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I.

Nous enjoignons à tous nos sujets, de quelque qualité et condition qu'ils soient, de vivre à l'avenir les uns avec les autres en paix, union et concorde, sans s'offenser, injurier, ny provoquer à haine et inimitié, sur peine d'encourir nôtre indignation, et d'estre châtiez exemplairement. Leur ordonnons d'honorer et respecter les personnes, qui par les avantages que leur donne la Nature, ou par les charges et dignitez dont nous les avons pourvûs, meritent d'estre distinguez des autres, ainsi que nous entendons qu'elles le soient; et que ceux qui manqueront à ce devoir et à ce respect soient châtiez, eu égard à la qualité de la personne offensée. Lesdites personnes avantagées par la Nature, ou par leur qualité, s'abstiendront aussi d'offenser les autres, et les contraindre de perdre le respect qui leur est deû, et s'ils y manquent, ils seront tenus de les reparer, ainsi qu'il leur sera ordonné.

II.

Tous differends intervenans entre nos sujets, dont la demande et decision peut et doit estre faite en Justice, seront terminez par les voyes ordinaires de droit établies en nôtre Royaume, et nous défendons

aux parties d'en former une querelle, sur peine à l'aggresseur de la perte entiere de la chose contentieuse, que dés à present, comme pour lors, nous adjugeons à sa partie.

III.

Et d'autant que par l'indiscretion et malice des uns, les autres sont quelques fois tellement outragez, qu'ils croyent n'en pouvoir tirer reparation qui les satisfasse en leur honneur, que par la voye des armes, laquelle leur estant défenduë par nos Edits, ils la recherchent par eux-mêmes, ou par leurs amis; et au mépris de nos Loix et de nôtre autorité, en viennent au combat, d'où naissent les crimes si frequens, que nous voulons à present reprimer: Nous ordonnons, pour y remedier, à tous ceux qui s'estimeront offensez en leur reputation, de s'en plaindre Nous, ou à nos tres-chers et bien amez Cousins les Maréchaux de France, afin que l'injure qu'ils auront receuë soit reparée de telle sorte, qu'ils en soient pleinement satisfaits en leur honneur.

IV.

Ceux qui seront en nos Provinces, s'adresseront en pareil cas aux Gouverneurs d'icelles, ou en leur absence, à nos Lieutenans Generaux, et en leur dé

faut, aux Gouverneurs et Lieutenans Generaux des Provinces les plus proches, pour leur faire leurs plaintes comme dessus: Lesquels Gouverneurs ou Lieutenans Generaux decideront aussi-tost les differends, si faire se peut ; et s'ils sont de telle qualité, qu'ils ne les puissent terminer, ils nous en avertiront, pour faire executer ensuite nos commandemens sur ce sujet.

V.

Celuy qui aura offensé sera tenu de comparoître pardevant Nous, ou lesdits Maréchaux de France, ainsi que pardevant lesdits Gouverneurs ou Lieutenans Generaux en la forme susdite, lors qu'il luy aura esté ordonné par nous, ou par eux; et que nôtre commandement ou le leur aura esté signifié à sa personne, ou à son domicile, jusqu'à deux fois, avec la plainte de l'offensé; à quoy défaillant, il sera ajourné à trois briefs jours: Et ne comparoissant point, sera suspendu de son honneur, declaré incapable de porter les armes, et renvoyé aux Gens tenans nos Cours de Parlement, chacun en son ressort, pour estre puni comme refractaire à nos Ordonnances, dont nous enjoignons à nosdites Cours de faire leur devoir.

VI.

Si l'une des parties a juste sujet de recuser les susdits juges, ausquels il luy est enjoint d'adresser ses plaintes; elle aura recours à Nous, et nous y pourvoirons: Mais si les causes pour lesquelles elle prétendra cette recusation sont trouvées legeres et frivoles, et partant indignes d'estre admises, elle sera renvoyée avec blâme pardevant lesdits Juges.

VII.

Si quelques uns de ceux qui sont offensez, ou croient l'être, se laissent tellement aveugler par la violence de leur ressentiment, que contre toute sorte de raison, ils s'imaginent qu'il leur seroit honteux de demander, comme dessus, reparation des injures qu'il prétendront avoir receuës: Nous enjoignons en ce cas, à nosdits Cousins les Maréchaux de France, soit qu'ils soient en nôtre suite, ou en nos Provinces, que sur l'avis qu'ils auront des differends survenus entre ceux qui feront profession des armes, ils mandent et fassent aussitost comparoistre devant eux les deux parties, aúsquelles il défendront de nôtre part d'en venir au com- bat; ny de rien entreprendre l'une contre l'autre par voie de fait, directement ou indirectement, sur peine de la vie : Et après les avoir oüies en presence

des Seigneurs et Gentils-hommes qui se rencontreront sur les lieux, et autres qui seront par eux appellez, bien qu'il se trouve que l'offense ne soit pas fort grande; ils ordonneront une satisfaction si avantageuse à l'offensé, qu'il aura sujet d'en demeurer content; estant nécessaire, pour empêcher l'insolence de ceux qui offensent mal à propos, de les châtier par des réparations aussi rigoureuses à ceux qui les font, qu'honorables à ceux qui les reçoivent. Si l'injure faite par l'offensant est jugée par nosdits Cousins les Maréchaux de France, toucher à l'honneur, ledit offensant sera privé pour six ans des charges, Offices, honneurs, dignitez et pensions qu'il possede; et ny pourra estre rétabli avant ledit temps, ny aprés sans nous demander pardon, avoir satisfait à sa partie, ainsi qu'il aura esté ordooné, et pris de Nous nouvelles Provisions, et declarations de nôtre volonté, pour rentrer ausdites Charges; et il ne pourra, aussi, durant ledit temps, se trouver à dix lieuës de nôtre Cour. Si ledit offensant à l'honneur n'a ny Offices, ny charges, ny dignitez, ny pension, il perdra durant ledit temps, de six ans, le tiers du revenu annuel de tout le bien dont il joüira; lequel tiers sera pris par préference, à toutes charges, dettes et hypotheques quelconques, et appliqué à l'Hôpital Royal, dont il sera parlé cy-aprés en l'article quatorziéme. Si le tiers du revenu dudit offensant à l'honneur, ne monte pas à deux cents livres, il tien

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