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pulé d'une manière générale la clause de faire échelle.

72.-La faculté de toucher et faire échelle s'entend également et d'une échelle préméditée avant le départ, et d'une échelle faite accidentellement pendant le voyage.-Dagev., 3, 66.

75. Lorsqu'indépendamment de la faculté de toucher et faire échelle, stipulée dans la police, l'assuré a obtenu, par un avenant, de partie des assureurs la faculté de dérouter et de rétrograder, ceux des assureurs qui ont refusé d'adhérer à l'avenant ne peuvent se soustraire au paiement de la perte survenue, si le capitaine n'a usé que de la faculté de faire échelle, et n'a ni dérouté ni rétrogradé. Dagev., 3, 67.

74--La nature et la valeur ou l'estimation des marchandises ou objets que l'on fait assurer.-On peut cependant se contenter de dire qu'on fait assurer telle somme sur les facultés de tel navire. Il suffit alors qu'au moment du sinistre il y ait une pareille valeur en marchandises ou en argent, chargée sur le navire, pour le compte de l'assuré.-Delv., 2. 398.

75. Mais, lorsque la police contient la désignation des marchandises assurées, le contrat n'est valable qu'autant qu'il existait dans le navire, lors du sinistre, des marchandises de la nature de celles désignées. Toute autre marchandise, chargée pour le compte de l'assuré, ne pourrait être donnée en équivalent. Dagev., 3, 74; Pard., n. 872.

76.-Le défaut de chargement des objets indiqués dans la police, annulle le contrat, alors même que les choses que l'assuré aurait chargées à la place, seraient ou des matières servant à la fabrication des objets désignés au contrat, ou des choses qui se composent avec les matières indiquées dans la police, comme si, par exemple, l'assurance ayant été faite sur de la farine ou des laines, on avait chargé du blé ou du drap. Mêmes autorités.

77. Mais il n'y aurait pas substitution d'une chose à une autre, si l'assurance ayant été faite sur du blé désigné en sacs, ce blé se trouverait simplement entassé dans le navire; ou même, si l'assurance, ayant eu pour objet des lingots, ceux-ci avaient été convertis en vaisselles, en piastres ou en quadruples.Pard., n. 872.

78.-Lorsque l'assurance porte sur le chargement, l'énonciation de la valeur des effets chargés n'est pas non plus indispensable dans la police; souvent même on l'omet forcément.

79. Il doit être fait désignation, dans la police, des marchandises sujettes, par leur nature, à délérioration particulière ou diminution, comme blés, ou sels, ou marchandises susceptibles de coulage, sinon les assureurs ne répondront point des dommages ou pertes qui pourraient arriver à ces mêmes denrées, si ce n'est, toutefois, que l'assuré eût ignoré la nature du chargement lors de la signature de la police (C. comm. 555), comme, par exemple, dans le cas de l'art. 537.

80.. Les temps auxquels les risques doivent commencer et finir.-Les parties peuvent faire à cet égard telles conventions qu'elles jugent à propos. En l'absencee de ces conventions, la durée des risques est déterminée par l'art. 341.

81.-La somme assurée.-Cette désignation n'est pas toujours absolument indispensable. L'assureur peut s'engager à payer, en cas de perte, la valeur de la chose assurée, d'après l'estimation qui en sera faite. Il peut, en cas d'assurance sur la liberté des personnes, s'engager à payer la somme qui sera nécessaire pour le rachat. Mais il est plus commode de

déterminer d'avance la somme à payer par l'assureur. Delv., 2, 400. Delaborde, n. 118-119.

82. La prime ou le coût de l'assurance.--On ne peut supposer que les parties aient oublié de fixer la prime. C'est presque la seule chose qui soit débattue entre elles lors du contrat. Mais on peut prévoir le cas où la police porterait quittance de la prime, sans en énoncer la quotité. Dans cette hypothèse, et s'il y avait ristourne pour défaut ou insuffisance de chargement, rupture de voyage avant le départ, etc., le montant de la prime devrait, faute par les parties d'en justifier d'une manière satisfaisante par leurs livres et écritures, ou même par témoins, être réglé par les tribunaux, qui prendraient pour base les assurances faites à la même époque que celle dont il s'agirait de fixer la prime. Pard., n. 822.

83.-Et généralement toutes les autres conditions dont les parties sont convenues.-Il n'y a d'autres limites à la liberté qu'ont les parties d'insérer dans le contrat telles clauses qu'elles jugent à propos, que la nécessité de ne pas violer les dispositions prohibitives du code, par exemple, celles de l'art. 347. et de ne pas altérer la nature du contrat, comme on le ferait en détruisant le risque. Du reste, les parties ne seraient pas admises à prouver par témoins qu'il est intervenu entre elles d'autres stipulations que celles portées dans la police.

84. - Toute réticence, toute fausse déclaration (même non frauduleuse) de la part de l'assuré, toute différence entre le contrat d'assurance et le connaissement, qui diminuerait l'opinion du risque ou en changerait le sujet, annullent l'assurance, et cela, alors même que la réticence, la fausse déclaration ou la différence n'auraient pas influé sur le dommage ou la perte de l'objet assuré (C. comm. 548). Ainsi, par exemple, le défaut de déclaration que le navire est armé en guerre, annulerait l'assurance, quand même le navire aurait péri par suite, non d'un combat, mais d'une tempête.-Delv., 2, 395.

85.-La nullité pour cause de réticence ou fausse déclaration de la part de l'assuré, ne peut être invoquée que par l'assureur. L'assuré ne pourrait exciper de sa faute ou de son dol pour s'affranchir, en cas d'heureuse arrivée, du paiement de la prime.

86.-L'assureur qui fait annuler le contrat, en cas de sinistre, n'a pas le droit de demander, en outre, l'indemnité de demi pour cent, laquelle, en général, n'est due que quand la nullité est prononcée dans l'intérêt des deux parties.-Delv., 2, 395.

87. L'assurance faite, depuis le départ, avec clause que les risques ne commenceront qu'après un certain délai, à partir du contrat, est nulle, si, avant l'expiration de ce délai, les objets assurés avaient éprouvé des avaries telles que leur perte était devenue inévitable, bien que, dans le fait, cette perte ne soit arrivée que depuis l'échéance du délai dont il s'agit. L'assuré est censé avoir promis que les effets qu'on lui assure n'étaient point en un état imminent de perte occasionnée par des accidents antérieurs au jour où les risques de l'assureur ont commencé. -Pard., n. 883.

88.-Pour que l'assurance puisse être annulée sur la demande de l'assureur, il suffit que la déclaration fausse qui lui a été faite ait pu influer sur sa détermination, quand même cette déclaration porterait sur une énonciation que l'assuré pouvait omettre de faire. Par exemple, la mention du nombre d'hommes et de canons, quoique non exigée dans les polices, annulle, dans l'intérêt de l'assureur, l'assurance, si elle a été faite d'une manière fausse.-Delv., t. 2, p. 394.

ART. 2.-Des choses qui peuvent être assurées.

89. Deux principes généraux servent à déterminer quelles choses peuvent être l'objet d'un contrat d'assurance : le premier, qu'on peut faire assurer tout ce qui est exposé à des risques maritimes; le deuxième, qu'on ne peut faire assurer que ce que l'on possède actuellement, et que l'on court risque de perdre. Delaborde, n. 57 et suiv.

90. On peut faire assurer tout ce qui pouvant être l'objet d'une transaction commerciale, est exposé à des risques maritimes. Ainsi, l'assurance peut avoir pour objet le corps et quille du vaisseau, vide ou chargé, armé ou non armé, seul ou accompagné, les agrès et apparaux, l'armement, les victuailles, les sommes prêtées à la grosse, les marchandises du chargement, et généralement toutes autres choses ou valeurs estimables à prix d'argent (C. comm. 334). L'assurance peut être faite sur le tout ou sur une partie desdits objets, conjointement ou séparément (C. comm. 335).

91. Lorsqu'une chose susceptible d'être assurée l'a été conjointement avec d'autres qui ne pouvaient pas l'être, le contrat n'est frappé de nullité qu'en ce qui concerne ces dernières; il est valable pour le surplus. Poth., n. 44; Dagev., 3, 127.

92. — Si l'on fait assurer séparément les corps et quille, les agrès et apparaux, les armements et victuailles, ces divers objets sont alors considérés comme autant de corps distincts. Mais ce mode d'assurance, assez rare, ne se présume jamais. Par cela seul qu'on assure un navire par les expressions usuelles quille et corps, ou même par le seul mot navire, pourvu qu'on ne fasse aucune réserve, les agrès, armements, victuailles sont compris dans le contrat, ainsi que les objets du même genre qui pourraient y être substitués pendant le voyage (Bernard, p. 314; Pard., et Delaborde, n. 64.

93. L'assurance faite sur le chargement, ou sur la cargaison, ou sur facultés, est valable, sans qu'il soit nécessaire que les objets assurés soient désignés par leur nature et espèce. Les termes génériques chargement, cargaison, facultés, embrassent tout ce qui a été chargé dans le navire, sans que le détail en soit nécessaire.

94. Ainsi, celui qui se fait assurer sur chargement, est censé faire assurer ses pacotilles, c'est-àdire les portions des marchandises qui lui appartiennent spécialement, indépendamment de la part qu'il peut avoir dans le chargement principal. Mais l'assurance des pacotilles ne comprendrait pas les droits de l'assuré dans une partie aliquote du chargement.

L'argent, les bijoux, dont il y a connaissement ou factures, sont également compris dans l'assurance généralement faites sur facultés ou marchandises. -Emér., ch. 10, sect. 1re et 2e; Pard., n. 759; Dagev., 3, 109, et Delaborde, n. 64.

93. Si l'on avait spécifié dans la police les effets ou marchandises qu'on a voulu faire assurer, l'assurance serait restreinte aux marchandises nommément désignées, et ne s'étendrait point aux autres marchandises que l'assuré pourrait avoir chargées sur le même navire.-Emér. et Pard., loc. cit.

96. L'assurance sur le corps ne s'étend point aux marchandises, et réciproquement, à moins que les parties ne paraissent manifestement avoir eu l intention de tout confondre dans une assurance conmune. 97. Si l'on a fait assurer une somme sur tel navire, c'est d'après les circonstances que l'on pourra

décider si l'assurance affecte le corps ou le chargement, ou même l'un et l'autre. Elle n'affecterait évidemment que le chargement, si l'assuré n'avait aucun intérêt dans le navire, et réciproquement.

98. L'assurance sur facultés ne comprendrait les marchandises chargées sur le navire, pendant le voyage, qu'autant que la police en contiendrait une stipulation expresse, ou qu'on y aurait inséré la clause de faire échelle. Et, dans le cas même où cette clause existerait, il faudrait qu'on eût assuré les marchandises d'entrée et de sortie, pour que l'assurance s'étendît aux marchandises que l'assuré aurait achetées au lieu de la destination, ou pendant la traversée du retour.- Pard., n. 760.

99. L'application d'une police faite génériquement sur facultés de tel navire, se faisait de plein droit à la totalité des marchandises chargées pour le compte de l'assuré, il s'ensuit que si un négociant, après avoir fait assurer sur les marchandises qui lui sont expédiées par tel navire, une somme montant à la moitié, par exemple, de leur valeur, veut assurer le surplus de cette valeur par une nouvelle police, il doit éviter de faire porter spécialement cette seconde assurance sur l'une des espèces de marchandises composant le chargement, sinon il pourrait arriver qu'il aurait fait assurer sur cette espèce de marchandise une somme excédant sa valeur, tandis qu'il se trouverait à découvert sur une partie du surplus du chargement. En effet, si un négociant faisait d'abord assurer 50,000 fr. sous l'expression générique sur fucultés, et si. venant ensuite à apprendre que les marchandises qu'il attend consistent en 50,000 fr. de sucres et 50,000 fr. de cafés, il se bornait à faire une nouvelle assurance de 50,000 fr. sur cafés, cette seconde assurance serait nulle pour moitié, comme excessive, tandis qu'il y aurait une moitié de sucres qui ne se trouverait garantie par aucune assurance. Dagev., 3, 111.

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100. L'assurance peut être faite sur corps et sur facultés, séparément ou conjointement : séparément comme lorsqu'on assure le corps pour une valeur particulière, et le chargement pour une autre valeur distincte, ou telle somme sur corps, et telle autre sur facultés. Le corps et les facultés forment alors chacun une masse distincte.-Conjointement, comme lorsqu'on assure ensemble le navire et le chargement, ou une mème somme sur corps et facultés. Dans ce cas, le corps et les facultés forment ensemble une seule masse.

101. De ce que, dans l'hypothèse d'une assurance faite conjointement sur corps et facultés, le navire et la cargaison ne forment qu'une seule masse, doit-on conclure, comme le font Emérigon, ch. 16, sect. 5, Delvincourt, 2, 346, et Pardessus, n. 761, que si celui qui a fait assurer telle somme sur tel navire, corps et facultés, ne fait aucun chargement, il suffira que la somme assurée n'excède pas la valeur de la portion de propriété qu'a l'assuré dans le navire, pour qu'il soit fondé, en cas de sinistre, à réclamer de l'assureur la totalité de la somme assurée? Est-il rationnel d'appliquer les règles relatives aux assurances faites sur deux objets conjointement, dans le cas où il n'y a eu qu'un seul objet mis en risque? L'équité et l'intention raisonnablement présumées des parties n'exigent-elles pas que, dans le cas dont il s'agit, l'assurance soit annulée pour moitié? Néanmoins, l'opinion des auteurs cités paraît devoir être suivie.

102. Mais si, dans le même cas d'une assurance faite conjointement sur corps et facultés, il y a eu, au contraire, des marchandises chargées pour le compte de l'assuré, ne semble-t-il pas que l'assu

rance doive porter en entier sur chaque portion du navire et du chargement appartenant à l'assuré; de sorte, par exemple, que si la portion de l'assuré dans le navire valait 15,000 fr., et celle dans le chargement, 5,000 seulement, et que la somme assurée ne fût que de 12,000 fr., l'assureur, en cas de perte du navire seul, devrait payer toute la somme assurée, nonobstant le sauvetage entier du chargement? Peuton supposer qu'en permettant de faire des assurances conjointement sur corps et facultés, l'art. 535 ait voulu parler, non d'une conjonction re et verbis, mais d'une simple conjonction verbis tantùm? Toutefois, une décision contraire résulte de la déclaration du 17 août 1779, que la jurisprudence considère comme toujours en vigueur. Cette déclaration porte, art. 10, que « dans le cas où le navire et son chargement seront assurés par la même police, et pour une seule somme, ladite somme assurée sera répartie entre le navire et son chargement par portion aux évaluations de l'un et de l'autre... »

105. L'autorité légale de la déclaration de 1779, une fois admise, il faut décider, avec Dagev., 3, 106, que celui qui, ayant, par exemple, un navire évalué 10,000 fr., et un chargement de 90,000, a, par une première police, fait assurer 50,000 fr. sur corps et facullés, doit considérer cette assurance comme s'il l'avait faite avec application de 5,000 fr. sur le corps, et de 45,000 fr. sur facultés. sans qu'il puisse changer ultérieurement cette application, de sorte que si, par une seconde police, il fait assurer 50,000 fr. sur facultés seulement, il se trouvera avoir fait assurer 5,000 de trop sur facultés, tandis qu'il aura un découvert de 5,000 fr. sur le navire.

104. Dans le cas où une assurance aurait été faite, soit sur corps, ou soil sur facullés, cette clause n'attribuerait pas à l'assuré le droit de rejeter, à son choix, suivant les occurences, le risque des assureurs, ou sur les facultés ou sur le corps, droit qui donnerait lieu à mille fraudes; mais il faudrait, suivant Emérig., ch. 10, § 4, appliquer l'assurance sur le découvert que l'assuré aurait sur l'un ou l'autre objet, et si le découvert était égal des deux côtés, l'assurance frapperait proportionnellement sur le reste de l'un et de l'autre. · Bernard, p. 427, ne regarde comme valable l'assurance faite, soit sur corps, soit sur facultés, qu'à la condition, de la part de l'assuré, de déclarer à l'assureur et de déterminer avant le sinistre, ou avant d'en avoir connaissance, si la police s'applique au corps ou à la cargaison. Cette condition paraît à Bernard le seul moyen de prévenir la fraude. Quant à Pardessus, il admet implicitement la décision d'Emérigon, car il en fait l'application au cas où l'assurance aurait été faite, soit sur telles parties du chargement, soit sur telles autres, soit sur des marchandises chargées au départ, soit sur les retours.

105. Si quelqu'un, ayant fait assurer une certaine quantité de choses spécifiées, en a chargé sur le navire une quantité plus grande, l'assureur n'a pas le droit d'appliquer son risque sur la portion qu'il juge à propos. La quotité non assurée étant indivise avec celle qui l'a été, l'assureur et l'assuré sont réputés assureurs par indivis dans la proportion résultant de la police et du découvert.- Pard., n. 760.

106.- Sur la question de savoir si l'assurance indéfinie des marchandises de l'assuré comprend celles qui lui sont communes avec d'autres intéressés, Emėrigon établit les distinctions suivantes : « 10 Si les marchandises communes ont été chargées pour mon compte et celui des autres intéressés, l'assurance que j'aurai faite pour mon compte seul ne concernera que mon intérêt, parce que rien de plus n'a

été assuré; - 2o si le connaissement avait été dressé pour compte d'une maison de commerce, et sous le nom social, l'assurance, faite pour compte, et au nom particulier d'un des associés, serait étrangère aux effets sociaux; - 3o si les marchandises coinmunes ont toutes été chargées en mon nom et pour mon compte, l'assurance que je ferai pour mon compte sur la totalité des mêmes marchandises profitera à moi seul, dans le cas où la somme assurée n'excède pas l'intérêt que j'avais dans la chose com

mune. »>

107.-L'assureur qui fait réassurer, doit-il déduire du montant de la réassurance la prime qui lui a été promise par l'assuré? — Oui, suivant Valin, sur l'article 20, Pothier, n. 55, Boulay, t. 1er, p. 256, el Bernard, p. 568, parce que cette prime étant acquise à l'assureur, quel que soit l'événement, il ne court aucun risque à cet égard; que, d'ailleurs, l'art. 342 ne permet à l'assureur de faire réassurer par d'autres que les effets qu'il a assurés; qu'enfin, ce serait une assurance sur profit espéré, défendue par l'art. 547 C. comm. — Au contraire, Emér., ch. 8, sect. 14, Delv., t. 2, p. 350, Pard., Estrang., p. 46, et Dagev., t. 3, p. 169, décident que le risque que court le premier assureur de payer, en cas d'heureuse arrivée, une somme plus forte que celle qu'il a à recevoir, suffit pour autoriser l'assureur à faire assurer même la prime de la première assurance. Tel est aussi notre sentiment.

108. L'assuré peut faire assurer la prime ou coût de l'assurance (C. comm. 342), sans aucun bénéfice, puisqu'il est exposé à perdre cette prime. Il peut même, contrairement à l'opinion de Poth., n. 34, faire assurer la prime et la prime des primes par l'assureur du capital; c'est d'ailleurs ce qui se pratique constamment. 11 se forme alors deux contrats d'assurance séparés : l'un pour les effets à raison desquels la prime est due; l'autre, de cette prime originaire pour laquelle on paie une seconde prime. - Emérig., ch. 8, sect. 12; Bern., p. 259.

109. L'assurance de la prime et de la prime des primes ne se présume pas. Seulement elle s'induit souvent de certains termes usités pour l'exprimer, par exemple, de la stipulation que la prime ne sera payable qu'en cas d'heureuse arrivée. Cette stipulation a précisément l'effet d'une convention d'assurance de la prime, parce qu'à ce moyen l'assureur reçoit, en cas d'heureuse arrivée, une prime plus forte, et qu'il s'engage, s'il y a sinistre, à payer la totalité de la somme assurée, sans déduction.

110. Il y a des polices dans lesquelles les assureurs disent aux assurés : Nous vous permettons de vous faire assurer en entier la prime et la prime de la prime. L'usage attribue à ces expressions le même effet que si les assureurs avaient dit qu'ils assuraient eux-mêmes la prime et la prime de la prime.

111. L'assurance de la prime et des primes des primes est très-usitée en temps de guerre, à cause du haut taux de la prime. Cette assurance fait rentrer l'assuré dans son capital primitif tout entier, à quelque taux de prime que l'assurance soit faite. Pour déterminer quelle est la somme à payer pour la prime d'un capital donné, et pour la prime des primes à l'infini, il faut multiplier ce capital par le taux de l'assurance, et diviser le produit par la différence de 100 à ce même taux. La prime peut s'élever beaucoup au-dessus du capital primitif. Emérigon en cite des exemples. V. aussi Delv., 2, 554.

112. L'assurance est nulle si elle a pour objet le profit espéré des marchandises (C. comin. 347); mais

on peut faire assurer le bénéfice acquis. Si donc les marchandises sont arrivées à un terme de voyage où l'on puisse les vendre à un prix plus élevé que celui qu'elles avaient au départ, elles seront valablement assurées d'après l'évaluation réelle qu'elles peuvent recevoir dans ce lieu.

113. L'assurance est encore nulle si elle a pour objet le loyer des gens de mer (C. comm. 347), parce que ces loyers sont pour eux des profits éventuels qui ne leur appartiennent pas encore, et parce que, surtout si ce loyer était assuré, les gens de mer seraient moins intéressés à la conservation du navire. Mais ils peuvent faire assurer les marchandises achetées au moyen des avances ou à-comptes par eux reçus pendant le voyage, ces avances leur étant irrévocablement acquises (C. comm. 258).

114.-La question de savoir si le fret ou nolis peut être l'objet d'une assurance, se résout par une distinction: il y a deux espèces de frets, le fret à faire et le fret acquis. L'art. 347 C. comm. n'annulle que le contrat ayant pour objet le fret des marchandises existant à bord du navire, c'est-à-dire, en d'autres termes, le fret à faire.

Les auteurs conviennent unanimement que le fret est acquis, 10 lorsque les marchandises qui le doivent, étant mises à quai, le fréteur a droit d'en exiger le payement; 20 lorsque les marchandises ayant péri, le chargeur n'en est pas moins tenu, aux termes de la convention, et conformément à l'art. 302 C. comm., de payer le fret promis, dit Pardessus, t. 3, n. 765. - Dalloz, n. 170.

115. Dans le cas où le propriétaire du navire a le choix, soit de décharger les marchandises dans tel port désigné, soit de les transporter, moyennant une augmentation de prime, dans tel autre plus éloigné, s'il arrive qu'étant parvenu au premier port, il poursuive sa route jusqu'au second, le fret qu'il aurait pu gagner en déchargeant dans le premier, pourra-t-il être de sa part l'objet d'une assurance?-Oui, suivant Emér., Bern., p. 528, Pard., Delv., 2, 312, et Boulay, t. 5, p. 485.- Non, suiv. Estrang. sur Poth., n. 36, et cette dernière décision nous paraît préférable. Le fret n'était acquis au premier port, qu'à la charge que le navire y serait déchargé; cette condition manquant, le fret est resté dans la classe du fret à faire. L'art. 347 C. comm. seul prouverait que tant que les marchandises ne sont pas déchargées, le fret n'est pas acquis, puisqu'il désigne comme fret à faire celui des marchandises existant à bord du navire.

116. Mais alors même qu'on adopterait la décision d'Emérigon, et que l'on considérerait comme fret acquis celui qu'on aurait été en droit d'exiger au lieu du relâche, il n'en faudrait pas conclure que les matelots pussent aussi faire assurer les salaires qu'ils auraient exigés dans le même lieu de relâche, si le navire y avait désarmé, ni que les chargeurs pussent faire assurer la plus-value de leur marchandise.

117. La prohibition d'assurer le fret d'un navire est d'ordre public, et il ne peut y être dérogé par des conventions particulières entre l'assuré et l'assureur: la nullité qui en résulte est tellement absolue, qu'elle ne serait pas couverte par la ratification ou l'exécution des parties (C. comm. 847; C. civ. 6, 1558).— 5 juin 1832 Req. Rennes.

118. La même décision est, ce nous semble, applicable à toutes les assurances qui seraient faites nonobstant la prohibition de l'art. 347. Mais la nullité de l'assurance, en ce qui concerne l'objet assuré en contravention à la loi, n'empêcherait pas le contrat d'avoir son effet relativement aux objets licitement assurés. Dageville, 3, 227. 119.

L'assuré ne peut faire assurer une seconde LEG US.

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120. Dans le cas où l'assuré s'est fait assurer la solvabilité de l'assureur, les deux assureurs n'ayant pas traité ensemble, demeurent nécessairement étrangers l'un à l'autre le second ne devient donc ni la caution ni le codébiteur solidaire de l'autre. Aussi ne peut-il, opposer le bénéfice de discussion.-Si le premier assureur est en demeure de payer au premier commandement qui lui en est fait en vertu du jugement de condamnation, l'assuré peut s'adresser au second assureur, sauf en se faisant payer par ce dernier, à le subroger aux droits et actions résultant de la première assurance. - Emérig. ch. 8, sect 15; Locré, t. 4. p. 99; Estrang., p. 42; Dagev., t.3, p. 177. 121.Si, dans le cours du voyage, il est fait des dépenses extraordinaires pour le navire, l'armateur peut faire assurer ce surcroît, non-seulement lorsque les dépenses ont eu pour motif et pour effet d'augmenter la valeur du navire, mais encore lorsqu'elles ont été faites uniquement pour les nécessités de ce navire: car, même dans ce dernier cas, le surcroît de dépenses peut, en cas de sinistre, se trouver aux risques de l'armateur V. Valin, art. 19, tit. du Capitaine; Emérig., ch. 8, sect. 6, § 2; Bern., p. 315; Dagev., 3, 72.

122. - De même, on peut faire assurer la somme employée au rachat d'un navire, soit lorsqu'il n'a pas encore été assuré, en ajoutant cette somme au prix d'évaluation, soit en la faisant assurer postérieurement comme nouvelle dépense car c'est un déboursé qui augmente la quotité des risques de l'armateur.--Pard., n. 767.

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125. L'emprunteur à la grosse ne peut faire assurer soit les sommes empruntées, s'il les a chargées sur un navire et destinées à des opérations de commerce, soit les objets affectés à ces sommes, puisque ces objets ou ces deniers ne sont plus à ses risques. Il ne pourrait même pas, dit Bernard, p. 351, convenir avec un tiers que, moyennant une prime quelconque, ce tiers serait chargé du remboursement du prêt, en cas d'heureuse arrivée; car celui qui traiterait, dans ce cas, avec l'emprunteur, parierait réellement pour la perte, ce qui répugne à toutes les idées d'ordre et de morale.-Pardessus émet la même décision, n. 768.

124.- Quant au préteur à la grosse, il ne peut faire assurer le profit maritime du prêt qu'il a fait (C. comm. 347), parce que, a-t-on dit, le profit stipulé est un gain qu'il manquera de faire si le vaisseau périt, et non une perte affective. Mais il peut faire assurer le capital (C. comm. 334), pourvu que cette assurance ne soit pas souscrite par l'emprunteur luimême, car alors le contrat serait nul, comme renfermant une usure déguisée, la prime d'assurance étant toujours moindre, dans le fait, que le profit maritime stipulé par le préteur à la grosse. V. Emérig., ch. 8, sect. 11. 125. Une assurance sur marchandise de contrebande est nulle. Pardessus pense néanmoins, t. 5, p. 342, que les tribunaux ne frapperaient pas de la même nullité l'assurance qui s'appliquerait à des marchandises destinées à la contrebande en pays étranger.-Mais. suivant Bernard, p. 511, toute con27 LIVR.

vention de contrebande, soit dans sa propre patrie, soit en pays étranger allié, est immorale et nulle. Cet auteur décide même, en cas de contrebande en pays ennemi, que le droit des gens n'autorise pas ce genre d'hostilités. Du moment, dit-il, qu'on est accueilli, sous le pavillon national ou sous un pavillon neutre dans un pays même ennemi, on viole l'hospitalité, on commet une perfidie en fraudant les droits de la nation chez laquelle on est reçu. Telle paraît être aussi la doctrine de Poth., n. 58; celle d'Emérigon et d'Estrangin est moins sévère.

126. Au reste, Bernard cite à l'appui de son opinion deux arrêts de la cour de Rennes. le 1er, rendu le 23 déc. 1825, dans une espèce où il s'agissait d'une convention de fraude entre un commettant et un commissionnaire pour l'introduction de marchandises françaises à Saint-Domingue, porte « que les droits d'importation ont dû être payés lors de l'arrivée des marchandises à Haïti; que toute convention qui a pour objet l'importation frauduleuse de marchandises dans quelque pays que ce soit, est illicite, et que, par conséquent, les magistrats n'ont pas à prononcer sur les contestations qu'elles peuvent amener, etc. » — Le second, du premier décembre 1826, décide que l'acte d'affrétement qui a pour objet un commerce frauduleux dans les états d'une puissance étrangère, est contraire aux principes du droit naturel, et, par cela même, fondé sur une cause illicite; que ce motif suffit pour en faire prononcer l'annulation, et que, d'après les dispositions des articles 1151 et 1227 C. civ., la clause pénale stipulée pour en assurer l'observation, ne peut subsister lorsque l'obligation principale est anéantie.

127. On peut, suivant Pard., n. 814, assurer valablement les effets appartenant aux sujets d'une nation ennemie. Delv., au contraire, déclare une pareille assurance nulle, quand même ces effets seraient chargés sur des bâtiments appartenant à des neutres, si toutefois, dans ce dernier cas, il y a preuve que les parties savaient que les objets appartenaient à un ennemi (t. 2, p. 396).

128. L'assureur peut faire réassurer, mais par d'autres que l'assuré, sinon ce ne serait qu'une sorte de dissolution du contrat primitif. La prime de réassurance peut être moindre ou plus forte que celle de l'assurance (C. comm. 342). La réassurance est un contrat nouveau, tout à fait distinct de l'assurance primitive, laquelle continue de subsister dans toute sa force. Néanmoins, l'assureur pourrait stipuler que les réassureurs paieront à son acquit la perte au premier assuré, et, si celui-ci accepte, il acquiert action et privilege contre les réassureurs. Dans ce cas, la réassurance opérera novation si le premier assuré décharge le premier assureur; elle ne sera au contraire qu'un cautionnement, si ce dernier demeure obligé, et que les réassureurs ne soient que ses garants (Bern.. p. 365). Mais, hors le cas où il existe de pareilles stipulations, la réassurance est, à l'égard du premier assuré, res inter alios acta.

129.-Il résulte de ce principe, que (contrairement à l'opinion de Valin, sur l'art. 20) le premier assuré, en cas d'insolvabilité du premier assureur, n'a pas d'action directe contre le réassureur, et ne peut agir contre lui que comme exerçant les droits de son assureur, sans qu'il y ait lieu, par conséquent, de lui accorder, sur le montant de la réassurance, aucun privilége ni préférence sur les autres créanciers, avec lesquels dès lors il viendra par contribution (Emérig., ch. 8. sect. 14, § 2; Dagev. t. 3, p. 166).— Une autre conséquence de la même règle, c'est que la remise faite à l'assureur ne profite point à son ré

assureur.

130.-L'assureur qui s'oblige indéfiniment à payer, en cas de perte, la valeur des marchandises de l'assuré, sans déterminer la somme pour laquelle il prend risque, ne répond cependant que des marchandises qui, lors du contrat, se trouvaient déjà chargées sur le navire, et non de celles qui l'ont été depuis. Mais ce mode d'assurance est peu usité. Ordinairement la police détermine la somme à payer par l'assureur, et porte que l'assurance qui a pour objet les marchandises, est faite sur facultés chargées ou à charger; et, dans ce cas, l'assurance comprend toutes les marchandises chargées dans le navire, soit avant, soit après le contrat, et même celles qui le sont pendant le voyage, pourvu que la clause de faire échelle ait été stipulée. — Emérig., ch. 10. sect. 1re. Des risques.

ART. 3.

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§ 1er.-Nécessité d'un risque maritime.

151.

De ce qu'il est de l'essence de l'assurance, que la chose assurée soit exposée à un risque, il suit que si le voyage est rompu avant le départ du vaisseau (ou, plus exactement, arant le risque commencé),même par le fait de l'assuré, l'assurance est annulée; seulement l'assureur reçoit, à titre d'indemnité, demi pour cent de la somme assurée (C. comm. 349).

132. Il est unanimement admis par les auteurs que la rupture du voyage, arrivée après que le risque a commencé à courir pour l'assureur, fait acquérir la prime entière à ce dernier, quoique le départ n'ait pas eu lieu; car le risque peut commencer avant ce départ, soit en vertu d'une convention des parties, s'il s'agit d'une assurance sur corps, soit même de plein droit et sans stipulation spéciale, s'il s'agit d'une assurance sur facultés (C. comme. 341, 328). En un mot, le voyage du navire et le royage assuré sont essentiellement distincts. Valin, sur l'art. 57; Dagev., 3, 244. Delaborde, n. 101.

133. - En attribuant à l'assureur l'indemnité de demi pour cent, en cas de rupture du voyage, même par le fait de l'assuré, l'art. 349 indique assez que cette indemnité est due, à plus forte raison, lorsque la rupture provient d'une autre cause quelconque, et, par exemple, d'un événement de force majeure, puta d'un incendie, pourvu toujours que l'assureur n'ait point commencé à courir les risques. Cette décision est motivée sur ce que le demi pour cent est dû par l'assuré, moins à titre de dommages-intérêts (la loi ne prononçant, en général, des dommagesintérêts que contre la partie qui, par son fait, a rompu le contrat) que comme indemnité des frais de négociations faits par l'assureur, de ses déplacements, peines et soins, etc.-Emérig., ch. 16. sect. 6; Deiv., 2, 370; Pard., n. 875; Dagev., 3, 245. - Contrà, Poth., n. 181.

134. - Ce n'est, au reste, que lorsqu'elle empêche absolument le voyage, que la force majeure annulle l'assurance, par exemple, en cas d'incendie du navire assuré. Carl'assurance subsisterait, nonobstant même cet incendie, si elle portait sur facultés, pourvu qu'on trouvât un autre navire pour y charger les marchandises (Pard., n. 872). S'il n'était pas possible de se procurer un autre navire, ou si l'assuré refusait d'y faire son chargement, il y aurait lieu à l'annulation de l'assurance, avec l'indemnité de demi pour cent. - Delv., loc cit.

135. Il n'y a pas lieu à l'indemnité de demi pour cent, soit en cas de rupture du voyage, par suite d'arrêt de prince, avant le risque commence, soit, suivant Dagev., 5, 245, en cas d'interdiction de commerce, avant la même époque, avec l'état dans lequel se trouve le port de destination (arg. de l'art. 276). Mais le voyage serait rompu, dans le sens de

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