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portait depuis long-temps une tumeur considérable dans l'aine, du côté droit. Le 19 déal cembre 1815, elle éprouva des coliques, des vomissemens assez fréquens, qui la déterminèrent à chercher du secours dans les salles de chirurgie de la Salpêtrière.

Jusqu'à l'âge de 40 ans, elle avait joui d'une parfaite santé, et antérieurement elle n'avait point eu de hernie. Elle avait eu huit accouchemens faciles. Il y a 42 ans qu'elle mit au jour le dernier de ses enfans: huit jours après, elle se leva, et eut l'imprudence de reprendre les occupations fort pénibles qu'exigeait son état de blanchisseuse. C'est à cette époque, et après un travail qui l'avait beaucoup fatiguée, qu'elle s'aperçut de la formation d'une petite tumeur dans l'aine droite. Elle parvint à la faire rentrer, et ne prit aucune autre précaution; elle avait alors 40 ans. Jusqu'à l'âge de 41 ans, elle continua d'être réglée, et pendant ce temps sa hernie, très-peu volumineuse, rentrait facilement, sortait lorsqu'elle travaillait, et après. un exercice fatigant, lui semblait avoir acquis un plus grand volume.

A 41 ans, survint l'époque ou temps critique, qui altéra sa santé. Elle fut depuis sujette à des affections érysipélateuses. Déja sa hernie avait acquis plus de volume; elle la faisait rentrer plus difficilement; et elle éprouvait assez souvent des coliques et des nausées.

Elle consulta sa tumeur fut regardée comme

un entérocéle; on la réduisit, et on lui recom manda l'usage d'un bandage herniaire.

Elle en porta un pendant quelques années mais avec la plus grande négligence; enfin, elle y renonça, et abandonna sa tumeur à ellemême celle-ci ne tarda pas à acquérir le volume d'un œuf de poule; elle devint irréductible; la malade fut sujette à ce qu'elle appelait des tiraillemens d'estomac ; elle éprouvait presque constamment des nausées qui lui faisaient choisir un petit nombre d'alimens, tels que la salade et les fruits.

Lorsqu'elle mangeait des viandes, ses nausées, plus fortes, étaient quelquefois suivies de yomissemens.

Tel fut l'état habituel de la malade jusqu'à l'âge de 74 ans. A cette époque, elle fut affectée d'une fièvre aiguë; pendant l'accès d'un délire agité, sa tumeur prit tout-à-coup un volume double; quelques symptômes d'étranglement se manifestèrent : coliques, hoquets nausées, et même quelques vomissemens. Le ventre fut tendu, la tumeur dure; la peau offrit quelques traces d'inflammation.

L'on appliqua des cataplasmes sur sa hernie; au bout de quelques jours, l'on y sentit de la fluctuation; le chirurgien qui la soignait crut que la tumeur était un entérocèle; son volume lui fit éviter l'opération : il se contenta de coinbattre l'inflammation par des tisanes rafraîchissantes; la fluctuation sensible vers la partie

droite de la tumeur, fit croire à la formation d'un abcès stercoral. La peau enflammée ne tarda pas à s'ouvrir, et il ne s'écoula ni pus, ni matières fécales, mais un fluide séreux, tant soit peu sanguinolent, et extrêmement abondant.

Cet écoulément fut suivi d'une diminution dans le volume de la tumeur. Les symptômes de l'étranglement disparurent, ainsi que la fièvre antérieure indépendante de la hernie.

Depuis l'âge de 74 ans jusqu'à 82, la malade continua d'être sujette aux mêmes nausées, douleurs de ventre, coliques, quelquefois vomissemens. Même choix d'alimens; de plus, de trois mois en trois mois, à-peu-près, sa tumeur augmentait, la peau s'ouvrait, donnait issue à un fluide inodore, d'une consistance huileuse, dont l'expulsion produisait une diminution dans le volume de la hernie.

Enfin, le 19 décembre 1815, la malade ayant éprouvé des symptômes d'étranglement, entra aux infirmeries de la Salpétrière.

Voici quel était son état général, le 20 décembre un peu de fièvre, nausées, peu de vomissemens, coliques, constipation.

La tumeur offrait les particularités suivantes: elle existait dans l'aine droite; son volume étonnait ; elle avait peut-être cinq pouces de longueur sur quatre de large. Sa forme était celle d'une pyramide à trois faces; l'une de ces faces était antérieure ; l'autre, postérieure,

appuyait sur la cuisse droite; une interne dépassait de quelques pouces la vulve. La base était en haut, le sommet en bas, et la tumeur était plus large dans son milieu qu'à sa base; sa direction était oblique de droite à gauche et de haut en bas.

La peau avait tellement cédé, qu'elle formait une vraie bourse pendante entre les cuisses. Le doigt porté au-dessus de la tumeur, reconnaissait l'anneau inguinal dans l'état naturel; immédiatement au-dessous on sentait l'arcade crurale.

Le volume de la hernie, le peu d'intensité des symptômes qu'offrait l'étranglement, firent juger qu'elle était sur-tout épiploïque ; et que si elle contenait une portion d'intestin, l'épiploon la mettait à couvert d'un étranglement plus marqué. Le volume de la tumeur, le peu de violence des accidens, l'âge de la malade, et sur-tout le mauvais état du pouls, s'opposaient à toute tentative d'opération. L'on se contenta d'employer des tisanes laxatives et des lavemens émolliens; ces moyens suffirent pour appaiser les symptômes de l'étranglement.

Il y eut un écoulement considérable de sérosité par la peau de la tumeur, qui n'offrait cependant aucune ouverture fistuleuse sensible. Cette sérosité fut trop abondante pour être regardée comme un effet de la transpiration; d'ailleurs la malade y était tellement sujette, qu'elle salissait beaucoup de linge par cet écou

lement. Les symptômes de l'étranglement eurent à peine cessé, qu'elle fut atteinte d'une fièvre adynamique, d'autant plus grave que des évacuations provoquées l'avaient affaiblie. Elle y succomba malgré l'emploi des toniques, et l'on fit, en ouvrant son cadavre, les découvertes suivantes :

La peau qui formait l'enveloppe extérieure de la tumeur était saine.

Au-dessous existait une quantité considérable de graisse d'une consistance ferme et serrée.

Le sac herniaire fut à peine reconnu ; la hernie existait depuis quarante ans; ces parties n'existaient plus dans leur état naturel. Plus profondément l'on découvrit un tissu Jardacé, graisseux, en masse considérable, auquel venaient s'unir deux prolongemens d'épiploon. On fendit cette partie, l'on en fit deux lambeaux, l'un interne, l'autre externe, et l'on ne vit point d'intestin, mais les objets suivans qui adhéraient de toutes parts aux graisses environnantes: la matrice, les ovaires, les trompes de Fallope, une partie du vagin, deux cordons distincts d'épiploon, enfin deux kystes ou peut-être deux hydatides.

Pour bien reconnaître ces objets, on mit à découvert d'abord l'anneau inguinal libre ; on coupa le ligament de Fallope, et évidem ment on reconnut une hernie crurale

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