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sur un corps solide et dans l'eau ne différeront point de ceux de la sangsue entière. Connoîton la vraie structure, le nombre et l'action des muscles destinés à la progression ? est-on certain que les muscles de la sangsue aient les mêmes propriétés que les muscles de l'homme, que les muscles de la sangsue n'aient pas des propriétés qui lui soient particulières, et qu'il n'existe pas des organes propres à la sangsue, différents des muscles, et susceptibles d'alongement, de rétrécissement et de raccourcissement?

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Les physiciens anatomistes, persuadés qu'il ne peut y avoir de muscles longitudinaux ou obliques là où il n'existe ni os, ni cartilage, ni autre substance solide pour leur servir de point fixe lorsqu'ils se contractent, ont avancé que la charpente de la sangsue consistoit en cent cinq anneaux cartilagineux rangés sous la peau, a peu de distance les uns des autres, depuis la bouche jusqu'à la queue; ils les ont composés de plusieurs pièces adaptées les unes sur les autres, et ils ont vu l'interstice de ces anneaux occupé par des cloisons mus→ culaires très épaisses.

Plusieurs de ces physiciens ont encore avancé

qu'il y avoit des muscles, sur les parties latérales du corps, destinés à faire exécuter les mouvements nécessaires pour nager. Ces muscles, selon eux, ressembloient, pour leur situation et leur forme, aux fils disposés sur les bords de plusieurs pièces de carton mises à la suite les unes des autres et imitant un serpent, de manière à leur faire exécuter, lorsqu'on comprime les parties latérales, des mouvements semblables à ceux du serpent.

Premièrement les anneaux ne sont point cartilagineux; ce sont autant de faisceaux musculeux unis et entrelacés par des fibres musculeuses ou tendineuses avec le plan extérieur de la tunique musculaire cutanée : d'un autre côté il n'y a point de cloison musculaire entre chaque anneau ; du moins n'est-elle pas sensible à la vue. Supposé même qu'on admette la structure ci-dessus des anneaux et de la masse musculaire entre chaque anneau l'explication qu'on donneroit des mouvements de la sangsue d'après cette structure seroit toujours insoutenable. Je ne m'élèverai pas contre la comparaison que certains ont faite des muscles qui servent à faire nager, aux fils entrelacés et unis à des pièces de carton pour leur imprimer

les mouvements d'un serpent; cette idée est trop absurde.

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Les naturalistes, peu satisfaits de ces der nières explications, ont imaginé de reconnoître trois forces combinées inhérentes au système musculaire, la force de situation fixe, la force d'élongation, la force de contraction. La force de situation fixe des fibres musculeuses est cette force qui maintient les fibres du muscle vivant dans un état de contraction constante; elle résiste aux puissances qui tendent à écarter Tes molécules de la fibre musculeuse. La force d'élongation est la faculté qu'a la fibre, musculaire de s'alonger avec un degré de force et d'étendue dont on ne peut assigner les limites: par exemple, au milieu du plan de fibres longitudinales de la tunique musculaire cutanée, la force de situation fixe s'établit; les fibres longitudinales situées devant ce centre d'action s'alongent et portent en avant la tête, le cou et la moitié du corps de la sangsue: cette force de situation fixe peut se transporter dans différentes portions des fibres longitudinales de la tunique musculaire cutanée, et y former aus tant de centre d'action. Pour la force de contraction, elle ne diffère point de la force de

contraction musculaire de l'homme; elle raccourcit la fibre musculaire jusqu'à un certain point; ce raccourcissement dure plus ou moins de temps, et il est suivi d'un relâchement qui rend à la fibre toute sa longueur. A l'aide de ces trois forces ils expliquent tous les mouve ments de la sangsue dans l'eau et hors de l'eau.

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Mettez à découvert plusieurs muscles d'une des extrémités d'un animal vivant, vous verrez les muscles tantôt se raccourcir, tantôt se relâcher, mais vous n'observerez jamais qu'ils s'alongent en se roidissant: ouvrez la poitrine d'un quadrupede vivant, et considérez avec attention les mouvements du cœur, il vous sera facile de remarquer sa dilatation et sa constric tion que des physiologistes ont prises pour élongation. Quant à la force de situation fixe, ce ne peut être qu'une forte contraction dans un point fixe de la fibre musculaire, tandis que la partie de la fibre antérieure à ce point peut être relâchée, et l'autre contractée. Je

Ce système du mouvement musculaire est encore bien loin d'être démontré les mêmes naturalistes, convaincus qu'ils ne pourroient découvrir le mécanisme des mouvements que la sangsue fait pour pager, se sont contentes

de décrire à leur manière une partie des mouvements qu'elle exécute afin de donner à son corps la forme et la situation les plus favorables pour nager : « C'est, disent-ils, par des courbures al<«<ternatives, qui se transforment soudainement << en d'autres courbures, que la sangsue s'avance << en nageant ; elle commence par étendre son « corps, ensuite elle produit deux ou trois cour<< bures en sens alternatifs, et celles-ci en s'é<< tendant font avancer d'autant la sangsue qui « les remplace de suite par d'autres : les cour«< bures s'opèrent par la multiplication, des «< centres d'action établis sur les fibres muscu«laires du même côté; la sangsue n'a qu'à << transporter ces centres d'action sur les fibres « du côté opposé pour déterminer les cour« bures dans un autre sens : (rien de si imagi<< naire que cette explication.) Non seulement << la sangsue étend son corps pour nager, mais << encore elle l'aplatit; on voit aisément (tou« jours en parlant aux amateurs d'hypothèses) « qu'elle ne pourroit alors frapper l'eau que « par un plan très étroit, si elle nageoit sur « l'une de ses faces ou supérieure ou inférieure; <<'aussi ne reste-t-elle pas dans telle une posi «<tion; elle tient son corps fort incliné vers

«

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