OCT 23 1890 La Confédération suisse et Sa Majesté l'Empereur d'Allemagne, animés du désir de maintenir et de resserrer les liens d'amitié existant entre la Suisse et l'Empire d'Allemagne et dans le but de régler à nouveau les conditions de l'établissement des Suisses dans l'Empire d'Allemagne et des Allemands en Suisse, ainsi que celles de l'assistance réciproque de ceux de leurs ressortissants qui doivent être secourus et soignés, sont convenus de conclure à cet effet un traité et ont nommé pour leurs plénipotentiaires, savoir: Le Conseil fédéral : M. le Conseiller fédéral Numa Droz, Chef du Département fédéral des Affaires étrangères, et Sa Majesté l'Empereur d'Allemagne M. Otto de Bülow, son Envoyé extraordinaire et Ministre plénipotentiaire auprès de la Confédération suisse, Conseiller intime de Légation et Chambellan, lesquels, après s'être communiqué leurs pleins pouvoirs, trouvés en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants, sous réserve de ratification : Article premier. Les Allemands seront reçus et traités dans chaque canton de la Confédération, relativement à leurs personnes et à leurs propriétés, sur le même pied et de la même manière que le sont ou pourront l'être à l'avenir les ressortissants des autres cantons. Ils pourront en conséquence aller, venir, séjourner temporairement et s'établir d'une manière permanente en Suisse, en se conformant aux lois et règlements de police. Tout genre d'industrie et de commerce permis aux ressortissants des (1) Les ratifications ont été signées à Berne le 3 juillet 1890. divers cantons le sera également aux Allemands, sans qu'on puisse en exiger aucune condition pécuniaire ou autre plus onéreuse. Art. 2. Pour pouvoir invoquer le bénéfice de l'article premier, les Allemands en Suisse devront être munis d'un certificat de leur légation, constatant qu'ils possèdent la qualité de ressortissants allemands et jouissent d'une bonne réputation. Art. 3. Les Suisses jouiront, en Allemagne, en se conformant aux prescriptions de l'art. 2 du présent traité, des mêmes droits et avantages que l'article premier ci-dessus assure aux Allemands en Suisse. Art. 4. Les dispositions des précédents articles ne portent aucune atteinte au droit qu'a chacune des parties contractantes d'interdire son territoire aux ressortissants de l'autre, soit en vertu d'un jugement, soit pour des motifs tirés de la sécurité intérieure et extérieure de l'Etat, soit encore pour des motifs se rapportant à la police des mœurs et à la mendicité. Art. 5. Les ressortissants de l'un des deux Etats établis dans l'autre demeurent soumis aux lois de leur patrie en ce qui concerne le service militaire et les prestations imposées par compensation pour le service personnel; ils ne peuvent, en conséquence, dans le pays où ils sont établis, être astreints ni à un service militaire quelconque, ni aux pres tations imposées par compensation pour le service personnel. Art. 6. En cas de guerre ou d'expropriation pour cause d'utilité publique, les citoyens de l'un des deux Etats résidant ou établis dans l'autre seront assimilés aux citoyens du pays où ils résident, en ce qui concerne les indemnités pour les dommages qu'ils ont éprouvés. Art. 7. Tout avantage que l'une des parties contractantes aurait concédé ou pourrait encore concéder à l'avenir d'une manière quelconque à une autre puissance, en ce qui concerne l'établissement et l'exercice des professions industrielles, sera applicable de la même manière et à la même époque à l'autre partie, sans qu'il soit nécessaire de faire une Convention spéciale à cet effet. Art. 8. Les ressortissants de l'un des deux Etats contractants qui se trouvent sur le territoire de l'autre, qui y résident ou qui y sont établis, et qui seraient dans le cas d'être expulsés, en vertu des dispositions de l'article 4, seront, à la demande de l'Etat contractant qui les renvoie, reçus en tout temps, eux et leurs familles, dans l'autre État. Chaque partie s'engage, dans les mêmes éventualités, à recevoir, à la demande de l'autre partie, ceux de ses anciens ressortissants qui, tout en ayant perdu leur droit de citoyen d'après la législation du pays, ne sont pas devenus ressortissants de l'autre partie ou d'un autre Etat. Toutefois, si l'origine n'est pas établie par un acte encore valable et non suspect, un renvoi, par mesure de police, ne doit pas avoir lieu avant que la question de l'obligation de recevoir l'individu à renvoyer ait été résolue et que l'autre Etat ait expressément reconnu son obligation à cet égard. Les frais de transport jusqu'aux frontières de la Suisse et de l'Allemagne seront à la charge de l'Etat qui a provoqué le renvoi. Art. 9. Les deux parties se réservent le droit d'interdire, à ceux de leurs ressortissants qui se sont fait naturaliser dans l'autre avant de s'être acquittés de leur service militaire, le séjour permanent ou l'établissement dans leur ancienne patrie. Art. 10. Les propriétaires ou cultivateurs suisses de biens-fonds situés daus l'Empire d'Allemagne, et vice-versà, les propriétaires ou cultivateurs allemands de biens-fonds situés en Suisse, jouissent, pour l'exploitation de leurs biens, des mêmes avantages que les nationaux habitant la ruême localité, à la condition de se soumettre à toutes les ordonnances administratives et de police applicables aux ressortissants du pays. Art. 11. Chacune des deux parties contractantes s'engage à pourvoir à ce que sur son territoire les ressortissants de l'autre partie, qui doivent être secourus et soignés, soient traités à l'égal de ses propres ressortissants jusqu'à ce que leur retour dans l'Etat d'origine puisse s'effec tuer sans danger pour leur santé ou celle d'autres personnes. La bonification des frais résultant de l'application de ces dispositions ne peut être réclamée des caisses de l'Etat, des communes ou autres caisses publiques de l'Etat dont la personne secourue est ressortissante. Pour le cas où la personne secourue ou d'autres tiers obligés sont en état de rembourser les frais, le recours demeure réservé contre ces derniers. Les Gouvernements contractants s'engagent aussi réciproquement à prêter, sur la proposition de l'autorité compétente, l'appui admissible aux termes de la législation du pays, afin que ceux qui ont supporté les frais soient remboursés dans une mesure équitable. - Art. 12. Le présent traité entrera en vigueur le 20 juillet 1890 et sera valable jusqu'au 31 décembre 1900. Dans le cas où douze mois avant la fin de ladite période, aucune des deux parties contractantes n'aurait notifié son intention de faire cesser les effets du traité, il demeurera obligatoire jusqu'à l'expiration d'une année à partir du jour où l'une ou l'autre des parties contractantes l'aura dénoncé. Le présent traité sera ratifié aussitôt que faire se pourra, et les ratifi cations en seront échangées à Berne, au plus tard le 10 juillet de cette année. En foi de quoi, les soussignés ont signé le présent traité et y ont apposé le cachet de leurs armes. Fait à Berne, le 31 mai 1890 (mil huit cent quatre-vingt-dix). Signé : DROZ. Signé OTTO DE BULOW. Protocole de clôture. Au moment de procéder à la signature du traité en date de ce jour, les plénipotentiaires soussignés sont, avec l'autorisation de leurs Gouvernements, convenus par le présent protocole des dispositions suivantes : 1o Le ministre royal de Bavière près la Confédération suisse est compétent pour délivrer aux ressortissants bavarois le certificat dont il est fait mention à l'article 2. 2o Tant que la Suisse n'aura pas pris de disposition législative dans le but de déterminer que, pour ses ressortissants qui voudront se placer en Allemagne au bénéfice du présent traité, le certificat prévu à l'article 2 ne pourra être délivré que par sa légation et ses consulats dans ce pays, les autorités allemandes considéreront comme équivalant audit certificat l'acte d'origine (Heimatschein), délivré par la commune suisse et légalisé par le canton d'origine. 3o Les ressortissants de l'un des deux pays régulièrement établis dans l'autre en vertu du traité du 27 avril 1876 sont au bénéfice du traité en date de ce jour sans autre formalité. 4o Pour le rapatriement des personnes visées dans l'article 8 du traité de ce jour, les règles fixées par le protocole additionnel du 21 décembre 1881 au traité d'établissement du 27 avril 1876 continueront à déployer leurs effets aussi longtemps que ledit protocole n'aura pas été remplacé par un nouvel accord entre les deux Gouvernements. 50 Les deux Etats s'engagent réciproquement à ne provoquer le renvoi d'une personne, prévu à l'article 9, qu'après un examen préalable et minutieux des circonstances qui s'y rapportent; ils ne le provoqueront pas, s'il résulte de cet examen que le changement de nationalité a eu lieu bona fide et que la personne dont il s'agit n'a pas voulu, par cela, se soustraire au service militaire. Le présent protocole aura la même force et valeur que s'il faisait partie intégrante du traité. Il sera ratifié par les deux parties contractantes, et les ratifications en seront échangées à Berne le même jour et en même temps que celles du traité. En foi de quoi, les soussignés ont signé le présent protocole en double et y ont apposé le cachet de leurs armes. Fait à Berne, le 31 mai 1890. Signé : DROZ. (L. S) Signé OTTO DE BULOW. Pour élucider la disposition renfermée au chiffre 2 du protocole de clôture annexé à ce traité, l'échange de notes suivant a eu lieu entre le département fédéral des affaires étrangères et le ministère allemand des affaires étrangères, par l'intermédiaire de la légation suisse à Berlin. Berne, le 28 juin 1890. Le département fédéral des affaires étrangères à la légation suisse à Berlin. Monsieur le ministre, Le chiffre 2 du protocole de clôture annexé à notre nouveau traité d'établissement avec l'Empire allemand est conçu comme suit: «2° Tant que la Suisse n'aura pas pris de disposition législative dans le but de déterminer que, pour ses ressortissants qui voudront se placer en Allemagne au bénéfice du présent traité, le certificat prévu à l'article 2 ne pourra être délivré que par sa légation et ses consulats dans ce pays, les autorités allemandes considéreront comme équivalant audit certificat l'acte d'origine (Heimatschein) délivré par la commune suisse et légalisé par le canton d'origine. >> Pour éviter tout malentendu, il paraît nécessaire de déterminer quelles sont les autorités communales qui sont appelées, dans les divers cas, à délivrer le certificat de bonnes mœurs requis. Dans notre opinion, il y a lieu de prendre en considération les éventualités suivantes : |