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postes français devaient suivre la même ligne que celle des Ire et Ile divisions suisses en ayant égard à la neutralité des villages ci-dessus désignés. Cette convention était faite pour six fois 24 heures, pendant lesquelles le général de Laplane s'engageait à demander au général en chef Lecourbe l'occupation, par l'armée suisse, de la ville de Salins. Dans le cas où le général Lecourbe consentirait à l'évacuation de Salins par les troupes françaises, le général en chef des troupes suisses s'engageait à obtenir du commandant des troupes alliées un passage pour la IVe division des corps d'occupation du Jura afin qu'elle puisse se rendre à la destination qui lui serait assignée par le gouvernement français ou à une position qui assure sa subsistance.

Cependant l'inaction à laquelle était condamnée l'armée fédérale, et la difficulté qu'elle éprouvait à se nourrir dans un pays pauvre, produisant du mécontentement parmi les soldats, le général Bachmann se décida à ramener son armée en deçà des frontières. Peu de jours après, les généraux Bachmann et de Castella demandèrent leur démission, qui leur fut accordée, dans les termes les plus honorables, et la Diète confia au quartier-maitre général Finsler le commandement des troupes fédérales, dont la plus grande partie, du reste, fut licenciée '.

Cette invasion des bataillons fédéraux en FrancheComté fut sévèrement jugée en Suisse et au sein même de la Diète. En l'ordonnant, le général Bachmann avait cédé à la pression de son entourage. Quels que soient les motifs que l'on avance pour l'excuser, c'était une faute, car elle était inutile à la cause de la Suisse comme à celle de l'Europe et elle entrainait sans né

1 On trouvera dans le P. J. de M. Hilty, année 1888, p. 374 et suivantes, de nombreux détails sur cette invasion en Franche-Comté, ainsi que sur le siège d'Huningue.

cessité la Confédération hors de ses habitudes de neutralité. Les Vaudois surtout, qui devaient à la France leur émancipation politique, manifestèrent hautement leur mécontentement.

Les Alliés étaient entrés à Paris, Napoléon était descendu pour la seconde fois de son trône et le roi Louis XVIII était rentré en France, mais ce pays était en pleine anarchie et les généraux qui commandaient les corps d'armée sur la frontière suisse ne recevant pas d'ordre, agissaient chacun suivant leur inspiration. Il en était de même des commandants des forteresses de l'est, Belfort, Huningue, Besançon, etc., à côté desquelles les Alliés avaient passé en se bornant à laisser devant elles de petits corps d'opération. Cette situation explique, sans la justifier, l'attitude de la place d'Huningue, qui, ne tenant pas compte des faits qui s'étaient accomplis, continuait à menacer la ville de Bâle.

L'archiduc Jean d'Autriche fut chargé d'en faire le siège. Il réunit à cet effet un corps de 16,000 hommes; 4600 confédérés prirent part à l'investissement de la place. Le 30 juillet, le général Barbenègre offrit à la ville de Bâle de la ménager si elle lui envoyait une rançon de 250 mille francs en argent et 50 mille francs en fournitures. Bàle s'y refusant, le siège continua et, le 26 août, Barbenègre capitula.

Proclamation du Pacte. Serment fédéral.

Le moment était enfin venu pour la Confédération de mettre le sceau à l'œuvre de la Diète en proclamant solennellement le Pacte qu'elle avait adopté le 16 août 1814 et auquel tous les cantons, à l'exception de Nidwald, avaient donné leur assentiment. Cette cérémonie, longtemps différée, qui devait donner à la nouvelle alliance helvétique sa sanction définitive, fut célébrée en grande pompe à Zurich le 7 août 1815.

C'était, à quelques semaines près, le jubilé cinq fois centenaire du Pacte conclu à Brunnen par les trois cantons primitifs, après la bataille de Morgarten.

Les députés se réunirent à neuf heures du matin dans la salle des réunions de la Diète, où ils signèrent et scellèrent tous de leur sceau particulier le Pacte, écrit sur parchemin. Puis, précédés d'huissiers aux couleurs des XXII cantons, et suivis du corps des officiers, ils se rendirent, au son des cloches et au bruit. de l'artillerie, entre une double haie de milice zurichoise, à l'église de St-Félix et Ste-Régule, où ils furent reçus par les autorités du canton et de la ville de Zurich. Au milieu du corps diplomatique, nous dit Monnard à qui nous empruntons ce récit, on remarquait l'archiduc Jean d'Autriche, qui avait quitté le siège d'Huningue pour venir assister au renouvellement du Pacte fédéral. Après un discours patriotique du bourgmestre David de Wyss, président de la Diète, le chancelier fédéral Mousson lut le Pacte et la formule du serment, qui était ainsi conçue:

1 Voir Monnard, t. XVIII, p. 398.

« Nous, les députés de XXII Etats souverains de la Confédération, au nom et comme fondés de pouvoirs des Bourgmestres, Avoyers, Landammann, Chefs, Grands-Baillifs, Conseillers d'Etats, Syndics, Petits et Grands Conseils et Assemblées générales des Hauts Etats de Zurich, Berne, Lucerne, Uri, Schwytz, Unterwald, Glaris, Zug, Fribourg, Soleure, Bale, Schaffhouse, Appenzell des deux Rhodes, St-Gall, Grisons, Argovie, Thurgovie, Tessin, Vaud, Valais, Neuchâtel et Genève,

» Nous jurons:

» De maintenir constamment et loyalement l'alliance des Confédérés à teneur du Pacte du 7 août 1815, qui vient d'être lu, de sacrifier dans ce but nos biens et nos vies; de procurer, par tous les moyens en notre pouvoir, le bien et l'avantage de la commune patrie et de chaque Etat en particulier; de détourner tout ce qui pourrait leur nuire; de vivre dans le bonheur comme dans l'infortune en Confédérés et en frères, et de faire tout ce que le devoir et l'honneur exigent de bons et de fidèles alliés ».

Ensuite, les députés proférèrent à haute et intelligible voix, les paroles suivantes :

« Le serment qui vient d'être lu, le Haut Etat que je représente ici le tiendra et l'exécutera fidèlement et sans fraude, je le jure au nom du Dieu Tout Puissant, aussi vrai que je désire qu'il me fasse grâce (et les catholiques ajoutaient : par l'invocation des Saints) ».

Cet acte accompli, les députations reconduisirent le président de la Diète à sa demeure et virent défiler les milices au son d'une musique militaire.

On remarquera que les mots de peuple et de citoyens ne figurent pas dans ce serment; il n'y est question que des magistrats, sous des appellations variées, des Petits et Grands Conseils des Etats confédérés ou alliés.

Un seul demi-canton, Nidwald, ne participa pas à cette auguste solennité. Ses députés prêtèrent serment

dans un acte séparé, le 30 août 1815. Après avoir reçu l'adhésion de Nidwald, la longue Diète se sépara le 31 août 1815.

Adhésion de la Diète à l'acte additionnel du Congrès de Vienne du 29 mars. Réunion du Congrès de Paris. Suite des négociations relatives à la neutralité de la Savoie. Extension du territoire de Genève. Traité de Paris.

Avant de se dissoudre, l'Assemblée fédérale déclara, le 12 août 1815, donner son adhésion aux actes du Congrès de Vienne du 29 mars concernant le canton de Genève et la neutralisation du Chablais et du Faucigny, qu'elle acceptait avec reconnaissance'. Le territoire désigné comme devant faire partie du canton de Genève fut placé sous la garantie énoncée à l'acte Jer du Pacte fédéral.

Eu égard à la stipulation de neutralité perpétuelle consentie par toutes les Puissances en faveur des provinces du Chablais et du Faucigny, la Diète déclarait accorder aux troupes piémontaises, obligées de se retirer de ces provinces, le passage par la Suisse, sous la réserve qu'il n'en résulterait aucun préjudice pour sa neutralité; et si la Confédération ainsi que l'acte du Congrès lui en laisse la faculté) jugeait alors convenable d'y placer des troupes, de la manière et aux

1 Les stipulations relatives à l'obtention du territoire genevois et à la neutralité de la Savoie furent annexées à l'acte final du Congrès de Vienne ou expressément reconnues en faire partie intégrante. (Voir art. 74, 75, 79, 80, 84, 91, 92 et 118, chiff. 11 et 12, de l'acte final.)

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