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faites et le sang qu'elles ont sucé suffisent pour faire terminer heureusement la maladie on peut répéter plusieurs fois leur application de cette manière, sans crainte de trop affoiblir les forces vitales et musculaires. Lorsque le premier ou le second jour d'une maladie inflammatoire il y a indication de tirer beaucoup de sang par le moyen des sangsues, prenez garde de ne pas évacuer en une seule saignée une quantité de sang si considérable que les forces en soient entièrement abattues; il vaut mieux renouveler plusieurs fois, et par intervalles plus ou moins éloignés, l'application des sangsues, et ne tirer qu'une médiocre quantité de sang à chaque saignée: on obtient par cette méthode une dérivation et une révulsion plus sensibles.

Les praticiens qui conseillent de faire des saignées abondantes et en très peu de temps, et qui ne veulent pas employer pour cet effet la lancette, proposent, suivant l'indication, de faire mordre des sangsues à la veine jugulaire externe, ou au tronc principal de la veine crurale: mais sans doute ils ne connoissent pas la difficulté d'arrêter le sang qui s'écoule de l'ouverture faite à la veine jugulaire par les

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sangsues; souvent, malgré tous les secours de l'art, il en sort une telle quantité de sang, que le travail de la nature pour la coction et la crise est entièrement dérangé ; le malade même peut périr de cette hémorragie, comme je l'ai observé plusieurs fois. L'ouverture de la veine crurale présente moins de danger, parcequ'il est plus facile de la comprimer et d'assujettir fortement sur l'ouverture de la veine les substances astringentes les plus propres à suspendre cette espèce d'hémorragie, telles que l'agaric de chêne, la poudre de lycoperdon, un bouton de vitriol, etc. (Voyez les inconvénients des sangsues.)

Les inflammations lentes sont les espèces de maladies inflammatoires où l'on prescrit souvent l'application des sangsues. On a coutume de les faire mordre le plus proche de l'endroit enflammé, et lorsque l'inflammation est extérieure, certains empiriques n'hésitent pas à les appliquer sur la partie même, comme dans l'inflammation lente des yeux, des paupières, du nez, des lèvres, des joues, des oreilles, soit essentielle, soit par virus scrofuleux, teigneux, galeux, vénérien, dartreux, ou scorbutique, et dans l'érysipele lent de la tête ou

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du cou. Mais les sangsues mises sur la partie enflammée ne calment point l'inflammation; pour l'ordinaire elles l'accroissent; tandis que, posées sur les cuisses en assez grand nombre, et avec peu d'évacuation de sang après leur chute, elles soulagent d'une manière sensible, principalement dans certaines espèces d'inflammation, lorsqu'on a soin de réitérer cette saignée tous les huit, quinze, vingt ou trente jours.

L'inflammation lente de la gorge n'est point tempérée par la morsure et la succion des sangsues sur le cou ; il est toujours plus avantageux de les prescrire aux cuisses. Pour l'inflammation lente du foie, de l'estomac, des intestins, de l'épiploon, des reins, de la vessie, ou de la matrice, les sangsues, étant mises sur le ventre, ne portent aucun calme; mais, appliquées sur les bras, elles font souvent beaucoup de bien; cependant l'inflammation, lente de ces viscères dépend-elle de la suppression du flux menstruel, des fleurs blanches, des lochies, du flux hémorroïdal, des hémorroïdes, ou d'une dartre située aux parties naturelles ou aux extrémités inférieures; l'application

des sangsues sur les cuisses ou sur les bords dé l'anus est préférable.

1° La frénésie, espèce de fièvre inflammatoire de courte durée, accompagnée de délire furieux, sur-tout pendant les accès, exige dès le premier jour l'application, sur les cuisses, d'un grand nombre de sangsues, qu'il faut réitérer plusieurs fois dans les premières vingt-quatre heures; en même temps couvrez l'un et l'autre pieds jusqu'au gras de jambe d'un cataplasme de riz et d'eau où l'on aura mêlé de la moutarde en poudre depuis demi-once jusqu'à une once; ôtez-le dès qu'il causera de la cuisson et une vive chaleur; ensuite vous le renouvellerez en laissant trois ou quatre heures d'intervalle: cette application favorisera les bons effets des sangsues. Continuez ces remèdes le second et le troisième jour de la maladie, sans néanmoins trop abattre les forces vitales et musculaires. Gardez-vous de faire mordre les sangsues à la tête et au cou, particulièrement dans la frénésie par le soleil, dans la frénésie par suppression d'évacuation sanguine habituelle et dans la frénésie par abus des liqueurs, par violents exercices, ou par grandes passions; le sang, au lieu de se porter

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en moindre quantité à la tête, y seroit poussé plus abondamment, y circuleroit avec plus de difficulté, et les symptômes de la maladie deviendroient plus graves. Je doute même que, dans la frénésie par répercussion d'humeur teigneuse, les sangsues, appliquées sur le cuir chevelu avant leur application aux cuisses, calment le délire et la fièvre, à moins qu'après l'étanchement du sang qui coule de leurs morsures on ne couvre tout le cuir chevelu d'un emplâtre vésicatoire et qu'on n'applique des sangsues aux cuisses. Les deux jours suivants il faut appliquer les sangsues et les sinapismes légers aux extrémités inférieures : cette méthode m'a souvent réussi dans cette espèce de frénésie, plus commune qu'on ne pense. Des praticiens distingués recommandent avec raison l'application des sangsues aux parties génitales, lorsque les sangsues aux cuisses ne procurent pas de soulagement.

2o L'inflammation des yeux, quelle qu'en soit l'espèce, est beaucoup plus calmée par les sangsues mises aux cuisses que par les sangsues à la tête et au cou. Je sais bien que les oculistes, la plupart charlatans adroits et ignorants, les font

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