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subordonner la faculté, pour un belligérant, de convoyer les blessés à travers le territoire belge, au consentement de l'autre belligérant. Et ce consentement ne fut pas obtenu. Après la bataille de Sedan, l'évacuation des quantités énormes de blessés accumulées à la frontière se trouva impérieusement réclamée par des raisons d'humanité et d'hygiène. Le Gouvernement belge toléra le transit pour les deux belligérants.

Malgré les soins les plus charitables donnés aux blessés des deux nations par les ambulances belges et par nos nationaux, certaines plaintes concernant les sentiments inégalement sympathiques de la population se produisirent. Nous avons déjà examiné cette question au point de vue juridique (1). En fait, les enquêtes et les témoignages réduisirent à néant la plupart des accusations.

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3. Les communications postales et télégraphiques par territoire neutre. Le matériel des chemins de fer provenant d'États neutres.

Les communications postales, maintenues pour les belligérants à travers le territoire belge, ne donnèrent lieu qu'à l'incident de la malle-poste prussienne saisie, près de Bouillon, par des francs-tireurs français; enquête faite, les deux parties se trouvèrent être en faute.

Les communications télégraphiques furent également maintenues, sauf communication au Gouvernement des télégrammes d'État et droit de les retenir en cas d'absolue nécessité.

(1) Voyez supra, p. 454.

Les abus par les belligérants du matériel des chemins de fer provenant de l'État neutre ont donné lieu à l'insertion dans le Règlement de La Haye d'un article 34, dû à l'initiative de MM. Beernaert et Eyschen, et ainsi conçu dans la forme définitivement adoptée par la Conférence :

ART. 54. Le matériel des chemins de fer provenant d'Etats neutres, qu'il appartienne à ces Etats ou à des sociétés ou personnes privées, leur sera renvoyé aussitôt que possible.

Le projet de MM. Beernaert et Eyschen stipulait que le matériel « serait renvoyé aussitôt que possible, sans pouvoir être utilisé pour les opérations militaires ».

Les observations que j'ai présentées à la Commission de la Conférence dans la séance du 20 juin 1899 sauvegardaient ce point de vue.

4.

Le commerce des objets de contrebande de guerre.
Le trafic des armes et munitions.

Du fait que le commerce est libre en principe, dit Rivier, il résulte que, selon le droit des gens actuel, il est permis en général aux sujets neutres de vendre aux belligérants des armes, des munitions de guerre, des vivres, des navires tout équipés.

Je dis en général, parce qu'en vertu d'engagements conventionnels un Etat peut être obligé d'interdire à ses sujets pareilles ventes et de rendre cette interdiction efficace. Et je dis selon le droit des gens actuel, parce que la liberté existe aujourd'hui comme un fait indéniable, mais que peut-être la notion plus rigoureuse de la neutralité, telle qu'elle se développe de nos jours, jointe aux progrès de l'idée de la communauté internationale, amènera sur ce point un changement analogue à ceux qui se sont opérés déjà sur d'autres points. Cette évolution pourrait à certains.

égards sembler désirable. Cependant il est utile de maintenir que l'état de guerre est une situation exceptionnelle, dont les belligérants doivent le plus possible être seuls à pâtir; si, par le fait, les neutres en sont atteints dans leurs intérêts, non seulement cela ne doit avoir lieu que le moins possible, mais encore ils ne doivent pas être privés des compensations qui peuvent se présenter en leur faveur dans certaines branches de leur commerce et de leur industrie.

Le particulier neutre qui vend et livre des armes et des munitions à un belligérant, le fait à ses risques et périls. Comme on l'a fort justement dit, il court une aventure commerciale. Il s'expose à voir confisquer sa marchandise comme contrebande de guerre, et si pareille chose arrive, son gouvernement n'aura point lieu d'intervenir (1).

Pour la première fois depuis 1830, le Gouvernement a pris temporairement, en 1870, des mesures restrictives du commerce des armes, à raison de la situation géographique du pays dans la guerre franco-allemande. Voici les dispositions de l'arrêté royal du 5 août 1870, retiré par l'arrêté royal du 4 mars 1871:

Sont provisoirement prohibés le transit et l'exportation des armes et des munitions de guerre de toute espèce.

Toutefois, l'exportation des objets désignés ci-dessus pourra être autorisée par le Gouvernement lorsqu'il sera constaté par des justifications officielles qu'elle a lieu pour compte et à destination d'un Gouvernement neutre.

Voici, d'autre part, la teneur de la loi du 7 septembre 1870 prorogée jusqu'au 30 juin 1871 par la loi du 30 décembre 1870 :

ARTICLE PREMIER. Le Gouvernement est autorisé, jusqu'à

(1) RIVIER, Principes du droit des gens, t. II, p. 411.

la fin de 1870, à prohiber l'exportation et le transit des marchandises suivantes :

1° Armes de guerre de toute espèce ;

2o Munitions de guerre de toute espèce;

3' Effets d'habillement, de campement, d'équipement et de harnachement militaires ;

4° Chevaux autres que poulains;

5 Bâtiments à voile et à vapeur, machines et parties de machines destinées à la navigation, agrès et apparaux de navires et tous autres objets de matériel naval et militaire.

Le Gouvernement est autorisé à prohiber, jusqu'à la fin de l'année 1870, l'exportation des avoines, foin, paille et autres fourrages.

ART. 2. L'exportation et le transit des objets désignés à l'article 1er pourront être autorisés aux conditions que le Gouvernement déterminera.

Dans sa remarquable Chronique du droit international en 1870, M. Rolin-Jaequemyns fait observer que « de telles dispositions ne sont pas portées en vertu d'une obligation parfaite dont l'un des belligérants ou tous les deux auraient le droit de réclamer l'accomplissement, mais seulement en vertu d'une convenance national e dont la nation neutre est seule juge. »

En fait, la loi de 1870 visait non seulement un état spécial de guerre sur deux de nos frontières, mais un temps où la Belgique elle-même mettait son armée sur le pied de guerre pour la défense de sa neutralité. Ainsi s'expliquent certaines prohibitions admises temporairement à raison des besoins mêmes du pays.

Remarquons d'ailleurs que sous la réserve des armes et munitions de guerre, la faculté pour les parties belligérantes de s'approvisionner librement en Belgique a été conservée, à l'exception toutefois du ravitaillement des places assiégées.

5.

L'admission de bâtiments de guerre étrangers dans les eaux et ports neutres.

Les conditions d'admission des bâtiments de guerre étrangers dans les eaux et les ports belges n'avaient pas été réglées jusqu'en ces derniers temps. L'arrêté royal du 18 février 1901 a comblé cette lacune (1). Il s'occupe

(1) Voici les dispositions de l'Arrêté royal du 18 février 1901 réglant l'admission des bâtiments de guerre étrangers dans les eaux et ports neutres:

Considérant qu'il y a lieu de régler, conformément au droit international et aux obligations de la neutralité perpétuelle, l'admission des bâtiments de guerre étrangers dans les eaux et ports du Royaume;

Sur la proposition de Nos Ministres des Affaires étrangères, de la Guerre, et des Chemins de fer, Postes et Télégraphes, Nous avons arrêté et arrêtons :

Dispositions générales en temps de paix.

ARTICLE PREMIER. En temps de paix, les bâtiments de guerre appartenant à des Puissances étrangères peuvent entrer librement dans les ports belges de la mer du Nord et mouiller devant ces ports dans les eaux territoriales, pourvu que le nombre de ces bâtiments portant le même pavillon, en y comprenant ceux qui se trouveraient déjà dans cette zone ou dans un port, ne soit pas supérieur à trois.

ART. 2. Les bâtiments de guerre étrangers ne peuvent entrer dans les eaux belges de l'Escaut, mouiller en rade d'Anvers ou pénétrer dans les eaux intérieures du Royaume sans avoir obtenu l'autorisation du Ministre des Affaires étrangères.

Cette autorisation sera demandée par l'entremise du sous-inspecteur du pilotage belge à Flessingue.

ART. 3. Les bâtiments de guerre étrangers, à moins d'une autorisation spéciale du Gouvernement, ne peuvent séjourner pendant plus de quinze jours dans les eaux territoriales et ports belges.

Ils sont tenus de prendre le large dans les six heures, s'ils y sont invités par l'Administration de la Marine ou les autorités militaires

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