immediatement avec la divinité, & nous ne pouvions l'eftre que par fon humanité. Ainfi eftant neceffaire que la divinité fuft unie à l'humanité en la perfonne du Mediateur ; il eftoit neceffaire auffi que l'humanité du Mediateur nous fuft unie, afin que par elle nous fuffions unis à Dieu.

C'eftainfi que JESUS-CHRIST forme fon Eglife. C'eft ainsi qu'il l'anime & la vivifie. C'est ainsi qu'il en unit tous les membres. feparez en tant de lieux, non feulement par l'unité de fon Esprit, mais auffi par l'unité de fon corps caché fous les voiles du pain, par lequel il leur communique fon

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Efprit: Unus panis, unum corpus 1. Cor.rs multi fumus, omnes qui de uno pane participamus.

Que fi quelques-uns des membres de ce corps divin, ou par la condition du temps, comme les Juftes au temps de la Loy; ou par le defaut de l'âge, comme les enfans, n'ont pas reçû par eux-mêmes cette chair facrée; on ne peut pas dire neanmoins qu'ils ayent reçû la vie & l'Efprit de Dieu indépendamment de la chair de JESUS-CHRIST, réellement unie à noftre nature. Car les Peres nous affeurent, qu'il n'y a point de jufte qui ne reçoive fa fanctification du corps de l'Eglife: Tota hoc mater Ecclefia que fanctis eft, facit; quia tota omnes, tota fingulos parit. Ainfi le de l'Eglife ne recevant ne recevant fa vie que par le corps de JESUS-CHRIST, elle ne peut communiquer aux

in Auguft.

corps

epift.23.

membres qu'elle s'unit, que la même vie qu'elle reçoit de cette chair: de forte que l'on peut dire en un fens veritable, que ceux mêmes dont nous parlons, ont mangé le corps de JESUS-CHRIST, non en eux-mêmes, mais dans le corps de l'Eglife, auquel ils ont efté incorporez: comme on peut dire en un fens, que la main mange, & reçoit fa vie dépendamment de la nourriture que prend le corps, quoiqu'elle ne la reçoive pas par elle-même, mais par les autres parties du corps.

Le Sacrement de l'Euchariftie eftoit donc le moyen divin, par lequel Dieu, felon fa fageffe & felon l'economie de l'Incarnation de fon Fils, devoit fe communiquer aux hommes. Mais la perpetuité du Sacrifice n'eftoit pas moins neceffaire. Car le Sacrifice de JESUS-CHRIST eftant le plus

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grand acte d'adoration qu'il ait fait pour honorer fon Pere; comme il ne devoit point ceffer de luy rendre ce culte fuprême, il ne devoit point auffi ceffer de luy offrir fon Sacrifice. C'est pourquoy faint Paul nous le reprefente comme un Preftre éternel, qui eft entré avec Hebr. 94 fa victime dans le fanctuaire celefte, pour l'offrir éternellement à Dieu. D'ailleurs, les hommes eftant obligez, comme creatures, de s'offrir à Dieu en facrifice, & ne pouvant faire que leur oblation luy foit agreable, si elle n'est jointe à celle de JESUS-CHRIST, il a fallu que les vrais adorateurs de la loy nouvelle ne fuffent pas feulement affociez à JESUS-CHRIST comme victime, mais encore comme Preftre, pour rendre avec luy, par l'oblation du même JEsus, & d'eux-mêmes en JEsus, l'honneur fouverain qu'ils luy doivent.