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VIE DE MOLIÈRE

PAR VOLTAIRE.

Le goût de bien des lecteurs pour les choses frivoles, et l'envie de faire un volume de ce qui ne devrait remplir que peu de pages, sont cause que l'histoire des hommes célèbres est presque toujours gâtée par des détails inutiles et des contes populaires aussi faux qu'insipides. On y ajoute souvent des critiques injustes de leurs ouvrages. On tâchera d'éviter cet écueil dans cette courte histoire de la vie de Molière; on ne dira de sa propre personne que ce qu'on a cru vrai et digne d'être rapporté, et on ne hasardera sur ses ouvrages rien qui soit contraire aux sentiments du public éclairé.

Jean-Baptiste Poquelin naquit à Paris en 1620, dans une maison qui, subsiste encore sous les piliers des halles. Son père, Jean-Baptiste Poquelin, valet de chambre-tapissier chez le roi, marchand fripier, et Anne Boutet, sa mère', lui donnèrent une éducation trop conforme à leur état, auquel ils le destinaient il resta jusqu'à quatorze ans dans leur bou

1. Un petit écrit de M. L. F. Beffara, publié au commencement de l'année 1821, et qui paraît être le résultat de soigneuses recherches, a rectifié ou même fait connaître plusieurs faits relatifs à Molière. Il a semblé indispensable d'en donner ici une indication succincte.

4o L'acte de naissance de Molière, Jean-Baptiste Poquelin, est du 45 janvier 1622, ce qui prouve que mal à propos on l'a fait naître, les uns en 1620, d'autres en 4621. 2o Cet acte de naissance, ainsi que l'acte de mariage de ses père et mère, du 27 avril 1621, et le sien propre, du 20 février 4662, prouvent aussi que la mère de Molière, épouse de Jean Poquelin, se nommait Marie Cressé, et non pas Anne Bontet ou Boudet.

3o Ce nom Boudet (André) est celui de son beau-frère, marchand tapissier, qui

tique, n'ayant rien appris, outre son métier, qu'un peu à lire et à écrire. Ses parents obtinrent pour lui la survivance de leur charge chez le roi; mais son génie l'appelait ailleurs. On a souvent remarqué que presque tous ceux qui se sont fait un nom dans les beaux-arts les ont cultivés malgré leurs parents, et que la nature a toujours été en eux plus forte que l'éducation.

Poquelin avait un grand-père qui aimait la comédie, et qui le menait quelquefois à l'hôtel de Bourgogne. Le jeune homme sentit bientôt une aversion invincible pour sa profession. Son goût pour l'étude se développa; il pressa son grandpère d'obtenir qu'on le mit au collége, et il arracha enfin le consentement de son père, qui le mit dans une pension, et l'envoya externe aux Jésuites, avec la répugnance d'un bourgeois qui croyait la fortune de son fils perdue s'il étudiait. Le jeune Poquelin fit au collège les progrès qu'on devait attendre de son empressement à y entrer. Il y étudia cinq années; il y suivit le cours des classes d'Armand de Bourbon, premier prince de Conti, qui depuis fut le protecteur des lettres et de Molière.

II y avait alors dans ce collége deux enfants qui eurent depuis beaucoup de réputation dans le monde. C'étaient Chapelle et Bernier : celui-ci connu par ses voyages aux Indes, et l'autre célèbre par quelques vers naturels et aisés, qui lui ont fait d'autant plus de réputation qu'il ne rechercha pas celle

épousa, le 15 janvier 4654, Marie-Magdeleine Poquelin, sœur de Molière, et fille des mêmes père et mère.

4o On a désigné la maison rue de la Tonnellerie, sous les piliers des halles, aujourd'hui no 3, comme étant celle où naquit Molière. Le 28 janvier 1799 (9 pluviôse an vII), on plaça sur la façade de cette maison le buste de Molière et une inscription portant: Jean-Baptiste Poquelin de Molière est né dans cette maison en 1620. Entre le buste et l'inscription on a depuis ajouté: Castigat ridendo mores. Cette tradition depuis longtemps établie, se trouve détruite par les actes de naissance de Molière, ceux de ses trois frères, et de sa sœur Marie, sur lesquels la demeure de Jean Poquelin, leur père, marchand tapissier, est toujours indiquée rue Saint-Honoré. Il est possible que la maison par lui habitée ait été celle qui, au coin des deux rues, a quatre croisées sur la rue Saint-Honoré, et une seule, en retour, sur la rue de la Tonnellerie; ce qui justifierait la tradition de la naissance de Molière dans cette rue, mais non pas dans la maison où l'inscription a été placée.

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