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munauté? Non, sans doute. Pothier, n°. 598, second alinéa, décide fort bien que, si ce supplément est versé dans la communauté, elle en devra la récompense, parce qu'il représente l'action en rescision que la loi me donne, et qui est sans contredit immobilière. Il n'importe que le défendeur en rescision puisse se libérer en argent: ce n'est point la qualité de la chose qu'il a la faculté de payer, qui détermine la nature mobilière ou immobilière de la créance ou de l'action du créancier, mais la qualité de la chose qui en était l'objet, et qu'il pouvait demander. Voy. suprà, n°. 103. Or, il est certain qu'il ne pouvait de

»ticle 1681, où l'action en rescision est admise, l'acquéreur a le choix, » ou de rendre la chose, en retirant le prix qu'il en a payé, ou de gar» der le fonds, en payant le supplément du juste prix, etc. »

C'est une faculté qui lui est personnelle. Ce supplément n'est donc que in facultate solutionis. Le demandeur en rescision ne peut le demander. Après la rescision admise, l'obligation de l'acquéreur est facultative. Il n'y a qu'une chose due; c'est l'immeuble: mais la loi lui accorde la faculté de se libérer par un supplément de prix.

Ces principes ne sont pas nouveaux. Pothier, guide principal des rédacteurs, les a établis et professés dans son Traité du contrat de vente, .no. 332 : « L'objet de cette action (l'action en rescision pour lésion) » étant de rescinder le contrat de vente, il s'ensuit que lorsque le ven» deur a fait sur cette action prononcer la nullité du contrat, l'ache»teur a le droit de répéter le prix qu'il a payé, de même que le ven» deur a le droit de répéter l'héritage; car ce contrat étant rescindé, » il n'y a pas de cause qui puisse donner droit à l'un de retenir le prix, ‣ et à l'autre l'héritage. D'ailleurs, il est de la nature de toutes les ac>>tions rescisoires que les parties soient remises au même état qu'elles » étaient avant l'acte qu'on fait rescinder. »

C'est donc réellement la rescision, et non le supplément, qui est l'objet direct et principal de l'action, qui, par cette raison, est immobilière. Le Code n'a rien changé à ces principes, qui sont aussi professés par M. Delvincourt.

mander que l'immeuble qu'il avait vendu à vil prix, et non le supplément du juste prix.

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188. Cependant M. Delvincourt, tom. III, pag. 287, s'élève contre la décision de Pothier. Il convient néanmoins, avec lui, que le supplément de prix représente l'action en rescision, et que cette action est un droit immobilier (1) dans la personne du vendeur, demandeur en rescision; mais il pense qu'il faut décider la question par l'intention des époux. Dans l'espèce dont il s'agit, dit-il, l'immeuble était sorti des mains de l'époux avant le mariage. Par conséquent, les époux, ou au moins celui dont l'immeuble ne provient pas, n'a pas dû le regarder comme un › propre. Au contraire, il a pu penser que s'il res» tait encore dû quelque chose sur le prix, ce reste » était mobilier et devait faire partie de la commu» nauté. Or, il est certain que l'acquéreur, qui paie le supplément, ne fait pas une nouvelle acquisition; c'est l'ancienne qui subsiste, et qui » est maintenue. Le supplément peut et doit donc » être regardé comme le restant du prix qui est › encore dû par l'acquéreur. Or, nous avons vu » que la créance du prix des immeubles vendus » avant le mariage, est une créance mobilière, qui

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(1) Voici comment il s'exprime, pag. 286:

Pothier décide que la récompense est due, attendu, dit-il, que » le supplément de prix représente l'action en rescision, qui est un >> droit immobilier dans la personne du vendeur. Cela est vrai, dit » M. Delvincourt, et conforme à ce que nous avons établi au 2o. voli, » tit. 5, chap. 5, sect. 4, en traitant des obligations facultatives. »

» tombe dans la communauté. Ce supplément doit ⚫ donc également y tomber..

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En réponse à M. Delvincourt, nous lui observerons qu'il n'est point ici d'accord avec les prircipes qu'il établit quelques lignes plus haut, dans la page précédente. Il y dit fort bien que les époux, même ceux qui se marient sans contrat, » sont censés convenir entre eux d'une commu› nauté, telle qu'elle est établie par la foi : c'est donc comme s'ils avaient dit : « Nous mettons » dans la communauté tout notre mobilier pré» sent et futur, et nous en excluons tous nos im» meubles, aussi présens et futurs. » Or, en se reportant à l'intention qu'ont dû avoir les parties en faisant cette convention, il est certain qu'elles n'ont pas entendu comprendre, dans leur communauté, les immeubles qu'elles possédaient au mo¬ ment de la célébration. Donc, de quelque manière que ces immeubles sortent de leurs mains par la suite, la communauté ne doit pas profiter de ce qui a été mis à la place, et il est dû récompense du prix qui a pu être restitué par l'effet, soit d'une action rescisoire, soit d'une condition résolutoire.

Appliquant ces principes à l'action en rescision pour vilité de prix, nous dirons que cette action est un droit immobilier dans la personne du vendeur. M. Delvincourt en convient.

Il convient encore que le supplément en argent que le défendeur a la faculté de payer, ne change point la nature de l'action du vendeur, et que le supplément représente l'action en rescision, en la place de laquelle il a été mis donc il en est dù

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récompense, s'il a été versé dans la communauté. C'est la conséquence directe et nécessaire des principes posés par M. Delvincourt lui-même.

En vain cherche-t-il à éluder cette conséquence, en disant que le supplément en argent peut et doit être considéré comme un restant du prix de la vente. Comment accorder cela avec ce qu'il avoue lui-même, que ce supplément représente l'action rescisoire qu'il reconnaît immobilière dans la personne du vendeur? Nous pensons donc qu'il faut s'en tenir à la décision de Pothier.

189. Mais faut-il également suivre la décision de ce grand jurisconsulte (no. 598, premier alinéa), même dans l'espèce converse de celle dont nous venons de nous occuper, c'est-à-dire dans le cas où j'ai acquis, avant mon mariage, un héritage à vil prix? Cet héritage n'entre point dans la communauté. Depuis mon mariage, le vendeur demande la rescision du contrat pour cause de lésion. Le supplément du juste prix que je serai contraint de donner pour éviter la rescision, ne fera pas entrer l'héritage en communauté; il donnera seulement lieu à une récompense. Nous ne pensons pas qu'on puisse en douter. Pothier n'en dit rien; mais c'est une conséquence du principe qu'il pose, n°. 157, que les acquêts de chacun » des conjoints ne sont conquêts que lorsque le > titre ou la cause de leur acquisition n'a pas pré› cédé le tems de leur communauté; sinon ils sont • propres de communauté..

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Mais si, au lieu de payer le supplément du juste prix, je préfère abandonner l'héritage au deman

deur en rescision, la restitution du prix que je lui avais payé, et qu'il sera obligé de me rendre, entrera-t-elle en communauté? Pothier se prononce pour l'affirmative. Examinons ses raisons:

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Il n'en est pas de même, dit-il, du délais d'un héritage que l'un des conjoints avait acheté avant › son mariage, qu'il a été obligé de faire durant » la communauté, sur une action rescisoire du vendeur, soit pour cause de minorité, soit pour › cause de lésion, soit pour quelque autre cause de › rescision. La vente qui lui a été faite de cet héritage étant rescindée par le jugement qui inter» vient sur cette action, il est censé n'en avoir ja> mais été propriétaire; le délais qu'il en fait sur › cette action ne peut donc pas passer pour une > aliénation de son héritage propre, et la somme qui lui est rendue sur cette action par le vendeur, ne peut passer pour le prix de son héri> tage propre il est censé avoir été seulement » créancier pour la répétition de cette somme, con» dictione sine causâ, comme l'ayant payée en vertu » d'un contrat nul. Cette créance étant.... mobilière, est tombée dans la communauté, sans que le conjoint en puisse avoir aucune reprise.

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Il nous est malheureusement impossible de partager cette opinion, uniquement fondée, comme on le voit, sur cette proposition abstraite, que le contrat de l'époux acquéreur avant le mariage étant rescindé depuis, il est censé n'avoir jamais été propriétaire de l'héritage; proposition qu'on ne peut admettre dans sa généralité, et qu'on ne trouve nulle part établie par la jurisprudence,

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